LCR Formation 72 FMI = Famine, misère, impérialisme Pilier de l’ordre impérialiste mondial depuis l’après-guerre, le FMI (Fonds Monétaire International) est pour les travailleurs des "pays en voie de développement" synonyme de licenciements, d’attaques contre le niveau de vie des travailleurs et de misère généralisée pour la classe ouvrière. En effet, afin de "stabiliser" les économies et de "restaurer la confiance des investisseurs", le FMI insiste pour que chaque gouvernement applique ses plans d’austérité dont les travailleurs du monde entier supportent les conséquences. Le plan d’austérité est devenu le principal préalable du FMI à toute aide financière mise en place pour faire face à la fuite des capitaux, à la dette étrangère devenue écrasante ou à la disparition des réserves de devises étrangères - les signes classiques d’une crise financière aggravée. Le FMI, structure fondamentale de l’impérialisme moderne, se définit lui-même de la manière suivante : • Il est politiquement neutre, comme une espèce de banquier bénévole mais plein de bon sens, qui ne fait qu’appliquer la volonté de ses pays-membres. • Il a comme unique objectif d’appuyer le développement et la croissance du commerce international. • Son aide financière ne sert qu’à permettre aux pays-membres de surmonter des difficultés financières temporaires - en particulier dans le domaine de la balance des paiements (c’est-à-dire avoir assez d’argent pour payer les importations) - et à les aider à effectuer les changements structuraux nécessaires afin d’augmenter les exportations. • Sa doctrine est celle du néolibéralisme, avec comme objectif que tous les pays puissent avoir une spécialité dans le domaine de la production, afin de maximiser le bien-être des citoyens. Voilà la version officielle, la vision impérialiste de la chose. La vérité est tout autre. En fait, le FMI fonctionne comme une espèce de ministère des finances à l’échelle planétaire. Il contrôle notamment la situation des pays du "tiers monde" - les semi-colonies d’Asie, d’Amérique latine et d’Afrique - dans l’intérêt d’une poignée de puissances impérialistes, en particulier les USA, l’Allemagne, la France, le Japon et la Grande-Bretagne, qui dominent l’économie mondiale. Les objectifs réels du FMI sont en fait évidents : • Assurer la capacité d’un pays à remplir ses obligations en matière de dette aux banques privées. Tout surproduit financier créé par l’exportation ou la privatisation doit avant tout servir à payer l’intérêt des dettes aux banques étrangères. • Ouvrir des marchés nationaux à l’investissement et à l’appropriation par les principaux pays impérialistes. Au sein du FMI, certains pays-membres - les puissances impérialistes - sont plus égaux que d’autres. En poursuivant son projet d’abolition de toute restriction sur la libre circulation des marchandises, des services et du capital, le FMI montre clairement qu’il n’est qu’une arme au service des classes riches et puissantes. Le FMI et la crise des années 80 Jusqu’au début des années 70, la plupart des pays semi-coloniaux ont surfé sur la vague de croissance que constituaient les "Trente Glorieuses". Leurs exportations ont augmenté à un taux suffisant pour empêcher un déficit de leurs balances des paiements. Ils ne croulaient pas sous le poids des importations. Leur éventuels déficits étaient financés par des crédits commerciaux, des prêts des gouvernements étrangers ou des agences internationales. En 1971, les banques privées ne possédaient qu’un tiers des prêts étrangers dans les pays du "tiers monde". Puis les années 70 ont été marquées par la crise ; deux récessions mondiales ont frappé l’économie internationale et la demande pour les exportations traditionnelles d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine a chuté. A la fin de la récession mondiale de 1980-82, des pays comme le Brésil, le Mexique, l’Argentine et le Venezuela ont fait faillite. Ils ne pouvaient plus payer les intérêts des dettes contractées auprès des banques privées qui avaient proposé des prêts pendant les années 70 afin que les pays pallient aux déficits produits par la crise internationale. En 1970, la dette des pays dominés par l’impérialisme était de l’ordre de 75 milliards de dollars. 