A propos de la philosophicité des débats philosophiques en classe

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A propos de la philosophicité des débats philosophiques
en classe Jean-François Chazerans
Professeur de philosophie
Comme l'écrit Franck Lelièvre : En quoi ces pratiques [Nouvelles pratiques de la philosophie
en classe et dans la cité] sont-elles exactement philosophiques ? Quelle conception, quels
aspects de la philosophie mettent-elles à l’œuvre et s'agit-il même toujours de philosophie ?
Questions évidemment primordiales.
1
A quoi Erik Laloy fait écho : Il m'est tout de suite
apparu :
- que ces moments de discussion dite philosophique étaient institutionnellement importants,
mais que l'appellation unique recouvrait une grande diversité de pratiques;
- que la philosophie s'y voyait souvent prêter toutes sortes de vertus : développement du
langage, apprentissage de la démocratie et du raisonnement, construction de la
personnalité...". Erik Laloy rajoutant : "Globalement je n'y ai constaté [au colloque de Caen-
mai 2004] aucune avancée sur la prise de conscience des conditions auxquelles une pratique
doit répondre pour pouvoir se dire philosophique. C'est comme si, pour les personnes ayant
la responsabilité de ce Colloque, le travail fait à Ballaruc n'avait pas existé. Il semblait aller
de soi que tout ce qui était présenté ou proposé était philosophique.
2
En vertu de leurs positions nos collègues vont distribuer des bons et les mauvais points et…
occulter certains éléments. Pour Franck Lelièvre les meilleures méthodes sont celles de
Lipman et de Lévine et la pire et celle d'Oscar Brenifier. Pour Erik Laloy, le bon point revient
à ce qui se fait sur Caen (méthode lipman accompagnée par des profs de philo dont lui...) et
les mauvais points à la «pratique philosophique» intitulé «L'arbre du respect» et à la méthode
Lévine.
Si on tient compte du fait que l’intervention de Jean-Yves Château au colloque de Ballaruc est
une critique à peine voilée de le méthode de Michel Tozzi, ce que nous expliquerons par la
suite, nous avons donc affaire à une attaque en règle selon les techniques éculées mises en
place depuis longtemps contre les dissidents et les pratiques alternatives ou innovantes
(didactique, Tozzi, Meirieu, Defrance, cafés-philo..). D'abord la tactique du pianiste ou du
phare (selon qu'on tire ou pas dessus...). Enfin ici, c'est surtout la technique du pianiste pour
ce qui nous intéresse. On va chercher à déconsidérer quelque chose (un mouvement, une
méthode, une théorie ou une pratique) en déterminant une tête d'affiche "médiatique" et en
mettant toute la pression sur elle. J'ai analysé maintes fois le traitement subit par Marc Sautet
3
et on trouve de nombreux points communs avec l’attaque en règle de Franck Lelièvre contre
Oscar Brenifier... Cette tactique de l'arbre qui cache la forêt permet d’occulter le reste.
1
L’enseignement Philosophique, juillet-août 2004, p. 63.
2
L’enseignement Philosophique, juillet-août 2004, p. 73.
3
Voir :
- Du nouveau sur le front de la philosophie nouvelle ?, L'Incendiaire n°3, mars 1997.
http://www.incendiaire.net/texte/archives/incend3/philopop.htm (Version remaniée : Cafés-philo : pourquoi la
philosophie est-elle devenue si populaire ? http://www.philopartous.org/apptt/pourq2.html )
- Réponse du 15 septembre 1997 à Marc Sautet, L'Incendiaire 2nde mouture, n°1, octobre 1997.
http://www.incendiaire.net/texte/archives/2incend1/chermarc.htm
- Apologie de Sautet, L'Incendiaire 2nde mouture, n°7, avril-mai 1998.
http://www.incendiaire.net/texte/archives/2incend7/apologie.htm
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Deuxième tactique : le déplacement. On va se focaliser sur le secondaire ou sur l'insignifiant
et en faire le principal. Ce ne sera pas une tête d'affiche qui sera visée et pourchassée mais une
pratique marginale qui sera présenté comme représentative et pourra être considérée comme
bouc émissaire. L’arbre du respect en est un bon exemple. Comme l'arbre qui cache la forêt,
la victime émissaire permet d'occulter le reste.
