Chapitre 2 : les systèmes de détermination du produit national par la

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Chapitre 2 : les systèmes de détermination du produit national par la demande globale
Le principe même de l’équilibre macro consiste à écrire : le produit global offert =
produit global demandé, cette égalité n’est pas dans la plupart des modèle un équilibre
réciproque, il y a un côté de cet équilibrage qui est déterminant du niveau de l’autre côté.
L’autre approche, la macro de l’offre : le produit offert détermine le produit demandé,
il peut y avoir des ajustements réciproques.
On s’intéressera à la première.
Le produit offert n’est pas très adapter dans ce cas : le terme anglo saxon s’approprie : supply
qui s’oppose à demande. Le terme offre indique une proposition qui en quelque sorte
indépendante de la demande.
Si on admet que c’est le produit demandé : composante de la demande globale qui va
déterminer le niveau des biens qui seront produit, et qui donneront le total : produit offert, on
voit que parmi les composantes de la demande globale il y en a 2 qui sont importantes, ce sont
les consommations des ménages et les investissements des entreprises.
Ceci explique que l’essentiel des recherches sur l’équilibrage macro par la demande, apporté
sur l’association entre ces 2 grandes fonctions de consommation et d’investissement.
Section I. Les modes d'associations des fonctions de consommation et d'investissement:
Il existe deux manières possibles de combiner ces fonctions:
- opérer une addition des deux fonctions : on a un comportement des consommateurs d'une
part et un comportement des entrepreneurs de l'autre, en prenant en compte une valeur de
consommation et une valeur d’investissement, si on additionne les deux on aura l'élément
central de la demande globale. L'addition de leurs variations fournit l'élément essentiel du
rythme de croissance.
- une seconde approche keynésienne est privilégiée par la théorie économique. Cette
approche consiste à souligner les phénomènes d'interrelation entre les deux fonctions. La
consommation est dépendante des revenus des ménages et ce revenu est sensible à l'impact
qu'a l'investissement sur le produit des ménages et donc sur la consommation qui en découle.
D'autre part, la consommation des ménages au niveau individuel détermine le niveau de
revenu national et détermine donc de façon finale la consommation.
La décision de consommer va donc influer sur l'opinion des investisseurs et va donc modifier
le produit national qui modifiera lui-même la consommation.
Il existe donc de nombreuses interrelations.
Malgré ces phénomènes d'interrelation, la prévision économique à court terme préfère
raisonner de manière additive et introduit peu ces phénomènes.
§1. L'équilibrage macroéconomique par l'addition des composantes de la demande
globale
Le niveau du produit national (en tout cas en courte période) apparaît comme l'addition de
certains éléments.
- consommations
- investissements
- variation des stocks
- montant des exportations
-1-
Pour satisfaire à cette demande croissante des ménages, l'économie nationale fait aussi appel
à des producteurs étrangers et il faut donc déduire des éléments précédents le montant des
importations pour obtenir le niveau du produit national.
On a donc :
C + I + Δst + G + X = Demande
(C + I + Δst + G) – M = Yo = coté de l’offre
Yd
La consommation des ménages se monte à 2313 Mds de Fcs
consommation des administrations
à 743 Mds de Fcs
formation brute de capital fixe
à 762 Mds de Fcs
variation de stocks
à
4 Mds de Fcs
Les exportations
à 1266 Mds de Fcs
--------
On retranche les importations :
5088 Mds de Fcs
- 1193 Mds de Fcs
--------
Et on trouve le PIB
3893 Mds de Fcs
La demande de chaque composante étant de tant, et connaissant le PIB, on retrouve le
montant des importations.
C’est donc l’addition de ces différentes composantes et la soustraction des importations qui
déterminent la formation du produit offert YO, le PIB.
On a alors une formule de la forme Y0 + M = Yd
Ou YO = Yd – M
Il y a alors une solution pour conserver la relation YO = Yd qui est de modifier la notion
même de produit demandé Yd.
On peut considérer que la consommation est seulement la consommation des produits
nationaux et que l’investissement recensé est seulement l’investissement en biens produits par
les producteurs nationaux.
De même pour les autres composantes on exporte que des produits nationaux, dans ce cas
l’équation est rétablie en éliminant les importations.
La manière la plus raisonnable consiste à opérer une déduction du côté demandé entre le
montant des exportations et le montant d’importations. On considère alors que le montant du
produit demandé est donné par C + I + (X – M) = Yd
Ce regroupement revient à séparer les autres composantes de la demande globale, les
éléments proviennent du commerce extérieur. On dira que celui-ci a joué plus ou moins selon
que le solde (X-M) est positif ou négatif.
On obtient ainsi le rétablissement de la formule Y0 = Yd avec ce rôle déterminant du montant
de Yd sur la formation de l’équation macroéconomique.
L’aspect le plus intéressant de cette formule tient à la mise sur le même plan des différentes
composantes de la demande globale qui sont toutes en quelque sortes des déterminants
équivalent, même si leur importance est différentes, c'est à dire quelles sont autonomes les
unes par rapport aux autres. Et puisque c’est leur addition qui forme le montant du produit
offert elles apparaissent comme des variables autonomes par rapport au montant du produit
offert.
C => Yd => YO
I => Yd
-2-
Yd
C
I
Yd
C
I
Yo
Dépendance du Yo // à Yd. Autonomie de cet I //Yo
Sur un plan théorique et analytique, cette méthode n'est pas satisfaisante et on s'est efforcé de
mettre en valeur les interdépendances des variables qui interviennent dans la formation du
produit national.
§2. Les mécanismes de l'interdépendance keynésienne
C'est depuis la théorie générale qu'on estime normal de mettre l'accent sur la demande
globale pour déterminer le PIB National, mais dans cette théorie générale de KEYNES, la
détermination de l'investissement se fait par une prévision de la rentabilité.
En effet, ce mode de détermination de l’investissement fait que cette variable
macroéconomique apparaît comme indépendante à l'égard du niveau du produit national alors
que la consommation est déterminée par le revenu des ménages qui dépend du niveau du
produit national.
Cette approche particulière conduit à associer une variable autonome du produit national :
l'investissement, et une variable dépendante du produit qui est la consommation.
On a ainsi un mécanisme de circuit économique qui est partiellement ouvert au niveau de
l'investissement, variable qui doit se trouver équilibrée par une résultante du circuit
économique qui est l'épargne.
Ici, on ne retient plus que consommation et investissement.
C + I = Yd, c(Yo) + I = Yd.
-3-
L'investissement génère une demande globale qui détermine un produit qui génère un revenu
qui sera pour partie consommée et qui va accroître le montant de la demande globale.
Le supplément de demande globale va alors déterminer une production supplémentaire qui va
engendrer une offre supplémentaire et une demande supplémentaire. On entre alors dans un
phénomène contemplatif où on a égalité entre produit offert et produit demandé quand le
montant des fuites s'égalise au montant des sources.
C(Yo) = cYo, Yd = Yo.
CYo + I = Yo
I = Yo – cYo = S , I = (1-c)Yo = S.
Yo = I/(1-c)
Dans cette optique partielle, tout se passe comme si le montant de l'investissement déterminait
à lui seul le montant du produit à travers un coefficient multiplicateur keynésien égal à 1/s =
1/(1-c)
Si on adaptait ce point de vue, l'économie devrait être relativement instable car
l'investissement connaît des variations importantes, or on constate que l'économie montre une
très grande stabilité de niveau.
Dans sa formulation de la fonction de consommation, KEYNES souligne que les
consommateurs ont des habitudes de consommation
et qu'ils maintiennent cette
consommation autant que possible même en cas de diminution des revenus.
Cela signifie qu’une partie seulement de la consommation des ménages doit être considéré
comme une dépense autonome par rapport au revenu, et on peut alors modifier l'expression du
circuit économique pour intégrer cette part autonome de la consommation.
C’est pourquoi on va voir que la consommation est souvent représentée comme une constante
autonome qui ne dépend pas du revenu.
C = B + cYo où B représente une partie autonome constante.
On peut donc réécrire la formule d’équilibre :
B + cYo + I = Yd
B + I = (1-c)Yo
Yo = (B + I) / (1-c)
Le multiplicateur keynésien existe toujours mais il est modifié et ne prend plus en compte
seulement l'investissement comme seul déterminant. En effet, même si l'investissement varie
de manière importante, la partie autonome de la consommation va jouer un rôle essentiel pour
ajuster le PNB.
On va considérer que, normalement, la partie autonome de la consommation ne change pas
d'une période à l'autre, ce qui peut être le cas, alors que l'investissement peut varier d'une
manière importante d'une période à l'autre.
On va donc raisonner en terme de niveau :
Yd = Yo
cYo + I = Yo
I = Yo – cYo -> Yo = I / (1-c)
Même si l’investissement n’est pas la variable déterminante, il demeure l’élément qui varie de
manière importante, et c’est donc la variation de l’investissement qui fait varier le produit
d’une période à l’autre.
-4-
On constate que le problème actuel semble être l'évolution du niveau d’investissement qui
détermine la croissance, la reprise économique n'étant possible que lorsqu'il y aura une reprise
de l'investissement suffisamment importante dans les pays développés.
Graphiquement, on a :
Pour obtenir le point d’équilibre, on ajoute le montant de l’investissement, ce qui nous donne
ainsi Yd = cYo + I ; Selon que l’investissement est plus ou moins élevé, le produit sera plus
ou moins élevé.
Dans une autre optique, on a :
Dans cette hypothèse, la consommation à elle
seule permet d’obtenir un certain niveau de
production
déterminé
par
l’équilibre
macroéconomique, mais en principe on a
toujours un certain niveau d’investissement que
l’on va ajouter à cette consommation autonome
B.
Selon que cet investissement est plus ou moins important, l’équilibre sera obtenu au point de
rencontre entre la bissectrice et la courbe Yd.
Si l’on transcrit dans ce graphique l’exemple
précédent, cela n’aurait pas un intérêt comparatif
puisque ce serait une simple addition. On n’a pas
d’interdépendance, chaque variable se déterminant
d’elle-même.
-5-
La consommation est d’une part dépendante du revenu et d’autre part autonome.
Ainsi, les conditions dans lesquelles se forme l’équilibre utilisent l’interdépendance entre
le niveau du Produit National et le niveau de la Demande Globale.
A l’équilibre, on a égalité entre Produit et Demande Globale (Produit Offert et Produit
Demandé). On a une égalité entre les sources autonomes de la demande et les fuites du circuit
économique. Cette égalité s’interprète comme l’égalité entre l’épargne et l’investissement.
L’épargne est typiquement une fuite car elle ne donne pas lieu à l’investissement, tandis que
l’investissement est une source autonome type.
Cette égalité s’interprète dans un sens causal, qui est l’inverse de celui des classiques, car
c’est le niveau de l’investissement, déterminé en dehors du circuit économique, qui entraîne la
formation d’une épargne équivalente ; non pas directement, mais à travers la fixation d’un
produit national tel qu’il génère une épargne égale au niveau de l’investissement.
Rappel :
Dans la logique classique, c’est l’épargne qui est décidée par les agents privés, et elle se
transforme de manière directe ou indirecte en investissement. La transformation est directe si
l’épargnant investit directement, et indirecte s’il offre un prêt ou un moyen de paiement à
d’autres agents qui eux vont acquérir ces biens d’équipement.
A l’équilibre,
Yd = Yo
cYo + I =Yo
I = (1-c)Yo
Yo = I / (1-c)
-6-
Si on s’intéresse à une présentation qui montre en partie une demande autonome et une partie
conditionnée par le niveau du produit, partie dépendante de Yo, on a :
On peut se demander quelle est l’égalité qui s’établit en terme de demande autonome et de
variable complémentaire dans le schéma.
Il existe deux variables autonomes du circuit : l’investissement (I) et la partie autonome de la
Demande (B), et on remarque que la consommation peut fort bien varier sans qu’il n’y ait de
variation du revenu, et ces variations ont souvent plus d’importance en volume que celles de
l’investissement.
Il est important d’en tenir compte. C’est pour cela que, lorsque l’on veut avoir une courbe
« réaliste » dans l’analyse macroéconomique, on utilise une courbe de la forme B +cYo plutôt
que simplement une courbe en cYo, et on considère par-là qu’il y a une demande autonome
de la part des consommateurs, soit une demande de consommation qui peut pratiquement ne
pas être influencer par le revenu de la période.
On va donc être amené à dire que l’équilibre entre le Produit Offert et le Produit Demandé
implique l’égalité entre le montant de la dépense autonome et la part du Produit qui ne
détermine pas une dépense induite.
Dans le premier cas, cette part du produit qui ne détermine pas une dépense induite, c ‘était
l’épargne.
Dans le cas présent, c’est toujours l’épargne (part non consommée du revenu), mais aussi la
contre-valeur de la consommation autonome (B).
Autrement dit, dans ce cas présent, la valeur (1-c), qui correspond à la partie du revenu qui
n’induit pas une dépense, ne correspond pas à l’épargne seule, mais à la dépense autonome,
c’est à dire le montant de la consommation autonome.
Yd = Yo
B + cYo + I = Yo
B + I = (1-c)Yo
Yo = (B + I)/(1-c)
où (1-c) est la partie du revenu qui n’aboutit pas à une dépense induite.
c traduit la propension générale.
Une partie de la dépense autonome va donc être compensée par une partie de la dépense
induite du revenu.
On a toujours égalité entre épargne et investissement puisque avec B + I, on a une part du
revenu consacrée
Si d’autres composantes sont introduites, l’égalité I = S disparaîtrait. En revanche, l’égalité
entre la dépense autonome et la partie de ce revenu qui n’est pas consacrée à une dépense
induite serait maintenue (dans le schéma keynésien).
-7-
Même le modèle le plus simple d’interdépendance keynésienne aboutit à des résultats
inattendus et non saisissables, et c’est ce qu’on va retrouver avec :
§3 L’interdépendance entre la fonction de consommation et la fonction d’investissement
fondée sur l’accélération (modèle de HARROD, 1939)
Il a considéré que son modèle complétait celui de KEYNES en lui donnant une signification
et une profondeur dynamique. Ce modèle semble erroné.
HARROD propose un modèle élémentaire avec une fonction de consommation la plus simple
possible à un temps t.
Ct = cYt
où c est la partie induite du revenu.
L’investissement demeure autonome par rapport au produit réalisé de la période, mais en
revanche il dépend par le jeu de coefficient de capital (accélération), de la variation anticipée
dans le produit, correspondant à la forme :
It = g ( Xt – Yt-1 )
g = coefficient de capital
Xt = produit anticipé par les investisseurs
Yt-1 produit constaté en t-1
On s’écarte de la conception de KEYNES puisque ce qui va décider les investisseurs, ce n’est
pas la rentabilité prévue des investissements, mais plus simplement le niveau du produit
qu’ils anticipent sur la période même, et c’est donc une conception très simpliste de
l’investissement puisque les biens d’équipement durent un certain nombre d’années.
HARROD a la volonté de répondre à un besoin de liquidité sur la période causé par
l’accroissement du niveau du produit d’équilibre. Mais les investisseurs ne connaissent pas
le niveau d’équilibre et ils font une hypothèse en anticipant ce niveau.
Ce qui intéresse HARROD est que cette hypothèse va se révéler erronée, ce qui peut paraître
paradoxal puisque c’est la décision d’investir qui détermine directement le niveau du point
d’équilibre. Or ce produit d’équilibre ne sera pas, très généralement, l'équivalent du produit
préalablement anticipé par les investisseurs.
Les investisseurs décident du niveau du Produit en déterminant l’investissement, mais bien
qu’ils soient les seuls actifs, ils provoquent une valeur erronée du produit. (Ce problème reste
peu profond à résoudre).
Sur la base de ces anticipations on peut très facilement construire un modèle :
Yd = Yo
cYt + g(Xt – Yt-1) = Yt = (Produit réellement offert)
g(Xt – Yt-1) = (1-c)Yt
Yt = [g / (1-c)] . (Xt – Yt-1)
Yt = (g/s) (Xt – Yt-1) On prend s car on considère qu’il n’y a pas de complément sur la
demande de consommation
Yt-1 est donné, ainsi que g (coefficient de capital = 3 à 5) et s (niveau d’épargne).
C’est Xt qui détermine la valeur de Yt, et les investisseurs ne connaissent pas la valeur du
rapport g/s, mais connaisse (Xt-Yt), c’est à dire la différence entre le niveau de leurs
anticipations futures d’investissement et le produit réalisé. C’est donc l’ignorance de ce
rapport (g/s) qui fait que les décisions des investisseurs seront en général erronées, ce qui fait
-8-
que leurs anticipations ne correspondent pas au niveau du produit qui sera constaté à la fin de
la période.
Pourquoi n’a-t-on pas coïncidence entre réalisation et anticipation ?
C’est tout l’intérêt de la démonstration de HARROD :
A quelle condition a-t-on Xt= Yt ?
Comme Yt = Xt , Yt / Xt = 1
(Yt / Xt) = (g / s) . [(Xt – Yt-1) / Xt] = 1
d’où (Xt – Yt-1) / Xt qui est le taux de croissance anticipé des investisseurs = s / g.
Conclusion : Ce qui résulte de cela est que l’équilibre keynésien s’exprime sous la forme
d’un taux de croissance anticipé, c’est à dire que si les investisseurs anticipent le taux de s / g,
leurs anticipations seront bonnes quand elles correspondront au produit escompté, soit égales
au taux de croissance s / g, et le taux réalisé sera donc égal au taux anticipé.
s / g est donc ici le taux garanti, ce qui signifie que si ce taux est réalisé, il est anticipé, mais
si la garantie ne va pas (ou va) au-delà, la réalisation sera différente de ce qui était anticipé.
Si (Xt – Yt-1) / Xt = s/g  = (Yt – Yt-1) /Yt (spécificité du modèle de HARROD, où l’on a
au dénominateur non pas Yt-1 mais Yt)
Qu’est qui va se passer si le taux de croissance anticipé est supérieur à s/g ou au
contraire s’il est inférieur à s/g ?
On est certain d’une chose, c’est que dans ce cas il y aura une divergence entre le niveau du
produit anticipé et le niveau du produit réalisé, et donc une divergence entre le taux de
croissance réalisé et anticipé.