15 ans plus tard, ce chiffre a été multiplié par 12 : la dette s’élevait à 900 milliards de dollars. La plupart des prêts demandés par les classes dirigeantes des pays semi-coloniaux n’avaient pas pour objectif d’augmenter le niveau de vie de la population. Un grand nombre d’entre eux étaient directement liés à des contrats militaires dont l’objectif était de renforcer les régimes répressifs d’Amérique latine et d’Afrique confrontés à la pression populaire ainsi qu’au renforcement, dans le même temps, des profits des sociétés multinationales d’Europe et des USA qui fabriquaient des produits militaires (armes, avions, hélicoptères, voitures, etc.). D’autres prêts servaient, eux, des projets dits "de prestige", inutiles pour la population, mais qui avaient pour objectif de renforcer le régime aux yeux du peuple et des classes dirigeantes des États voisins. Et, bien entendu, parmi ces sommes empruntées, des milliards de dollars ont tout simplement été détournés vers des comptes privés dont jouissaient les Mobutu et les Suharto. Pendant la récession de 1980-82, le poids de la dette est devenue écrasant. L’effondrement de la demande de matières premières pendant les années 70 a porté un premier coup de massue aux pays d’Amérique latine. Ceci a été suivi en 1979 de l’explosion des taux d’intérêt - de 7 % à 17 % - alors que les USA cherchaient à freiner l’inflation. Par voie de conséquence, le remboursement des seuls intérêts -- et non pas la dette elle-même -- a consommé une partie croissante des revenus d’exportation qui diminuaient. La proportion des revenus des pays semi-coloniaux absorbés par le paiement des intérêts est passée de 15 % en 1977 à 25 % en 1982. Pendant cette même période, la somme totale remboursée par les pays dominés par l’impérialisme est passée de 40 à 121 milliards de dollars. Pays après pays, les bourgeoisies locales s’apprêtaient à jeter l’éponge. Les banques, menacées par la perte pure et simple de leur argent, ont exigé l’intervention du FMI pour renflouer les économies. Il fallait éviter la faillite et imposer les mesures politiques et économiques nécessaires pour assurer le remboursement de la dette. C’est dans ce contexte que le FMI a trouvé sa raison d’être. Dès la fondation des instances financières gérant l’économie capitaliste mondiale en 1944, les USA ont fait en sorte que tous les pays souhaitant recevoir de l’argent de la Banque mondiale doivent obligatoirement adhérer au FMI et donc subir sa politique. En 1978, les USA ont modifié la charte du FMI, afin que tout prêt soit conditionné à l’acceptation de la politique du FMI en matière de réforme économique. Ce changement généralisait une politique qui n’avait jusque là été appliquée que sélectivement. Par exemple, quand un pays impérialiste avait des difficultés à boucler son budget - comme ce fut le cas pour la Grande Bretagne en 1960 - aucune condition particulière n’était associé au prêt accordé par le FMI. Le sort des pays semi-coloniaux était très différent. En 1954, le Pérou fut le premier pays d’Amérique latine à se tourner vers le FMI ; il dut subir un programme de réformes économiques drastiques. Idem pour le Chili en 1956. La crise d’endettement des années 80 a conduit à une véritable ruée vers le FMI. A la fin de 1984, 40 pays semi-coloniaux avaient signé des accords avec lui. Bien sûr, ces accords étaient formulés de manière à éviter tout contrôle démocratique sur le processus de "réforme" exigé par le FMI. Les choses se passent toujours de la même façon : le FMI écrit une lettre d’intention spécifiant les conditions qu’il impose ; le gouvernement doit la signer. Les fonds sont ensuite débloqués. L’accord n’est pas nécessairement publié et il n’a pas le statut de traité international, il n’est donc pas nécessairement discuté par le parlement du pays concerné. Le FMI n’est pas gratuit. Le pays concerné doit payer 0,25 % du prêt afin de couvrir les "frais d’agent" du FMI ! Ensuite, il doit acquitter 4,5 % du prêt directement