EVALUATION - Formation, moyens, habitude : Les obstacles à la production des statistiques
Le Sénégal a encore des efforts à faire en matière de production et utilisation de statistiques.
A l’heure de l’évaluation du premier schéma directeur de la statistique (2008/2013) et à
l’élaboration d’un nouveau, les spécialistes parlent des contraintes auxquelles ils font face.
Au Sénégal, les statistiques sont tout sauf une culture commune. Les productions sur le plan
national sont loin de couvrir tous les secteurs. C’est le cas des domaines tels que
l’environnement, le sport, la culture où les statistiques sont presque inexistantes. Ou alors,
celles qui sont disponibles connaissent un problème de qualité, faute d’unité de production, si
l’on en croit Amadou Talla Guèye, le président de l’Association sénégalaise pour la
statistique (Astat), dont l’assemblée générale de révision des textes et renouvellement des
instances a eu lieu le week-end.
C’est pour cette raison d’ailleurs que depuis 2004, le gouvernement avait entrepris une
réforme du système statistique national pour le rendre plus performant. Cela avait mené à
l’adoption d’un schéma directeur de la statistique pour la période 2008/2013. Lequel schéma
déclinait les actions nécessaires au développement de la statistique. Aujourd’hui, l’heure est à
l’évaluation de ce premier schéma et à l’élaboration d’un nouveau pour une période de cinq
ans. Venu présider la cérémonie, le directeur général-adjoint du l’Agence nationale de la
statistique et de la démographie (Ansd) Mamadou Fallou Mbengue a estimé que la qualité des
produits statistiques a été sensiblement améliorée, notamment les statistiques économiques et
financières.
«Le suivi-évaluation de la Stratégie nationale de développement économique et social (Sndes
2013/2017) élaboré par le nouveau gouvernement va s’appuyer sur un système d’information
constitué d’un tableau de bord d’indicateurs qui renseignent sur l’avancement de l’exécution
des actions prioritaires. Ces indicateurs seront renseignés par les services producteurs de
statistiques publiques», se félicite-t-il. Il reconnaît tout de même que, malgré les efforts, il
reste beaucoup à faire.
D’abord, parce que, seuls l’Economie, la finance et les ménages couverts par l’Ansd, ainsi
que les secteurs tels que l’agriculture, l’éducation et la santé disposant de bureau ou direction
de la statistique, sont couverts statistiquement. Et à ce niveau, il y a beaucoup de facteurs qui
interviennent dans l’explication. La formation en est un, mais elle est la moins difficile,
puisque le président de l’Astat affirme qu’au Sénégal on peut considérer que la formation est
correctement faite.
Intervention des bailleurs
L’autre élément, le plus décisif sans doute, est les moyens à mettre en place. «La production
des données est couteuse en temps et en argent. Le premier recensement a été fait en 1976. On
pouvait donc s’attendre à ce que 10 ans après, c’est-à-dire en 1986, il y ait d’autres
recensements, mais on l’a organisé en 1988. Après 88, il faut attendre jusqu’en 2002 pour
d’autres recensements. A chaque fois, ce sont des problèmes de mobilisation de fonds. Pour
les recensements en vue, rien que la collecte qui doit avoir lieu en 2013 coûte plus 16
milliards», explique M. Guèye.
Ensuite, c’est ce facteur argent qui fait que, même si le statisticien jouit d’une indépendance
scientifique, il est soumis à une dépendance sur son champ d’action. En clair, avec
l’intervention des bailleurs de fonds qui définissent leurs priorités, le statisticien peut être
amené à produire des données dans des domaines loin de la priorité du pays. Tout ceci sans
compter que le Sénégalais n’a pas la culture de la statistique. Autrement dit, il est informel,