Immunité spécifique Elle fait intervenir des lymphocytes qui sont issus des organes lymphoïdes primaires (mœlle osseuse et thymus pour les T). Les lymphocytes vont reconnaître l'antigène par des récepteurs spécifiques (on dit que chaque lymphocyte est programmé pour reconnaître un antigène donné) et vont s'activer pour donner 2 catégories de cellules: - effecteurs qui vont éliminer l'antigène. - lymphocytes mémoire. Les antigènes sont apportés par les cellules dendritiques dans les organes lymphoïdes secondaires. Présentation et reconnaissance de l'antigène Le système immunitaire utilise 3 systèmes: - molécules du CMH (complexe majeur d'histocompatibilité) pour la présentation de l'antigène. - TCR (T cell receptor) - BCR (B cell receptor) Le complexe majeur d'histocompatibilité I) Historique En 1938, P. Gorer réalisait des greffes de peau chez des souris de souches différentes et constatait qu'elles étaient toujours rejetées. Il s'agissait d'un problème existant entre donneur et receveur. Il a ensuite observé que ce rejet était sous la dépendance du système immunitaire. Il a fallu attendre les travaux de G. Snell, qui a identifié chez la souris un système qu'il a appelé le système H2 (= CMH de la souris). Chez l'Homme, J. Dausset a découvert, sur les leucocytes en 1958, les molécules qu'il appelle ''antigènes d'histocompatibilité'', et les regroupe dans un système qu'il appelle ''système HLA''. J. Dausset les a appelé antigènes car il les a identifié grâce à des anticorps. Il a fallu attendre les travaux de Doherty et Zurkernegel pour comprendre que ces molécules jouaient un rôle physiologique fondamental: elles assurent une communication indispensable à la réponse immunitaire, car elles assurent la présentation de l'antigène aux lymphocytes T. Les travaux de P. Bjorkman ont permis de montrer comment ces molécules pouvaient assurer la présentation de l'antigène. HLA = Human Leucocyte Antigen Ces molécules ont 2 noms chez l'Homme: - Antigène d'histocompatibilité. Une molécule du CMH est un antigène pour un individu qui ne la possède pas. II) Définition du CMH Le complexe majeur d'histocompatibilité est un ensemble de gènes localisés sur le bras courts du chromosome 6. Il y a environ 200 gènes qui représentent environ 1/1000ème du génome humain. C'est un système multigénique, multiallélique, et d'expression co-dominante. Parmi tous ces gènes du CMH, il y en a qui codent des molécules qui vont présenter l'antigène aux lymphocytes T et ces gènes constituent le système HLA. III) Structure Les molécules du système HLA sont des protéines transmembranaires qui appartiennent à la superfamille des immunoglobulines car elles présentent un domaine immunoglobulin-like (environ 90 acides aminés) stabilisé par un pont disulfure. Les molécules de classe I du CMH sont constituées d'une chaîne lourde et c'est à ce niveau là qu'on retrouve la variabilité d'un individu à un autre. Cette chaîne lourde est constituée de 3 domaines α 1, α2 et α3, d'une partie transmembranaire et d'une courte partie cytoplasmique. La chaîne lourde est associée à une chaîne légère qui est totalement invariante: β2-microglobuline. Cette dernière n'est pas associée de manière covalente et est codée par un gène qui n'est pas dans le CMH. La molécule de classe II du CMH est formée de 2 chaînes: - une chaîne α. - une chaîne β. Chaque chaîne a 2 domaines extracellulaires: -α1 et α2 - β1 et β2 Chaque chaîne a une partie transmembranaire et une partie cytoplasmique très courte. Les domaines les plus extracellulaires (α1 et α2, α1 et β1) vont adopter une configuration particulière. Ils constituent une sorte de plateforme qui ménage une fente (25 angströms de long et 10 angströms de large) où sera présenté le peptide. CMH II CMH I La fixation du peptide est différente dans les 2 fentes. - Pour la classe I, le peptide a moins de 9 acides aminés et il s'insère complètement dans la cavité. Il envoie des acides aminés dans des poches spécifiques de l'allèle. - Pour la classe II, le peptide peut faire plus de 9 acides aminés et il envoie aussi des acides aminés dans des poches spécifiques de l'allèle. Les molécules du CMH présentent un grand polymorphisme: d'un allèle à un autre, on a des acides aminés qui changent au niveau de la cavité. Une molécule de classe I ou II ne peut fixer qu'un peptide à la fois, mais elle peut fixer de très nombreux peptides différents (on pense qu'elle peut fixer jusqu'à 1000 peptides différents). Comme on ne dispose que d'un certain nombre d'allèles sur nos cellules, on