JEAN CHRISTOPHE La grande traversée des âmes EPOPEE La tradition dit que Lao tseu s’enfuit de chine vers l’ouest assis sur un bœuf. Il confia son testament philosophique aux douaniers avant d’arriver en Inde. Certains pensent que c’est à son retour qu’il a diffusé son enseignement. D’autres affirment qu’il n’a jamais existé et on ne sait où il est enterré Lao-Tseu dit que : « Il y avait quelque chose d’indéterminé avant la naissance de l’univers. Ce quelque chose est muet et vide. Il est indépendant et inaltérable. Il parcourt partout sans se lasser jamais. Il doit être la mère de l’univers. Ne connaissant pas son nom je le dénomme Tao. Je m’efforce de l’appeler grandeur. » PROLOGUE Plus d’une fois, j’avais vu le bonhomme à la cafétéria ; avec son air perdu, il devait être un de ces étrangers errant à Paris. Son costume était limé et ses chaussures avaient fait des milliers de kilomètres, sa démarche et ses gestes elles ne manquaient pas d’une certaine noblesse. Le type avait l’air de chercher des amis ou à se faire inviter à boire ou à manger. Il pouvait rester des heures attablé devant un unique café ou a rêvé sur un banc du majestueux hall d’entrée de la cité. Il regardait les étudiants et les visiteurs et souriait à tout le monde. Une rougeur apparaissait sur ses joues quand il fixait les filles, certaines le remarquaient et n’hésitaient pas à lui sourire en retour, il semblait inoffensif. Comme il était muet, il écrivait sur des bouts de papier ou sur une sorte d’ardoise quand il était parfois accompagné d’autres personnes. Moi, je venais là pour lire ou écrire, j’en sentais de plus en plus un impérieux besoin et j’aimais de plus en plus cela. J’avais du temps, je travaillais peu et éprouvait pleins de choses à dire, mais avec ma famille où mes amis il en allait autrement, car je préférais me taire pour ne pas les tourmenter. Nous étions donc là tous les deux, sans parler ni tenter des mimiques de circonstances ; nous nous sentions bien ensemble. Il fredonnait ou psalmodiait un ravissant chant que je ne connaissais pas, en fait, j’avais trouvé un ami et je ne le savais pas. Un esprit mal tourné me suggérait qu’il finirait par me demander un service quand soudain un message fort et clair s’immisça dans ma tête. — C’est moi qui suis à ton service. Je fus surpris de la réalité de ma perception et l’idée qu’il m’eût envoyé ce message me mis mal à l’aise. Parfois je lisais dans les pensées, mais je n’avais encore jamais perçu une telle puissance d’émission. Gêné, je me décidais de prendre congé de mon hôte, mais un oiseau vint se poser sur son épaule. Je fus interloqué par le petit Piaf qui m’immobilisa aussitôt. En se figeant pour ne pas l’effrayer, le bonhomme rougissait en me regardant dans les yeux pour que je lui confirme l’apparition. Quelle vertu demeurait chez cet homme pour avoir la confiance de l’oiseau, ce n’est pas leurs façons, dans nos régions ils sont plus craintifs ? Une seconde nature chez moi consiste à chercher les signifiants et les signifiés et les lois de la synchronicité ; mais en général je les écarte aussitôt afin de ne pas dériver dans des interprétations d’horoscopes de quotidiens. Avec les yeux de la malice, mon complice tourna la tête doucement pour voir l’oiseau sur son épaule, ses lèvres rejoignirent presque son bec. C’est bête, mais ce petit rebondissement nous rapprocha plus encore. Dans un signe de bravoure, le moineau bâtit des ailes pendant un moment puis s’envola en emportant nos pensées et nous laissa un moment de silence. Je demandai alors à mon hôte son nom, tout en me présentant. Je m’appelle Malki. Mon compagnon sortit de son sac sa petite ardoise, c’était une glace de voyage. D’un geste méticuleux, il prit dans la poche intérieure de sa veste un feutre noir et il cala le miroir sur son genou pour écrire son nom et me le tendit. Tout d’abord, le reflet d’un rayon de soleil m’éblouit, en l’inclinant je pus lire les lettres S, A, T, Sat dis-je à haute voix. Mon hôte fit une sorte de révérence comique de la tête qui m’amena à rire. — Tu voulais te mettre à mon service ? Tu cherches du travail ? — Sa