Par convention, HARROD propose une situation où :
Taux de croissance anticipé = Ŷt = (Xt – Yt-1)/Xt
Taux de croissance réalisé = Ẏt = (Yt –Yt-1)/Yt, appelé « Y point t »
Quand Ŷt = s / g = Ẏt, mais quand Ŷt  s / g,
alors Ẏt  Ŷt.
Il faut relier Ẏt à Ŷt.
Ẏt = 1 - Yt-1/Yt
et on sait que Yt = (g/s)(Xt - Yt-1)

Ŷt = 1- (s/g) . [Yt-1/(Xt - Yt-1)]
Démonstration :
Ŷt = 1 – Yt-1/Xt
 Yt-1= Xt * (1-Ŷt)
s
Xt(1- Ŷt)
s
1-Ŷt
Alors, Ўt = 1 - --- x ----------------- = 1 - ---- x -----g
Xt(1-1+Ŷt)
g
Ŷt
-9-
s
1-Ŷt
1 - ---- x -------  Ŷt
g
Ŷt
et
s
Ŷt -1
---- x ---------  (Ŷt -1)
g
Ŷt
s/g  Ŷt

Ŷt  s/g

Ẏt  Ŷt .
Sachant que lorsque le taux de croissance anticipé est différent de s/g il va y avoir une
divergence entre le taux de croissance réalisé et le taux de croissance qui était anticipé.
Quel est le mécanisme qui détermine le sens de cette divergence ?
Comme le taux de croissance réalisé est toujours déterminé par le taux de croissance anticipé,
on peut toujours visualiser le lien de causalité entre taux de croissance réalisé et taux de
croissance anticipé. Si on réalise cette substitution, on constate que lorsque Ŷt (taux de
croissance anticipé) > s/g, le taux de croissance réalisé constaté (Ẏt) va se trouver lui aussi
supérieur au taux de croissance anticipé.
Si les investisseurs sont « optimistes » au sens de HARROD, la réalité sera encore plus
favorable qu’ils ne le pensaient, c’est à dire que le produit national constaté sera supérieur à
celui qu’ils anticipaient, et on peut penser que de ce fait, ils vont devenir encore plus
optimistes, et que ce faisant, ils vont provoquer une nouvelle situation où le taux de croissance
anticipé sera supérieur à celui qu’ils anticipaient de nouveau.
Inversement, si les investisseurs sont « pessimistes » (s’ils anticipent un taux de croissance
inférieur à s/g) le niveau du produit constaté sera inférieur à celui qu’ils anticipaient et comme
ils vont anticiper un niveau de produit plus faible, ils vont de ce fait provoquer l’apparition
d’un taux de croissance et d’un produit plus faible que celui qu’ils anticipaient. Il va y avoir
un processus cumulatif.
La raison de ce processus est que les anticipations des investisseurs déterminent un niveau
d’investissement plus ou moins élevé. Et c’est ce niveau qui va déterminer le niveau
d’équilibre de la période. Leurs anticipations ne sont pas auto-réalisatrices.
On a donc trois possibilités :
- soit (s/g = Ŷt) et on a équilibre, le niveau de la croissance est donc stable.
- soit les investisseurs sont plus optimistes et on a une hausse du niveau de la croissance
économique.
- soit les investisseurs deviennent plus pessimistes et on a une baisse du niveau de la
croissance économique.
Il est important de rappeler que « optimisme » et « pessimisme » ne déterminent pas la valeur
s/g que ne connaissent pas les investisseurs.
On aboutit alors à des résultats surprenants car ils s’expriment en terme de taux de croissance
directement.
- 10 -
On s’est longtemps demandé s’il n’y avait pas d’explications, notamment des mécanismes
cycliques de l’économie et du ralentissement qui s’accentue (phénomènes compliqués). Il
s’agit ici uniquement de la croissance ou du ralentissement de la demande globale sans que
cela ait forcément des conséquences sur l’évolution des capacités de production.
Puisque la variable stratégique est l’investissement, en phase de croissance accélérée, les
capacités de production sont progressivement élargies par l’investissement mais le produit
d’équilibre réalisé est toujours supérieur à celui qui est rendu possible par l’investissement
(i.e. la croissance accélérée dans le modèle de HARROD a un caractère inflationniste et
l’ajustement se fait par une hausse des prix de plus en plus forte).
On ne considère comme croissance effective que ce qui se traduit par un accroissement du
produit et non pas de la Demande Globale.
Ce mécanisme est celui des révisions des anticipations de la part des investisseurs qui
constatent à la fin de chaque période qu’il y a un écart entre le taux de croissance anticipé et le
taux de croissance effectivement réalisé. Ils révisent donc leurs anticipations en fonction de
l’écart constaté.
Il existe une infinité de mécanismes possibles pour que les investisseurs révisent leurs
anticipations en fonction de l’écart constaté, et HARROD propose la formule suivante :
Ŷt = Ŷt-1 + λ (Ẏt-1 – Ŷt-1) avec λ > 0. Et donc si Ẏt-1 > Ŷt-1, on a une hausse de Ŷt
L’évolution des taux de croissance anticipés et du produit national va avoir un caractère
quasi-explosif lorsque le taux de croissance anticipé est supérieur à s/g. Et inversement,
lorsque le taux de croissance est inférieur à s/g, l’évolution va être extrêmement négative et va
aboutir à un effondrement rapide du produit national.
On peut représenter ce phénomène par :
Dans ces modèles keynésiens, la morale est que l’économie décentralisée (laissée à l’initiative
des agents privés que sont les investisseurs) est spontanément déséquilibrée. Dans le cadre
keynésien traditionnel, ce déséquilibre s’exprime par le fait que le produit national de chaque
période est différent du produit de plein emploi.
Dans le cadre du modèle de HARROD, le déséquilibre spontané tient au fait qu’il n’y a aucune
raison pour que les investisseurs anticipent un taux de croissance égal à s/g.
L’économie est donc précipitée tantôt dans une forte expansion quand leurs prévisions sont
supérieures à s/g et tantôt dans la dépression quand la prévision est inférieure à s/g.
- 11 -
Remède : Il faut que les autorités économiques (gouvernement, banque centrale) agissent sur
les paramètres de l’économie de façon à faire coïncider les anticipations des investisseurs
avec le taux garanti s/g, ou il faut qu’ils complètent l’investissement pour que la croissance
effective se fasse à s/g en rappelant alors un point qu’il a lui-même souligné, qui est que
l’économie est instable puisqu’il y a peu de chance pour que s/g soit égal au taux de
croissance anticipée.
Selon HARROD, si l’économie évoluait régulièrement à ce rythme, ce taux de croissance de la
demande globale ne serait pas nécessairement un taux de croissance de plein emploi. Pour que
ce soit le cas, il faudrait que le taux de croissance de la force de travail suive.
Ce taux tient à deux éléments :
- le taux de croissance de la population active.
- la croissance de la productivité de chaque unité de travail.
C’est ce que HARROD appelle (n + m), soit le « taux naturel » égal au taux garanti.
Il ne suffirait pas pour assurer le plein emploi de rendre l’économie conforme au taux s/g. Il
faudrait aussi faire coïncider le taux s/g avec le taux de croissance de la force de travail de
l’économie. Ceci se rapproche de la théorie keynésienne, selon laquelle il n’y a aucune
chance pour que l’économie évolue spontanément de manière à assurer le plein emploi de la
force de travail présente dans cette économie.
En revanche, il y a une divergence importante entre la thèse de HARROD et celle de
KEYNES : Selon les keynésiens, l’économie spontanée tend plutôt à s’établir dans un état
stable de sous-emploi et il n’y a aucune raison particulière pour que l’économie évolue soit
vers un niveau plus faible d’activité soit vers une amélioration de ce niveau d’activité. La
caractéristique dominante de la pensée keynésienne est que l’économie tend à stagner en sousemploi alors que chez Harrod, l’évolution tend toujours à s’aggraver.
Mais laissons de côté le modèle de HARROD qui illustre les interactions entre l’investissement
et la consommation, et revenons au modèle keynésien que l’on va élargir.
§4. Le modèle keynésien avec élargissement des composantes autonomes et induites de la
demande globale.
Il y a deux raisons pour ne pas se contenter d’interactions entre la fonction d’investissement et
la fonction de consommation.
Raison 1 : Dans l’économie concrète il y a d’autres variables macroéconomiques importantes,
notamment celles qui dépendent de la dépense gouvernementale et de la dépense extérieure.
Ces variables complémentaires sont des instruments d’action de la politique économique.
Il est donc important de les expliciter dans le mécanisme de l’équilibre macroéconomique.
Raison 2 : Au niveau des composantes de la demande globale, à côté de la consommation et
de l’investissement, les exportations sont des variables autonomes par excellence par rapport
au produit national, puisque les exportations d’un pays sont directement déterminées par les
niveaux des produits nationaux des partenaires commerciaux de ces pays.
Ex. : Le premier déterminant des exportations françaises vers l’Allemagne, c’est l’évolution
du PIB de l’Allemagne. En effet, si ce PIB Allemand augmente, alors les exportations
françaises vont augmenter rapidement, et inversement, comme c’est le cas actuellement (mars
- 12 -
2003), si le PIB de l’Allemagne stagne, les exportations françaises vont stagner à leur tour.
Ainsi le PIB qui détermine les exportations de la France vers l’Allemagne n’est pas, comme
on pourrait le penser, le PIB français, mais le PIB Allemand. Les exportations sont donc une
variable autonome.
Pour ce qui est de la dépense gouvernementale (raison 1) de biens et services consommables
qui recouvrent la demande de l’État, des administrations centrales, mais aussi des collectivités
locales, on peut considérer que le niveau de la demande a un caractère autonome par rapport
au niveau du Produit, mais les dépenses que peut faire un pays ont forcément un lien avec le
PNB. (Les dépenses françaises militaires ne dépassent pas 1,8% du PNB, tandis que celle des
Etats-Unis avoisine les 3,9% du PNB.
Il n’y a pas de fonction stable qui relie ce produit national et cette dépense gouvernementale.
L’un peut stagner et l’autre peut augmenter. Il y a un lien mais il est instable. En l’absence de
toute fonction sérieuse, on considère la dépense gouvernementale comme un élément
autonome dans le circuit économique.
Le circuit économique se trouve stabilisé au niveau national quand :
Yo = Yd
Yd t = Yd t-1
M+S+T+C=X+I+G+C
M+S+T
= X + I + G, et on a égalité entre variables induites et variables autonomes.
Cette situation d’équilibre entre les sources et les fuites du circuit a un résultat surprenant :
désormais l’égalité s’impose entre l’ensemble de ces variables et non plus entre certaines des
sources et certaines des fuites.
En particulier, il n’y a alors plus égalité entre I et S, puisque la différence qui peut exister
entre ces deux variables peut être compensée par une différence inverse entre l’ensemble des
autres variables.
- 13 -
Il existe une relation importante qui est :
(X – M) = S + (T – G) - I
(X – M) =
E
-I
L’excédent commercial d’un pays (X – M) va être déterminé entre d’une part la différence
entre l’épargne (privée et publique) notée E et d’autre part le montant de l’investissement.
En effet si T-G < 0, et se déduit donc de S, on constate que le montant de l’épargne totale (E)
va être moins important comparé aux investissements, et qu’ainsi l’excédent commercial va
s’en trouver diminuer.
Ex. : Le déficit commercial américain est du au fait que l’épargne américaine est nettement
inférieure au montant de l’investissement réalisé chaque année aux USA. La conséquence de
cela est l’existence d’un important déficit commercial, ce qui ne veut pour autant pas dire que
les Etats-Unis exporte moins qu’ils n’importent.
Remarque 1 : Il y a disparition de l’égalité entre l’épargne et l’investissement qui
caractérisait le modèle keynésien simple dans lequel on raisonne simplement sur l’interaction
entre la fonction de consommation et la fonction d’investissement.
Peut-on par ailleurs donner les liaisons fonctionnelles qui nous rapprocheraient de ce
modèle élémentaire ?
Remarque 2 : Il nous faudra également déterminer quelle est la manière pour déterminer
T,G,...
Intéressons-nous d’abord à déterminer les variables induites par le revenu.
La manière la plus simple est d’affecter un coefficient à chaque variable M, S, T, et C. On va
donc prendre pour coefficient de proportionnalité de M, m ; pour S, s ; pour T, t ; et pour C, c.
Yo = (m + s + t+ c)Yo
Avec m + s + t + c = 1
Et 1 - c = m + s + t, où (1-c) devient la dépense non-induite dans le circuit.
Yd = cYo + X + I + G = Yo = mYo + sYo + tYo + cYo.
Yo = Yd
(m + s + t)Yo = X + I + G
X+I+G
X+I+G
Yo = ------------- = ------------------(m + s + t)
1–c
Le multiplicateur qui détermine le niveau d’équilibre est beaucoup plus faible que dans le
modèle keynésien puisque 1/ (m + s + t) < 1/ s.
Ex :
s = 10% )
alors k = 1/ (m + s + t) = 1/0.5 = 2
m = 20% )- 50%
tandis que k = 1/s = 1/0.1 = 10
t = 20% )
Pourquoi ce coefficient se réduit-il ?
- 14 -
Car désormais il n’y a plus que l’épargne comme fuite mais on considère d’autres fuites que
sont s et t, et ainsi un accroissement d’une des variables autonomes a des effets
multiplicateurs assez limités dans le circuit. Le multiplicateur est donc rarement supérieur
à 1, ce qui montre l’importance des fuites dans le modèle.
Néanmoins la politique économique a désormais un grand nombre de variables sur lesquelles
elle va pouvoir jouer : les exportations, l’investissement, la Dépense Globale, et chacune
d’entre elles va influer sur le niveau de le Demande Globale.
De plus, on voit que ces variables peuvent être modifiées, et peuvent donc servir de point
d’action pour faire varier le PNB.
Remarque : Ce qui est considéré comme dépenses publiques est constitué des marchandises
et des services marchands, à l’exclusion des dépenses sous forme de salaires, car ceux-ci
figurent déjà dans les revenus des ménages qui déterminent le montant de la consommation
(on évite ainsi les « doublons »).
Donc, si l’Etat prélève sur les revenus, il n’y a pas de changement du point de vue de la
dépense dans le fonctionnement de l’économie. En revanche, s’il constitue des biens dans
l’économie de marché, il provoque des changements dans le circuit. L’intégration de ces
revenus supplémentaires et biens supplémentaires ne modifie pas le principe général de
l’équilibre keynésien, qui s’établit toujours au niveau du produit pour lequel la somme des
dépenses autonomes et induites s’égalise avec le niveau du Produit National Offert de
l’économie.
Pour envisager les implications de ce modèle élargi sur la politique économique, il faut
évidemment faire apparaître une variable complémentaire, extérieure au modèle keynésien,
qui est le niveau de Produit National qui correspondrait au Plein-Emploi des ressources
productives, que l’on limite parfois au plein-emploi de la force de travail disponible pour
simplifier.
Par une représentation graphique, on a :
G+I+X
Yo = --------------- où m + s + t = 1c
m+ s+ t
Du point de vue keynésien, il y a
toujours un équilibre qui se dégage,
équilibre
déterminé
par
les
variables
autonomes
et
les
coefficients
des
fuites
correspondantes. On va faire
apparaître le plein-emploi des
facteurs
dans
la
théorie
keynésienne traditionnelle.
Le produit de plein-emploi est toujours au-delà du produit disponible, et l’économie
spontanée, préconisée par KEYNES, n’assure pas automatiquement le plein-emploi. L’équilibre
se trouve ainsi en général au-deçà du plein-emploi, et quelquefois même au-delà.
- 15 -
Le but de la Théorie Générale de KEYNES et de ses disciples est de montrer qu’il est
possible, par la politique économique, de faire coïncider le Produit d’équilibre et le Produit de
Plein-Emploi.
Sur un plan graphique, qui n’est plus simplifié, pour opérer cette coïncidence, il suffit de
relever dans le graphique la fonction de Dépense Globale de telle sorte que cette fonction
coupe la bissectrice du graphique exactement au niveau du produit de plein-emploi des
facteurs.
De combien faut-il relever cette courbe pour obtenir cette coïncidence entre l’équilibre
spontané et l’équilibre de plein-emploi ?
Il faut relever la courbe C + I + G + X du niveau de l’écart du produit de plein-emploi entre
la fonction de Demande Globale, et le niveau où se situe la bissectrice (où Yo=Yd). Comme
le produit de plein-emploi est au-delà, on parle d’écart déflationniste.
Si on parvenait à nuancer le montant de cet écart, il suffirait d’ajouter à la courbe de
Demande Globale le même montant pour obtenir une coïncidence entre le produit d’équilibre
et celui de plein-emploi.
Il existe toute une gamme d’instruments sur lesquels la politique économique peut chercher à
agir :
- elle peut tout d’abord essayer d’agir sur les variables autonomes en favorisant
l’investissement grâce à des crédits d’impôts, à des subventions, à une baisse du taux d’intérêt
quand cela est possible,
- mais il semble que l’autorité publique possède des moyens plus directs comme par
exemple en augmentant les dépenses gouvernementales en achetant des biens et des services
sur les marchés, ce qui va relever la courbe de Demande Globale.
- L’action sur les exportations paraît plus difficile, mais il est cependant possible d’agir
directement en favorisant une diminution de la valeur de la monnaie nationale sur le marché
des changes, ce qui rend alors les produits nationaux moins chers que ceux des pays étrangers.
Il existe éventuellement des cas différents à mettre en œuvre, comme la possibilité d’établir
des subventions à l’exportation qui favorisent là-aussi les exportations.
Il y a un problème pour les pays européens : ceux de la zone euro voient leur monnaie
s’apprécier sur le marché des changes, ce qui va à l’encontre des mécanismes de stimulation
de l’économie.
En ce qui concerne la Dépense Gouvernementale directe, les principaux pays développés
ont des problèmes, leurs budgets étant déjà déséquilibrés, ces Etats ne peuvent envisager
l’accroissement des dépenses gouvernementales.
Donc, sur le papier, il est très facile de résoudre ce problème, mais dans la pratique cela
s’avère plus difficile.
