Dossier Audinet tunisie Tunisie - Les chaines de valeur mondiale : Échelle de mesure des opportunités en période de crise Lors du 11ème congrès de l’Ordre des Experts Comptables de Tunisie, M Mondher Khanfir (Conseiller au commerce extérieur et fondateur de MKC Consulting) a présenté une intervention intitulée « Investir dans la restructuration des chaînes de valeur mondiales ». Le consultant a présenté un point de vue stratégique des opportunités post-crise en se basant sur une étude de la situation des chaînes de valeur mondiales. M Khanfir a construit son approche sur 4 axes : Les grandes mutations économiques La mondialisation des Chaînes de Valeur Caractéristiques des CDVM Comment intégrer les CDVM Les grandes mutations économiques C’est une synthèse des faits les plus marquants dans l’économie mondiale. Ce passage retrace l’image d’une conjoncture internationale fluctuante. La première remarque touche les échanges internationaux qui augmentent plus vite que la production de richesse. Mesurée à partir de données en prix constants, la part des exportations de biens et services dans le PIB mondial a doublé en vingt ans alors qu’elle n’avait progressé que de 2 points entre 1970 et 1985. Le nouveau schéma économique est basé sur l’exportation. 30% des biens et services produits dans le monde sont exportés. Il y a lieu de remarquer que l’intégration commerciale de l’économie mondiale atteint aujourd’hui des sommets. La deuxième remarque concerne la fluctuation de l’offre et la demande. L’offre globale en biens et services a largement dépassé la demande globale solvable. Le nouveau marché est basé sur la demande. Les entreprises planifient leurs productions selon le niveau de la demande. Les nouveaux secteurs de l’industrie s’orientent vers la valeur ajoutée au lieu des industries manufacturières. L’innovation et l’intervention des TIC ont influencé l’économie mondiale. Le monde des affaires est devenu multipolaire par l’accroissement des échanges Sud-Sud. Cette nouvelle cartographie est très importante dans la mesure des rapports d’influence. L’accélération du commerce et de l’investissement Sud-Sud est l’un des traits les plus significatifs des récentes évolutions de l’économie mondiale. Depuis l’année 2000, l’on assiste à un accroissement important des flux d’échange et d’investissement entre l’Afrique et l’Asie. Aujourd’hui, l’Asie reçoit environ 27% des exportations de l’Afrique, contre 14% seulement en 2000. Les exportations de l’Asie vers l’Afrique croissent également à un rythme très soutenu (environ 18% par an). L’existence des nouveaux instruments économiques a aussi influencé les décisions. La tertiarisation des économies est une tendance forte. En fait, la recherche des zones les plus attractives en termes de coût et d’avantages stratégiques et logistiques demeure une exigence. La part des services dans le PIB dans les pays de l’OCDE (schéma ci-après) prouve des tendances très importantes à analyser. La mondialisation des CDV Mr Khanfir définit la chaine de valeur comme « l’ensemble des étapes déterminant la capacité d’un réseau interentreprises organisé afin d’obtenir un avantage concurrentiel global ». C’est un instrument stratégique de valeur. Traditionnellement, les CDV étaient contrôlées par des entreprises géantes (multinationales) qui ont évolué d’une manière extraterritoriale par le biais de fusion acquisition pour assurer leur croissance. Les CDVM ne sont pas « une nouvelle forme de production », mais plutôt une nouvelle modélisation des chaînes d’approvisionnement et des attributs de la compétitivité. Le meneur d’une CDVM est l’entreprise qui contrôle au moins les bouts de chaîne, qui décide de la stratégie, de l’organisation, du mode de gouvernance, des acteurs de la chaîne (qui fait quoi, où?), des investissements et de la répartition des profits. C’est clair que la chaine de valeur trouve son importance surtout pour les multinationales et les entreprises de grande taille. La chaine de valeur est sollicitée selon trois dimensions : géographique, fonctionnelle et sectorielle. Cette sollicitation a pour objectif une meilleure intégration des éléments de la chaine. Le phénomène d'intégration géographique se traduit simultanément par le développement d'infrastructures logistiques mutuelles couvrant plusieurs pays et par le renforcement de la couverture logistique mondiale. Tous secteurs économiques confondus, nous constatons que des systèmes se mettent en place avec pour vocation, d'une part, de créer des entités logistiques dédiées à des zones géographiques plus étendues au niveau continental et mondial et, d'autre part, de constituer des organisations locales susceptibles de répondre du point de vue logistique à certains types de réponses de proximité. Synthétiquement, ce phénomène est une approche innovée de la logistique mondiale. Le phénomène d'intégration