Compte-rendu rédigé par Marc Foglia, pour le GBF
En l'absence d'une opinion publique européenne, peut-on imaginer un
média européen ?
Séance du Groupe des Belles Feuilles du 21 mars 2009
à l'Institut d'Etudes Supérieurs des Arts (IESA), au 5, avenue de l'Opéra.
Jean-Christophe Boulanger introduit la séance, qui réunira cinq médias (télé,
radio, web, agence de presse et groupe de presse) et cinq métiers (journaliste,
chercheur, développement média, stratégie média, entrepreneur).
Eddy Fougier, chercheur à l’IFRI, est l’auteur d’une étude publiée le mois dernier sur "Les
Français et la télévision face à l'Europe : le grand malentendu ?". À la question posée par
Jean-Christophe - existe-t-il une opinion publique européenne ? – un politologue spécialisé
sur les questions européennes, comme Dominique Reynié, répond en général par la négative.
Pourtant, il existe en Europe de nombreux points communs entre les opinions publiques
nationales. Les différences en termes de comportement médiatique opposent davantage les
groupes sociaux, dans un même pays, que les espaces nationaux. Il faut ajouter que c’est la
langue qui semble le plus souvent déterminante, et non le fait national.
Un sondage récent montrait que 80% des Français souhaiteraient être mieux informés sur les
questions européennes. Il convient de considérer ce résultat avec prudence, et de le comparer
par exemple à l’audience très modeste réalisée par Arte ou Euronews. L’audience de la chaîne
franco-allemande Arte (1,7%) vient de passer derrière celle de W9 et TMC. Se déclarer
intéressé par les questions européennes, c’est avant tout vouloir donner une bonne image de
soi-même. On évoquera également les magazines consacrés aux questions européennes,
comme « Avenue de l’Europe », le magazine européen de France 3, présenté par Valérie
Auger, ou encore « Zoom Europa », sur Arte. « Avenue de l’Europe » attire en moyenne un
demi million de téléspectateurs et peut donner lieu à un pic d’audience - jusqu’à 19% de parts
d’audience. Ces sources d’information sur l’Europe restent toutefois marginales par rapport
au JT, qui rassemble 13 millions de téléspectateurs chaque soir. Les sujets européens
constituent entre 2 et 3% des sujets abordés par le JT – un pic à 5% a été observé en 2005, en
raison du référendum. On rappellera que TF1 n’a pas de correspondant à Bruxelles – la
rédaction en dépêche un lors de crises comme celle de la Commission Santer, ou de la vache
folle. L’actualité communautaire serait-elle trop lisse, trop institutionnelle, trop technique ?
L’Europe se prêterait mal au sensationnalisme médiatique.
Eddy Fougier soutient que l’offre crée la demande, dans les médias, et qu’il est possible de
pousser l’intérêt du public sur l’Europe sans tomber dans une information paternaliste.
Valérie Lainé, responsable du pôle Europe de RFI, commence par rappeler que cette radio
présente un double avantage, par rapports aux autres radios : son auditoire, c’est le monde
entier, et l’actualité internationale joue un rôle central. RFI traite des questions européennes
comme des questions américaines ou africaines. L’Europe reste pourtant un objet mal
identifié. Tout comme les auditeurs, les directeurs des rédactions et les journalistes eux-
mêmes ont du mal à s’approprier les sujets européens.
Le problème est aussi d’origine française : les liens entre les politiques et les journalistes sont
très étroits, trop étroits. Tout ce que fait l’Europe est intéressant, à la condition que la classe
politique française y trouve son compte. En cas de problème, on fera de l’Europe un bouc
émissaire. A-t-on le droit d’être optimiste ? Michel Barnier montre que l’on peut aller à
Bruxelles sans enterrer sa carrière politique ; les cas médiatisés de Rachida Dati ou de Rama