Occulter quoi alors ? Il me semble que deux choses soient occultées par Franck Lelièvre et
Erik Laloy. D'abord le fait scandaleux que n'importe qui, à leur yeux illégitime, puisse
philosopher (ne pas oublier qu’Erik Laloy passe les deux premiers paragraphes de son texte à
se légitimer et que Franck Lelièvre était reconnu au colloque de Caen [mai 2004], même s'il
s'en est défendu, comme le représentant de l'inspection générale de philosophie). De tirer à
boulets rouges sur Oscar Brenifier, comme ça été le cas avant pour Michel Tozzi, Philippe
Meirieu, Bernard Defrance ou pour Marc Sautet dans d'autres contextes pas si éloignés,
permet d'occulter que les petits profs de base mettent en place des pratiques philosophiques
dans leur classes sans aucune permission autre que celle qu'ils se donnent eux-mêmes
4
. C'était
déjà, nous pensons, une volonté affichée au colloque de Ballaruc (tant vanté par Erik Laloy je
le rappelle) : ne pas se faire déborder par la base. C’est ici que nous retrouvons les critiques
de A. Lambert à l’encontre de Gilles Geneviève
5
. Mais nous pouvons rajouter, les réactions de
Jean-Yves Château au colloque de Ballaruc à l’égard du même Gilles Geneviève, de Sylvain
Connac et surtout d’Agnès Pautard, tous instits de base qui se sont autorisés eux-mêmes à se
lancer dans des débats philosophiques dans leurs classes. Cela a été l’un des grands
enseignements du colloque de Ballaruc. Jusqu’à présent, rien dans l’institution concernant la
philosophie, ne se faisait sans l’aval de l’inspection générale de philosophie, et si elle
n’acceptait pas cela ne se faisait pas. Il a été clair au colloque de Ballaruc que l’Inspection
Générale a été mise devant le fait accompli. Si les Inspecteurs Généraux ont exigé d’y être
invités et y sont venus est-ce que ce n’est pas avec l’idée de mettre la main dessus, de remettre
au pas ceux qui avaient le toupet de vouloir philosopher dans leurs classes, et s’ils n’y
arrivaient pas de mettre alors leur mouchoir dessus ? Ils ne sont pas arrivés à leurs fins car la
difficulté avec la philosophie du premier degré c’est que ni les inspecteurs généraux de
philosophie, ni les inspecteurs généraux du premier degré, ne sont compétents puisqu’elle
n’est pas une discipline inscrite dans les programmes. Nous sommes donc en présence d’un
vide pédagogique qui facilite l’innovation.
La deuxième chose occultée par Franck Lelièvre et Erik Laloy c'est la question de la
philosophicité du cours de philosophie de terminale. Ne partent-ils pas du présupposé que ce
cours est naturellement philosophique ? Or, et comme il n'y a rien de bien nouveau sous le
soleil de l'institution de philosophie, je m'en étais déjà préoccupé il y a presque 10 ans
6
et
plusieurs fois par la suite
7
. Je soutenais que les professionnels de la philosophie considèrent
qu’un cours de philosophie est philosophique parce qu’il est mené par quelqu'un qui a une
formation philosophique et qui a un concours (Capes ou Agrégation) de philosophie. C’était
lisible en référence au café-philo de Poitiers, mais en creux, car, comme j’étais maître
auxiliaire de philosophie, mes collègues professeurs de philosophie ne pouvait quand même
pas me considérer ouvertement comme un non-professeur et avaient été amenés à considérer
que, les débats de café sont des débats d'opinions, d'une part parce que les débatteurs de
4
Ce qui est pour moi déjà philosopher...
5
L’enseignement Philosophique, juillet-août 2004, p. 70.
6
Aux professeurs de philosophie de l'Académie de Poitiers (juin 1996), Avec David Sawadogo, Café-PhiloWeb,
http://www.cafephiloweb.net/cpwt/contrib/debat02.htm
7
Jean-François Chazerans, Fait-on de la philosophie dans les cafés-philo ?
