Damien AMOSSE – Lycée Jean Zay - Orléans
Budget 2017 : la quadrature du cercle
Article de Guillaume DUVAL, Alternatives économiques, 20 septembre 2016
Le gouvernement doit prochainement présenter le dernier budget de la législature. Et résoudre
la quadrature du cercle(1) : respecter les engagements de la France - la priorité affichée constamment
depuis 2012 par François Hollande - en ramenant le déficit public sous la barre des 3 % du produit
intérieur brut (PIB) en 2017, tout en évitant de s'aliéner des électeurs supplémentaires à la veille d'une
échéance qui s'annonce difficile. Et cela dans un contexte économique qui s'assombrit, sous l'impact
notamment du Brexit et des attentats terroristes. Les derniers chiffres de la conjoncture ont fait l'effet
d'une douche froide : l'économie française a totalement stagné au printemps
Grâce à la politique monétaire hyper-accommodante de la Banque centrale européenne (BCE)
et à la baisse des prix du pétrole, l'année avait commencé en fanfare avec une croissance du PIB de
0,7 % au premier trimestre, soit 2,8 % en rythme annuel. Mais les chiffres du deuxième trimestre, publiés
le 29 juillet dernier, ont fait l'effet d'une douche froide : l'économie française a totalement stagné au
printemps (« croissance du PIB de 0,0 % »). La consommation des ménages a été atone,
l'investissement, qui semblait enfin repartir, a reculé de nouveau, tant du côté des entreprises que des
ménages et des collectivités, et les exportations ont elles aussi diminué. Certes, l'économie française a
malgré tout continué à créer des emplois (24 100 dans le secteur marchand au deuxième trimestre) et
le nombre d'inscrits à Pôle emploi s'est stabilisé, tandis que l'Insee annonçait, le 18 août dernier, que le
chômage était repassé sous la barre des 10 % au printemps.
Il n'en reste pas moins que ce coup d'arrêt, sensible dans toute l'Europe mais plus marqué en
France, a souligné la fragilité de la reprise engagée. Depuis est venu se greffer le Brexit : le Royaume-
Uni est le pays avec lequel la France affichait jusqu'ici l'excédent extérieur le plus important (+ 15
milliards d'euros en 2015). Le net ralentissement de l'économie britannique et la forte baisse de la livre
engendrés par le vote du 23 juin devraient limiter les exportations françaises vers le Royaume-Uni, mais
aussi les visites de touristes d'outre-Manche. Cet impact - difficile à apprécier - devrait cependant rester
limité.
Quant aux attentats, ils ont déjà eu un effet significatif sur la saison touristique cet été, notamment à
Paris et sur la Côte d'Azur. Leur répétition peut faire craindre que la résilience(2) manifestée jusqu'ici -
après quelques semaines les choses revenaient à la normale - ne se reproduise plus désormais.
L'impact risque en particulier d'être durable sur les décisions d'investissement des entreprises
étrangères.
Bref, les nuages se sont accumulés, même si l'objectif de croissance affiché par le
gouvernement pour 2016 (+ 1,5 %) semble toujours pouvoir être atteint. Ce ralentissement et les
incertitudes supplémentaires sur 2017 n'en compliquent pas moins la donne budgétaire.
Face aux nombreux mécontentements, le gouvernement a déjà commencé à lâcher du lest sur
divers fronts. Il a annoncé début 2016 un plan d'urgence pour l'emploi(3) doté de 800 millions d'euros
supplémentaires. La situation indigne faite aux demandeurs d'asile a nécessité 160 millions d'euros de
crédits supplémentaires. Les agriculteurs ont eux aussi reçu des soutiens additionnels(4). Le point
d'indice des fonctionnaires(5) a été - enfin - augmenté, après six ans de blocage. Et les collectivités
locales se sont vu quant à elles promettre que la réduction de la dotation que l'Etat leur versera en 2017
sera deux fois moins importante que prévu initialement, soit un plus de 1,2 milliard d'euros.
L'ensemble de ces mesures représente des dépenses non prévues dans le programme de stabilité
transmis à Bruxelles en avril dernier de 3,3 milliards d'euros cette année et 6,8 milliards (soit 0,3 point
de PIB) l'an prochain, selon la commission des Finances de l'Assemblée nationale. Pour compenser ce
- léger - dérapage, le gouvernement a déjà annoncé qu'il misait sur 2,1 milliards d'euros de surcroît de
rentrées en 2017 dans la lutte contre la fraude fiscale.
Il a surtout décidé de mettre en œuvre un tour de passe-passe : dans le cadre du pacte de
responsabilité(6), il était prévu que disparaisse en 2017 la contribution sociale de solidarité des sociétés
(C3S), un impôt qui sert à financer la sécurité sociale des travailleurs indépendants, soit une économie
de 3,5 milliards d'euros pour les entreprises. Cette suppression devrait être ajournée. A sa place, et
pour le même montant, le taux du crédit d'impôt compétitivité emploi(7) (CICE) sera porté de 6 % à 7 %.
Quel avantage ? Le CICE est, comme son nom l'indique, un crédit d'impôt : si les droits correspondants
seront bien acquis l'année prochaine par les entreprises, les débours(8) ne seront effectifs pour l'Etat
qu'à partir de 2018. De quoi donc annuler sans douleur l'effet budgétaire de la moitié des dépenses
supplémentaires programmées.
Malgré cette astuce, l'équation reste compliquée du fait de l'ampleur des baisses d'impôts
consenties aux entreprises. Les dépenses doivent donc être fortement réduites si l'on veut pouvoir, en
même temps, réduire les déficits. Et cela d'autant plus que le gouvernement entend aussi - à la veille