Groupe 2 : Peut-on faire un bébé toute(s) seule(s) ?
La première demande adressée par une femme célibataire au centre de médecine de la reproduction de la Vrije
Universiteit Brussel (VUB) date de 1981, suivie par la demande d'un couple de lesbiennes. Estimant que chaque dossier
de PMA (procréation médicale assistée) devait être pris en compte d'une manière égalitaire et sans préjugé, le VUB fut le
premier centre en Europe à offrir une lAD (insémination artificielle avec sperme de donneur) aux femmes célibataires et
aux couples de femmes homosexuelles. A l'époque, l'initiative de notre centre a suscité de nombreuses critiques pour sa
démarche, la majorité des centres de fertilité européens n'acceptant guère les demandes de familles « non traditionnelles
». Aujourd'hui encore, la législation de certains pays, dont la France, réserve l'IAD aux seuls couples hétérosexuels.
Jusqu'en juillet 2007, aucune loi ne réglementait la PMA en Belgique. S'agissant des dossiers acceptés et du choix des
traitements, les centres de fertilité établissaient leurs propres règles. Dorénavant, la loi du 6 juillet 2007 (relative à la
PMA et à l'utilisation des embryons surnuméraires) autorise l'assistance médicale pour les femmes célibataires et les
couples « non traditionnels ». Mais les centres gardent la possibilité de faire jouer leur clause de conscience au cas par
cas. Concernant le don de sperme, la loi responsabilise les centres. Ces derniers doivent garantir la confidentialité sur
l'identité des donneurs, même si le don « non anonyme » résultant d'un accord entre le donneur et le (ou les) receveur(s)
est autorisé. Le désir d'enfant des femmes célibataires a soulevé de nombreuses critiques en Belgique. L’ absence du père
était présentée comme un risque pour le développement psychosexuel de l'enfant; l'absence d'un deuxième parent pouvait
réduire la quantité de stimulation offerte à un enfant donc influencer son développement cognitif; l'enfant pouvait subir
une stigmatisation sociale; enfin, la famille monoparentale était perçue comme plus exposée à d'éventuelles difficultés
financières. Toutes ces réserves tenaces expliquent pourquoi, depuis 1981, toutes les femmes célibataires qui se sont
adressées à la Vrije Universiteit Brussel ont été orientées vers une psychologue : la stabilité financière, la capacité de
vivre de façon autonome et indépendante, l'expérience relationnelle, le soutien de la part de l'environnement familial et
social, la motivation, le degré de sincérité sur ce projet familial non traditionnel sont autant de critères évalués au cours de
ces entretiens. De 1981 à 1993, avant que je n'y exerce moi-même, quatre-vingt-quatorze femmes célibataires se sont
présentées au centre pour une insémination artificielle avec donneur anonyme. Ce choix de l'IAD reposait sur le fait que
la majorité d'entre elles considéraient comme « moralement injustifiable » de faire un enfant avec un homme sans son
consentement. Il était aussi justifié par la crainte des maladies sexuellement transmissibles. Cela étant, les femmes
célibataires dont le dossier fut accepté ne correspondait pas toujours au profil souhaité. Seules huit femmes se
considéraient mères célibataires par choix. Les autres auraient préféré avoir une relation stable qui aurait pu leur
permettre d'avoir un enfant. C'est le plus souvent leur âge qui les a conduites à choisir entre devenir mère célibataire ou
rester sans enfant. Au total, 56 % des dossiers présentés par des femmes célibataires ont été refusés par le centre. Soit en
raison de problèmes familiaux (expériences traumatiques, relations conflictuelles ou symbiotiques avec un parent), soit en
raison de difficultés liées à leurs relations amoureuses (incapacité à nouer des relations intimes, conflit avec un
compagnon sans désir d'enfant, etc.). D'autres ont été refusés en raison de facteurs jugés déstabilisants dans la vie de
certaines femmes (problèmes financiers ou psychiques), souvent associés à un isolement social -l'enfant était alors
considéré comme un moyen de les surmonter. Mon expérience personnelle de seize années {.1997/2008} sur des dossiers
de demandes alternatives (858 couples lesbiens et 1698 femmes célibataires) m'a convaincue que les différences entre les
demandes d'enfant dépassent les problèmes liés à l'absence du père ou à une orientation homosexuelle. Entre 1992 et
1999, quatre-vingt-quinze couples homosexuels ont fait une demande de traitement et seulement six d'entre eux ont vu
leur demande refusée. D'une façon générale, les couples étaient stables et les femmes assumaient leur homosexualité : la
majorité d'entre elles étaient acceptées par la famille et les amis; tous les couples avaient accepté l'idée de partager la
responsabilité de l'éducation de leur enfant. Il est très clair qu'au moment où les couples de femmes homosexuelles se
présentaient au centre, tout un travail de réflexion avait déjà été réalisé. Pour les femmes célibataires, la situation de
départ est différente. La majorité d'entre elles n'ont jamais eu le désir d'être des « mères célibataires ». Elles espèrent
toujours trouver un partenaire avec qui elles peuvent réaliser leur désir d'enfant, et attendent le dernier moment pour se
présenter. Pour les couples homosexuels, il semble qu'une sélection se soit faite avant de venir au centre, alors que cette
sélection n'existe pas dans le cas des femmes célibataires. Pour les couples de lesbiennes, le choix de faire appel à I'IAD
est un choix positif; alors que pour la femme célibataire, l'IAD est plutôt vécu comme un échec, une sorte d'ultime
recours. Heureusement, l'expérience de ces dernières années nous montre que le profil des femmes célibataires a évolué
en faveur de celles qui deviennent de mères célibataires par choix. Ces femmes sont plus jeunes, plus épanouies sur le
plan émotionnel, professionnel et relationnel. Elles se sentent parfaitement capables d'élever un enfant toute seule. .
Patricia Baetens DU CENTRE DE REPRODUCTION HUMAINE, HÔPITAL UNNERSITAIRE DE BRUXElleS , Alternatives internationales, mars 2009
1°) Quels est le principe qui a conduit la Belgique à accepter les demandes des femmes célibataires et des
couples de femmes homosexuelles ?
2°) Quelles sont les précautions prises dans l’intérêt de l’enfant ?
3°) Quels sont les arguments avancés par les femmes célibataires pour recourir à l’IAD ?
4°) Calculer la part des dossiers déposés par des couples de Lesbiennes qui ont été refusés ?
5°) Pourquoi les IAD sont elles plus fréquemment autorisées pour des lesbiennes et moins souvent pour des
célibataires ?6°) A partir de vos réponses construire un tableau recensant les arguments pour et les arguments
contre l’IAD pour les femmes seules