Les investissements sont destinés aux entreprises, pour la plus grande partie en variable
économique, or nous le savons, c’est l’état d’ « optimisme » ou de « pessimisme » des
entrepreneurs qui jouent. En cas de « pessimisme », il y a peu de possibilités pour obtenir une
option supplémentaire d’investissement.
Il y a toute une gamme d’actions nationales possibles, au niveau du dénominateur, pour
obtenir le relèvement du Produit d’équilibre, qui permettrait de passer au produit de pleinemploi des facteurs. On peut agir sur G, I ou X, soit séparément, soit simultanément sur s, t et
m.
Il faut inciter les consommateurs à augmenter leur consommation pour un niveau de revenu
donné, or, dans la situation présente, cela est impossible car les consommateurs sont
- 16 -
convaincus que pour des raisons de précaution due à la dégradation de la conjoncture
économique et de la conjoncture internationale (guerre en Irak), cela ne facilite pas la
consommation des agents.
Il faut donc agir sur les dépenses publiques, en réduisant les taxes pour permettre un effet
stimulant sur le Produit National d’équilibre.
Si les consommateurs souhaitent développer leur épargne, une réduction de taxes pourrait
aboutir à un accroissement du taux d’épargne, ce qui pourrait annuler l’effet stimulant sur le
Produit National.
L’action sur la dernière variable qu’est m (le pourcentage d’importation dans le revenu) qui a
le même mécanisme qui permet d’agir sur les exportations : si la monnaie nationale perdait de
sa valeur sur le marché des changes, cela renchérirait le prix des produits importés et il en
résulterait une diminution des importations et dans le même temps, cela stimulerait les
exportations. Or, nous le savons, en ce qui concerne la France, l’évolution de la monnaie
commune sur le marché des changes tend à encourager les importations - l’€uro s’appréciant
par rapport aux autres monnaies internationales - et ainsi à décourager les exportations. Le
résultat serait totalement défavorable.
Cependant, la hausse de la monnaie commune sur le marché des changes aurait un résultat
favorable, étant de limiter la hausse des prix des produits pétroliers, et donc d’empêcher la
baisse du revenu réel des consommateurs que l’on aurait constaté s’il y avait en même temps
une hausse des produits pétroliers exprimés en $, et ainsi une baisse de valeur sur le marché
des changes.
L’actualité nous montre que la solution graphique du Produit de plein-emploi, si elle est
extrêmement simple, n’est pas toujours utilisable, et il y a des situations concrètes qui
interdisent l’emploi de ces solutions, mais cela n’enlève rien à la validité du principe abstrait,
et si on éludait ces difficultés concrètes, on pourrait améliorer ces possibilités de plein-emploi
en utilisant les éléments que l’on vient de démontrer.
Il nous reste à évoquer l’impact d’une diminution des composantes s, t, et m d’un point de vue
graphique.
On a un relèvement de la courbe en
posant 1-c = m + s + t. Une baisse de
1-c entraîne une baisse de m + s + t.
G+I+X
Yo = --------------  où m + s + t =
1-c
m+s+t
On a un nouvel équilibre du Produit de Plein-Emploi. Les mesures découlant du modèle
semblent cependant difficiles à prendre, et on voit qu’en France, en Allemagne,…, tout va
dans le sens d’une dégradation, et d’une impossibilité de réagir à cette situation.
- 17 -
Dans une situation inverse, si le produit de plein-emploi était en deçà du produit d’équilibre
(Yo*<Yo éq), les mesures inverses permettraient d’obtenir un équilibre entre le produit
d’équilibre et Yo*. Les mesures inverses consisteraient à réduire les Dépenses autonomes que
sont G, I et X, ou bien à élargir les éléments du dénominateur, c’est à dire m, s et t.
Cette situation est celle qu’on aurait si la coïncidence entre G + I + X se faisait avec un point
d’équilibre supérieur au Produit de plein-emploi. Dans la terminologie keynésienne, on
parlerait de gap (d’écart) inflationniste pour indiquer que la Dépense Globale tend à excéder
le produit de plein-emploi, et l’ensemble des mesures restrictives évoquées doit viser à
supprimer cet écart inflationniste en agissant soit sur le numérateur, soit sur le dénominateur,
soit sur les 2 à la fois, mais il faudrait éliminer juste ce produit en contractant le revenu
national.
A priori, si les circonstances ne s’y prêtent
pas, l’action directe des autorités publiques
devrait permettre d’assurer ce produit
d’équilibre au niveau du produit de pleinemploi, et il semble en particulier que les
variables budgétaires, les dépenses publiques,
et le montant des taxes puissent être adaptées à
l’obtention de ce produit de plein-emploi.
Autrement dit, à première vue, les
graphiques keynésiens indiquent que la
politique budgétaire suffit à assurer l’équilibre de plein-emploi des facteurs.
Or, depuis 20 ans, dans la pratique macroéconomique, on a pris l’habitude de considérer que
les circonstances sont toujours difficiles pour la politique budgétaire, et qu’il faut donc mettre
en avant la politique monétaire relevant d’autres mécanismes, et qui pendant longtemps a été
considérée par les économistes keynésiens comme un élément superflu de la politique
économique, ou au mieux comme un élément subordonné et complémentaire de la politique
budgétaire. Pour faire apparaître la politique monétaire, il faut utiliser d’autres graphiques.
En revanche, différents aspects de la politique budgétaire ont été exploré par les économistes
keynésiens, car cette politique semble avoir des effets multiplicateurs qui n’apparaissent pas
au premier examen tel que celui des graphiques que nous venons d’examiner.
§5. Le mode d’insertion des finances publiques dans le circuit macroéconomique : le
théorème d’HAAVELMO.
Ce théorème, qui se présente comme un paradoxe, résulte d’une réflexion sur les
implications des opérations de prélèvements fiscaux et de dépenses publiques à
l’intérieur du circuit macroéconomique.
En effet, traditionnellement, on a 2 types de situation :
- une situation de budget équilibré dans laquelle le prélèvement fiscal est équivalent aux
dépenses publiques, et on a le sentiment qu’une telle situation est neutre du point de vue de
l’impact des dépenses publiques sur la Dépense Globale.
- au contraire, lorsque ces 2 variables sont inégales, (lorsque le prélèvement fiscal est inférieur
ou supérieur à la Dépense Publique), il doit y avoir des effets de contraction de la dépense
globale, ou au contraire, des effets expansifs sur cette dépense globale.
C’est une question intuitive de bon sens, et c’est une autre manière d’envisager le rôle de la
politique budgétaire à l’égard de la dépense globale.
- 18 -
Ce que HAAVELMO fait apparaître, c’est que même un budget équilibré devrait avoir des effets
expansifs sur la dépense globale, et ceci pour une raison qui tient au fait que le prélèvement
fiscal est réalisé sur des agents privés qui emploient le revenu dont ils disposent soit en
consommation, soit en épargne.
Si ce revenu est détourné par les finances publiques, et s’il est entièrement dépensé et
employé (différemment de la théorie selon laquelle il faudrait conserver une partie de ces
ressources pour résorber les déficits des pays, notamment en ce qui concerne l’Union
Européenne) ; la Dépense Publique remplace pour partie la dépense privée, mais pour partie
également elle se substitue à une épargne privée. Le résultat est que le dépense globale est
accrue, et provoque un accroissement du PNB, et par le jeu des effets multiplicateurs, on
aboutit à ce résultat surprenant selon lequel après les prélèvements fiscaux, le revenu net des
agents privés reste au même niveau qu’auparavant.
On va reconstituer le schéma macroéconomique en excluant les échanges extérieurs, et on
aura 2 sources : la dépense gouvernementale et les investissements qui vont déterminer le
montant du revenu demandé, qui va lui-même déterminer le revenu offert, lui-même alimenté
par les taxes, et, avant la consommation, l’épargne.
C = c(Yo-T) et S= (1-c)(Yo-T)
Le montant des taxes est prélevé tout de suite, et
c’est sur le RDB net que vont être distribuées la
consommation et l’épargne.
L’équilibre est réalisé quand Yd = Yo, soit
quand Yo = I + G + c(Yo – T).
 Yo = cYo + G – cT + I
 Yo = [(G-cT) + I] / (1-c)
HAAVELMO est intéressé par la situation où il y a un objet équilibré dans les dépenses
publiques, c’est à dire où il y a un accroissement des dépenses publiques, et un
accroissement du prélèvement fiscal de manière équivalente. (G = T).
La modification du produit est alors :
Yo = [G – cT] / (1-c) ; I n’intervient pas dans les changements éventuels.
G – cT correspond à une variation positive, on ne tient compte que d’une partie du
changement des taxes destinées à la consommation.
Yo = (1-c) G / (1-c)
Donc
Yo = G (variation source supplémentaire) = T (variation fuite nette)
L’augmentation du produit national qu’aura provoquée cette variation des variables
budgétaires est exactement = l’accroissement des dépenses globales, et à l’accroissement
des taxes ayant servies à les financer.
- 19 -
Si l’accroissement du Y est = à un accroissement des DG, les agents privés ne ressentent pas
un accroissement des taxes dans le montant du revenu destiné à la consommation.
Le fait de l’accroissement des dépenses publiques n’est pas compensé par l’accroissement
des taxes, puisque C – ct est positif et l’accroissement du produit se trouve égal à
l’accroissement des taxes et à l’accroissement de la dépense gouvernementale.
Autrement dit, le changement opéré dans les finances publiques a supprimé une fuite du
circuit économique constitué par une portion de l’épargne privée.
Cette suppression d’une fuite a provoqué un accroissement du produit national d’équilibre.
Ceci présente un aspect paradoxal, et cela amène HAAVELMO à s’interroger sur l’effet
qu’aurait un accroissement de dépenses publiques qui ne serait pas immédiatement financé
par un prélèvement équivalent, étant donné en effet qu’en général le montant des taxes
correspond à un certain pourcentage du produit national.
On peut donc se demander si l’effet expansif que génère l’accroissement de Dépenses
Publiques n’aurait pour résultat d’élever le montant des taxes proportionnelles à un niveau tel
qu’il corresponde exactement à l’accroissement initial de la Dépense Publique.
Dans un cadre traditionnel de circuit, un accroissement de la dépense publique est financé par
un accroissement de taxe, avec un effet neutre, et une fois que l’Etat augmente ses
dépenses, il génère un effet multiplicateur dans l’économie qui entraîne une réduction des
taxes, résultant une ressource fiscale équivalente.
Cet argument se heurte, en France, à des difficultés dans la vie économique.
C’est également une argumentation souvent employée dans l’ancienne France : la Royauté, en
effet, qui avait beaucoup de mal à prélever des taxes, avait développé une argumentation qui
est la suivante : les dépenses que je fais pour construire un château (Versailles), vont générer
des accroissements de revenu, qui vont entraîner des augmentations proportionnelles du
montant perçu, et ce par les taxes, qui vont compenser exactement le montant de la dépense
initiale. Ce qui donne le pouvoir de multiplier aussi bien les château et le forteresse à
condition qu’elles soient construites sur le territoire nationale et non à l’étranger sinon les
fuites deviennent équivalente aux dépenses. On peut également faire l’inverse, c’est à dire
prélever auparavant.
Une hausse des dépenses publiques a des effets multiplicateurs et rééquilibrera le budget.
HAAVELMO considère que le montant des taxes correspond à :
T = tYo. Alors, avec Yo = Yd, on a Yo = I + G + c(Yo - tYo)
Yo = G + c(Yo – tYo)
(1 – c + ct) Yo = G
d’où on tire Yo = G / (1 – c + ct) et on a donc une fuite dans le circuit due à l’épargne et
au phénomène fiscal.
La formule de variation du produit est alors connue.
?
Est-ce que tYo = G (variation initiale de la Dépense Gouvernementale) ?
tYo = tG / (1 – c + ct) = G et on doit avoir t = 1 – c + ct pour que la variation soit
équivalente.
D’où : t (1-c) = 1-c et t = (1-c) / (1-c) = 1.
Cette hypothèse est inquiétante puisque si t = 1, cela veut dire que le montant des taxes
proportionnellement générées par l’accroissement du PNB, doit être égal à 100% de ce
- 20 -
produit, c’est à dire qu’il faut que, au niveau de la taxation marginale, cette taxe soit égale à
100%, ce qui est peu concevable, et HAAVELMO en conclut donc que puisque le montant
des taxes même marginales est toujours < à 100% du PNB, il n’est pas possible qu’un
accroissement de dépenses gouvernementales génère un accroissement du même montant
de recettes fiscales dans le cadre d’un circuit keynésien.
Ceci est un nouveau paradoxe : lorsque le prélèvement est fait en même temps que la dépense
gouvernementale, on a une augmentation du produit qui laisse les revenus inchangés, et si on
laisse les taxes augmenter proportionnellement, on n’obtiendra pas d’équivalence entre
dépenses gouvernementales et recettes fiscales.
On peut se demander si l’opinion des Rois de France (Louis XIV, Richelieu,…) avait tort de
croire que leurs dépenses en fortifications, en châteaux seraient automatiquement refinancé
par des recettes fiscales induites.
Il y a un cas qu’il n’envisage pas, qui est le cas où le coefficient de consommation (c) est égal
à l’unité, c’est à dire le cas où les agents privés redépensent l’intégralité de leur revenu (ce qui
n’est pas un cas keynésien puisque pas d’épargne)
Avec t = 1 – c + ct, si c =1, on a : t = 1 – 1 + 1t, et ainsi t= t (le schéma est donc respecté)
On peut représenter ceci dans un schéma à 2
variables : dépenses gouvernementales qui est
la seule variable autonome qui détermine le
produit demandé déterminant le produit offert,
et une partie est dérivée sous forme de taxe.
En revanche, le produit disponible (Yo – tYo)
est entièrement redépensé (avec c =1).
Dans ce cas, on a effectivement un
équilibrage automatique entre tYo et G.
Yo=Yd ;
Yo = G +(Yo-tYo) où Yo – tYo = dép.priv.
tYo = G, Yo = G / t
Yo (↑) = G / t (↓) d’où l’intérêt de baisser le taux de l’impôt pour permettre une croissance
plus rapide du revenu national.
La fontaine dans « les membres et l’estomac »
Les rois de France avait peut être raison en considérant que les dépenses intérieures seront
intégralement refinancées, alors que les dépenses de guerre extérieures ne le seront pas
puisque exogènes (n’amenant pas de contrepartie).
Pour des raisons monétaires, Louis XIV possédait un schéma différent.
Ceci explique l’importance du rôle leader des dépenses publiques qui alimentent le revenu
national. On pourrait également dire que l’augmentation du revenu national en diminuant de
la même manière les taxes, avec un pourcentage constant, permettrait d’augmenter le revenu
national.
- 21 -
COLBERT, se considérant hostile à ce modèle : le produit national avait une limite qui
était celle de la circulation monétaire, et selon lui on ne pourrait augmenter le produit
national sans augmenter le montant de la consommation, et de ce fait l’augmentation des
Dépenses Publiques ne peuvent pas, à stock monétaire constant, générer des recettes fiscales
équivalentes.
Cette idée d’une contrainte monétaire sur le circuit macroéconomique n’est pas propre à
COLBERT, et c’est une idée qui va être approfondie par J.M. KEYNES.
Au début du 19ème siècle ou triompher la doctrine de l’épargne, un certain nombre
d’économistes français ont rappelle ce modèle, cette richesse de la France qui résultait de ces
dépenses qui leur semblaient plus dynamique que l’épargne qui au contraire prive l’économie
de ce flux de dépense qui est censé alimenter le circuit économique.
Raisonnement de Keynes : le stock de monnaie disponible détermine le taux de l’intérêt selon
il est vrai l’intensité de la demande de monnaie, et ce niveau du taux d’intérêt détermine à son
tour compte tenu du degré de pessimiste ou d’optimiste des investisseurs, le niveau de
l’investissement et dans le modèle simplifié, l’investissement qui constitue la seule source
autonome détermine, compte tenu de la forme de la fonction de consommation, le niveau du
produit national. M => r => I => Y
Dès 1937 les disciples de Keynes ont eu le sentiment que ce raisonnement était trop linéaire
car il y a un effet de retour.
La déterminant de Y va influer sur r à travers la demande de monnaie. Si Y augmente, r
augmente car L augmente. On a donc un système circulaire de liaison fonctionnelle que Hicks
propose de réinterprétation dans un cadre d’équilibre générale simplifié qui va prendre la
forme de modèle IS-LM.
- 22 -
Section 2 : L’interaction entre le marché de la monnaie et marché des biens et services
Celle ci apparaît dès la théorie générale de KEYNES, d’où son titre : Théorie générale de
l’emploi, du revenu et de la monnaie. Il y donc une insertion monétaire, des influences
monétaires sur le circuit macroéconomique, cette insertion doit se faire selon KEYNES par le
biais du taux d’intérêt et c’est pour cette raison que la fonction d’investissement adoptée par
KEYNES est une fonction en terme de rentabilité car un élément déterminant du calcul de cette
rentabilité est justement le taux d’intérêt pratiqué sur les marchés qui selon KEYNES est
directement influencé par l’offre de monnaie.
Les indications données par KEYNES pour associer la monnaie au circuit macroéconomique
des biens et services sont assez compliquées et les disciples directs de KEYNES ont donc
cherché un modèle simplifié qui rendrait compte avec un minimum de raisonnement de cette
interaction de la monnaie et des biens et services et ils ont proposé un modèle célèbre dit
modèle IS-LM.
§1. La constitution du modèle IS-LM
Le point d’ancrage est la théorie de l’investissement proposée par KEYNES, sa
caractéristique est exprimée en terme de rentabilité mais plus particulièrement la notion
d’efficacité marginale de l’investissement, rentabilité qui décroît avec le montant de
l’investissement
Plus l’investissement est élevé, plus l’efficacité
marginale est faible.
Cette courbe est une courbe psychologique
liée à la rentabilité des investissements des
investisseurs et elle se déplace selon le degré de
pessimisme et d’optimisme des investisseurs.
Mais à un moment donné du temps il existe une
courbe qui reflète l’état psychologique des investisseurs sur le moment et on considère que
sur la base de cette courbe les investisseurs vont décider de réaliser tous les investissements
dont l’efficacité est égale ou supérieure au taux d’intérêt de marché
Si rn = an alors le montant de l’investissement réalisé sera égal à In, avec un taux d’intérêt
fixé par le hasard.