ne peut pas tout présenter. Il y a donc un tri cellulaire, en fonction des allèles qu'on a, ce qui explique également pourquoi tout le monde ne répond pas de la même manière à une infection. Avec ce système, on n'a qu'une vue partielle du Soi et du Non soi. IV) Distribution tissulaire de ces molécules Les molécules de classe I conventionnelles (HLA-A, HLA-B, HLA-C) ont une distribution extrêmement ubiquiste. Dans le sang, toutes les cellules en possèdent à leur surface, sauf les globules rouges. On les trouve partout sauf les hépatocytes, les cellules et les vaisseaux au niveau central, le pancréas et le syncytiotrophoblaste. Chaque fois qu'une cellule sera modifiée par un virus, par une transformation tumorale, les molécules de classe I vont pouvoir avertir les lymphocytes T. Les molécules de classe II ont une expression beaucoup plus restreinte. Dans le sang, on les trouve uniquement sur 3 catégories de cellules qui présentent l'antigène aux lymphocytes T: - lymphocytes B - cellules dendritiques - monocytes. Dans les tissus, on les trouve au niveau des cellules endothéliales des capillaires et au niveau de certaines cellules épithéliales de l'intestin grêle. D'autres cellules peuvent présenter des molécules de classe II mais uniquement après stimulation. V) Organisation génomique On distingue 3 régions génétiques: - région de classe I qui comporte des gènes qui codent pour les molécules HLA-A, HLA-B, HLA-C, et les molécules HLA-E, HLA-F et HLA-G. On les appelle les molécules de classe B car elles sont non conventionnelles (E → G) - région de classe III qui comporte des gènes qui ne sont pas en relation directe avec le système HLA. Il y a des gènes qui codent pour le complément (C2), pour des cytokines (TNF), … - région de classe II qui comprend des gènes qui codent pour les molécules de classe II du CMH. Il y aura 2 gènes (A et B) pour chaque molécule car elles sont constituées de 2 chaînes. On appelle ces molécules HLA-DP, HLA-DQ et HLA-DR. Il y a d'autres gènes qui codent des molécules qui interviennent dans le traitement et le transport des peptides (LMP et TAP), et des gènes qui codent pour des molécules qui permettent le chargement des peptides (DM, DO). Pour tous ces gènes, il existe de très nombreux allèles (plus de 1000) → polymorphisme. Exemples: pour HLA-B, il existe plus de 617 allèles. pour HLA-A, il existe plus de 338 allèles. Il est démontré qu'un haplotype parental est transmis en bloc. L'expression est co-dominante. Classe I: Chaque individu possède, sur ses cellules nucléées, 2 molécules HLA-A, 2 molécules HLA-B et 2 molécules HLA-C, exprimés n fois. Au maximum, il y en a 6 différentes, mais il est possible qu'une mère et un père partagent ces spécificités. On peut donc avoir en 3 différentes au minimum, et 6 différentes au maximum. Si l'interaction de ces molécules avec un peptide était très spécifique, on ne pourrait présenter dans la fente que 6 peptides. Par chance, cette interaction est très peu spécifique. Avec les 6 molécules de classe I différentes, on peut présenter un très grand nombre de peptides, mais on ne peut pas tous les reconnaître. Classe II: On a, par cellule, 2 molécules HLA-DP, 2 molécules HLA-DQ, 2 molécules HLA-DR, exprimés n fois. L'un provient de la mère, l'autre du père. Il y a parfois un gène DR en plus sur un chromosome ou sur les 2 chromosomes. Il y en a 3 différentes au minimum et 8 différentes au maximum. Exemple de la mère: - HLA-A 3 et 26, une provenant du père et une provenant de la mère. - HLA-B 13 et 27 Le numéro correspond à un allèle. Il peut y avoir des crossing-over au moment de la méiose mais c'est extrêmement faible. Nomenclature: On utilisait une approche sérologique pour identifier ces molécules. Pour cela, on prend les lymphocytes de l'individu que l'on veut typer au point de vue HLA, et on utilise les anticorps dirigés contre toutes les spécificités HLA, on rajoute un peu de complément et on observe les lymphocytes. S'il y a une lyse des lymphocytes, c'est qu'ils portent la molécule dont l'anticorps est dirigé contre. Quand on a identifié ces molécules par une approche sérologique, on leurs donne un numéro. Aujourd'hui, on utilise la PCR car les anticorps ne détectent pas les différences très fines. On utilise des primers complémentaires aux exons variables. Dans ce cas là, on a une dénomination différente → approche par biologie moléculaire. VI) Molécules du CMH non classiques et apparentées • Molécules de classe 1b: HLA-E, F, G, H: - HLA-E - HLA-G: présente sur le trophoblaste