Prière du Coeur, voie immédiate du bouddhisme et du christianisme
La statue du Bouddha historique, en posture méditative dans les sanctuaires du bouddhisme, et le Christ
en croix des contemplatifs chrétiens ne sont que des apparences, des repsentations. La voie de l'Eveil ne
s'attache pas aux formes religieuses, aux croyances qui opposent les hommes entre eux, mais à l'expérience
directe, libératrice...
Stèle nestorienne à Xian, où la croix christique sort du lotus bouddhique
Depuis l'Eveil du Bouddha Shakyamuni sous l'arbre de la bodhi, en Inde, il y a 2500 ans, on sait que les
dieux ne sont que des refuges et dans le meilleur des cas des supports à la prière, à la méditation qui
permettent l'union avec la conscience cosmique - Dieu ou Brahman, peu importe le nom qu'on lui donne.
L'utilisation du souffle dans les techniques d'éveil, la méditation sur le « vide » (Zen), le renoncement à
tout ce qui est illusion, dogme, attachement à l'ego, se retrouve dans la pratique chrétienne chez ceux qui
en ont fait un yoga de l'amour, centsur le Christ, sans tomber dans les pièges de la religion affective,
dogmatique, culturelle. Ermites de l'ancienne Russie, moines du désert pratiquant l'Hésychasme (prière du
coeur), contemplatifs du XVIème siècle (moines carmélites), ils ont, sans le savoir, rejoints les
contemplatifs du Vedanta, les adeptes du Zazen, et fait la même expérience que le Bouddha, assis sous
l'arbre de l'Eveil....mêmes postures du corps, mêmes techniques méditatives.
La garde du coeur
Le bouddhiste pratiquant connaît l'importance de la respiration, le prâna, qui prend source dans le coeur,
l'anâhata chakra.
Anahata chakra, chakra du coeur
« Je n'envoie pas de bois pour le feu des autels » répond le Bouddha aux Brahmanes adorateurs du feu,
« j'allume une flamme en moi-même. Mon coeur est l'autel, la flamme mon ego maîtrisé »
On retrouve cette pratique du contrôle du souffle et de la méditation sur le coeur
chez les Pères du désert, les chrétiens du 5ème siècle qui s'appliquaient à la
prière du coeur, qui deviendra la technique favorite du mont Athos. Dans l'un
des textes de base des chrétiens orthodoxes de Grèce et de Russie - La Philocalie
et la garde du cœur -, les moines de l'Athos lisent les conseils des grands priants,
Pères du désert ou grandes figures du christianisme. Le moine Caliste, qui fut 3
mois patriarche de Constantinople, enseigne ainsi la prière du coeur :
« Rassemble ton esprit de son habituelle distraction et de son vagabondage;
pousse le alors lentement dans ton coeur en me temps que ton souffle et
attache-toi à la prière : « Seigneur Jésus-Christ, ayez pitié ». Parallèlement au
souffle, introduis les paroles de la prière.