aux pays-membres dont les devises composent l’argent prêté. Résultat : un transfert de la richesse des pays semi-coloniaux vers les pays impérialistes. Enfin le pays-emprunteur doit adopter un plan "d’ajustement structurel", sans lequel il n’est pas admis sur les marchés internationaux des capitaux, ce qui le prive de l’accès à la richesse. Le but des plans est d’assurer les profits des banques et de transférer les richesses nationales vers les impérialistes. Le plan traditionnel du FMI comporte certains éléments immuables : • la dévaluation de la devise nationale ; • la hausse des taux d’intérêt ; • l’élimination des subventions, y compris sur la nourriture ; • l’augmentation des prix demandés par les entreprises d’État pour l’énergie, l’eau etc. ou la privatisation de ces entreprises ; • le contrôle des salaires ; • la restriction du crédit. Toutes ces mesures "d’ajustement" ont un même objectif : la limitation de la demande intérieure et des importations et le renforcement des exportations occasionnées par la diminution de leur prix. Tous les revenus découlant des exportations doivent être utilisées pour le remboursement de la dette. Investissements étrangers En restaurant l’équilibre de la balance des paiements, le FMI assure que le pays puisse à nouveau attirer les investissements étrangers. Lorsque les impérialistes reviennent dans ces pays, tout est moins cher à cause de la dévaluation. Là encore une fois, ces mesures n’ont qu’un seul objectif : créer - ou recréer - les conditions pour l’extraction des surprofits par les impérialistes. En Amérique latine, pendant les années 80, la politique du FMI a conduit à une "décennie perdue" pour les masses. Le Brésil constitue un exemple typique. En janvier 1983, le Brésil a signé un accord avec le FMI et s’est lancé dans un programme de "stabilisation" prévu sur trois ans. En échange d’un prêt de 4,5 milliards de dollars, le plan prévoyait : • la dévaluation de la devise de 30 % ; • la réduction de moitié du déficit de la balance des paiements en 1983 ; • la réduction de moitié du déficit budgétaire ; • la baisse de l’inflation de 100 % par an à 85 % en 12 mois ; • la hausse des taux d’intérêt et la suppression des subventions ; • l’abandon de l’indexation des salaires, conduisant ainsi à une perte du pouvoir d’achat des travailleurs. Étant donné qu’avec la dévaluation, les prix ont grimpé deux fois plus vite que les salaires, bon nombre de travailleurs ont connu la pauvreté. Les exportations ont augmenté mais la résistance ouvrière a fait en sorte que les salaires n’ont pas diminué dans les proportions espérées par le FMI. Conséquence ? Le FMI a refusé de livrer la deuxième tranche du prêt, jusqu’à ce que le gouvernement adopte une loi décrétant que la hausse des salaires ne pouvait atteindre que 80 % de la hausse des prix ! Les travailleurs se sont mis en mouvement et le gouverneur de la Banque du Brésil a dû démissionner. Au bord de la faillite, le gouvernement brésilien a écrasé le mouvement et a fait adopter la politique du FMI à la hussarde. En novembre 1983, le FMI a débloqué enfin 11 milliards de dollars, dont l’unique fonction était... de rembourser la dette. Les pays d’Amérique latine des années 80 ont joué le rôle de cobayes néo-libéraux du FMI. L’un après l’autre, chaque pays a dû adopter une politique orientée vers les exportations, basée sur un programme de privatisation des industries nationales au profit des sociétés multinationales impérialistes et la destruction pure et simple des aides étatiques destinées aux couches les plus pauvres. Mais en 1997, l’effondrement des pays du Sud-Est asiatique a montré l’erreur des théories néo-libérales prônées par le FMI sur le développement capitaliste. Le FMI chantait les louanges de ces économies. Il les prenait pour modèles afin de montrer comment des pays du "tiers monde" pouvaient connaître croissance et stabilité et jouir des investissements étrangers. Entre 1990 et 1996, les banques étrangères se sont ruées vers ces pays, applaudis par le FMI qui y voyait des modèles à suivre partout dans le monde semi-colonial. Et puis, l’année