réponse m’apparut instantanément dans la tête. Non je ne sais pas travailler et les humains sont méchants et ingrat. — Je lui fis signe d’écrire pour éviter tout quiproquo. J’avais besoin de garder toute ma tête alors lui dodelina la sienne, mais s’exécuta. L’homme en avait gros sur le cœur. Je continuais le dialogue à haute voix et lui à écrire sur son miroir qu’il effaçait à chaque fois avec application — AH l’ingratitude humaine ! Mais pourquoi veux-tu te mettre à mon service ? — Parce qu’on m’a supprimé ma mémoire. — Qui, quoi, où, comment ? Voulus je dire, mais je me repris pour ne pas que cela semble un interrogatoire de police. — Je me souviens d’hommes lisant et écrivant des livres comme toi. — Je n’écris pas de livres moi, je matérialise juste des pensées, ça m’aide à réfléchir. — Pourrais-tu raconter ce monde s’il te plait, pour les gens comme moi qui n’ont plus de mémoire ? — Je n’écris pas pour être lu et puis composer le récit de ce vaste monde me parait impossible. J’appuyai ma phrase avec un mouvement circulaire des bras vers le ciel. — Ce monde non plus n’a plus de mémoire ? Enfin si et il y a même des encyclopédistes. — Je suis perdu sans ma mémoire, pourrais-tu alors raconter une histoire du monde et m’y donner quelque chose à réaliser, comme une mission s’il te plait ? Je regardai à nouveau la glace et vis mon visage pour la première fois de la journée. Je souriais, mes traits étaient détendus, c’était le visage que j’aimais. Je lui tendis le miroir en redisant son nom d’air un pensif, SAT. Ma tête commençait à bourdonner comme un essaim d’abeilles, mes paupières tombaient sans que je puisse les retenir, mes pieds me picotaient et s’échauffait. J’enlevais mes chaussures puis fit un signe à Sat que j’allais m’allonger un peu. Mon cerveau s’emplissait d’énergie, comme une cornemuse qui enfle. Je sentais mon corps s’engloutir dans un océan de vibration et progressivement je me trouvais comme porté au-dessus du sol. Les personnes qui ont frôlé la mort disent voir passer en un instant devant leurs yeux les expériences de toute une vie. Moi, j’étais seul comme satellisé dans l’espace ou dans un creux de la terre et l’histoire et les souvenirs du monde m’envahirent et défilaient devant mes yeux ; je savais que je devais me tenir tranquille au centre de cette tornade kaléidoscopique afin de ne pas être aspiré vers je ne savais quel chaos. Ainsi je pus accomplir cet étonnant voyage. *** Il existe un continent parallèle où les âmes demeurent en dehors de l’espace-temps. Je sentais pouvoir m’y déplacer instantanément en tout temps et en tout lieu. Je voyais mon corps allongé dans le parc et j’étais entouré de promeneurs étranges, ses ombres répétaient en boucle les mêmes choses mais ce n’était pas les joggeurs du parc. Je pensai aux fous de l’hôpital voisin de sainte Anne, mais pour les libérer de leur mal, on les laissait de nos jours cloitrés comme des contagieux ou des mourants. Je me souvins alors que près du jardin il y avait eu des nécropoles gallo-Romaines, était-ce leurs âmes qui revenaient roder par ici ou bien celles des catacombes que l’on avait créées au-dessous du parc dans les carrières souterraines ? Les ossuaires de millions de Parisiens avaient été déchargés là, suite à la fermeture des vieux cimetières de la capitale, comme celui des saints innocents près du Louvre qui datait des Mérovingiens. Les cadavres ou ossements récupérés dans le fleuve depuis des milliers d’années avaient transité par ici. On retrouva des os fossilisés dans la Seine datant de deux cent mille ans ! Finalement, on les évacua par centaines de tombereaux au-delà de la périphérie de la ville, pendant la création du parc. En fait, je voyais des fantômes qui tournaient en rond ; j’entendais leurs pensées, pas celles de leurs histoires personnelles, de leurs problèmes de travails, d’amour ou de santé, mais celles de leurs explications du monde qu’ils évoquaient ou plus exactement radotaient. Je saisissais leurs explications de leur monde qui se voyait sur leurs têtes renfrognées, craintives, interrogatives, muettes, mauvaises ou pleines de gratitudes