foetal, ligand de récepteurs inhibiteurs des NK. Elle est très peu polymorphique. Elle permet au foetus de ne pas être rejeté par la mère. • Molécules HLA-like: - MIC A et B: protéines intracytoplasmiques, polymorphiques, surexprimées en cas de stress. Reconnues par des récepteurs présents sur les NK, LTγ/δ et LT CD8 (ne présentent pas de peptides). - CD1: présentent des lipides et glycolipides aux LTCD4, CD8, CD4CD8, NKT. VII) Les fonctions du CMH On a, à la surface de toutes les cellules, les molécules de classe I du CMH. On a, à la surface de certaines cellules, les molécules de classe II. Les molécules du système HLA ont une fonction fondamentale dans le système immunitaire: c'est de dire aux lymphocytes T qu'il y a, dans l'organisme, des structures étrangères qui ont réussi à rentrer dans l'organisme. Elles vont donc signaler un événement anormal aux lymphocytes T, et donc déclencher la réponse immunitaire. Les molécules de classe I et II ne sont jamais vides à la surface des cellules. Elles contiennent toujours des peptides qui peuvent dériver, à la fois, des protéines du Soi et de protéines étrangères. Normalement, avec les peptides d'origine du Soi, il n'y a pas de réponse. Dans le cas des molécules de classe II du CMH, le chargement des peptides va s'effectuer dans les endosomes. Ces peptides proviennent de protéines exogènes et qui ont été endocytés ou phagocytés, et dégradés. Les molécules de classe II vont présenter ces peptides aux lymphocytes T CD4. Dans le cas des molécules de classe I, le chargement s'effectue dans le réticulum endoplasmique. Les peptides qui sont chargés sont endogènes car ils ont été fabriqués par la cellule (peptides du Soi, mais en général d'origine virale, ...). Ces molécules de classe I vont présenter ces peptides aux lymphocytes T CD8. A) Chargement des molécules de classe I La cellule fabrique sans arrêt des protéines du Soi et du non Soi (protéines virales, tumorales, …). Ces protéines vont donc se retrouver dans le cytoplasme. Elles vont être dégradées par le protéasome en peptides. Cette dégradation se fait au hasard et on admet que le protéasome ne fait que 10% de peptides capables d'être présentés. Les peptides vont ensuite passer du cytoplasme au réticulum endoplasmique par le système des TAP transporteurs. Dans le réticulum endoplasmique, il y a présence de la chaîne lourde (α) de la molécule de classe I du CMH, qui est associée à la calnexine. La calnexine se détache et est remplacée par la tapasine et la calréticuline. Entre temps, la β2-microglobuline s'est associée à la chaîne α, et ce complexe va arriver à proximité des TAP transporteurs. Le peptide va se mettre dans la fente de la molécule de classe I du CMH, qui vont utiliser une voie sécrétoire pour aller au niveau de la membrane. Il existe une voie de chargement des molécules de classe I avec des peptides qui viennent de l'extérieur. A retenir: ce chargement a lieu dans le réticulum endoplasmique et les peptides sont synthétisées par la cellule. Les peptides sont exportés au niveau de la membrane par les molécules de classe I du CMH, afin d'être présentés aux lymphocytes T CD8. Ce système est important car il permet de montrer aux lymphocytes T CD8 qu'elle est anormale (infectée, …). B) Chargement des peptides par les molécules de classe II du CMH L'expression des molécules de classe II est limitée aux lymphocytes B, aux macrophages et aux cellules dendritiques. Ces cellules vont récupérer des protéines qui sont à l'extérieur, et qui ne sont donc pas synthétisées par la cellule. Ces protéines sont internalisées par endocytose ou phagocytose et se retrouvent dans des endosomes qu'on appelle CIIV. Les molécules de classe II du CMH sont synthétisées dans le réticulum endoplasmique et vont s'associer, dans le réticulum, à la chaîne invariante (Ii). En réalité, il se forme un complexe: 3 molécules de classe II et 3 chaînes invariantes. La chaîne invariante a 3 fonctions: - bloquer le site de fixation du peptide - présenter des motifs qui permettent le passage du réticulum jusqu'aux endosomes - dans les endosomes, il y a des cathepsines qui vont dégrader la chaîne invariante, ce qui fait que le complexe se dissocie. HLA-DM va permettre le changement entre le fragment CLIP et le peptide. Ce complexe va être exportés au niveau de la membrane, afin d'être présenté aux lymphocytes T CD4. Il y en a des millions sur une cellule dendritique. Les molécules de classe II peuvent présenter des peptides du Soi ou du Non soi, afin d'alerter le système immunitaire.