dernière, la vérité a éclaté aux yeux de tous : surproduction, effondrement des profits, mauvaises dettes et fuite des capitaux. L’un après l’autre, l’Indonésie, la Thaïlande, la Malaisie, la Corée du Sud et les Philippines ont tous sombré. Incapables de défendre leurs devises face à la déferlante financière, leurs économies se sont effondrées. Étant donné qu’ils suivaient tous et sans conditions la politique du FMI, ils étaient en droit d’attendre que celui-ci débloque immédiatement les fonds nécessaires pour les sauver. Pas du tout. Pour le FMI, la crise devait être payée par les populations. Cela s’est traduit par la réduction des dépenses d’État, la limitation de la demande intérieure et des salaires et l’augmentation des taux d’intérêt. Les "apprentis sorciers" du FMI ont même rajouté une clause visant la dérégulation du mouvement des capitaux, un des facteurs qui avaient déclenché la crise ! Le but du FMI est simple : se servir de la crise afin d’ouvrir ces pays comme autant d’huîtres, permettant ainsi aux banques et aux sociétés impérialistes d’en déguster les meilleurs morceaux. Voilà pourquoi l’accord de décembre 1997 entre le FMI et la Corée du Sud exige une profonde réforme structurelle, la fermeture des institutions financières, le rachat des banques coréennes par des banques étrangères et la fin des prêts gouvernementaux. Comme l’a dit un commentateur, l’objectif du FMI est net : "Il ne peut y avoir aucun doute, les vrais gagnants sont les sociétés occidentales et nippones. Le transfert vers des propriétaires étrangers a commencé, marqué par l’euphorie, comme le montre cette remarque de la part d’un dirigeant d’une banque britannique : 'Si quelque chose qui hier valait 1 milliard de livres, aujourd’hui ne vaut que cinquante million, c’est assez excitant.' La combinaison des dévaluations massives avec la libéralisation à tout va et la reprise soutenue par le FMI pourrait même précipiter le plus grand transfert de richesses des propriétaires nationaux vers l’étranger qu’on ait jamais vu en temps de paix depuis cinquante ans. Même les transferts vers les USA qu’on a vu en Amérique latine pendant les années 80 ne seraient rien à côté." L’avenir du FMI Le caractère pro-impérialiste des conditions avancées par le FMI n’a jamais été aussi évident malgré ce qu’en dit Michel Camdessus. Celui-ci déclarait, sans rire, fin octobre, que les programmes du FMI "cherchent à faire en sorte que la reprise des dynamiques de développements serve le développement humain, que la dépense publique soit autant que possible destinée à l’éducation, à la santé de base, etc. C’est le meilleur moyen pour donner leur chance aux plus pauvres." La seule pointe de critique que Camdessus concède avec cynisme, c’est que "la libéralisation a parfois été conduite en dépit du bon sens". Et les millions de travailleurs et de jeunes qui ont subi les effets nocifs des programmes du FMI sur leurs conditions de vie, alors ? Oubliés ! Comme Piaf, le FMI ne regrette rien. Car après tout, ces conséquences sont sa raison d’être. L’avenir du FMI peut prendre deux directions. D’une part, il est possible que le nombre et la profondeur des crises financières des années 90 épuisent les ressources du FMI. Par conséquent, les impérialistes craignent que la prochaine crise soit la dernière. Car pour répondre à la crise rampante qui déferle sur les places boursières de la planète, le FMI a besoin de plus d’argent encore. Aux USA, le Congrès n’a donné "que" 18 milliards de dollars au FMI le mois dernier. Mais son instrument financier préféré a besoin de beaucoup plus. S’il s’écroule sous le poids de cette crise ou de la suivante, on pourrait assister à l’effondrement du système d’échange planétaire et à un retour au chaos qui a caractérisé les années 30. Voilà la voie réactionnaire. Mais il y a une autre piste. Les luttes des pauvres et des exploités contre l’austérité imposée par le FMI pourraient bloquer les plans de ce dernier, aboutir au renversement des gouvernements bourgeois qui cherchent à les mettre en œuvre. Voici la voie révolutionnaire. C’est seulement en suivant une