Si rx = ax alors le montant de l’investissement réalisé sera égal à Ix, avec un taux d’intérêt
fixé par le hasard.
On peut donc refaire ce graphique en utilisant r :
Si nous ne connaissons pas le montant du taux
d’intérêt, nous n’avons plus de niveau
d’investissement bien déterminé, mais nous savons
que cet investissement sera d’autant plus important
que le taux d’intérêt sera plus bas sur le marché.
Autrement dit, nous avons une infinité de
niveaux d’investissement possibles, qui les relie
chacun de manière particulière au taux d’intérêt.
- 23 -
Dans un cadre keynésien d’économie fermée (sans échanges extérieurs), et où on néglige
l’intervention des variables budgétaires, nous savons que l’équilibre sur le marché des biens et
services va se faire à un niveau de revenu tel qu’il y a égalité entre l’investissement et
l’épargne.
Nous pouvons visualiser ce phénomène en considérant que le montant de l’épargne va
dépendre du montant du revenu, et on peut donc représenter ce montant d’épargne dans le
graphique du niveau d’investissement relié au taux d’intérêt en indiquant que l’épargne ne
sera pas sensible au taux d’intérêt mais va dépendre du montant du revenu :
Un produit faible va déterminer un montant faible d’épargne, et inversement.
S1, S2, S3 correspondent à des niveaux de taux d’intérêt associé au niveau du Revenu
National. En représentant dans le revenu, on a donc :
Egalité entre Yo et Yd, et les points sont différents selon le niveau de taux d’intérêt, avec un
revenu d’équilibre plus ou moins élevé.
On a une situation indéterminée : jusqu’ici, on raisonnait avec un niveau d’équilibre du
produit unique généré par un niveau d’investissement unique, et par la fonction de
consommation, on trouvait un niveau de revenu d’équilibre unique.
Désormais, on a une infinité de revenus nationaux du fait de l’infinité d’investissements
possibles puisque chaque niveau d’investissement est fixé par un niveau de taux d’intérêt,
qui lui, n’est pas fixé.
On a donc un niveau différent selon le taux d’intérêt.
Il faut souligner que la courbe IS va en réalité se déplacer dans le cadre graphique selon le
degré d’optimisme ou de pessimisme des investisseurs, puisque cette situation psychologique
- 24 -
des investisseurs va générer une fonction d’investissement différente, et il y a donc un
déplacement possible et parallèle à la courbe IS.
Si les investisseurs sont optimistes, la courbe se déplace vers le haut ; s’ils sont pessimistes,
elle se déplace vers le bas.
Par ailleurs, en étudiant le modèle du circuit élargi, modèle qui intègre les variables
internes et les variables externes, nous avons admis que l’intégration de ces variables ne
changeait pas fondamentalement le mode de détermination du produit national par le circuit
macroéconomique.
Simplement, si on élargit le nombre de variables, on a plus d’égalité entre épargne et
investissement, mais égalité entre l’ensemble des sources autonomes, et l’ensemble des fuites
du circuit.
Pour changer l’aspect général de la courbe, on peut raisonner sur la courbe XIG – MST.
La courbe IS détermine quasiment la courbe XIG –
MST, puisque seule l’investissement est sensible au
taux d’intérêt.
Cette indétermination de l’équation sur le marché des biens et services n’est intéressante que
parce qu’elle donne la possibilité d’insérer dans l’équation macroéconomique le jeu de
l’équilibre monétaire.
On a un équilibre entre la masse monétaire offerte et la masse monétaire demandée.
Avec Keynes, on parle de L : quantité de monnaie demandée, à mettre en parallèle à M :
quantité de monnaie offerte.
La quantité de monnaie offerte M est une quantité autonome du système, puisque l’offre
de monnaie est considérée comme financée par les autorités monétaires, et c’est donc en fait
la donnée la plus externe de l’équilibre économique.
M est donc arbitraire et déterminé par la politique monétaire. En revanche, L apparaît
comme une véritable fonction qui présente une double détermination :
1) l’une par le niveau du produit national.
2) L’autre par le taux d’intérêt.
1) Pour ce qui est du revenu national, on a L(Y) qui est rattaché à la nécessité de disposer
d’un stock minimal de monnaie pour assurer des transactions sur le marché des biens et
services. Donc plus la quantité de monnaie est élevée, plus la quantité de monnaie nécessaire
pour effectuer les transactions est élevée (COLBERT, KEYNES).
2) Mais, et c’est là l’intérêt du modèle keynésien, L manifeste une sensibilité au niveau du
taux d’intérêt, selon un raisonnement simplifié par les disciples de KEYNES, qui est que
- 25 -
lorsque le taux d’intérêt diminue, les agents économiques sont plus incités à placer la
monnaie dont ils disposent sous forme d’achats financiers rémunérés n’ayant plus le caractère
de monnaie, et ainsi plus le taux d’intérêt est faible, plus la détention d’encaisses monétaires
sera forte et donc plus la demande de monnaie L sera forte. Les disciples keynésiens
qualifient alors de Demande spéculative de monnaie cette partie de la demande de monnaie,
partie sensible au taux d’intérêt.
On a désormais 2 variables qui déterminent le niveau de la Demande Globale de monnaie et
qui sont :
- la variable revenu national
- et le taux d’intérêt qui joue en sens inverse.
+ -
L(Y,i)
Graphiquement, on a :
Pour un niveau M, on va avoir une demande L
d’équilibre, selon le niveau du taux d’intérêt et le
montant du revenu national.
On peut alors retrouver le montant du revenu :
Cette courbe LM assure le niveau de revenu pour r
et Y qui repose sur M, M étant invariable.
En superposant les 2 courbes IS et LM, on aboutit au modèle de Hicks-Hansen, qui est :
Du fait de la contrainte M, on va avoir un certain
niveau de revenu et du taux d’intérêt qui vont
être déterminé.
Yo =Yd
M est déterminé par r2 et Y2
- 26 -
Nous pouvons aisément constater que la courbe LM est croissante par rapport au revenu. De
même la courbe IS est décroissante par rapport au revenu. C’est cela qui explique qu’il y ait
un équilibre.
La courbe IS est en pratique considérée comme la courbe XIG – MST
Yo – cYo (demande induite) = I + G + X
La forme générale de cette courbe est donnée par la pente de l’investissement plus ou moins
pentue selon que l’on est en économie ouverte ou en économie fermée.
Cet équilibre simultané qui va s’établir, avec un taux d’intérêt et un revenu d’équilibre,
signifie qu’il y a interaction entre le marché des biens et services et le marché de la monnaie.
Le taux d’intérêt d’équilibre résulte tout autant du marché des biens et services et aussi du
marché de la monnaie. De manière complémentaire, le produit d’équilibre résulte du
comportement des marchés des biens et services et du comportement du marché de la
monnaie.
A l’équilibre : Yo = Yd
M =L
{ Y-cY = I(r)
{ M = L(Y,r)
Solution = {(réq,Yéq)}
Ce modèle n’est pas donné par KEYNES qui n’acceptait pas cette interdépendance, mais par un
de ses disciples anglais : HICKS. Ce modèle a par la suite été (mal) interprété par un
économiste américain : A.H. HANSEN.
On parle alors tantôt du modèle IS-LM ou du modèle HICKS-HANSEN.
Dans ce modèle, comme dans le modèle d’équilibre walrasien, il y a un équilibrage simultané
des marchés qui détermine les deux inconnues : le produit national et le taux d’intérêt
d’équilibre.
Ce modèle est fondé sur un certain nombre de structures caractéristiques de l’économie :
- la fonction d’investissement I(r),
- la fonction de consommation (C(cYo)),
- la fonction de demande de monnaie L(Y,r),
- la fonction d’offre de monnaie M étant exogène, devenant le seul élément autonome.
Avec le modèle élargi du type XIG-MST, on va réintroduire une ou deux variables
autonomes : le montant des exportations (X) et les dépenses gouvernementales (G).
- 27 -
Dans le modèle réduit IS-LM, il n’y a que la fonction d’investissement, de consommation et
de demande de monnaie. La quantité de monnaie disponible semble être la véritable
déterminante de l’équilibre économique.
Si la quantité de monnaie est modifiée, l’équilibre va se trouver à son tour modifié.
Par exemple, si on augmente M, on va avoir un déplacement de la courbe de LM en LM’ (cf.
graphique précédent). Il y a alors un déplacement en terme de taux d’intérêt et de revenu.
Cette variable monétaire est une variable macroéconomique qui est contrôlée par l’autorité
monétaire. Le graphique IS-LM indique que la politique monétaire a une action extrêmement
forte sur le niveau de produit national et sur l’emploi. C’est sur ce point que l’interprétation
de HANSEN va s’efforcer de réduire le rôle de l’action monétaire pour affirmer la primauté de
la politique budgétaire (dans le cadre de IS-LM).
Comment peut-on introduire la politique budgétaire dans ce graphique ?
Qu’il s’agisse de la courbe LM ou de la courbe IS, l’action budgétaire va avoir pour effet de
provoquer un déplacement de la courbe dans l’espace graphique. Il s’agit de ce fait d’une
modification des fonctions qui régissent l’égalité sur le marché des biens et services. Cela
signifie que la courbe IS peut être représentée à un moment donné dans l’espace graphique
mais qu’elle doit subir des déplacements sous l’impact de la politique économique, mais aussi
sous l’impact des changements de comportements des agents économiques.
On pourrait remarquer également que la courbe LM peut connaître un changement dans
l’espace graphique à la suite d’une modification des comportements des demandeurs de
monnaie, la masse monétaire restant quant à elle identique.
La courbe IS peut être déplacée à une courbe I’S’ et
ceci, pour un assez grand nombre de raisons :
- parce que les investisseurs sont devenus plus optimistes et qu’ils ont relevé le niveau de
l’efficacité marginale de l’investissement ; à taux d’intérêt identique, on a un plus haut
niveau d’investissement.
- parce que les consommateurs épargnants ont décidé d’accroître leur propension à
consommer ; et ainsi de réduire leur tendance à l’épargne.
- parce que l’État a adopté une politique budgétaire ou fiscale en faveur de l’investissement.
La courbe IS peut donc se déplacer, soit par l’action des agents privés, soit par l’action de la
politique adoptée par l’État.
En admettant que les comportements des agents ne changent pas, il semble que l’action
monétaire aboutisse nécessairement à accroître le produit national d’équilibre lorsqu’il y a
une augmentation ou permette de réduire ce produit national d’équilibre lorsque l’offre de
monnaie est contractée (cf. LM’’ sur l’avant dernier graphique).
En d’autres termes, la politique monétaire semble constituer l’instrument d’action le plus
directement efficace, soit pour relancer l’activité de l’économie, soit pour combattre des
tensions inflationnistes.
- 28 -
§2. L’évolution du rôle de la politique monétaire dans le modèle IS-LM
De manière contradictoire, l’interprétation proposée par HANSEN au lendemain de la Seconde
Guerre Mondiale tend à réduire ou même à annuler l’influence de la politique monétaire sur la
conjoncture économique.
Le premier effort de démonstration consiste à montrer que la politique monétaire ne peut pas
provoquer une évolution expansive de l’économie parce que les conditions concrètes
d’application de cette politique ne sont pas conformes au cadre théorique de IS-LM. L’intérêt
est plus considérable maintenant.
A l’époque de HANSEN, dans les pays anglo-saxons, les taux d’intérêt étaient très bas. Or il
semblait que les changements possibles de taux d’intérêt, sous l’influence d’une politique
monétaire expansive, ne pouvait pas influer sur l’état de l’économie. Ils variaient de 1.5 à 3%,
soit à un niveau peu supérieur à ceux actuels. Cela signifiait qu’une baisse supplémentaire des
taux d’intérêt aurait une amplitude insuffisante pour agir sur le comportement des
investisseurs. Pour ceux-ci, le coût du financement est devenu très faible et leur décision
d’investir va dépendre de leurs perspectives de débouché (perspectives de croissance
économique).
Tout se passe comme si la courbe IS était verticale à ces niveaux de taux.
Quand on passe de LM à LM’, cela ne change rien
au niveau du produit national : seul r baisse. Cela ne
sert donc à rien de baisser le taux d’intérêt.
Une deuxième approche consiste à mettre l’accent sur l’existence d’une trappe à liquidité qui
correspond à la partie quasi horizontale de la courbe LM qui exprime que les demandeurs de
monnaie sont prêts à conserver en encaisses monétaires la totalité de l’offre de monnaie
lorsque le taux d’intérêt est inférieur à un certain niveau.
L’offre de monnaie est accrue, et on va donc avoir un
déplacement de la courbe vers la droite mais il n’y
aura pas de décalage aux niveaux bas de taux
d’intérêt, l’accroissement de M n’apporte alors
aucun changement quant au produit d’équilibre qui
reste le même.
Dans des périodes de faible taux d’intérêt (2ème
Guerre Mondiale), on peut constater une rigidité de
la décision d’investissement par rapport à des changements à la baisse du taux d’intérêt.
- 29 -
Cependant, on constate aussi que les banques centrales ne parviennent pas à provoquer une
baisse sensible du taux d’intérêt en dessous d’un niveau minimum.
Dans ce cas, la trappe à liquidité rend insensible à l’économie un changement de la quantité
de monnaie : ni le taux d’intérêt ni le niveau de revenu ne change (aspect expansif).
A la fin des années soixante, les taux d’intérêts sont remontés et on s’interroge sur la
capacité de la politique monétaire à assurer la lutte contre les tendances inflationnistes (de
plus en plus marquées à cette époque).
Conclusion : la politique monétaire serait en fait incapable de lutter contre ces
tendances inflationnistes car elle serait incapable de contrôler l’offre de monnaie.
Ceci est avant tout le fait des banques commerciales contrôlées par les banques centrales au
niveau de la liquidité des banques commerciales et en limitant la capacité de ces banques pour
limiter l’offre de monnaie.
Cette thèse a été développée dans le rapport RADCLIFFE fait au parlement anglais en 1959.
Ce rapport exprime les changements dans les conditions de fonctionnement des banques
commerciales qui expliqueraient la capacité des banques commerciales à limiter l’offre de
monnaie.
Les banques commerciales peuvent mettre à disposition des agents privés toute une gamme
d’actifs liquides, au sein desquels la monnaie proprement dite, la monnaie moyen de paiement
ne représente qu’une fraction qui peut être réduite sans porter atteinte à la liquidité effective
des agents privés.
Or, traditionnellement, les banques centrales s’efforcent de contrôler le stock de monnaie
proprement dit en agissant sur la liquidité des banques. Ce faisant ils ne réduisent pas la
liquidité de l’économie, ni la capacité des banques à maintenir ou développer leur capacité de
crédit.
Il y a donc toujours le
même niveau de crédit et
donc de création de
monnaie à cause des actifs
liquides non monétaires
.
La liquidité reste donc
toujours la même malgré
la politique restrictive.
Il y a un fond de réalité dans ces critiques. C’est pourquoi, depuis le rapport RADCLIFFE, le
concept de stock monétaire de référence s’est transformé en concept de liquidité de
l’économie. On est passé d’un concept de masse monétaire M au concept de masse monétaire
M1, M2, M3. Les banques centrales surveillent soit M2, soit M3, M1 étant insuffisant pour
contrôler la liquidité de l’économie.
- 30 -
On peut modifier très légèrement les taux d’intérêt, ce qui permettait de provoquer un
déplacement entre la monnaie et les autres actifs liquides non monétaires.
En réalité, il paraît difficile d’admettre que l’action d’une banque centrale puisse être
réellement inefficace car la réduction de la liquidité des banques (par le jeu des réserves
bancaires) finit toujours par être efficace et par réduire la capacité de crédit du système
bancaire. Il suffit d’imposer aux banques des réserves spécifiques, non seulement sur la
monnaie, mais également sur les actifs liquides non monétaires.
Si l’on s’intéresse à la capacité d’action expansive des banques centrales :
- la notion de trappe à liquidité n’a pas beaucoup d’importance ;
- il faut s’inquiéter de la capacité de l’économie monétaire à stimuler l’économie lorsque les
taux d’intérêt ont atteint un niveau très faible (cf. Japon où les taux sont presque nuls). La
banque centrale ne peut alors plus agir.
Lorsque les taux d’intérêt ont atteint un niveau relativement élevé, l’action monétaire est
efficace, mais au bout d’un délai d’au moins six mois avant qu’il y ait une réponse de
l’économie.
Si on accepte la situation actuelle, on est amené à considérer qu’en fait, depuis les années 70,
dans le cadre IS-LM, c’est plutôt la politique monétaire qui va se révéler efficace alors que la
politique budgétaire va se heurter à des difficultés croissantes. La principale difficulté est
l’endettement très important de l’État qui lui interdit d’augmenter les dépenses, même lorsque
cela lui serait nécessaire compte tenu de la faiblesse de la conjoncture et tout particulièrement
de l’investissement.
On s’est interrogé sur la répartition au sein du modèle IS-LM, à travers la politique monétaire
et budgétaire, et on aboutit à une sorte de répartition des tâches selon le régime monétaire
extérieur de la zone monétaire considérée.
§3. La place relative des politiques monétaires et budgétaires selon le régime de change
extérieur
Le modèle MUNDELL-FLEMING (prix NOBEL 1999) présenté dans les années 1962 – 63
propose d’utiliser de manière implicite le modèle IS-LM (de la manière suivante) :
I – S = XIG - MST
- 31 -
Dans un système de change fixe, la ligne BB signifie que l’équilibre extérieur de la balance
des paiements du pays dépend des mouvements de capitaux qui peuvent entrer et sortir
librement du pays considéré. Ce qui va déterminer s’ils vont entrer ou sortir, c’est l’écart entre
les taux d’intérêt à l’intérieur et à l’extérieur du pays.
En pratique, le taux intérieur va s’aligner sur le taux du marché international. S’il était
supérieur au taux d’intérêt international, il y aurait une entrée massive de capitaux dans le
pays, ce qui par la suite ferait baisser les taux dans ce pays. Réciproquement, s’il était
inférieur, il y aurait une sortie massive de capitaux, ce qui ferait par la suite augmenter les
taux dans ce pays, les agents préférant avoir un dividende plus élevé.
Dans un système de change fixe, on aurait 1$ = 1 €, avec une parité irrévocable, comme à
l’époque de la 2nde guerre mondiale jusqu’à 1973.
