
Grossesse normale
Au cours de la grossesse normale, un débit cardiaque élevé est nécessaire à la perfusion
nourricière de l'unité utéro-placento-fœtale [10]. Cela est obtenu par la conjonction d'une
tachycardie de repos et d'une augmentation du volume plasmatique liée à une stimulation du
système rénine-angiotensine-aldostérone d'origine œstrogénique, créant une anémie de
dilution. Une vasodilatation artérielle périphérique facilite l'éjection ventriculaire et se traduit
par une pression artérielle plus basse que celle mesurée en dehors de la grossesse. La
réduction du tonus vasculaire et l'atténuation de l'effet des substances vasoconstrictrices sont
liées à une production accrue de monoxyde d'azote grâce à une stimulation de la NO-synthase
endothéliale et de l'induction d'une NO-synthase, en particulier dans l'unité
utéroplacentaire [11]. Malgré l'entrave à la circulation veineuse par l'utérus gravide, le retour
sanguin vers le cœur est maintenu par une augmentation du tonus veineux des membres
inférieurs. L'adéquation des mécanismes compensatoires de l'hypovolémie est attestée par
l'absence d'hypotension orthostatique au cours de la grossesse normale. Leur sollicitation
permanente réduit toutefois la réserve cardiovasculaire de la femme enceinte face à une
hémorragie. Certaines caractéristiques respiratoires de la femme enceinte facilitent le
développement de l'hypoxémie maternelle et contribuent à l'hypoxie fœtale : une réduction de
la capacité résiduelle fonctionnelle contrastant avec une demande périphérique élevée en
oxygène, un déplacement céphalique du diaphragme, un cardia incompétent et une vidange
gastrique incomplète facilitent les régurgitations de liquide digestif [12]. Une augmentation de
l'activité fibrinolytique au cours de l'accouchement accélère l'apparition des coagulopathies au
cours des hémorragies péri-partum [13].
Interférences pathologiques et pharmacologiques
Dans certaines circonstances, l'efficacité du contrôle neurohumoral de la pression artérielle est
réduite ou la transition vers la phase sympatho-inhibitrice est favorisée : le vieillissement, la
toxémie gravidique, une pathologie sous-jacente (cardiopathie, cirrhose, dysautonomie
neurovégétative), un médicament (alpha ou bêta bloquant, inhibiteur de l'enzyme de
conversion, antagoniste des récepteurs à l'angiotensine II, inhibiteur calcique), une
intoxication (par exemple, l'alcoolisme aigu ou chronique) [14] [15]. Le contrôle réflexe de la
fonction cardiovasculaire est altéré chez les patients avec une pathologie pulmonaire
chronique hypoxémiante [16]. L'hypoxémie aiguë facilite l'apparition d'une syncope
vasovagale au cours de l'hypovolémie modérée au travers d'une moindre libération de
noradrénaline, par les terminaisons nerveuses sympathiques [17] et/ou d'une vasodilatation
liée à l'adaptation métabolique régionale [18]. L'oxygénothérapie active le baroréflexe artériel
et ralentit le cœur [19] [20].
Les médicaments de l'anesthésie, en particulier les hypnotiques, interfèrent avec les
mécanismes compensatoires de l'hypovolémie. Chez le sujet normovolémique, un nouvel état
d'équilibre s'établit sous anesthésie générale, grâce à une adaptation cardiovasculaire à la
réduction de la demande tissulaire. En cas d'hypovolémie, les médicaments de l'anesthésie
rendent la pression artérielle directement dépendante de la perte volumique, en raison de leurs
effets cardiodépresseurs et vasodilatateurs ainsi que de leur action sur chaque composante des
arcs réflexes (mécanorécepteurs, centres vasomoteurs, transmission ganglionnaire et neuro-
effectrice des fibres sympathiques efférentes) [21]. Les caractéristiques de la technique
d'anesthésie idéale chez le patient hypovolémique seront une simplicité d'application, une
stabilité de l'effet pendant l'intervention d'hémostase, une facilitation de l'assistance