Diotime / l’Agora,
n°3,
septembre 1999, http://www.crdp-montpellier.fr/ressources/agora/ag03_039.htm
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l'assistance n'ont ni formation ni surtout concours administratifs de philosophie, d'autre part
parce qu'il s'agit de débats collectifs
8
, prêtant ainsi le flans à la critique et annihilant par là
même la possibilité de l’enseignement en terminale et même de tout enseignement de la
philosophie. Et c’est effectivement ce sur quoi repose la position critique de A. Lambert, un
cours de philosophie en terminale est philosophique parce que c’est un professeur de
philosophie qui le fait. Et cela, il n’arrête pas un instant de le dire : A l'initiative de
professeurs de philosophie, l'association « l'Atelier de philosophie », a été fondée en octobre
1997 à Hérouville-Saint-Clair… Ces ateliers sont animés par des professeurs de
philosophie… rencontre de Michel Fromagetvenue de Robert Misrahientreprise voulue
et animée par des enseignants de philosophie en terminaleadulte raisonnable, doté d'outils
rationnels assimilés, capable de penser par soi-même grâce en particulier aux apprentissages
acquis… nous jouons dans les séances un rôle spécifique, y intervenant activement à partir de
notre expérience et de notre savoir de professeurs de philosophie pour guider la discussion,
aider à l'élucidation des problèmes abordés, à la compréhension des textes proposés pour
leur acuité, voire leur actualité
9
. Qu’est-ce donc alors qu’un professeur de philosophie en
France aujourd’hui si ce n’est quelqu’un qui a suivi des études, pas toujours d’ailleurs, de
philosophie et qui a un concours administratif (capes ou Agrégation), quelqu’un qui est en
quelque sorte coopté par ceux qui sont déjà en place ? Et puis est-il si important que cela de
préciser que quelqu’un qui a été formé et sélectionné pour faire des cours de philosophie
sache vraiment le faire ? Ne serait-il pas plus intéressant de se préoccuper de la pratique
philosophique des élèves ? Ont-ils alors vraiment de réelles possibilités d’apprendre à
philosopher ? Surtout, de quelle philosophie est-il ici question ? Nous y reviendrons.
C’est dans l’intervention de Jean-Yves Château au colloque de Ballaruc, publié par la Desco
dans les Actes du colloque
10
, et reproduit dans le n° de novembre décembre 2004 de
l’Enseignement philosophique
11
que nous trouvons des éléments éclairants sur la
philosophicité des cours de terminale. C’est cela que nous allons discuter maintenant. Pour
Jean-Yves Château, les pratiques philosophiques à l’école sont dangereuses d’abord, parce
qu’elles conduisent, en usurpant le nom même de philosophie pour qualifier des activités
dogmatiques à teneur idéologique, à dénaturer un authentique enseignement philosophique.
Ensuite, parce que de telles activités, si elles étaient vraiment philosophiques, conduiraient à
« démoraliser » les enfants et contrediraient le principe de laïcité.
Nous allons suivre dans un premier temps Jean-Yves Château lorsqu’il fait reposer le
problème de la philosophicité des débats philosophiques en classe sur la nature complexe de la
philosophie. En effet, il postule que pour déterminer si [une] activité est « philosophique» en
un sens ou en un autre (Desco, p.32 ; EP, p. 26) il faudrait qu'on soit capable de dire ce que
c’est que la philosophie, ce que c'est que le philosophique (Desco, p.32 ; EP, p. 26), démarche
très complexe et délicate pour des raisons de principe qui tiennent à l'essence même de la
philosophie (Desco, p.32 ; EP, p. 26). En effet, il faudrait d’une part former une idée de la
philosophie qui vaille pour toute la philosophie, pour toutes les philosophies, faire, en
somme, une philosophie de la philosophie (Desco, p.32 ; EP, p. 27). Et d’autre part, nul ne
peut imaginer qu'une telle tâche ne prenne pas un temps très long et n'exige un travail et une
8
Jean-François Chazerans, Fait-on de la philosophie dans les cafés-philo ?
Diotime / l’Agora,
n°3,
septembre 1999, p. 42 http://www.crdp-montpellier.fr/ressources/agora/ag03_039.htm
9
L’enseignement Philosophique, juillet-août 2004, p. 69-71.
10
juin 2004. Cité par la suite Desco suivi du numéro de page.
11
Cité EN suivi du numéro de page.
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culture très vastes (en toute rigueur «encyclopédiques»). Car comment savoir ce qu'est la
philosophie sans l'avoir étudiée suffisamment ? C'est peut-être la question la plus lourde pour
un philosophe (à supposer que la réponse puisse être entièrement philosophique). C'est une
question à laquelle même celui qui a consacré toute sa vie à la philosophie a du mal à
répondre d'une façon qui convienne à tous les autres (Desco, p.32-33 ; EP, p.27). Cette nature
très complexe de la philosophie vient de ce qu’elle n'a pas d'objet propre. Elle peut
s'intéresser à tout, et ses objets et problèmes, (en dehors de quelques-uns, qui sont, peut-on
dire, techniques et n'ont de sens qu'à l'intérieur de telle ou telle doctrine constituée), sont
aussi et d'abord, en général, empruntés à d'autres disciplines ou d'autres modes de pensée.