fonctionnelle marque l'interaction forte entre le design produit et les services connexes. Elle doit donc être conduite à formaliser ses outils de travail avec des fonctions comme le marketing ou la recherche et le développement pour intégrer la dimension service dès la conception du produit. En effet, des décisions prises au moment de la conception ont des conséquences importantes en termes de coût dans les phases de distribution et d'exploitation ultérieures. Une morphologie inadaptée d'un produit, par exemple, entraînera au niveau de l'emballage ou de la production, des coûts supplémentaires qu'une conception différente aurait pu limiter. Le phénomène d'intégration sectorielle vise à permettre à des agents économiques qui ont le même but satisfaire un client se trouvant en bout de chaîne - de donner plus de valeur de bout en bout, indépendamment des entreprises. Cette intégration s'établit selon un schéma d'intensité croissante de coopération partant d'aspects technicocommerciaux, elle passe par un stade logistico-commercial (ruptures, gestion partagée des approvisionnements) pour atteindre un stade plus large de coopérations logistico-marketing (lancement de produits nouveaux, promotion dédiée...). La mondialisation des chaines de valeur mondiales est influencée par les facteurs macroéconomiques marquants du nouveau modèle international à savoir : 1) Les politiques de commerce et d’investissement « à la frontière », notamment les mesures ayant une incidence sur l’accès aux marchés (droits de douane et barrières non tarifaires (BNT)) ; les régimes administratifs de l’IDE ; et les accords bilatéraux, régionaux et multilatéraux sur le commerce, 2) Les conditions liées aux marchés (intérieurs) « au-delà de la frontière », notamment la nature de l’environnement des affaires ; la compétitivité des structures de marché ; la qualité des institutions de marché ; et les contraintes liées à l’offre telles que la mauvaise qualité des infrastructures et le développement insuffisant du capital humain et des compétences, 3) Les facteurs « entre les frontières », comprenant l’élaboration de régimes de logistique et de transport transfrontaliers propres à faciliter les échanges; la qualité de l’information sur les débouchés sur les marchés étrangers, l’impact des normes techniques et le rôle des migrations, 4) Les complémentarités entre l’investissement et le commerce, notamment la mesure dans laquelle les flux d’investissement et de commerce se renforcent mutuellement ; la participation aux réseaux de production et les chaînes de valeur à l’échelle mondiale ; et la propagation des transferts de technologie. Caractéristiques des CDVM Une Chaîne de Valeur Mondiale (CDVM) est caractérisée à la fois par Sa capabilité industrielle, commerciale et logistique, Sa couverture géographique et fonctionnelle et surtout Sa compétitivité On peut distinguer 3 types de CDVM: 1) Primaire : selon le rapport sur le développement dans le monde 2008, 40% à 45% du café torréfié dans le monde est produit par 4 entreprises (alors que le café est produit par 25 millions d’agriculteurs et consommé par 500 millions de personnes). Dans le même ordre d’idées, 80% du marché mondial du Thé est contrôlé par 3 multinationales. Le troisième indicateur agricole à prendre en considération réside dans le fait que 40% du commerce de cacao mondial est entre les mains de 4 multinationales. La part de la valeur ajoutée revenant aux pays en développement a diminué de ~60% en 1970 à ~28%, 2) Secondaire : ces chaines sont centrées sur l’activité industrielle (voir le schéma ci avant) 3) Tertiaire : ces CDVM sont dédiés aux activités de service. Ils sont en plein essor grâce aux TIC. Comment intégrer les CDVM ? L’intégration des CDVM est une procédure stratégique très importante. Cette opération nécessite plusieurs compétences et une intervention pluridisciplinaire. Au niveau des procédés, il y a lieu d’accroître l’efficience de la transformation des intrants. Au niveau des produits, il faut produire d’articles plus sophistiqués avec une valeur unitaire croissante. Au niveau fonctionnel, les CDVM sont intégrés à travers l’acquisition de nouvelles compétences faisant partie de la CDVM et pour finir par le niveau intersectoriel, il y a lieu d’utiliser des compétences acquises dans une fonction donnée pour entrer dans un nouveau secteur. Conclusion M Mondher Khanfir a insisté sur l’existence de réelles opportunités d’intégration des CDVM même pour les petites entreprises (Méta Réseaux). Ces opportunités nécessitent une mesure du degré d’intégration des entreprises dans les CDVM. Les entreprises tunisiennes doivent analyser le commerce international non plus sur la base des valeurs d’échange mais sur les flux de valeur ajoutée. Le contact direct avec les CDVM permet d’adopter et contribuer à l’enrichissement des normes et référentiels internationaux.