telle voie que l’on peut arracher des mains des capitalistes les banques et les usines du monde entier et les mettre sous le contrôle de ceux qui y travaillent. Dans ces circonstances, si les pays les plus développés étaient munis de gouvernements ouvriers, ils pourraient commencer la construction d’un ordre monétaire international opposé à celui du FMI. Ce serait un ordre basé sur un système planétaire de planification socialiste, un système destiné à augmenter le niveau de vie des plus pauvres. L’expropriation des banques abolirait les dettes nationales. Les revenus des exportations n’assouviraient plus l’avarice des financiers internationaux et ne conduiraient plus au transfert des richesses entre les mains d’une poignée de sociétés multinationales. Une institution monétaire internationale sous le contrôle démocratique des travailleurs dirigerait un système de paiements à taux de change stables entre les pays-membres d’une fédération socialiste, tout en permettant aux devises nationales d’exister si tel était le souhait des masses travailleuses de ces pays. Mais une transition socialiste, durant laquelle chaque pays serait intégré au sein d’un plan international de production et de distribution, aurait comme conséquence inévitable de miner le besoin de devises nationales. Les sommes dépensées pour les échanges pourraient utilement servir ailleurs. Dans cette optique, celle de l’après-révolution socialiste, la politique monétaire aurait comme seul objectif de mesurer la productivité du travail, signalant ainsi aux institutions de planification comment mieux répartir l’argent au sein du système socialiste tout entier. C’est une perspective très différente de celle du FMI. Mais c’est la seule qui peut faire sortir l’humanité du cycle de crise, de répression et de guerre qui est le lot commun sous la férule capitaliste. Il s’agit d’une perspective émancipatrice et rationnelle plaçant la production au service de l’humanité et non l’inverse. Aux origines du Fonds Monétaire International Pendant les années 30, le monde capitaliste fut ravagé par la Grande Dépression. Des milliers de banques ont fait faillite ; la valeur marchande des terres s’est effondrée ; les usines se sont arrêtées et des dizaines de millions de travailleurs se sont retrouvés au chômage. Le système financier et d’échange monétaire international fut profondément endommagé. Une perte de confiance généralisée dans le papier-monnaie a conduit à un accroissement de la demande d’or à laquelle ne pouvait faire face les trésoreries nationales. C’est pourquoi de nombreux pays copiant une décision prise par le Royaume-Uni ont abandonné l’étalon-or, qui, depuis des années, établissait la valeur des devises en comparaison d’une certaine quantité d’or. Pendant les années 30, la valeur des monnaies étant incertaine, les pays ont stocké l’or. Cela eut pour effet de diminuer encore l’importance et la fréquence des transactions monétaires, intensifiant la dépression. Les gouvernements voulant vendre coûte que coûte leurs produits agricoles aux acheteurs étrangers ont baissé leur devise nationale en dessous de sa valeur réelle afin de miner le commerce des pays vendant les mêmes produits. Cette pratique ("la dévaluation compétitive") a été employée également par le commerce privé, renforçant ainsi l’incertitude financière et minant l’activité commerciale. Le rapport entre la monnaie et la valeur des marchandises est devenu de plus en plus confus, tout comme celui entre les devises. Le capitalisme mondial fut plongé dans une spirale de déflation et de récession. Entre 1929 et 1932, à l’échelle planétaire, les prix ont diminué de 48 % et la valeur du commerce international a chuté de 63 %. La destruction massive du capital et l’écrasement de la classe ouvrière engendrés par la deuxième guerre mondiale ont créé les conditions d’une reprise économique. Sur cette base, les puissances impérialistes victorieuses ont construit un système monétaire dont l’objectif était d’éviter une répétition de la catastrophe économique des années 30. Au début des années 40, deux économistes anglo-saxons - H. Dexter