(Cela ne veut pas dire que n'importe quel sujet est bon pour la philosophie, indépendamment
de l'élaboration qu'elle en réalise). On s'en convaincra aisément en songeant au caractère
réflexif ou second de la philosophie par rapport aux diverses sciences, à la religion, à la
morale, à la politique, à l'art, etc. On aperçoit que ce n'est pas par son objet, son thème, sa
matière, que la philosophie se distingue des autres, mais par sa manière de faire à leur égard
(Desco, pp.36-37 ; EN, pp.30-31).
Ainsi, il pourrait y avoir ce que nous pourrions nommer un paradoxe de la philosophie : pour
faire de la philosophie il faut être capable de dire ce que c’est que la philosophie mais pour
être capable de le dire il faut déjà en faire. Et donc, la philosophie ne se distingue pas, comme
semblent le supposer certains praticiens des débats philosophiques en classe, par les thèmes
abordés (Desco, p.38 ; EP, p.32), ni par les procédés généraux de la pensée qu'elle met en
œuvre (Desco, p.38 ; EP, p.32) mais par la radicalité de sa dimension critique (Desco, p.38 ;
EP, p.33). Se fondant sur cette constatation Jean-Yves Château en vient à dénoncer un des
risques les plus importants que l’on court si on veut enseigner la philosophie sans tenir
compte de sa nature complexe. On en arriverait, pour le dire de la façon la moins
désobligeante, [à] faire passer une philosophie pour la philosophie, [à] faire passer
subrepticement, et peut-être sans même s'en douter, une idéologie, un ensemble d'idées que
l'on partage (si intéressantes soient-elles), pour de la philosophie. Ce serait tomber dans
l'arbitraire et le dogmatisme, le contraire même de la philosophie, même si c'est un danger
qui la guette constamment et contre lequel il faut sans cesse lutter. L'enjeu est bel et bien,
d'abord, le respect du principe de laïcité (Desco, p.32 ; EP, p.27). Nous suivons tout à fait
Jean-Yves Château dans ce positionnement du problème de la philosophicité des débats en
classe et nous sommes tout à fait d’accord avec lui sur la nature complexe de la philosophie et
son ancrage dans la radicalité de la critique qui mettent en lumière la nature idéologique que
pourraient avoir certaines pratiques. Mais prendre les choses ainsi, surtout pour un inspecteur
général de philosophie, n’est-ce pas jeter le bébé avec l’eau du bain ? Car ne va-t-on pas
rejeter non seulement la philosophie à l’école primaire mais son enseignement en terminale ?
Comment donc l’enseignement de la philosophie en terminale échappe-t-il au risque pointé :
tomber dans le dogmatisme ? Et comment le discours de Jean-Yves Château peut-il lui-même
y échapper ?
D’abord, comment l’enseignement de la philosophie en terminale échappe-t-il lui-même à ce
risque ? Jean-Yves Château considère d’ailleurs de suite qu’on pourrait lui faire cette
objection : Pour mesurer la nature exacte de notre problème, nous pourrions nous demander
si la difficulté de la définition de la philosophie ne concerne pas également, dans son
principe, son enseignement à tous les niveaux où il existe (Desco p.33 ; EP, p.27). Il y répond
immédiatement : oui et non (Desco p.33 ; EP, p.27). Et conclut, sans jamais aborder la
réponse oui c’est-à-dire l’éventualité que l’enseignement en terminale pourrait ne pas
échapper à ce paradoxe induit par cette définition de la philosophie comme critique radicale et
donc qu’il pourrait n’être qu’une philosophie c’est-à-dire une idéologie : Nulle part dans
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l'institution, on n'attend d'un professeur, même spécialiste, qu'il fasse « de la philosophie »
sans plus de précision, mais qu'il enseigne un contenu déterminé
12
et cela en tenant compte de
la nature d'épreuves de contrôle prévues pour ses élèves, ces éléments se conditionnant
réciproquement (du moins quand l'enseignement est lucide et équilibré) (Desco, p.33 ; EP,
p.27). Et donc, le spécialiste, d'ordinaire, n'est pas en situation d'avoir à inventer des
contenus qui soient philosophiques, ni à prouver à personne, ni à se convaincre lui-même,
qu'ils le sont (Desco, p.33 ; EP, p.27-28).