Dans ce cadre, il y a une volonté dans le pays d’augmenter le produit national d’équilibre
(point E) et d’obtenir ce résultat soit en utilisant la politique monétaire, soit en utilisant la
politique budgétaire.
La politique monétaire provoque un déplacement de la courbe LM de façon à obtenir la
courbe L’M’.
La politique budgétaire, par le biais d’un accroissement des dépenses publiques, provoque un
déplacement de la courbe IS de façon à obtenir la courbe I’S’.
Supposons que l’on utilise la politique monétaire : la banque centrale accroît l’offre de
monnaie M en élargissant la liquidité des banques. Nous passons à L’M’, et IS reste
inchangée. Ce déplacement aboutit à un nouvel équilibre (point G).
Ce point provoque une sortie massive de capitaux parce que les taux d’intérêts sont
inférieurs dans le pays. La banque centrale doit fournir sur le marché des changes les
monnaies étrangères qui sont demandées pour faire des transferts de capitaux vers les
économies étrangères. Ce faisant, la banque centrale est amenée à réabsorber les liquidités
qu’elle avait émises précédemment puisqu’elle reçoit des moyens de paiement qui
proviennent de la circulation monétaire interne, avec pour résultat une contraction de la
courbe L’M’. Du fait de la perte de liquidité, l’équilibre sera ramené sur la ligne LM au point
E, équilibre d’origine.
Conclusion du modèle : en situation de change fixe, la banque centrale perd l’essentiel de
son pouvoir monétaire et ceci est vrai également de son pouvoir de contraction de la
masse monétaire.
Examinons l’impact d’une politique budgétaire qui consisterait en un déplacement de IS en
I’S’.
Cette fois ci, il n’y a pas de politique monétaire d’accompagnement. Il y a donc un nouveau
point d’équilibre F qui correspond à un accroissement du produit national, mais à une
augmentation des taux d’intérêt internes très au-dessus du niveau des taux d’intérêt sur le
marché international.
Il doit donc y avoir une entrée massive des capitaux dans le pays considéré (pour obtenir une
meilleure rémunération), et cette fois, il y a sur le marché des changes une forte demande sur
le marché national, ce qui oblige la banque centrale à acheter les devises des monnaies
étrangères offertes sur le marché des changes pour acquérir de la monnaie nationale.
Pour réaliser cette opération, la banque centrale fournit des liquidités en monnaie nationale et
ces liquidités sont transférées par leur détenteur aux banques commerciales qui vont donc
élargir l’offre de monnaie de l’économie.
- 32 -
Résultat : la courbe LM se trouve déplacée vers L’M’. Un équilibre se rétablit au point H qui
correspond à l’équilibre interne L’M’ et à l’équilibre externe selon la ligne BB.
Le point H traduit la réussite de la politique budgétaire qui a provoqué une hausse
importante du produit national qui est compatible avec l’équilibre des paiements extérieurs.
Ceci explique que la thèse monétariste développée dans les années soixante (école de Chicago
avec notamment Milton FRIEDMAN), selon laquelle la politique monétaire perd sa capacité
d’action quand on est dans un système de change extérieur fixe ou rigide. Ce qui les a amené
dans les années 60 à préconiser l’abandon des changes fixes pour rendre à la politique
monétaire sa capacité d’agir sur l’économie et notamment sa capacité à combattre les tensions
inflationnistes.
Le vœu monétariste a été accompli en 1973 avec l’abandon des taux de changes fixes compte
tenu du fait que l’on ne parvenait plus à maintenir ces taux sur le marché des changes
internationaux.
En cas de changes flexibles, la parité entre les diverses monnaies, parité €uro / $, se fixe en
permanence en continu sur le marché des changes, de façon à équilibrer les offres et les
demandes d’une monnaie par rapport à une autre.
Or, et c’est un point non évident, le modèle FLEMING considère que ce qui détermine avant
tout la monnaie d’échange, c’est le mouvement des capitaux : si les capitaux affluent dans la
zone euro, la valeur de l’euro augmente par rapport au $, et inversement, si il y a une sortie de
capitaux, la valeur de l’euro diminue comparé au $.
Les mouvements de marchandises n’ont pas en eux-mêmes une incidence sur le taux de
change et seuls les mouvements de capitaux influent, la conséquence étant que les
mouvements de marchandises vont être influencés par la parité de change mais n’auront quant
à elles aucune influence sérieuse sur ces parités de change.
La politique monétaire, en change fixe, se révèle inefficace, au contraire de la politique
budgétaire qui tend à provoquer un déplacement du Produit National en hausse.
Supposons, dans un cadre de change flexible, l’utilisation de la politique budgétaire qui
provoque un déplacement de la courbe IS en I’S’ avec un nouvel équilibre qui s’établisse au
point caractérisé par un taux d’intérêt supérieur au taux international. Ceci va provoquer un
déplacement des capitaux vers le pays qui pratique cette politique budgétaire, et par voie de
conséquence, la valeur de la monnaie va alors augmenter par rapport aux monnaies des autres
pays.
Cette situation va avoir une conséquence directe qui est une déterminante des échanges de
marchandises vers l’étranger : le niveau des exportations va diminuer consécutivement à la
hausse de la valeur de la monnaie, les produits nationaux étant trop chers par rapport aux
produits étrangers, et parallèlement, les produits étrangers vont être importés, étant à des prix
plus faibles qu’auparavant.
Une des sources (X) de l’équilibre macroéconomique voit son débit diminuer, tandis
qu’une des fuites voit son volume augmenter (M). On a donc un retour de la courbe I’S’ vers
la courbe IS.
- 33 -


XIG – MST  retour à IS.
La courbe LM ne connaît aucun déplacement car la banque centrale n’intervient plus sur
le marché des changes, car l’autorité n’achète plus de monnaie pour équilibrer la parité
officielle entre la monnaie nationale et la monnaie internationale, qui va s’équilibrer entre les
offreurs et les demandeurs.
On repasse donc du point F au point E et il n’y a donc aucun effet de la politique
budgétaire sur le niveau du produit national en cas de changes flexibles.
Supposons maintenant une politique monétaire expansive qui va déplacer la courbe LM
vers L’M’.
On aboutit alors à un nouvel équilibre.
Les grands pays de la zone euro sont en difficultés budgétaires, avec des déficits
considérables, et ils ne peuvent pas se permettre de stimuler l’économie par une augmentation
de leurs dépenses budgétaires, trop élevées par rapport aux règles posées dans le cadre de la
zone euro.
Selon la règle d’HAAVELMO, en augmentant les impôts et les dépenses, il est probable que
cette mesure soit efficace puisque la réduction d’impôts stimulerait l’épargne, et non pas la
demande des consommateurs.
Cette technique serait favorable à la demande. Le niveau des impôts est déjà tel qu’une
augmentation sensible de ces impôts, même avec une augmentation des dépenses publiques,
serait impossible à réduire davantage.
On essaie ici de montrer la signification du modèle IS-LM dans des situations différentes
en les adaptant. Il faut alors tenir compte des taux de change qui sont soit flexibles, soit fixes,
et ce dans le cadre IS-LM.
- 34 -
Section III. La prise en compte des effets prix dans les modèles de Demande Globale,
sensés déterminer le niveau d’équilibre macroéconomique.
Que l’on soit dans un modèle keynésien simple, avec simplement l’association des
fonctions de consommation et d’investissement ou que l’on soit dans un modèle un peu plus
développé (IS-LM), on raisonne sur la formation d’un équilibre macroéconomique qui
détermine le niveau du Produit National de manière nominale.
Le produit national d’équilibre qui intéresse les économistes n’est pas simplement le niveau
nominal, mais plutôt ce qui résulte des niveaux de Produit National, une fois éliminé par le
calcul l’effet d’une hausse des prix d’une période à l’autre, et on a alors l’évolution du Produit
National Réel.
Or, l’approche keynésienne initiale, même dans le modèle IS-LM, n’a pas grand chose à
dire sur la variation des prix associée à la formation de l’équilibre macroéconomique.
Remarque : on peut penser que si l’équilibre macroéconomique tend à se faire au-delà de la
capacité de production de l’économie, tout le supplément de produit national enregistré par les
statistiques traduira simplement une augmentation de prix, d’où l’idée d’écart inflationniste
qui traduit ce décalage entre le Produit Réel maximal que l’on peut créer, et le produit
nominal plus élevé enregistré par les statistiques de la Comptabilité Nationale.
Reprenons le modèle IS-LM.
L’équilibre réel ne peut pas se faire au niveau du
produit potentiel, et il y a donc exigence de
hausse de prix dans l’économie.
Yéq = Produit potentiel + niveau de l’inflation
(=écart inflationniste)
A l’inverse, la politique budgétaire provoque une entrée de capitaux dans le pays
considéré, et il en résulte un affaiblissement de la monnaie nationale, dépréciation qui rend
les produits nationaux plus attractifs que les biens étrangers, leurs prix étant inférieurs aux
prix des biens étrangers, les exportations vont alors augmenter, et les importations vont se
contracter. Les produits nationaux valent alors moins chers que les produits étrangers.


XIG – MST
On a un déplacement de la courbe IS
vers I’S’
On arrive alors au point d’équilibre H
qui correspond au point de liaison
entre la nouvelle courbe I’S’ et la
ligne BB d’équilibrage de la BP du
pays considéré.
En change fixe, la courbe L’M’ était
instable parce qu’affectée par les
- 35 -
mouvements d’offre et de demande sur le marché des changes.
Ici, la Banque Centrale n’intervient plus sur le marché des changes, et elle ne va donc pas
fournir de devises sur le marché des changes pour permettre la sortie de capitaux, et ne va
donc pas supprimer de liquidité interne à l’occasion de la vente de ces devises.
Ceux qui veulent exporter des capitaux devront trouver des agents privés qui acceptent de
leur céder des devises en échange de monnaie nationale. C’est pour les inciter à faire ces
opérations que le prix des devises va monter sur le marché des changes, mais il n’y aura pas
eu pour autant de contraction de la monnaie nationale en circulation dans l’économie.
En situation de change flottant, la politique monétaire se révèle particulièrement efficace
pour agir sur l’équilibre macroéconomique, tandis que la politique budgétaire se révèle en
principe inefficace pour remplir cette fonction d’influence sur l’équilibre macroéconomique.
Il est à remarquer que cette approche intéressante n’est pas aussi simple dans la pratique
concrète de l’activité économique :
- les mouvements de capitaux ne sont pas aussi directement influencés par les écarts de taux
d’intérêt.
- les marchés des changes ne sont pas toujours flexibles, et il y a une intervention des
banques centrales pour influer sur les parités de change.
- en ce qui concerne les pays de la zone euro, on a en fait une double situation troublante :
- la zone euro étant en situation de change flottant à l’égard des autres monnaies
internationales ($, Yen, Franc Suisse, Livre anglaise,...), la politique budgétaire bénéficie des
avantages des changes flottants ;
- mais la politique budgétaire est propre à chaque pays de la zone, et tout se passe comme
si la politique budgétaire se situait dans un cadre de change fixe à l’intérieur de la zone
puisque la plus grande partie des échanges extérieurs de ces pays se réalisent avec d’autres
pays de la zone euro, à l’égard desquels l’autorité monétaire se rééquilibre à une situation de
change fixe. La zone bénéficie donc des avantages de la politique budgétaire et monétaire en
change fixe.
On est alors ramené à une réflexion dans un cadre keynésien, et on a le sentiment que si le
produit d’équilibre est inférieur au produit potentiel, il n’y a pas d’écart inflationniste et il n’y
a donc aucune raison macroéconomique pour que le niveau des prix augmente dans
l’économie considérée.
Cette augmentation de prix va nécessairement se produire dès que le produit d’équilibre tend
à excéder le produit potentiel, et la différence entre les deux ne pourra être traduite qu’en
terme de hausse des prix.
Conséquence : il semble donc qu’il ne peut pas y avoir de hausse des prix au niveau
macroéconomique lorsqu’il y a simultanément eu sous-emploi des capacités productives, et
tout particulièrement lorsqu’on est en situation de sous-emploi de la force de travail de
l’économie.
Chômage et hausse de prix devraient donc être incompatible dans cette optique.
De la même manière, il semblerait que les salaires ne puissent augmenter qu’une fois que les
taux de salaires ont augmenté dans l’économie. On aboutit donc à une solution du « tout ou
rien » qui ne correspond pas dans l’absolu à la réalité économique telle qu’enregistrée par la
politique des prix ou dans la Comptabilité Nationale.
- 36 -
Autrement dit, pour continuer à raisonner dans un cadre macroéconomique où la Demande
Globale est déterminante, il faut découvrir une technique permettant d’introduire des effets
prix alors même que l’on n’est pas en situation de plein-emploi total.
Cette possibilité n’est pas facile à découvrir mais il se trouve qu’un économiste NéoZélandais a proposé en 1958 une formule graphique représentée par la Courbe de PHILLIPS
qui va relier les changements du niveau de sous-emploi sur le marché du travail et les rythmes
de variation du salaire nominal.
PHILLIPS va proposer une liaison continue entre ces deux variables.
§1. Présentation de la courbe de PHILLIPS.
Au fur et à mesure que le marché du travail se rapproche du plein-emploi, les salaires tendent
à augmenter de plus en plus vite ; et inversement, si le sous-emploi augmente d’une manière
importante, le niveau des salaires va alors pouvoir baisser (de manière très limitée). On voit
donc que cette représentation graphique donne à l’approche IS-LM keynésienne la possibilité
d’expliquer simultanément l’évolution du Produit National Réel, et l’évolution des prix qui lui
est en général liée.
Résultat (en 2 étapes) :
Tout d’abord rejet de KEYNES de la courbe de PHILLIPS qui considère que celle-ci ne
correspond pas aux phénomènes keynésiens.
Ensuite, les keynésiens vont regretter cet instrument qui leurs permettrait de rapprocher la
politique économique d’action contre la hausse des prix et vont alors l’adopter.
Cette dynamique n’est pas vraiment comparable à la dynamique actuelle du marché du travail
car on est dans une période où dans le marché économique, les prix sont relativement stables,
et il n’y a donc pas de tendance particulière à la hausse des prix sur le marché des biens et
services.
Ceci correspond à une négociation salariale qui se fait à un niveau de prix constant sur le
marché du travail. C’est pourquoi on considère que lorsqu’il y a une hausse de prix, celle-ci
est liée à une hausse des salaires (niveau de hausse des prix plus rapides qui correspond à un
déplacement vers le haut de la courbe). Mais tout ceci va être approfondi ultérieurement.
La courbe de PHILLIPS est compatible avec une situation dite de stagflation, situation où on a
à la fois hausse des prix, et un niveau de sous-emploi élevé. Or, cela signifie que les agents
anticipent la hausse des prix, et que les contrats salariaux intègrent cette hausse des prix sous
forme de hausse équivalente des salaires.
Si le marché du travail était moins tendu, on devrait assister à une hausse des salaires plus
grande que la hausse des prix, et ceci maintiendrait la logique de la courbe de PHILLIPS.
Contrairement aux hypothèses keynésiennes standards, le marché du travail est un marché
qui réagit au rapport entre l’offre et la demande de travail. Le prix du travail va donc
augmenter ou diminuer selon l’état de ce rapport.
PHILLIPS estime qu’on peut mener une politique économique éclairée par cette courbe, à
condition de prendre en compte le fait que depuis le milieu du XXème siècle, l’économie est
animée d’un mouvement de croissance de la productivité du travail qu’il évalue à environ 2%
- 37 -
par an. Ces gains de productivité permettent alors de connaître la transmission du mouvement
des salaires aux mouvements des prix.
Ainsi, en maintenant le taux de sous-emploi à 2,5%, on devrait constater une hausse des
salaires de 2% par an, mais cette hausse des salaires serait entièrement compensée, et l’impact
de la hausse des salaires sur la hausse des prix est alors nul.
PHILLIPS introduit par cette conception l’idée d’un menu de politiques économiques qui fait
un choix entre d’une part le sous-emploi et d’autre part la hausse des prix.
Un taux de sous-emploi d’environ 2,5% avec une stabilité relative des prix simultanée
serait alors un idéal impossible à atteindre (sauf à la limite au Luxembourg). Il est donc
nécessaire d’accepter un certain niveau de chômage pour avoir une stabilité des prix.
§2. Les controverses soulevées par la courbe de PHILLIPS.
Article publié en 1958, s’intitulant « Relations entre sous-emploi et le taux de changement des
taux de salaires nominaux », étude faite en Grande-Bretagne sur la période 1861-1957.
Cet article présente la possibilité ouverte par le Royaume-Uni qui s’explique par le niveau de
chômage caractérisé par le niveau de sous-emploi montré par les syndicats de travailleurs
anglais sur l’évolution des salaires et des prix sur cette période.
L’ajustement le plus caractéristique porte sur les années 1861-1913 qui présente une
courbe continue - (tandis qu’après 1915, et particulièrement pendant les périodes suivant les
guerres, on constate des phénomènes de perturbations dont les causes sont complexes mais
qui tiennent à des accords nationaux entre gouvernements et syndicats pour fixer la hausse des
salaires) - où, au contraire, on assiste à des ajustements rapides des salaires à la suite de
phénomènes d’inflation d’origine internationale.
Pour des raisons multiples, la période antérieure à la première guerre mondiale permet de
sortir une courbe cohérente avec la théorie de PHILLIPS.
La thèse de PHILLIPS permet de retrouver dans les périodes antérieures la logique de la
courbe de PHILLIPS, logique perturbée par des chocs politiques et économiques graves,
dissimulant les distances de cette courbe.
De 1861-1913 donc (PHILLIPS a écarté quelques années lorsque la hausse des prix à
l’importation était supérieure en Grande-Bretagne à 2,5%), l’Angleterre fonctionne avec un
système de libre-échange et les prix à l’exportation sont ... ???
Qui constituent un élément important dans les achats des salariés. PHILLIPS considère que
lorsqu’il y a une forte poussée des prix sur les produits achetés par les salariés, il y a des
ajustements de salaires demandés par les salariés qui sont indépendantes de la situation du
marché du travail.
Ceci montre que dès la conception initiale de la courbe de PHILLIPS, on a deux éléments
retenus dans la détermination des salaires nominaux :
- il y a ... ??
