Climat / Durban
Climat / Durban : Recherche d’un compromis pour l’après-Kyoto
(MFI / 25.10.11) Sensibilisée sur les changements climatiques et le développement
durable, la communauté internationale, profondément divisée, se réunit fin
novembre à Durban en Afrique du Sud. Elle y cherchera un compromis difficile
pour sauver la planète et sa biodiversité à travers la suite à donner au Protocole
de Kyoto destiné à réduire les gaz à effet de serre.
Le Protocole de Kyoto, ratifié en 1997, seul instrument juridiquement contraignant
imposant des réductions d’émissions de gaz à effet de serre (GES) à 37 pays
développés, arrive à expiration le 31 décembre 2012. Les pays-membres de la
Convention cadre des Nations unies sur les Changements climatiques (CCNUCC)
vont-ils poursuivre le processus ? La question se pose. Pays riches et pays émergents,
devenus pollueurs avec l’industrialisation, ne sont pas d’accord sur le prix à payer. Au
sein des pays développés, les avis aussi sont partagés concernant la suite à donner au
Protocole de Kyoto. Tandis que les pays les plus pauvres qui polluent le moins mais
subissent de plein fouet les conséquences de la dégradation du climat réclament des
compensations.
En attendant l’Organisation mondiale de l'environnement
La conférence sur le changement climatique, qui se tiendra du 28 novembre au 9
décembre prochains à Durban, a été précédée cette année de conférences préparatoires,
notamment à Bangkok, Bonn et Panama. Elle sera suivie du 20è anniversaire du
Sommet de la Terre, à Rio, en juin 2012. Ce sommet Rio+20 portera essentiellement
sur l'économie verte dans le cadre du développement durable et de l'élimination de la
pauvreté, et sur la gouvernance internationale de l'environnement. Il devrait lancer une
« feuille de route vers une économie verte » incluant des objectifs et actions
spécifiques au niveau international.
La création d'une agence internationale spécialisée sous l'égide de l'ONU, qui
garantirait la cohérence des actions menées et leur suivi, ainsi que la gestion des
financements nécessaires à cette transition mondiale, serait à l’étude par certains pays.
Cette esquisse d'une Organisation mondiale de l'environnement (OME) nécessiterait
une vraie réforme de l'ONU pour que les règles de protection de l'environnement et
leur respect soient hissés au niveau des règles du commerce mondial par exemple.
L’Union européenne pour une suite conditionnelle
Les principaux pays émetteurs de gaz à effet de serre comme la Chine ou les Etats-
Unis qui, eux, n’ont jamais ratifié le Protocole de Kyoto, et le refus de plusieurs pays
(Canada, Russie, Japon) de s’engager pour une seconde période, montrent bien la
difficulté de la tâche. Seule l’Union européenne (l’UE) s’est prononcée sur une suite
de Kyoto qui reste conditionnelle. Après d’âpres négociations, les ministres de
l’Environnement des 27 pays-membres de l’UE, réunis à Luxembourg le 10 octobre
dernier, se sont déclarés « ouverts » à une seconde période d’engagement au titre du
Protocole de Kyoto « dans le contexte de la recherche d’un cadre global
d’engagement » et à condition que les autres pays industrialisés et en développement
fassent un effort équivalent. La Commission européenne, l’Allemagne et la Grande-
Bretagne ont refusé d’adopter une position plus volontariste. De même, des Etats
comme la Pologne ou la Roumanie restent opposés à toute modification concernant
l’échange ou la vente de crédits-carbone supplémentaires. L’UE plaide pour une
solution qui permette l’utilisation et le transfert de ces crédits-carbone à condition
qu’ils garantissent l’intégrité environnementale globale du mécanisme et préservent les
incitations à aller plus loin. La France, notamment, qui avait organisé une vaste
réunion, le Grenelle de l’environnement, soutient la création d’une organisation
mondiale de l’environnement qui associe les acteurs de la société civile.
Vers un accord global contraignant ?
Fin 2010, à Cancun, au Mexique, les participants s’étaient engagés à maintenir
l'augmentation moyenne des températures mondiales en dessous de deux degrés
Celsius par rapport au niveau préindustriel, ce qui est loin d’être le cas ; et de financer
un fonds de compensation, un « Fonds vert » pour les plus pauvres, au rythme de
100 milliards de dollars par an d'ici à 2020... La CCNUCC devait recevoir en outre
30 milliards de dollars promis par les pays industrialisés pour la période 2010-2012.
Enfin, les modalités de fonctionnement et de participation au mécanisme d'adaptation
et de transfert de technologie devaient être mises en route.
Des avancées sont quand même perceptibles. L’Australie et la Norvège ont proposé
d'adopter d'ici 2015, pour une entrée en vigueur en 2018, un accord global
contraignant qui inclurait les principales économies. Ses objectifs, fixer des
engagements de limitation des émissions de GES et établir un mécanisme de
vérification commun. Cette proposition mettrait fin au Protocole de Kyoto au profit
d'un cadre unique d'engagement et de contrôle (reporting and verification, MRV) des
actions entreprises. L’Australie prévoit d’instaurer une taxe carbone dès 2012 et
d’imposer un plafond d’émission aux industries les plus polluantes à partir de 2015.