White aux USA et J. Maynard Keynes en Grande-Bretagne - ont avancé des projets similaires. Ils proposaient la création d’un système dont le rôle serait : • d’appuyer la conversion sans limites des devises ; • d’établir une valeur claire pour chaque devise ; • d’éliminer toute pratique restrictive, telle que la dévaluation compétitive. Pour contrôler ce système, il fallait une instance internationale. En 1944, lors de la conférence de Bretton Woods aux USA, le FMI fut fondé. Si par tradition le président du FMI est un européen (l’actuel Directeur Général, Michel Camdessus, est un Français), celui de l’instance parallèle, la Banque Mondiale, est toujours un américain. La base fondamentale du FMI a toujours été l’impérialisme nord-américain. Installé aux USA, composé principalement d’économistes américains, le FMI échange régulièrement son personnel avec celui de la trésorerie des USA. De plus, en tant que principal contributeur du budget du FMI, les USA ont toujours eu plus de voix que tout autre pays et ont pu ainsi bloquer toute modification de sa charte. Comme l’a dit en 1983 le Secrétaire de la Trésorerie des USA, Donald Regan : "Le FMI est essentiellement une institution non-politique... Mais cela ne veut pas dire que les intérêts politiques et sécuritaires des USA ne sont pas servis par le FMI." Pendant ses 25 premières années d’existence, le FMI fut peu visible. Le système monétaire international fut stable. Selon l’accord de Bretton Woods, 1’once d’or valait 35 dollars. Les USA étaient prêts à vendre et à acheter à ce prix en toutes circonstances. Du moment que la domination économique américaine soit absolue et qu’il y ait suffisamment d’or dans les coffres, il n’y avait pas besoin d’une intervention du FMI. Mais pendant les "Trente Glorieuses", la domination des USA par rapport aux autres pays s’est affaiblie alors que ces derniers - Europe et Japon - se sont enrichis. Au début des années 70, la trésorerie des USA n’avait plus de réserves d’or suffisantes pour échanger les dollars détenus à l’étranger. En 1971, face à une crise financière montante, les USA ont abandonné unilatéralement les taux de change fixes. Une nouvelle période s’est ouverte : celle des taux de change flottants. Mais comment éviter le retour des dévaluations compétitives des années 30 ? C’est à ce moment-là que le FMI est entré en scène. Comme le dit l’historien officiel du FMI : "En adoptant le système actuel, les pays-membres ont demandé au FMI d’aller au-delà de la valeur d’échange qui, après tout, est le résultat final d’une série de politiques économiques, d’examiner tous les aspects de l’économie d’un pays-membre qui conduisent la valeur d’échange à être comme elle est et d’évaluer franchement la performance de l’économie pour que tous les pays-membres puissent la connaître. Bref, le système actuel exige une transparence plus grande à l’égard de la politique des paysmembres et donne au FMI une plus grande capacité à contrôler ces politiques. Le FMI appelle cette activité le ‘contrôle’, ou la supervision, de la politique d’échange des pays-membres. Cette supervision est basée sur la conviction qu’une politique économique domestique qui est forte et conséquente conduira à des taux de change stables, et à une économie mondiale croissante et prospère." Traduction : le FMI est le gendarme financier de l’impérialisme. Il existe afin d’assurer que la politique économique intérieure des pays-membres serve l’ouverture du commerce et du mouvement du capital, au profit des pays impérialistes. Inévitablement, un tel système d’ouverture ne peut que servir et renforcer la richesse et la puissance des impérialistes, dont la productivité économique, les ressources du capital et la domination technologique permettent de balayer toute concurrence là où il n’existe pas de barrières protectionnistes au mouvement des capitaux ou des marchandises. Le FMI existe afin d’assurer que les pays qui entrent dans une crise financière et qui sont obligés de demander son aide - principalement les pays semi-coloniaux les plus pauvres - soient contraints d’enlever de telles barrières.