- il y a de manière indépendante, la variation du niveau des prix dont les salariés
demandent compensation pour maintenir leur niveau de salaire réel.
- 38 -
PHILLIPS aboutit alors à la courbe suivante qui correspond aux liens entre la variation du taux
de salaire et du taux de sous-emploi en Grande-Bretagne au cours de la période 1861-1913.
L’hypothèse de cette courbe est la suivante : il y
a un lien causal entre taux de sous-emploi et
rythme de hausse du salaire nominal. Le lien
correspond à une courbe simple. Il se produit
une hausse supplémentaire des salaires lorsque
le marché de l’emploi est au-delà de 5,5%. On a
alors une zone de quasi-stagnation du salaire
nominal, avec ensuite une légère tendance à la
baisse de ce salaire nominal d’un ½ % quand le
taux de sous-emploi est de l’ordre de 10%.
(chiffres non adaptés au graphique ci-contre)
De nombreuses critiques vont alors être formulées par rapport à la courbe de PHILLIPS :
Pour les keynésiens, les salaires nominaux ne peuvent augmenter qu’une fois atteint le
stade de plein-emploi, et ils soulignent que c’est à cause de cela justement que les prix
restent stables jusqu’à l’obtention du plein-emploi sur le marché du travail.
Au contraire, les keynésiens refusent l’idée que les salaires nominaux puissent diminuer
lorsqu’il y a aggravation du sous-emploi.
Cette position doctrinale n’est cependant pas très sérieuse car on constate en réalité qu’il y a
des variations de salaire avant obtention du plein-emploi intégral, et c’est ce caractère
aberrant de la doctrine keynésienne initiale qui a permis son rejet assez rapide, puis
finalement l’adhésion des keynésiens à la courbe de PHILLIPS qui leur est apparue assez
rapidement comme un complément utile de leur approche par la Demande Globale.
Pour les monétaristes de l’Ecole de Chicago (dont FRIEDMAN), la courbe de PHILLIPS est
une sorte d’artefact statistique qui consiste à interpréter abusivement un nuage de
points comme une courbe continue décroissante.
- 39 -
Il y a une droite verticale qui correspond à une ligne tirée à partir du taux de sous-emploi
structurel de l’économie, et il y aurait association d’une hausse des salaires plus ou moins
rapide avec un taux de chômage identique dans l’économie.
Selon les monétaristes, il existe à un moment donné un niveau de sous-emploi qui reflète les
disfonctionnements structurels d’une économie, résultant de la rigidité des différents marchés,
et notamment du marché du travail (insuffisance de souplesse), et par la présence de syndicats
(manifestation collective et non pas individuelle), mais provenant aussi du fait que l’offre de
travail ne correspond pas à un moment donné de manière qualitative à la demande de travail
(travailleurs non formés pour les tâches disponibles) et on a donc toujours une très forte
adaptation qui reflète ce taux de chômage structurel.
On peut cependant s’écarter temporairement de ce taux de chômage structurel lorsqu’il y a
une variation du salaire réel. Lorsque le salaire réel (=salaire nominal – inflation) diminue, le
sous-emploi va diminuer, mais le phénomène est temporaire car les salariés exigent le
rétablissement de leur salaire réel.
Inversement, le sous-emploi peut augmenter de manière importante lorsque le salaire réel
augmente trop fortement. On rattache en général ce mouvement de salaires réels à des
mouvements imprévus du niveau des prix, ces mouvements n’ayant pas été anticipé, les
agents économiques, notamment les salariés, n’ont pas pu les compenser dans leur contrat.
Selon les monétaristes, PHILLIPS a donc tort d’interpréter ses résultats comme il le fait.
La critique des monétaristes est un peu ambiguë puisqu’elle fait appel à des phénomènes
de hausse des prix plus ou moins rapide que justement PHILLIPS s’était efforcé d’éliminer pour
rétablir sa courbe qui normalement doit être conçue dans un cadre de stabilité anticipée des
prix. Ce qui fait que le salaire réel évolue alors moins vite qu’il ne devrait, ce qui peut
permettre une diminution du sous-emploi.
- 40 -
Cependant la principale critique adressée à la courbe de PHILLIPS, c’est
l’incompatibilité de la logique de cette courbe et la situation de stagflation de ces annéeslà, c’est à dire le constat d’une forte hausse de prix alliée à un niveau élevé de sous-emploi.
Selon ces critiques, l’existence d’un sous-emploi important devrait provoquer la stabilité
ou même la baisse des salaires nominaux, et ceci devrait entraîner sinon une stabilité complète
des prix, du moins un niveau très faible de hausse de prix, et il ne devrait donc pas y avoir
d’inflation.
Pour PHILLIPS, les années de forte hausse de prix était écartée du tracé de sa courbe parce
que, en fait, une forte hausse de prix détermine une hausse des salaires nominaux,
indépendamment de l’état de tension du marché du travail.
La théorie est donc très simple : on va considérer l’évolution du salaire nominal (hausse en
% du taux de salaire ẇ).
ẇ = ṗ- α.μ
Stagflation : si on a une très forte hausse des prix, cette hausse entraîne une hausse du taux de
salaire quelque soit l’état du sous-emploi dans l’économie.
En période d’hyperinflation, on ne parvient plus à faire apparaître de liaison entre les
salaires nominaux et la situation du marché du travail, car cette forte hausse des prix perturbe
le fonctionnement de l’ensemble des marchés, et notamment du marché du travail.
En revanche, en période de hausse des prix modérée, on admet qu’il existe une liaison
entre l’évolution des salaires nominaux et l’évolution de la situation du marché du travail
tantôt nette, tantôt cette évolution n’est pas nette.
On admet donc qu’il existe une courbe de PHILLIPS qui a une importance significative sur la
formation de l’équilibre macroéconomique.
§3. L’intégration de la courbe de PHILLIPS dans le cadre néo- keynésien et la politique
qui en découle.
La courbe de PHILLIPS initiale va se trouver ici transformée sous forme d’une liaison entre le
rythme de hausse des prix et le niveau du produit national. En effet, à un moment donné, le
niveau du produit national va déterminer un certain niveau d’emploi, et l’impact de la courbe
de PHILLIPS sur l’évolution du niveau des salaires va entraîner un mouvement d’évolution
des prix consécutif à ce rythme d’évolution des salaires.
Le principal créateur de cette approche est Charles LIPSEY, qui va décider de transformer la
courbe de PHILLIPS et de l’intégrer dans le modèle économique.
Yf est le produit potentiel de l’économie qui correspond à la capacité normale de
fonctionnement de l’économie. Quand on va au-delà, il est difficile d’augmenter la
production.
On a deux situations :
Soit on est en deçà de Yf : le rythme de hausse des prix tend à décélérer mais il le fait
lentement de manière progressive.
- 41 -
Soit on est dans l’autre sens ( au-dessus de Yt) : il y a une brutale accélération de la hausse
des prix lorsqu’on dépasse le niveau du produit potentiel Yf.
Dans cette approche néo-keynésienne, on
fait le constat suivant :
Il y a le rythme de hausse des prix qui est
établi quand l’économie est équilibrée pour
un niveau donné du produit potentiel. On
peut se demander à quoi correspond cette
hausse des prix qui ne semble pas résulter
d’une impulsion en présence des forces
macroéconomiques.
C’est ce qui est appelé l’inflation de noyau, ce qui signifie qu’à un moment donné il y a un
rythme de hausse des prix caractéristique dont les agents estiment qu’il va se perpétuer en
l’absence de phénomènes nouveaux dans l’économie.
Ce rythme d’inflation est donc intégré aux anticipations des agents, aux contrats qu’ils vont
passer entre les périodes et qu’ils projettent sur le futur.
Si l’économie restait à son niveau de produit potentiel ce taux d’inflation tendrait à perdurer
par une sorte d’inertie de la vie économique mais on voit que l’économie peut s’en écarter
lorsqu’il y a un changement dans l’équilibre macroéconomique : si la demande globale tend à
fixer l’équilibre au-delà du produit potentiel, il y a une forte augmentation de hausse des prix
attribuée à la demande globale, et on va avoir une inflation due à cette demande.
L’approche néo-keynésienne introduit un
3ème élément : l’effet de choc (pétrolier par
exemple). A côté de l’inflation de noyau et
l’inflation de la demande, il peut apparaître
une inflation de choc qui va s’ajouter ou se
soustraire à la hausse de l’inflation à
n’importe quel endroit de la courbe.
ṗ= ṗn + ṗd + ṗc
Conformément à la suggestion initiale de PHILLIPS, la composante d’inflation de la demande
apparaît comme un reflet en terme macroéconomique de la courbe de PHILLIPS, et le niveau
de produit national ou le niveau de sous-emploi ne font que moduler le rythme total de la
hausse des prix déterminé de manière exogène par l’inflation intégrée aux anticipations des
agents.
- 42 -
Il existe cependant une dynamique de la variation des prix qui peut être commandée par la
gestion de la demande globale, et qui va progressivement modifier les anticipations des
agents.
Autrement dit, à un moment donné, il y a un rythme de hausse des prix qui s’impose à
l’économie, mais les autorités économiques peuvent agir sur la demande globale pour influer
sur ce rythme de hausse du niveau général des prix.
On peut alors introduire le schéma néo-keynésien proprement dit, caractérisé par 2 étages :
On a donc une économie qui est à un niveau d’équilibre, mais qui, selon l’état des choses, a
hérité d’un rythme d’inflation de noyau, et elle est face à un niveau d’inflation qui ne peut ni
s’aggraver ni se réduire tant que l’on est au niveau de l’équilibre macroéconomique.
Si l’on admet qu’il y a un rythme d’inflation relativement élevé que l’on souhaite réduire, on
peut agir par une politique monétaire sur LM ou par une politique budgétaire sur IS. On passe
alors à LM’ avec un niveau de produit national en deçà du produit potentiel, et ce faisant on
crée une situation de chômage, d’accentuation du sous-emploi dont le but est de réduire la
hausse des prix.
On peut se demander si le coût à payer n’est pas élevé car on voit que cette réduction de
prix est limitée, et il est très difficile et très lent d’obtenir une réduction significative de
l’inflation par une action macroéconomique de la Demande Globale. Ceci est un constat
commun des keynésiens et des monétaristes.
L’idéal serait de ne pas avoir à appliquer cette politique de contraction de la demande globale,
et qu’il n’y ait donc pas d’inflation de noyau dont la période a hérité. Or, si on a une inflation
de noyau importante, ceci est peut être du à une politique macroéconomique intérieure qui
s’est efforcée de fixer le niveau du produit national au-delà du produit potentiel qui aurait été
provoqué par une hausse importante du taux d’inflation.
LM’’ avait provoqué antérieurement un produit National au-delà du Produit potentiel, qui va
provoquer une hausse importante de l’inflation.
On retrouve le problème d’asymétrie de la courbe de PHILLIPS :
- 43 -
- lorsqu’on augmente le produit national au-delà du produit potentiel par une expansion de
budget IS, on provoque une hausse rapide des prix.
- lorsqu’au contraire on contracte le produit national à un niveau au deçà du produit potentiel
par une politique restrictive monétaire, on a une hausse moins rapide de l’inflation.
Si on observe une poussée autonome de la demande, caractérisée par une variation positive de
l’investissement, de la consommation, et une augmentation des exportations, on va passer à
IS2 avec un nouveau point d’équilibre caractérisé par un produit d’équilibre au-delà du produit
potentiel caractérisé par une asymétrie. On a donc une crise de l’emploi caractérisée par un
manque de travailleurs.
Cette hausse de prix devrait suffire à ramener l’équilibre dans la mesure où la hausse des prix
réduit la valeur réelle de la quantité de monnaie offerte et va entraîner une contraction de la
courbe LM1 qui va nous ramener dans l’hypothèse la plus simple à un nouveau point
d’équilibre sur la courbe LM2. L’économie va alors être ramenée à sa situation antérieure, la
contraction de la quantité réelle de monnaie venant compenser la poussée de la demande, et
l’économie retrouve son équilibre au niveau du produit potentiel.
Autrement dit, et c’est un paradoxe apparent, la poussée inflationniste déclenchée par la
hausse de la demande globale est elle-même anti-inflationniste car elle vient supprimer l’effet
de la poussée de la demande globale. C’est là une des vues de l’analyse économique.
Il est assez fréquent que les autorités monétaires acceptent de compenser la contraction de la
quantité réelle de monnaie en augmentant leur offre nominale de monnaie. Dans l’hypothèse
où elle maintient ainsi le niveau de l’offre réelle de monnaie, l’économie reste sur la courbe
LM1 et l’équilibre macroéconomique se maintient dans la zone d’accélération de la hausse
des prix. C’est ce que l’on peut représenter par le graphique située sur la page suivante.
La banque centrale compense alors la perte de quantité réelle de la monnaie, et la courbe
LM1 va rester à son niveau antérieur du fait de la compensation interne d’offre de monnaie
m0 .
- 44 -
Le rythme de hausse des prix va augmenter de manière sensible, c’est à dire importante, et
cette hausse des prix qui s’impose aux agents économiques comme une nouvelle situation va
provoquer une très forte tension sur les salaires, les prix, etc… ceux-ci étant poussés à la
hausse.
Poussée autocorrectrice de la
demande
Ceci entraîne un problème : on ne revient pas au produit potentiel Yf et l’économie s’installe
donc durablement sur un rythme de hausse des prix plus rapide. Tous les contrats vont donc
être passés sur la base d’un rythme de hausse des prix p1, et cela signifie que la courbe H1 va
se déplacer en H2, une nouvelle courbe plus élevée. H2 traduit l’intégration par les agents
économiques d’un nouveau produit d’équilibre potentiel qui traduit le niveau élevé
d’inflation. Si la banque centrale continue à compenser l’offre de monnaie, l’équilibre se fait
non plus sur p1 mais sur p2, l’horizon des agents économiques se fait alors sur une hausse des
prix sur H2, de l’ordre de 6% dans l’exemple. La courbe H2 va alors se déplacer à nouveau
sur H3, et le processus va alors s’accélérer, la hausse des prix étant de plus en plus forte d’une
période à l’autre, et ce tant qu’il existe une volonté des banques centrales de maintenir un
équilibre entre produit d’équilibre et de produit potentiel.
On a donc un système de progression systématique du niveau des prix.
Nous pouvons constater la présence d’un certain nombre d’inconnues : quel est l’horizon
d’ajustement des agents ? D’un trimestre, d’un semestre, d’une année à l’autre ? On ne le sait
pas.
En deux ou trois ans, on arrive à un rythme d’inflation à deux chiffres. On aboutit à une
hyper-inflation qui peut être de 100%, voire plus.
Cette évolution qui est tout à fait naturelle montre que la présence d’une courbe de PHILLIPS
en macroéconomie permet d’expliquer facilement le passage à des rythmes d’inflation de plus
- 45 -
en plus rapide lorsque l’équilibre macroéconomique est maintenu au-delà du produit potentiel.
Dans les pays développés, un rythme d’inflation à deux chiffres n’est pas accepté, et il faut
donc envisager une politique économique de lutte contre l’inflation ouverte. Et c’est là que la
dissymétrie de la courbe de PHILLIPS crée également une dissymétrie dans le rythme de
retour à un niveau faible d’inflation.
Inflation ouverte : on
accepte que la masse
monétaire soit contractée
pour revenir au produit
potentiel.
On a donc un équilibre du produit potentiel qui est rétabli. Donc l’inflation n’a ni tendance à
s’accélérer ni à diminuer. Cette inflation de 15% va demeurer stable tant qu’elle est au niveau
du produit potentiel car elle intègre alors les prévisions des offreurs et des demandeurs sur le
marché des biens et services. Pour provoquer une contraction de ce rythme d’inflation, il faut
provoquer une contraction du produit national en utilisant soit une politique monétaire soit
une politique budgétaire (IS3), qui va alors aboutir à un nouvel équilibre en deçà du produit
potentiel. Cette situation va provoquer un ralentissement de hausse des prix, soit une baisse de
l’inflation passant de 15% à un taux de 14%.
On peut penser que les agents sont moins sensibles à une baisse qu’à une accélération de
hausse des prix, et les agents, en intégrant ce nouveau rythme ralenti d’inflation, vont
raisonner sur une courbe HL plus basse que la courbe HK. On passe de 14 à 13%.
La courbe de PHILLIPS étant plate à ce niveau de produit d’équilibre, le rythme de
décélération des prix est alors très réduit (env.1%). En supposant que le rythme d’inflation
soit maintenu, on va alors avoir une baisse progressive de HL vers HM, les agents intégrant au
fur et à mesure l’origine de leurs prévisions d’inflation. Les contrats sont donc modifiés et on
arrive à une hausse de prix de 12%. A nouveau ils raisonnent en dessous du revenu potentiel
et il va y avoir un rythme de la hausse des prix qui va se réduire de manière beaucoup plus
faible qu’il ne s’est accéléré précédemment (i.e. une politique de déflation menée en
établissant l’équilibre du produit national en deçà du produit potentiel, donc en acceptant une
hausse importante du chômage). Une telle politique va être extrêmement lente quant aux
résultats obtenus alors qu’au contraire la politique d’inflation consistant à maintenir
- 46 -
l’équilibre du produit au-delà du produit potentiel provoque très rapidement une très forte
hausse de prix.
Morale : Si on ne veut pas avoir à provoquer une importante dépression économique pour
combattre une inflation ouverte, il faut éviter de provoquer cette inflation en opérant une
politique économique de poussée sur la demande car si cette poussée produit des effets
rapides sur les prix, l’effet de la politique inverse de contraction du produit va être
extrêmement lente pour ramener la hausse des prix à un rythme tolérable.
Il faut quatre à cinq ans pour provoquer une inflation proche des 20% en partant d’un rythme
initial de 2 à 3 % par an.
Par contre, il faut au minimum environ vingt ans pour revenir au rythme de départ de cette
inflation (soit de 20% à 2-3%).
Il faut donc vingt années de chômage accentué pour effacer l’effet d’un suremploi artificiel
qui aura duré quatre à cinq ans.