Ou une approche « pas à pas » ?
La Chine, qui talonne les Etats-Unis en tant que premier pollueur de la planète, prend
aussi des mesures. Elle devrait tester à partir de 2013 des marchés pilotes dans six
régions, en vue d’instaurer un système national en 2015. Aux Etats-Unis, la Californie
a opté pour la mise en place d’un marché de carbone régional en 2013, avant une
généralisation en 2015. Des démarches qui ressemblent au système européen
d’échange des quotas d’émissions, le plus grand « marché » du carbone au monde
instauré par l’Union européenne pour réduire l’émission globale de CO2 et atteindre
ses objectifs dans le cadre du Protocole de Kyoto.
Le président sud-africain Jacob Zuma, hôte de la conférence de Durban, a tenu de son
côté à souligner que son pays faciliterait les négociations. « Nous exhortons toutes les
parties à trouver des terrains d'entente », a-t-il dit, proposant trois objectifs pour
l’Afrique : soutien aux processus multilatéraux, priorité à un résultat veillant à ce que
le régime climatique mondial protège l'environnement pour les générations futures et
importance pour les pays africains de s’adapter à un futur régime climatique qui repose
sur un régime efficace dans la réduction des émissions. Il a rappelé que l'état du
développement socio-économique de l'Afrique, et sa dépendance des ressources
naturelles pour la subsistance, rendent le continent particulièrement vulnérable aux
catastrophes naturelles telles que les sécheresses ou les inondations. Il s’est toutefois
félicité de la position commune adoptée par les Africains.
Un responsable du climat à l’Union européenne a certes déclaré qu’il ne s’attendait pas
à un « big bang » à la conférence de Durban mais a estimé, tout comme les Français
que des progrès peuvent être réalisés. Jos Delbeke, directeur général pour l’action
climatique à la Commission européenne, a déclaré également lors d’une conférence de
presse à Pékin qu’il ne se faisait pas d’illusions quant au défi qui attend les
négociateurs lors du prochain tour de discussions sur le sujet à Durban. Il a néanmoins
indiqué qu’il était optimiste quant au fait qu’une approche « pas à pas » pourrait
permettre de conduire à un traité mondial d’ici 2014-2015.
La Chine est considérée comme le principal bénéficiaire du « Mécanisme de
développement propre », un système du Protocole de Kyoto permettant aux pays
industrialisés d’atteindre leurs objectifs en matière de réduction de leurs émissions de
dioxyde de carbone en achetant « des réductions d’émissions certifiées », c’est-à-dire
en investissant dans des projets à faible taux de carbone lancés par des nations en
développement. Mais l’Union européenne, principal acheteur de ces crédits, a déclaré
qu’elle n’accepterait plus de crédits générés par des projets chinois une fois que la
phase actuelle de son marché d’émissions arrivera à expiration en 2012.
L’endettement des pays industrialisés et la crise de la zone euro risquent cependant de
mettre à mal des projets ambitieux en faveur de l’environnement.
Marie Joannidis
France-Brésil : Une Initiative sur le climat pour l’accès aux énergies propres
(MFI / 25.10.11) La France, qui copréside avec le Brésil « la sauvegarde des bassins forestiers
tropicaux », a lancé avec le Kenya en avril 2011 une Initiative sur le climat pour l’accès aux énergies
propres en Afrique et dans les pays les plus vulnérables au changement climatique. Une conférence
co-présidée par la ministre française de l’Écologie, du Développement durable, des Transports et du
logement, Nathalie Kosciusko-Morizet, et du Premier ministre kenyan, Raila Odinga, a souligné le
lien étroit existant entre les problématiques Energie, Climat et Développement. Elle a notamment
permis d’engager un dialogue de haut-niveau sur les questions de gouvernance, le renforcement des
capacités, la gestion de projets et le financement des projets d’énergies propres dans les pays en
développement. L’amélioration de l’accès à l’énergie est en effet, selon les experts, une condition
nécessaire à l’atteinte des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). Plus de 1,4 milliard
de personnes dans le monde, principalement en zone rurale, n’ont pas accès à l’électricité, dont plus de
550 millions en Afrique subsaharienne et 400 millions en Inde. En l’absence de politiques spécifiques,
ce nombre devrait se maintenir autour de 1,2 milliard à l’horizon 2030. Quelque 2,7 milliards de
personnes ont encore recours à la biomasse traditionnelle pour la cuisson. Ils pourraient être 2,8
milliards en 2030. Les populations les plus pauvres paient pour une énergie parmi les plus chères, les
moins efficaces et les moins durables. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) estime à 36
milliards de dollars par an les investissements nécessaires pour assurer un accès généralisé à
l’électricité d’ici 2030.
Marie Joannidis
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