Le Sacré Coeur
Jean Climaque, moine au mont Sinaï, auteur de L'Echelle (Klimax), véritable somme de la vie spirituelle,
recommande à ses moines : « ...Etends-toi, sans lâcher la prière, et que le souvenir de Jésus partage ton
sommeil...Hors la respiration, mets-toi hors de toutes choses durant la prière si tu veux ne faire qu'un avec
ton seul esprit. » Nicodème, le champion de la renaissance spirituelle au sein de l'orthodoxie, écrira à la
fin du 18ème siècle : « L'esprit une fois rentré dans le coeur doit prier. Que votre esprit donc, ayant trouvé
le verbe intérieur, ne lui permette de dire autre chose que la courte prière appelée monologique :
« Seigneur Jésus-Christ, ayez pitié de moi ». La rétention mesurée de la respiration subtilise le coeur dur
et épais. Et les éléments humides du coeur convenablement comprimés, échauffés, deviennent de ce fait
plus tendres, plus sensibles, plus humbles. Le cerveau se subtilise aussi et du même coup avec lui l'acte de
l'esprit devient uniforme, transparent, plus apte à l'union qui procure l'illumination surnaturelle de Dieu, la
Philocalie. Cette pratique chrétienne de la prière, issue des Pères du désert, ne s'encombre pas des formes
extérieures et illusoires de la prière. Elle va droit au coeur en harmonie avec la respiration. De la même
façon que les moines hésychastes utilisent la répétition du nom de Jésus, centrée sur le coeur,
parrallèlement à leur respiration, les bouddhistes du Tibet méditent sur les Dharanî, litanies de formules
dont le but est de fixer l'esprit (de Dhârana : fixation). Ils disent : « Pour l'absorption en Samadhi, on
acquiert une vérité : par une dhâranî, on la fixe et on la conserve. »
Sutra du Coeur
Le Sutra le plus lu par les pratiquants du Zen est le Shingyo, le Sutra Hridaya (en sanskrit : « voie du
coeur »). Il est considéré par la pratiquants du Zazen comme la voie immédiate. On retrouve la même
méthode expérimentale dans le bouddhisme tantrique du nord de l'Inde. Celui qui fait l'expérience de la
méditation doit « se baigner dans le souffle » (Prâna - respiration), en harmonie avec l'univers tout entier.
Les maître disent « Les planètes et les étoiles proches et lointaines sont toutes des réserves inépuisables
du Prâna, dynamisant la Terre avec des flots d'énergie transmis par leur rayonnement. ». Pour eux, le
coeur de l'Univers est aussi le coeur de l'homme.
UN YOGA CHRETIEN
Dans les récits d'un pèlerin, un vagabon de Dieu, moine orthodoxe itinérant, raconte son expérience de la
prière perpétuelle, l'on prie en permanence le nom de Jésus, sur chaque mouvement de la respiration.
C'est l'époque de la guerre de Crimée, avant l'abolition du servage, entre 1856 et 1861. Le moine errant
s'en va de village en village, dort dans les bois ou sur la paille d'une grange, et il prend des notes, au jour
le jour. Il ne s'attarde jamais à dépeindre le monde des apparences. Il est à la recherche de Dieu dans la
grande tradition chrétienne dite du « désert » (calme - silence - contemplation). Le pèlerin russe, à la
recherche d'une méthode de prière efficace, s'en va voir un starets, un maître spirituel. Il écrit : « Le starets
ouvrit la Philocalie, choisit un passage de Saint Syméon le Nouveau Théologien et commença : « Demeure
assis dans le silence et dans la solitude, incline la tête, ferme les yeux; respire plus doucement, rassemble
ton intelligence, c'est-à-dire ta pensée, de ta tête dans ton coeur. Dis sur la respiration : « Seigneur Jésus-
Christ, ayez pitié de moi » à voix basse, ou simplement en esprit. Efforce toi de chasser toutes pensées,
sois patient et répète souvent cet exercice. »
Il s'agit réellement d'une discipline spirituelle, qui n'a rien à voir avec les prières affectives; les jeux de
l'imagination, les superstitions religieuses. Nous sommes en présence d'une technique de l'Eveil semblable
à celle du Bouddhisme. « Tu sais que la raison de tout homme est dans sa poitrine, lui dit le starets. A
cette raison, enlève donc toute pensée (tu le peux si tu veux) et donne lui le « Seigneur Jésus Christ, ayez
pitié de moi ». Efforce toi de remplacer par cette invocation intérieure toute autre pensée et, à la longue,
cela t'ouvrira le seuil du coeur, c'est là un fait prouvé par l'expérience. ». Cette pratique, qui vient
des textes patristiques sur la prière spirituelle et la garde du coeur, rassemblés
par les moines du mont Athos, est un véritable yoga chrétien.
Garde du coeur, essence de la prière hésychaste
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