Les monétaristes de l’Ecole de Chicago qui avaient initialement rejeté la courbe de PHILLIPS
considèrent qu’elle est intéressante et qu’elle vient rendre compte de cette dissymétrie de
l’effet des politiques économiques sur les prix. Et finalement, au cours des années 70, les
modèles monétaristes ont systématiquement intégré une courbe de PHILLIPS, rejoignant ainsi
l’optique des néo-keynésiens ; au point d’ailleurs que, au terme d’interprétations théoriques,
les différences entre ces deux Ecoles ont pratiquement disparu.
Nous venons de traiter des constats inflationnistes. On devrait retrouver cette même
dissymétrie en se plaçant dans une situation différente et en admettant qu’il y a au départ, non
pas une poussée, mais une contraction de la demande.
Autocorrection légère
On a une hausse de la valeur
réelle de la monnaie du fait
de la baisse des prix. On va
avoir un déplacement de LM1
en LM3. Ceci provoque une
hausse du produit d’équilibre,
mais insuffisante pour revenir
à l’équilibre initial. Elle n’est
donc pas totalement auto
correctrice.
- 47 -
Les (néo)-keynésiens ont montré qu’il faut toujours une politique macroéconomique active,
qu’elle soit monétaire ou budgétaire pour rétablir l’équilibre macroéconomique au niveau du
produit potentiel lorsqu’il y a eu une contraction du produit national sous l’effet d’un choc qui
peut affecter aussi bien la courbe IS que la courbe LM.
NB : Un choc répressif ne peut pas être corrigé automatiquement.
Il est long et coûteux de ramener ce rythme de hausse des prix à un rythme faible considéré
comme normal.
Cet alignement des monétaristes sur les néo-keynésiens a provoqué une scission de l’école
monétariste, une partie des monétaristes considérant que l’aspect purement mécanique du
rythme de hausse ou de baisse de l’inflation ne rend pas compte du comportement possible
des agents économiques ; agents qui sont ouverts sur leur environnement économique et qui
peuvent rapidement réviser à la baisse comme à la hausse leurs anticipations à partir des
indications de la politique économique.
C’est l’Ecole des anticipations rationnelles des années 70 dans laquelle les agents voient
l’avenir. On a alors les monétaristes de Friedman et les monétaristes rationnels.
Les monétaristes de FRIEDMAN croient trop aux variables permanentes que sont le revenu
permanent (prend en compte l’expérience passée), l’inflation permanente (qui prend en
compte les expériences passées d’inflation avec la courbe H), ???
Dans l’optique des anticipations rationnelles, si les autorités économiques et monétaires
déclarent publiquement qu’elles ont décidé d’arrêter la dérive des prix (hausse de 15% des
prix) et qu’elles ont décidé de ramener cette hausse des prix à 2-3 % annuels et si en même
temps elles prennent des mesures concrètes, les agents vont anticiper ce retour à un rythme de
hausse des prix de deux à trois pourcents et ils vont passer leurs contrats sur cette base. Et à
l’idéal, l’équilibre sera retrouvé au niveau du produit potentiel avec un faible rythme de
hausse des prix.
Politique restrictive
On va réduire la quantité de
monnaie offerte pour atteindre
une hausse des prix de 2-3%.
Brusquement, on va arriver à
la courbe H3 en provenance
de H15 qui va se faire sans
changement de l’équilibre
potentiel à la suite uniquement
de
l’annonciation
d’une
politique restrictive, les agents
ayant
intégrés
à
leur
anticipation la hausse promise
et déclarée des prix de 2-3%
au lieu de 15%.
Cela ne pourrait marcher
qu’une seule fois, puisque les
agents, constatant que les
autorités
ont
mentis,
- 48 -
n’auraient alors plus confiance en elles.
Il n’y a pas de perte d’emploi, il n’y a aucun changement économique (le changement de taux
d’inflation est ici effectué toutes choses égales par ailleurs).
Ceci est envisageable à une condition : la politique annoncée doit être crédible (les autorités
monétaires prennent donc le risque d’un énorme taux de chômage si les agents économiques
n’alignent pas leurs anticipations sur le taux de hausse des prix annoncé).
C’est là l’objection qu’a fait Milton FRIEDMAN à la politique REAGAN des années 80, cet effet
d’arrêt fort de la hausse des prix va provoquer une hausse du chômage car les agents
économiques sont orientés vers le passé et on voit que croire à cette hausse faible des prix va
entraîner une gigantesque dépression.
L’expérience REAGAN est une expérience anti-monétariste et le brusque arrêt qu’elle a
généré a provoqué une situation de sous-emploi marqué pendant environ 2 ans, mais, très
rapidement, les agents se sont convaincus que les prix allaient être stabilisés. Ils vont donc
assez rapidement réviser leurs anticipations d’inflation. Il n’y a donc pas eu l’énorme
dépression prévue par Milton FRIEDMAN.
D’autres expériences du même type ont eu lieu précédemment dans les années vingt en
France pour remédier à une situation d’hyper-inflation, expériences soulignées par les
théoriciens des anticipations rationnelles. On est parvenu à provoquer un arrêt brutal de ces
dérives inflationnistes par le blocage de l’offre de monnaie avec un coût très limité en terme
de sous-emploi.
L’expérience allemande au lendemain de la seconde guerre mondiale : l’hyper-inflation va
être arrêtée brutalement. Cet évènement est aussi le point de départ d’une croissance forte
dans les 2 cas, et toutes ces expériences confirment qu’il est possible d’agir sur le niveau de la
courbe de PHILLIPS lorsque l’on convainc les agents économiques que le rythme d’inflation
va être modifié par les politiques économiques vers le bas.
C’est ce que refusent de croire les monétaristes friedmaniens, mais c’est ce que l’on constate
effectivement à différents occasions, et ceci réintroduit dans la réflexion macroéconomique le
rôle des anticipations des agents dans la formation de l’équilibre macroéconomique.
- 49 -
Section IV. Le rôle de l’anticipation des agents dans d’équilibre macroéconomique.
Ces anticipations sont partout dans ces analyses. Il y a deux catégories possibles : les
anticipations rigides (KEYNES, FRIEDMAN) et les anticipations souples (rationnelles, reflétant
la réalité des opinions des agents telles qu’on les enregistre par des indices d’opinion établis
en général sur une base mensuelle).
§1. Les anticipations de la théorie générale de Keynes.
Dans le modèle le plus simple de la théorie générale, il y a deux catégories d’agents :
- les investisseurs dont le comportement est fondé sur des anticipations
- et les ménages avec une fonction de consommation qui n’ont pas de véritables
anticipations car leur consommation est déterminée principalement par le niveau de revenu de
la période.
Rappel : Les investisseurs keynésiens ont un mode d’anticipation qui est extrêmement
instable car ils doivent raisonner sur une rentabilité à long terme de leurs investissements et
selon KEYNES, elles ne sont pas fondées sur des bases rationnelles. C’est donc leur degré de
pessimisme ou d’optimisme qui va déterminer le niveau de rentabilité supposé de leur
investissement. Les investissements seront donc rentables ou non-rentables.
L’instabilité macroéconomique est due à cette instabilité des anticipations des investisseurs.
On a beaucoup ironisé sur cette théorie de KEYNES dans laquelle la rentabilité à long terme
est source de révision permanent en hausse ou en baisse.
A l’inverse, les consommateurs ont une liberté de décision quant à leur PmC et leurs
anticipations optimistes ou pessimistes ont une grosse influence sur leur niveau de
consommation.
En revanche, il y a un troisième élément qui a une très grande importance dans la théorie
générale : ce sont les anticipations spéculatives et leur impact sur la demande de monnaie et
par là même sur le taux d’intérêt.
Dans l’interprétation IS-LM de HANSEN, le taux d’intérêt influe sur la demande de monnaie
en indiquant aux agents économiques si cela vaut la peine ou non de convertir une encaisse
monétaire en un placement rémunéré aux taux de marché.
Dans la théorie générale, KEYNES met l’accent sur la valeur des actifs financiers pour
déterminer la demande de monnaie.
On va se limiter aux actifs à revenus fixes que sont les obligations à long terme : la valeur de
chaque titre obligataire est profondément influencé par les changements dans le taux
d’intérêt.
Lorsque le taux d’intérêt augmente, les obligations à long terme se déprécient.
Lorsque le taux d’intérêt diminue, les obligations à long terme sont valorisées.
Le taux d’intérêt a donc une relation inverse avec le cours des titres.
Application numérique :
V = 10 / 10% = 100
- 50 -
Si i diminue, V augmente proportionnellement.
V = 10 / 5% = 200
1) si r*a > r ; ΔLsp > 0 ; Lsp > 0.
Si nous sommes dans une phase d’évolution économique caractérisée par une baisse assez
sensible du taux d’intérêt sur le marché (baisse de 5 à 4 % par exemple), les détenteurs
d’obligation constatent que actuellement, la valeur de leur obligation va augmenter. Ils ont
donc plusieurs possibilités : soit vendre leur obligation pour profiter de cette valorisation
(cette vente est justifiée si le taux d’intérêt baisse durablement…)
A l’inverse, si le taux d’intérêt passe de 4% à 5%, et se maintient à 4% pendant plusieurs
années, cette vente aura coûté des frais de transactions pour la vente puis pour racheter de
nouvelles obligations pour ne pas laisser l’argent inemployé ; et les acheteurs auront vendu
des actions à 4% pour acheter à 5%, leur revenu sera alors à peu près le même et la valeur du
capital sera restée à peu près la même, sauf qu’ils auront subi deux fois les frais de transaction
(une fois pour vendre les anciennes obligations et une autre fois pour en racheter de
nouvelles). Ils n’ont donc pas fait de gain et c’est une opération légèrement négative.
Si les spéculateurs éclairés vendent leurs obligation, cela veut dire qu’ils sont convaincus que
la baisse actuelle des taux d’intérêt sera temporaire, et donc que le niveau du taux d’intérêt
de marché va remonter d’ici quelques mois. Ils ont intérêt à convertir en monnaie leurs
obligations. La somme en monnaie reçue traduit alors le gain en capital par rapport à la
situation antérieure.
Ce que souligne KEYNES, c’est que la valeur de ce stock de monnaie ne sera pas modifiée
lorsque les taux d’intérêt remonteront. Le grand attrait du placement en monnaie est que ce
placement en monnaie a une valeur invariable en capital nominal.
Supposons que les spéculateurs aient raison, et que les taux d’intérêt remontent au bout de 3
mois, alors ils vont considérer qu’on va retrouver le taux d’intérêt initial, et ils vont donc
rétablir leur stock de monnaie. Après cette opération, ils auront un stock d’obligations dont la
valeur se trouvera accrue par la période initiale, et dont le revenu périodique est également
plus élevé.
Autrement dit, ce qui détermine l’action des spéculateurs sur les marchés, (arbitrage entre titre
et monnaie), c’est l’anticipation qu’ils ont sur l’évolution du taux d’intérêt de marché.
Le cas des anticipations rigides des spéculateurs : ils considèrent que le taux d’intérêt de
marché connu depuis un certain temps va perdurer et ils vont considérer que la baisse
enregistrée par le marché est purement transitoire, et c’est donc l’écart entre le taux d’intérêt
anticipé et le taux de marché qui détermine la demande spéculative de monnaie.
Dans ce cas, il y a une demande de monnaie positive puisque les
agents convertissent leurs titres en monnaie dans l’esprit de faire
l’inverse lorsque cela sera favorable. (Lsp >0)
2) si r*a = r ; ΔLsp = 0 ; Lsp > 0
- 51 -
Cas où le taux d’intérêt de marché est identique au taux de marché anticipé. Dans ce cas, que
ce niveau soit haut ou bas, il n’y a aucune demande spéculative de monnaie, et donc aucune
variation de la demande de monnaie. L’agent spéculateur conserve ses titres et n’exprime
aucune variation de la demande de monnaie (aucune variation de la masse monétaire).
3) si r*a < r ; ΔLsp < 0 ; Lsp = 0
Situation où le taux d’intérêt anticipé est nettement inférieur au taux d’intérêt de marché.
Cela veut dire que les spéculateurs sont convaincus que dans un délai de quelques mois au
plus, le taux d’intérêt actuel du marché va se trouver réduit et atteindra un niveau plus faible
que celui qu’anticipent les consommateurs.
Question : Qu’est ce que vont faire les consommateurs lorsqu’ils anticipent une baisse
du taux d’intérêt de marché ?
Réponse : Les spéculateurs vont acheter le plus possible de titres à revenus fixes car ils
s’attendent à la revalorisation qui sera constatée par le marché quand le taux d’intérêt aura
baissé. Dans ce cas, l’encaisse monétaire est systématiquement convertie en titres et l’offre de
monnaie excédentaire sur le marché de la monnaie qui a comme contrepartie une demande
monétaire de titres sur le marché des titres, le résultat étant une baisse accélérée du taux
d’intérêt de marché.
C’est l’hypothèse la plus intéressante où Keynes se pose la question du pouvoir de la politique
monétaire dans une situation où il y a une tendance à la formation d’un équilibre
macroéconomique de sous-emploi parce que le niveau d’intérêt est insuffisant pour assurer le
plein emploi.
La politique monétaire va consister à provoquer une baisse du taux d’intérêt sur les marchés
en développant l’offre de monnaie ; et c’est là que cette hypothèse va se heurter à l’hypothèse
des anticipations rigides de la part des spéculateurs.
Il y aura en effet une baisse initiale du taux d’intérêt obtenu par l’intervention de la banque
centrale, mais la suite dépend de la nature des anticipations des spéculateurs.
Si ceux-ci sont convaincus que le taux d’intérêt va remonter et qu’ils anticipent le maintien
des taux d’intérêt antérieurs, ils vont vendre systématiquement leurs titres longs et exprimer
par là une demande d’encaisses monétaires spéculatives qui va rapidement absorber l’offre de
monnaie supplémentaire.
Dans ce cas, les taux d’intérêt vont remonter au moins sur les marchés financiers.
L’intervention de la banque centrale se sera révélée inutile, le taux d’intérêt ne diminuant
pas, il n’y aura pas de reprise de l’investissement et l’économie retrouvera son équilibre en
situation de sous emploi.
KEYNES estime que c’est ce qui s’est produit au début des années trente quand les banques
centrales ont tenté de lutter contre les tendances dépressives où elles ont alors échoué face aux
attitudes spéculatives rigides.
Explication de KEYNES :
- 52 -
Toutes les banques centrales à cette époque sont des banques privées dotées de statuts
particuliers, mais étant des banques privées, elles ne peuvent pas se permettre de subir des
pertes en capital. Elles se refusent donc à prendre le risque d’offrir des liquidités en achetant
des titres long sur les marchés financiers (open-market).
Si elles étaient des banques publiques sans préoccupations de bilan, elles pourraient intervenir
de manière à convaincre les spéculateurs de façon à obtenir une baisse effective des taux
d’intérêts y compris sur le marché financier et ceci en achetant systématiquement tous les
titres long « offerts par les spéculateurs ».
Si elles montraient cette détermination, elles n’auraient aucun titre à acheter et les taux
d’intérêt baisseraient au niveau qu’elles auraient déterminé. Miracle facile à démontrer : si
les banques centrales affirmaient leur détermination, les spéculateurs vont réviser leurs
anticipations, et vont prévoir la réalisation à court terme d’un taux d’intérêt de marché
inférieur à celui constaté actuellement sur le marché (i.e. leurs anticipations de taux d’intérêt
vont devenir brusquement inférieures au taux d’intérêt du marché). Dans cette situation, non
seulement ils ne vont pas offrir de titres sur les marchés, mais ils vont en demander et ils vont
eux-mêmes provoquer la baisse du taux d’intérêt jusqu’au niveau prédéterminé par les
banques centrales.
Mais même s’ils ne sont pas demandeurs de titres, les offreurs vont garder leurs titres et sans
offre, les taux d’intérêt vont dégringoler jusqu’à atteindre celui des banques centrales
privées.
Pour ce faire, il faudrait que les banques centrales soient des organismes publiques.
C’est cette proposition de KEYNES qui a provoqué la vague de nationalisation des banques
centrales au lendemain de la seconde guerre mondiale. La nationalisation a aboutit dans
certains pays à la subordination des banques centrales aux ministères des finances. Il a fallu
dans les années 90 rendre aux banques centrales l’autonomie de décision, paramètre
primordial à leur efficacité.
- L’anticipation des salariés est rigide. En effet, selon KEYNES, sur le marché du travail
existe une anticipation rigide qu’est le maintien des salaires nominaux à leur niveau antérieur
(ne peut pas descendre en dessous de ce qu’il a atteint et constitue donc un cliquet).
Raison technique de cette anticipation :
Une baisse des salaires nominaux devraient commencer par une certaine catégorie de salariés
dans les entreprises les plus fragiles, mais comme les salariés vont refuser cette baisse car ils
estiment qu’elle ne devrait pas avoir lieu parce qu’ils anticipent le maintien des salaires
nominaux. Ils ne pourraient accepter une telle diminution uniquement si elle commençait par
une autre catégorie de salariés. Cette diminution ne peut donc avoir lieu et ne peut donc
commencer. L’anticipation des salariés fait que le salaire nominal ne peut pas diminuer sur le
marché du travail. C’est donc bien l’anticipation des salariés sur le maintien du salaire
dominant qui fait que le salaire ne peut pas baisser.
Pour KEYNES, il n’y a qu’une seule solution :
- 53 -
Lorsque l’équilibre macroéconomique de plein emploi exige une diminution du salaire réel, il
faut provoquer une augmentation du niveau général des prix qui n’entraîne pas de diminution
du salaire nominal mais qui réduit le salaire réel. Cette solution est plus facilement acceptée
par les salariés qui ne se rendent pas compte, ceux-ci raisonnant sur leur salaire nominal.
C’est la seule solution pour que la baisse de salaire soit acceptée.
La courbe de PHILLIPS développe deux objections à cette thèse de KEYNES développée dans
La Théorie Générale.
(i) On constate historiquement une légère baisse du salaire nominal quand le taux de chômage
atteint des niveaux élevés. Cette baisse est de 0.5% lorsque le taux de chômage est de 10%.
Cette diminution faible du salaire nominal montre bien qu’en pratique KEYNES a raison et
qu’il y a une opposition quasi absolue de l’ensemble des salariés à une baisse des salaires
nominaux.
