Mercredi 24 juin 2009, 16h Salle du conseil, IPNL, 1e étage Conférence de Michel Paty Directeur de recherche émérite au CNRS Comprendre aujourd'hui les concepts et la théorie de la physique quantique Une réflexion philosophique Avec le temps et les décantations d'idées occasionnées par l'exercice de la physique quantique et par son développement aux plans théorique et expérimental, les questions posées par sa compréhension ne sont plus nécessairement les mêmes qu'à son époque pionnière, marquée par le “débat sur l'interprétation”. Nous aborderons cette question en nous situant autant que possible de l'intérieur de la physique quantique telle qu'elle est pensée et pratiquée de nos jours, en tentant de dégager la signification de ses propositions d'un point de vue physique. En préliminaire, nous proposerons une clarification sur le lien de la physique quantique aux probabilités, ainsi que sur ce que l'on entend en général par théorie physique et sur la signification des contenus de connaissance que celle-ci exprime. Considérant ensuite la théorie quantique dans son état actuel bien établi, nous montrerons les limitations de la conception selon laquelle elle consisterait en un formalisme mathématique complété par une interprétation chargée de relier ce formalisme aux données d'observation. La notion d'interprétation est elle-même ambiguë, mêlant l'interprétation théorique interne (liée aux définitions des concepts ou grandeurs) à une interprétation “philosophique” posée de l'extérieur (sur la nature de la connaissance). Nous indiquerons comment l'intelligibilité de la physique quantique est liée, comme c'est le cas des autres domaines de la physique (et sans doute de la connaissance scientifique, d'une manière générale) à une minimisation de l'interprétation externe. Il faudrait pour cela que les concepts quantiques soient admis comme des concepts physiques, et non seulement comme des grandeurs formelles, opératoires, ce qui peut se concevoir moyennant une extension de la notion de grandeur physique au-delà de la conception commune de grandeur à valeur numérique (et directement mesurable). En prenant donc le point de vue que les grandeurs quantiques sont les grandeurs physiques pertinentes pour le domaine quantique, ce qui peut être justifie aisément, plusieurs questions physiques et épistémologiques traditionnelles s'en trouvent éclairées différemment. Nous évoquerons, parmi celles-ci, la “mesure au sens quantique” (et son évanouissement de fait), la nature du principe de superposition (du statut de principe formel à celui de principe physique), la signification physique de l'intrication (ou non séparabilité) et de la décohérence. Si la théorie quantique apparaît ainsi comme une théorie physique portant sa signification interne, et donc descriptive, objective et explicative, son rapport à la philosophie s'en trouve clarifié, sans ingérences indues: banalisé, certes, mais non pour cela moins fondamental, puisqu'll concerne, pour son domaine, le monde qui est décrit et la manière dont la pensée parvient à le connaître en se le représentant.