LE DEVOIR, LE VENDREDI I 3 NOVEMBRE I998 ÉCONOMIE Baisse de 46 % Les profits des entreprises canadiennes dégringolent PRESSE CANADIENNE Toronto—La moitié des profits des entreprises canadiennes se sont évaporés au troisième trimestre, alors que l'économie asiatique continuait à se détériorer et que le secteur financier, jadis invincible, essuyait des pertes. Et s'il faut en croire certains analystes, le pire reste encore à venir. «Rien ne laisse présager un revirement de la situation», soutient Martin Roberge, stratège chez Lévesque, Beaubien, Geoffrion, de Montréal. Un rapport du quotidien torontois The Globe and Mail sur la performance de 163 grandes entreprises indique que leurs profits ont atteint 3,9 milliards au cours du trimestre se terminant le 30 septembre, ce qui en fait le pire troisième trimestre depuis 1995. Les profits ont dégringolé de 46 % par rapport à la même période l'an dernier. Selon Jonathan Cunningham, directeur de la recherche chez Nesbitt Burns, l'érosion de la croissance des profits n’est plus seulement le fait des matières premières: elle s'étend maintenant à des industries qui semblaient peu touchées par la crise asiatique. La croissance économique américaine est encore vigoureuse, mais les industries sont aux prises avec une accumulation d'inventaires invendus, signale l'économiste Patricia Mohr, de la Banque Scotia. Les commandes sont au ralenti, ce qui rend la situation difficile pour les Canadiens qui exportent un grand nombre de produits aux Etats-Unis, ajoute-t-elle. Le pire trimestre À la Bourse de Toronto, l'indice TSE 300 a subi une diminution de 23,8 % en juillet, août et septembre, son pire trimestre jamais enregistré. Le marché a repris environ 12 % depuis le 30 septembre, mais l'important ratio cours-bénéfice—le prix que sont prêts à verser les investisseurs pour chaque dollar réalisé par les entreprises—a baissé à 25-1 alors qu'il était de 30-1 et plus il y a quelques mois. Même si cela semble peu, cela peut affecter le cours des actions. Si le ratio devait baisser à 20-1, par exemple, et si les profits des entreprises restaient inchangés, le prix des actions baisserait encore de 20 %. Les pires résultats du troisième trimestre ont été encore une fois ceux du secteur des ressources naturelles, dont les bénéfices ont dégringolé de 73 %, comparativement au troisième trimestre de 1997, pour atteindre 248,5 millions. Les entreprises du secteur de l'énergie ont perdu au total 194,2 millions, après avoir dû consentir des réductions en raison de la baisse du prix du pétrole. Les bénéfices de l'industrie manufacturière se sont pour ainsi dire évaporés, enregistrant une perte de 89 % pour atteindre 195 millions. La baisse des profits a également été ressentie dans les secteurs traditionnels de l'industrie tels que l'acier et les produits chimiques. Les grèves chez General Motors et une augmentation des importations d'acier asiatique ont réduit !es profits de Stelco de 42 %, à 22 millions. «Les pays dont les marchés d'exportations sont en péril déversent le trop-plein de leur production au Canada», déplore l'entreprise. Les banques, dont les bénéfices avaient augmenté de 18 % au deuxiéme trimestre, ont enregistré une baisse, et leurs profits ont perdu 7 % pour atteindre 1,9 milliard.