Conséquence : un minimum d’inflation est nécessaire au fonctionnement de l’économie
puisqu’il y a des secteurs de l’économie où l’emploi doit diminuer, d’autres où l’emploi doit
augmenter, et comme on ne peut diminuer les salaires dans les secteurs en déclin, il faut
provoquer le déplacement en augmentant les salaires dans les secteurs en expansion. Les
salariés vont alors vouloir travailler dans les secteurs en expansion.
Une inflation de 2 à 3 % semble presque nécessaire compte tenu de la rigidité des salaires
nominaux.
(ii) PHILLIPS affirme que le marché du travail en général prend en compte la hausse des prix
et tend à provoquer une augmentation plus rapide du salaire nominal pour un taux de chômage
donné. C’est ce qui est confirmé dans les phases de stagflation. On constate donc que les
salariés sont en général tout à fait sensibles aux questions du pouvoir d’achat. Ils exigent le
maintien du pouvoir d’achat dans la mesure du possible, et en général, ils obtiennent gain de
cause dans tous les secteurs sauf ceux qui sont déprimés.
KEYNES dit que lorsqu’ils cherchent à obtenir le maintien de leur pouvoir d’achat lorsqu’il y
a une forte hausse de prix, les salariés ont tendance à perdre de vue qu’ils ont droit à une part
des gains de productivité de l’économie.
Il est possible qu’il y ait une certaine perte de prévision des variables réelles pour les salariés
quand la hausse des prix est relativement forte, limitée seulement au maintien du pouvoir
d’achat. Ils ont tendance à exiger une hausse de leurs niveaux de salaires réels.
On a donc rigidité du salaire nominal, rigidité des anticipations des spéculateurs, et on
constate que l’approche des keynésiens et des monétaristes tend à concevoir les agents
économiques comme des agents relativement irrationnels qui sont tournés vers leur
expérience passé, et qui projettent sur l’évolution proche les tendances observées par le passé.
Ceci est vrai soit en niveau (Keynes), soit en terme de taux d’inflation (Néo-keynésiens et
monétaristes).
Il en résulte de graves dangers lorsque l’on veut mener une politique économique qui rompe
avec le passé, notamment dans la lutte contre l’inflation, avec un risque de rupture entre les
mesures brutales qui sont prises et le maintien durable d’une anticipation de forte hausse de
prix. Le risque est une grave dépression économique.
Qu’advient-il si l’on écarte cette hypothèse d’anticipations rigides ?
§2. La thèse des anticipations adaptatives : les anticipations rationnelles
- 54 -
A. Les hypothèses de rationalité des agents économiques appliqués à leurs anticipations.
Cette idée a été affirmée par l’économiste John MUTH (1961) qui a proposé l’hypothèse des
anticipations rationnelles qui fut réalisée à la suite d’une étude tout à fait pratique de
l’évolution des prix industriels. Il a en effet constaté que les industriels prévoyaient eux
même l’évolution des prix industriels, certes avec des évolutions assez considérables mais que
ces erreurs n’avaient aucun biais systématique (tantôt des prévisions de prix trop élevés, tantôt
des prévisions de prix trop faibles). En moyenne, leurs prévisions de prix étaient bonnes.
Il en résulte un moyen de coïncidence entre les prix prévus et les prix réalisés sur les marchés.
Or, ces résultats prévisionnels ne pouvaient être dépassé par d’autres états de l’analyse
économique.
Les prévisions des industriels sont donc au moins aussi bonne que les modèles complexes de
l’analyse économique et en tout cas bien meilleures que les modèles simples.
Aucun industriel n’aurait l’idée d’acheter des prévisions sur l’évolution des prix à un agent
extérieur !
Conclusion de John MUTH :
Ces industriels sont à l’évidence des agents rationnels, intéressés par ces prévisions. Ils font
des efforts pour s’informer sur tous les éléments qui influent sur l’évolution des prix, et grâce
à cela, ils obtiennent les prévisions les meilleures possibles.
Dans ce domaine, il n’y a donc pas d’anticipation rigide, et il n’y a donc pas de biais
systématique. On considère donc que ces anticipations sont rationnelles et parfaitement
adaptées à l’objet sur lequel elles portent.
Contrairement à ce que dit une autre partie de l’Ecole de Chicago représentée par Simon, ce
qui caractérise l’économie, c’est la rationalité. John MUTH considère que au cours des années
70, on a transféré la notion d’anticipations rationnelles de la microéconomie vers la
macroéconomie.
B. L’application en analyse macroéconomique
La mise en cause des fonctions macroéconomiques de type keynésien est une réflexion sur 2
domaines :
- l’impact de l’inflation et
- l’impact de la politique monétaire sur l’équilibre macroéconomique.
La première approche a un effet dévastateur sur la notion même de modèle économétrique tel
qu’il était connu dans les années 70. Ces modèles prétendent prévoir l’évolution économique
à partir de centaines et de milliers d’équations obtenues par un ajustement sur certains liens
entre variables enregistrés par les domaines statistiques. On pensait que sur la base d’une
inflation stable, on pouvait prévoir l’évolution économique à partir d’hypothèses sur quelques
variables considérées comme exogènes.
Yt+1 = F(Yt, Xt+1, θ)
θ est un coefficient stable ; ici, on a un nombre de 100 fonctions différentes qui représentent le
nombre de coefficient θ.
Yt est constaté à partir des relevés statistiques.
C = B + cY
- 55 -
On a donc une variable exogène qui correspond au schéma keynésien :Y = I / (1-c)
Dans les années 70, Robert LUCAS a souligné que ces modèles économétriques ne pouvaient
pas fonctionner car ils supposaient des agents réagissant de manière mécanique aux
changements dans les variables de leur environnement.
On considère que les variables autonomes changent de 10 à 20% et on considère que les
coefficients de transmission θ qui traduisent la réaction des agents aux modifications de la
variation ne changent pas.
Dans un cadre d’anticipations rationnelles, ceci est inadmissible car on ne peut pas concevoir
l’existence de coefficients fixes. Les agents vont en effet modifier ces coefficients pour
s’adapter aux changements de leurs variables d’environnement.
C’est ainsi que les consommateurs vont réagir différemment à une même variation de leur
revenu selon qu’ils anticipent un accroissement du chômage dans l’économie ou au contraire
une baisse du chômage dans l’économie.
On ne peut donc pas considérer que des coefficients de liaison entre variables constatées dans
le passé restent valables dans un autre environnement car les agents économiques tendent à
s’adapter à ce nouvel environnement.
Plus particulièrement, l’hypothèse des anticipations rationnelles a été transférée au domaine
de la politique monétaire conformément au principe dit « d’invariance ».
Ce principe a été énoncé en 1976 par deux économistes relativement connus : SARGENT et
WALLACE. « Une variation anticipée de l’offre de monnaie est sans effet sur l’équilibre
macroéconomique. »
La raison simple en est que si les agents constatent que l’offre de monnaie est fortement
accrue par la politique monétaire, ils prévoient que l’inflation va augmenter et
immédiatement, ils intègrent à leurs contrats une hausse de l’inflation ce qui laisse leurs
contrats en terme réel inchangés.
Corollaire :
Une politique monétaire n’a un effet macroéconomique réel que si elle provoque un
changement de la masse monétaire qui n’est pas anticipé par les agents. En effet, dans ce cas,
les agents passent leur contrat sur la base du taux d’inflation qui résulte de l’offre de monnaie
(qui est connue).
La banque centrale ne change pas sa politique, et elle crée une offre de monnaie plus forte. De
ce fait, les acheteurs payent moins cher qu’ils ne devraient les biens et les services qu’ils
achètent et le taux d’inflation devient alors inférieur au taux d’intérêt nominal. Il y a alors
une possibilité d’accroissement de l’emploi, et par la même de la production, les agents
n’ayant pas pu anticipé cette hausse inattendue de l’offre de monnaie.
Pour être efficace, il faut donc mentir, ceci n’étant possible qu’une fois car ensuite on a une
perte de crédibilité. Les agents vont alors essayer de se prémunir en suivant ce qu’elle fait et
non ce qu’elle dit.
Les agents économiques sont en effet censés être rationnels dans leurs anticipations et leurs
comportements et ils cherchent à anticiper l’avenir de manière à s’y adapter le mieux possible.
Il est évident qu’un tel comportement ne permet plus de considérer le processus
macroéconomique comme un processus purement mécanique.
Il faut faire place à ces anticipations des agent qui jouent un rôle essentiel dans la formation
de leur comportement.
- 56 -
Ces anticipations sont-elles cependant toujours rationnelles ?
Il est nécessaire de tenir compte de ces anticipations et même si on admet qu’elles ne sont pas
rationnelles, on doit être attentif à celles-ci quand on envisage l’évolution à court terme de
l’économie.
C. L’utilisation de ces anticipations comme instrument de prévision.
La voie qui est explorée depuis une vingtaine d’années consiste, plutôt que de recourir à des
modèles économétriques, en des enquêtes de conjoncture dont le noyau essentiel est constitué
par une enquête auprès des chefs d’entreprise pour connaître l’évolution de leur production
telle qu’ils l’envisagent dans l’année à venir.
Le rôle des prévisionnistes est de transformer ces anticipations en agrégats
macroéconomiques. C’est une tâche difficile car ces prévisions ne sont pas directement
additionnables (ce sont des données qualitatives qu’il est nécessaire de transformer en
données quantitatives).
On essaye donc de les confronter aux prévisions probables des exportations qui ne sont que
les conséquences de la prévision de noyau des investisseurs. On a une hypothèse forte qui est
la rationalité des anticipations des chefs d’entreprise. Ce qu’ils espèrent obtenir à partir de ces
enquêtes, ce sont les prévisions de retournement conjoncturel.
Le gros problème rencontré est que si les chefs d’entreprises sont des agents rationnels on va
passer brusquement d’une croissance rapide à une croissance faible, comme les chefs
d’entreprise n’ont pas d’anticipations rigides car à tout moment, ils révisent leurs anticipations
à partir des données dont ils disposent (en particulier avec leur carnet de commande). Cela
veut dire qu’ils changent aussi rapidement que nécessaire leurs anticipations et que des
entreprises peuvent très bien prévoir 1 mois après un arrêt de la croissance car les données ont
changé.
Ceci explique pourquoi on révise en permanence les prévisions. Mais d’un autre côté, on ne
peut pas prolonger ce changement de prévision car il est fortement possible que les prévisions
des chefs d’entreprise changent de nouveau quelques mois après.
Par exemple en France, il y a eu un brusque pessimisme des chefs d’entreprise à la fin de
1998, puis un nouvel optimisme à partir du deuxième semestre, celui ci étant de courte durée,
on le qualifie de « trou d’air ». Dominique STRAUSS-KAHN a réussi néanmoins à maintenir
les prévisions de croissance pour 2003.
Lorsque pour les uns et les autres (consommateurs et producteurs) il y a pessimisme, on ne
peut plus penser qu’il y a un simple trou d’air et on dira plutôt qu’il y a un ralentissement
marqué de l’activité économique.
La loi d’Okun :
Mécanisme pour former la courbe H, courbe de formation des prix, en relation avec la courbe
de Philips.
Okun : 1928 – 1980
Il s’est intéressé à la notion de produit potentiel.
- 57 -
Constat statistique : de la période d’après guerre, en moyenne, chaque changement en
pourcentage dans le sous emploi au dessus de 4% a été associé avec une décroissance de 3%
dans le produit national réel.
Okun transforme cette réflexion en l’établissement d’une liaison entre rythme de croissance
du produit national et l’évolution du taux chômage constaté dans l’économie.
Quel rythme de croissance il faudrait pour réduire chômage ?
France : croissance de 2,4% (2004) comme en 2004 ne permet pas de baisser le taux de
chômage.
Il y a dans l’évaluation économique un rythme de croissance neutre en terme d’évolution du
taux de chômage si l’économie croît plus rapide le taux de chômage diminue. Si le produit
national croît en dessous de ce rythme le taux de chômage va augmenter. C’est là que l’on
voit la notion de produit potentiel qui est une notion dynamique quasiment.
Le produit potentiel va varier d’une période à l’autres sous l’effet d’un facteur essentiel étudié
sous l’angle de l’offre qui est la croissance de la productivité par heure travaillées. Cette
croissance suffit à elle seule pour provoquer une croissance du produit national avec un
niveau d’emploi constant, donc si le produit national n’augmente pas alors que la productivité
augmente, le taux de sous emploi va augmenter, et il faut en principe que la croissance
produite soit plus rapide que la croissance de la productivité pour que l’emploi augmente.
C’est cette règle qui est derrière la loi d’Okun qui indique que la baisse de sous emploi va se
faire dès lors que la croissance du produit potentiel > à la croissance de la productivité. Ce qui
fait que cette loi n’est pas d’une stabilité satisfaisante est que le rythme de croissance de la
productivité n’est pas régulier, il varie d’une année à l’autres et modifie le rapport entre le
taux de croissance du produit et l’évaluation du taux de sous emploi.
Malgré cette instabilité on a pu établi r une sorte de loi statistique d’Okun qui pour les années
70, 80 et 90 aurait l’aspect suivant :
3,2% de croissance du produit => pas de variation
du taux de sous emploi
∆Y (%)
∆u = α + β g β > 0
6
2
Loi statistique d’Okun
0
-2
∆u
-4
-2
-1
0 1 2
Ce qui donne la formule : y = 3,2 - 2∆u
∆u = ½ (3,2 – y) = 1,6 – ½ y
Cette loi importante est néanmoins anormale dans son expression puisque le lien n’est pas
entre la croissance du produit et le taux de sous emploi mais entre la croissance du produit et
la quantité de force de travail employé. Ce qui détermine le nombre d’heure travaillées c’est
d’abord le rythme de croissance de la productivité (si elle augmente rapidement il faut plus
d’homme) et par ailleurs 2ème incertitude qui tient au fait que la quantité d’homme travail va
varier de manière compliquée mais on voit que si la croissance du produit est rapide une
tendance se manifeste à augmenter le nombre d’heure de travail/ personne employée, ne
serait-ce que par l’augmentation d’heure supplémentaire. Enfin il y a un autre élément
important qui est l’évolution d’une période à l’autre de la population active c'est à dire censée
- 58 -
pouvoir travailler. Si cette population augmente le taux de chômage va être plus élevé pour un
rythme de croissance donné du produit national.
Il y a une multitude de raisons pour que le lieu entre le rythme de croissance du produit
national et le changement du niveau de sous emploi ne puisse pas correspondre à une loi
statistique stable, formulable. Or il y a une certaine régularité dans ce lieu même s’il se trouve
perturbé en plus ou en moins dans certaine période. On a constaté aux EU que certaines
années avec un taux de croissance rapide du produit national, le taux de sous emploi ne
diminuait pas parce que la productivité augmente fortement qu cours de cette année, alors que
l’année suivante malgré un ralentissement de la croissance, le sous emploi baisse de manière
importante parce que la productivité par heure travaillées n’augmente pratiquement pas.
Dans les années 2000 malgré un taux de croissance élevé > 5%, le taux de sous emploi ne
variait pas et il s’est mis à baisser quelques semestres plus tard lorsque la croissance de la
productivité s’est ralentie. Liaison instable d’une période à l’autre mais loi qui est une
évidence pour les économistes. C’est le rythme de croissance qui détermine le niveau du taux
de sous emploi ou les variations de ce taux de sous emploi, car la loi d’Okun reconnaît qu’il y
a pour chaque économie à un moment donné un taux de sous emploi structurel qui à
l’inadaptation relative de l’offre de travail au type d’emploi disponible dans l’économie, on a
une inadaptation du stock de capital à l’offre de travail disponible dans l’économie.
Si ∆u = 0 , ∆Y = α / valeur absolue de β (= 1,6/1/2)
En reprenant la formule ∆u = 1,6 – ½ y on constate que s’il n’y avait pas de croissance du produit le
taux de chômage
Conclusion du second chapitre :
Depuis deux ou trois ans, le rôle de la demande globale dans l’équilibre macroéconomique
apparaît comme le déterminant fondamental de l’équilibre macroéconomique. On suit donc
attentivement tous les ans l’évolution des composantes de cette demande globale et
l’évolution des anticipations des agents qui déterminent directement ces composantes de la
demande globale.
En ce sens, la macroéconomie actuelle est keynésienne puisque le principal apport de
KEYNES a été de rappeler le rôle déterminant de la demande globale sur l’équilibre
macroéconomique.
En revanche, si l’on considère les composantes de cette approche par la demande globale, il y
a de nombreuses divergences avec la Théorie Générale de KEYNES.
Ces fonctions fondamentales d’investissement et de consommation sont toujours des variables
essentielles, mais leur mode de détermination est très différent de la conception que KEYNES
avait.
Il s’agit surtout du jeu de la fonction de consommation qui était une fonction subordonnée
dans le modèle en ce sens qu’elle se contentait de transmettre les influences en provenance de
la variable autonome : l’investissement.
- 59 -
Désormais, la fonction de consommation constitue une variable quasi autonome du
système. Elle est subordonnée aux anticipations des consommateurs et non pas au niveau de
l’investissement.
La fonction d’investissement n’existe pas et on peut donc admettre que l’on est plus proche
de Keynes que de ses successeurs. On ne dit pas que l’investissement est irrationnel mais on a
renoncé à découvrir une fonction stable de l’investissement qui dépend avant tout des
anticipations des investisseurs.
Autre différence : on admet politiquement comme Keynes l’existence d’un biais déflationniste
systématique dans la demande globale. Il y a d’autres époques où la demande globale est
insuffisante et d’autres époques où la demande globale est excédentaire et où elle provoque
une croissance accélérée.
Dernière différence par rapport au modèle keynésien : dans la plupart des pays développés, la
politique budgétaire ne joue qu’un rôle secondaire dans la politique macroéconomique globale
alors que Keynes et les keynésiens pensaient qu’elle devait avoir un rôle déterminant, et ce
que l’on soit en régime de change fixe et/ou de change flottant.
L’autre élément est l’importance du coté de l’offre : la macroéconomie actuelle étant obligée
d’explorer le jeu de l’offre globale et ne peut pas se contenter dans les modèles keynésiens de
faire apparaître occasionnellement la capacité d’offre potentiellement excédentaire comme
une simple variable annexe de l’équilibre macroéconomique.
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