La croissance du PIB réel est sous-estimé (mesure des changements dans la qualité) : ajustements inexactes dans certains
secteurs (finance, santé, informatique). De même, le PIB évalue de manière insuffisante la production non marchande :
éducation, infrastructures et santé sont simplement évalués à leurs coûts de production. Tout comme l’économie informelle, les
activités légales non déclarées ou le travail domestique (autoconsommation, autoproduction…) voire le travail bénévole ne sont
pas comptabilisés. Ce n’est en effet pas la valeur d’usage de l’activité que prend en compte le PIB mais celle marchande.
Dans des économies qui se développent expressément grâce aux services, quid de la mesure de la valeur de ces services ?
b) PIB, pauvreté et inégalité
Le PIB ne posant pas la question de l’utilité de ce qui est créé, ni des conditions sociales, il est limité : problème de la répartition
des richesses. Le PIB/hab ne dit rien des disparités nationales. De plus, hormis voiler les inégalités nationales, le PIB exagère la
pauvreté, notamment à cause des évaluations monétaires. D’où, selon J.P. Délas, une « minoration du PIB en proportion du
degré d’inégalité » (Economie contemporaine).
2.2. Les dégradations des CDV occasionnées par les excès du PIB
a) La question environnementale
Il ne prend pas en compte les dégâts occasionnés lors de la production, les atteintes au patrimoine collectif ou bien la
production d’externalités. Le travail payé est productif malgré la production d’externalités nuisibles ou inutiles, dégradant les
conditions de vie des populations : pollution, armement, épuisement des ressources naturelles… Les dépenses de réparation
sont mêmes des facteurs de croissance du PIB (« Vive les catastrophes, vive la croissance ! »).
b) Les nuisances
Bruit, panneaux publicitaires, accident de la route… PIB ignore le qualitatif. Les externalités négatives sont comptabilisées et
certaines positives ne le sont pas (« ce qui a de la valeur n’a pas de prix » Généreux).
2.3. De l’impossibilité du PIB dans la mesure des CDV. Quelle méthode pour évaluer les CDV ?
a) PIB et données sociales : les nouveaux indicateurs de « la richesse des nations et du bien-être des individus » S-S-F
On met en avant des constituants et des indicateurs objectifs des CDV, en mesurant les apports essentiels à la qualité de vie :
niveau de vie, durée de vie, niveau d’éducation, accès aux soins, accès à l’eau potable, inégalités sexuées… Indicateurs mis en
place par des Etats ou des institutions internationales (double prise de conscience ?) : PNUD, BM, FMI, ONG… Liste exhaustive :
IDH, IPH (1-2), indice d’Osberg et Sharpe, épargne nette ajustée, indicateur de progrès véritable, indice de santé social, BIP 40…
b) CDV et bien-être : une ouverture ?
La question environnementale : PIB vert, IBED, IBEE… Corriger le PIB en retranchant des dépenses et en insistant sur des
éléments oubliés par l’indicateur de richesse général. Le bien-être ? Sen et la part démocratique (privation de libertés et
capacité de faire). Donnée subjective ! Comment calculer ? Bonheur Intérieur Brut (BIB) au Bhoutan ?
3. « Contre le PIB » dans l’appréciation des CDV : un procès excessif ?
3.1. Doit-il être pris comme un indicateur de richesse ou comme indicateur des CDV ?
a) Un indicateur économétrique qui n’a de sens qu’en fonction des usages qui en sont faits par la réflexion et l’action
La naissance du PIB : unification du langage économique, convention sur les indicateurs, exhaustivité de l’information
économique : le PIB = indicateur avec des buts assignés. On ne peut pas reprocher à un indicateur qui n’a pas été construit pour
cerner le bien-être de fournir des chiffres qui ne correspondent pas à l’évolution de ce dernier.
Utilisation politique du PIB : Stiglitz : « le PIB est utilisé de manière erronée ». Utilisation libérale du PIB : « l’illusion néolibérale »
selon René Passet. Quelle place pour la richesse ? Une reconsidération ? PIB anticipé et l’évaluation potentielle de la croissance
b) Une simple valeur économique, comptable et mathématique
Le PIB ne mesure pas la richesse mais son accroissement. Il est indispensable dans la société contemporaine : ex de la répartition
de la VA entre salaires et profits. Il reste d’une grande valeur conceptuelle pour évaluer la performance économique. C’est une
valeur objective, qui condense une multitude d’information et qui ne peut donc être assimilée à la subjectivité caractéristique de
l’évaluation des CDV. « Lorsque les instruments de mesure sur lesquels repose l’action sont mal conçus ou mal compris, nous
sommes quasiment aveugles » S-S-F.
c) Subjectivité des CDV et disparités internationales
PIB dépend du système des prix et des salaires: il ne peut donc pas forcément refléter les CDV. Il n’y a pas de prix uniques,
même sur les marchés internationaux. Donc, comment prétendre évaluer les CDV par le PIB ?
De même, les conditions de vie sont assimilées à des variables et considérations socioéconomiques, propres à une culture, à un
environnement, à des décisions et à des choix sociétaux nationaux. La mesure de la différence et de la subjectivé ne passe pas.
3.2. Coût d’opportunité et réparation nécessaire
Il est difficile de comparer les marchés dans le temps quand les produits changent. De plus quel coût d’opportunité ? Si une
plage, après pollution, fait perdre toute l’activité à la région ? Exemple de la catastrophe de l’Erika (1999) : même si la pollution
et son nettoyage ont entraîné une hausse du PIB, qu’en aurait-il été si rien n’avait été fait au vue du potentiel touristique de la
région ? C’est la confrontation entre le résultat au moment t et à celui au moment t+1 qui permet de définir le choix à opérer : le
PIB n’est qu’une traduction économique de l’évolution de ce passage entre t et t+1.
Bibliographie
Au-delà du PIB. Pour une autre mesure de la richesse (1999) – D. Meda
Du bien-être des nations : le rôle du capital humain et social (2001) – Rapport de l’OCDE
Les nouveaux indicateurs de richesse (2005) – Gadrey & Jany-Catrice
L’économie de l’environnement (2007) – Bontems & Rotillon
Rapport Stiglitz-Sen-Fitoussi – Richesse des nations et bien-être des individus (2009)