Cette solution avancée à de quoi rendre perplexe. Comment donc concilier la nature complexe
de la philosophie, le fait qu’elle n’ait pas d’objet propre et que son caractère ultime soit la
radicalité de sa critique avec cette détermination par un programme et par un exercice
formel ? D’abord, nous pouvons voir que les instructions officielles de l’enseignement de la
philosophie ne vont pas aussi loin que celles des autres disciplines et de l’actuel projet Fillon,
sur lesquelles d’ailleurs Jean-Yves Château semble calquer ses conceptions. Comme l’écrit
Emmanuel Davidenkoff dans Libération du 30 novembre 2004 : la liberté pédagogique de
l'enseignant s'exerce dans le cadre des programmes et des instructions du ministre de
l'Education nationale avec l'aide du directeur d'école ou du chef d'établissement, avec le
conseil et sous le contrôle des membres des corps d'inspection». L'enseignant sera donc
libre... de se soumettre aux instructions. C'était déjà le cas dans les collèges et les lycées. Une
circulaire de mai 1997 indiquait bien que «le professeur dispose d'une autonomie dans ses
choix pédagogiques» mais «dans le cadre des orientations et des programmes définis par le
ministre chargé de l'Education nationale, des orientations académiques et des objectifs du
projet d'établissement (Loi Fillon: les profs seront libres... de se soumettre). Et, que ce soit
dans les Instructions d’Anatole de Monzie de 1925
13
ou dans le Programme d’enseignement
de la philosophie en classe terminale des séries générales (B.O. n°25 du 19 juin 2003)
14
, le
législateur prend des gants, c’est le moins qu’on puisse dire si on a à l’esprit les longues
polémiques sur la questions des programmes de philosophie, avec la liberté de l’enseignant de
philosophie. Ce qui fait que la prise de position de Jean-Yves Château, qui limite la liberté
pédagogique des professeurs de philosophie, risquant tomber par là dans le risque de dérive
idéologique qu’il dénonce lui-même, nous semble très dangereuse, dans le sens qu’est éliminé
tout bonnement la différence entre la philosophie et les disciplines au profit de ces dernières,
nous pensons en particulier précisément, mais pas exclusivement, à cette discipline qu’est le
français ou les « lettres »
15
. Car, le propre de l’idéologie n’est-il pas de tenter de travestir la
philosophie en ce qui n’est pas elle ? Jean-Yves Château a raison de critiquer radicalement
son travestissement idéologique en didactique et en science de l’éducation. Mais d’autres
travestissements existent : en psychologie, sociologie, histoire, ou même logique voire
12
C’est nous qui soulignons.
13
L'esprit de l'enseignement philosophique. C'est pourquoi nous voulons que le mot liberté soit inscrit au début
même de ces instructions. La liberté d'opinion est dès longtemps assurée au professeur et il paraîtrait
aujourd'hui contradictoire avec la nature même de l'enseignement philosophique qu'il en fût autrement. Cette
liberté, sans doute, comporte les réserves qu'imposent au professeur son tact et sa prudence pédagogique, c’est-
à-dire en somme le respect qu'il doit à la liberté et à la personnalité naissante de l'élève.
14
Il n’y a pas lieu de fournir une liste exhaustive des démarches propres au travail philosophique, ni par
conséquent une définition limitative des conditions méthodologiques de leur assimilation.
15
Par exemple cet argument d’un collègue professeur de philosophie contre l’extension de l’enseignement de la
philosophie en 1ère : Autrement, je me souviens que C. Menasseyre, alors doyenne de l'IG de philo, m'avait mis
en garde contre le fait de marcher sur les plates bandes de nos collègues de Lettres, qu'on aurait tout à perdre
dans cette histoire. J'ai tenté de suivre son conseil mais je me suis très vite rendu compte que, quel que soit le
sujet, esthétique, moral, épistémologique même, on interférait avec les travaux d'argumentation des profs de
français. Conséquence funeste pour les élèves et pour les prérogatives de chacun. On parle des mêmes choses
mais de façons souvent opposées voire carrément contradictoires.
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