Résumé :
Le niobium (Nb) et le tantale (Ta) sont des éléments présents en trace dans la plupart des roches Hoggar.
Ils forment des minéraux de minéralogie complexe et de composition variée. La géochimie de ces deux éléments
pose un certain nombre de questions sur l’origine de leur fractionnement par rapport aux autres éléments en
trace et entre eux (rapport Nb/Ta). Des observations à différentes échelles sont nécessaires : du minéral à la
roche. Une compilation exhaustive des données de la littérature a été réalisée dans ce sens.
Le Hoggar est caractérisé par une diversité de minéraux porteurs de Nb et Ta et par des roches à teneurs
variables en ces deux éléments. Toutes les formations de l’Archéen au Cénozoïque sont prises en considération.
Dans des formations de lithologie et d’âge différents se retrouvent des minéraux porteurs de Nb et Ta.
Les pyrochlores sont représentatifs des roches d’âge archéen qui sont les paléoskarns d’Alouki (terrane d’In
Ouzzal). Les columbo-tantalites, wodginites et wolframoixiolites sont caractéristiques des granites à métaux
rares d’âge Cambrien. Ces derniers se localisent, pour la plupart, dans le Hoggar central.
Les paléoskarns peuvent avoir des rapports Nb/Ta très faibles (0,25≤Nb/Ta≤0,62) soulignant l’influence
des fluides issus de granites alcalins à 2,65Ga responsables de l’enrichissement en Ta et de la cristallisation de
quatre variétés de pyrochlores : les zirconolites riches en Nb, les pyrochlores sensu stricto intermédiaires et
enfin les bétafites et les microlites très riches en Ta.
Les granites à métaux rares, à rapport Nb/Ta très faibles, marquent un enrichissement en Ta en allant
des types moins évolués à Sn-W, localisés au Nord du Hoggar central, vers les types plus évolués à Ta-Nb-Sn,
au Sud. Cela se traduit par la cristallisation des niobo-tantalates depuis les phases minérales riches en Nb jusqu’à
celles très riches en Ta : les columbites (Egelé, Tin Mersoï, Hanana et Tin Amzi), les tantalites (Tamazaror,
Rechla et Ebelekane) et enfin les wodginites (Rechla et Ebelekane).
Les wolframoixiolites des microgranites d’Aléméda, ainsi que celles qui accompagnent les columbites
de Hanana et de Tin Amzi sont témoins d’une étape magmatique – hydrothermale riche en tungstène. Elles sont
les dernières phases porteuses de Nb et Ta à cristalliser.
Les concentrations de Nb et de Ta dans les diverses roches du Hoggar montrent des teneurs variables en
ces deux éléments. Le fractionnement de Nb et Ta par rapport aux autres éléments en trace est représenté par des
spectres normalisés au manteau primitif. Le fractionnement du Nb par rapport au Ta quant à lui, est représenté
dans des diagrammes binaires montrant les variations du rapport Nb/Ta soit en fonction du Nb soit de l’âge des
formations. Dans cette étude, seules les données obtenues simultanément, dans le même échantillon, par la
méthode d’analyse ICP-MS sont prises en considération. Les rapports Nb/Ta obtenus sont, de ce fait, plus
significatifs et permettent de mettre en évidence la distribution de ces deux éléments dans le Hoggar.
Les rapports Nb/Ta sont classés en deux groupes selon une limite (17,5) définie par plusieurs auteurs en
considérant que : Nb/Ta>17,5 est un rapport suprachondritique et Nb/Ta<17,5 un rapport infrachondritique.
Dans le Hoggar, les rapports Nb/Ta ont tendance à décroître des roches crustales archéennes aux roches
crustales panafricaines. Ces roches crustales archéennes à rapports suprachondritiques appartiennent à la croûte
continentale inférieure et les roches crustales panafricaines à rapports infrachondritiques appartiennent à la
croûte continentale supérieure.
Les valeurs des rapports Nb/Ta des roches d’arcs insulaires du Hoggar, tendent à croître depuis les
roches basiques et ultrabasiques anciennes vers les roches basiques et ultrabasiques récentes.
Les basaltes alcalins cénozoïques montrent la même allure des spectres normalisés au manteau primitif
observés dans les OIB. Ils présentent une valeur du rapport Nb/Ta inférieure (Nb/Tamoyen = 14,14) à celle obtenue
dans les OIB (16,5±1,0). Cela peut être expliqué par le fait que les laves des OIB traversent une croûte océanique
mince, contrairement aux basaltes alcalins du Hoggar qui sont contaminés en traversant une épaisse croûte
continentale.
Les rapports Nb/Ta les plus élevés peuvent refléter une signature mantellique, en tous les cas sont
proches d’un réservoir à niobium que pourrait constituer le noyau de la terre. Les rapports plus faibles, par
contre, caractérisent une croûte supérieure avec une influence de plus en plus croissante de fluides magmatiques
enrichis en tantale.