et de joies. Le reflet de leurs justifications avait marqué leurs âmes errantes. Elles ne me paraissaient pas communiquer entre elles, mais celles qui m’apercevaient semblaient dire sans attendre de réponse. Que sommes-nous ou allons-nous ? Peu de lieux sur terre détiennent le privilège d’avoir vu défiler en si peu de mètres carrés autant d’inconnus et de célébrités mortes ou vives. Les allées du parc ont abrité les amours, les chagrins, les méditations, les réflexions et les rêveries de Jean Paul Sartre, Simone de Beauvoir, Jean Cocteau, Colette, André Breton, Hemingway, Henri Miller, James Joyce, Samuel Beckett et pourtant. Jamais ce morceau de terre ne fût jamais honoré, à peine s’il fut cité dans un vers du poète populaire Jacques Prévert. Pablo Picasso, Paul Gauguin, Henry Matisse, Soutine, Chagall, Salvador Dali ont vu la lumière et les ombres de ce petit bijou de verdure, mais aucun ni a vu un chef œuvre, juste Henri Rousseau y a peint quelques esquisses naïves. Lénine et Trotski ont aussi habité le quartier, Lénine y promenait Inès Armand l’un des secrets historiques les mieux gardés de l’Union soviétique. Ils y cachaient leur grand amour trop petit-bourgeois pour la révolution prolétarienne russe et son centralisme bureaucratique dictatorial. Pendant ce temps, Trotski lui jouait aux échecs en attendant de répandre la légitimité de la violence et de la terreur au sein de la nouvelle société matérialiste. À cette même époque, la révolution plus pacifique et plus spirituelle du moine missionnaire Vivekananda récolta moins de succès. Malgré ses brillantes interventions au parlement des religions de Paris et de Chicago il vint ici sur ces bancs se reposer, malade et désabusé. Presque invisible au sein du parc, la station de chemin de fer Cité universitaire brasse elle les âmes des vivants, par wagons vers les quatre coins du monde. Pendant que dans les bacs à sable, les enfants observent tous ces manèges en se construisant des personnages et des châteaux qu’ils aimeraient devenir ou posséder un jour. Les multiples facettes de la société des hommes vont être exposées là, mais n’ayant aucune spécialité ni qualité particulières, vous pouvez à la lecture de ce livre, vous départir de l’esprit de sérieux qui a accaparé nos cerveaux et domine notre temps. Vous pouvez baisser la garde, car aucune conversion ni aucun militantisme partisan ne vous sera imposé, même pas celui de Sartre qui exigeait de nous, de choisir pour l’humanité entière : « Notre responsabilité est beaucoup plus grande que nous pourrions le supposer, car elle engage l’humanité entière... » Quand on connaît les résultats des révolutions politiques, idéologiques et religieuses que lui ou d’autres supportèrent pendant son siècle : on comprend mieux le soudain fatalisme et la lassitude qui a submergé nos contemporains comme une espèce d’envie de laisser faire, de ne plus croire à rien. La découverte de l’essence de notre être s’est transformée en un tricotage et un détricotage du néant entre ceux qui voient le mal partout et ce qui y voit le Bon Dieu, mais comme cela peut se trouver être les mêmes ; une foultitude de combinaisons philosophiques intermédiaires ont fleuri. Personnel et impersonnel, duel et non duel, une seule chose semble certaine le royaume de Dieu n’est toujours pas de ce monde. Plein d’enthousiasme et sans calcul, j’ai parcouru un monde fascinant, en cherchant sa vérité et en suivant mon étoile personnelle. C’est au cœur de cette quête où l’onde est paisible et sans fin que j’écoutais les messages de mes semblables, des sages, des savants et des fous qui essayent de percer plus loin les mystères de la vie et de la psyché. À présent sous le feu de cette intense et suave vibration ma langue se délie, je ne peux plus la tenir et je vais tenter de dire ce que j’ai entendu, vu et su dans cette étonnante traversée. Des regrets bien sûr j’en ai et je suis toujours étonné d’entendre des gens affirmer qu’ils ne regrettent rien de leurs décisions ou positions passées, mais je peux quand même chanter la chanson de ceux qui ont vécu la passion, car rien de grand dans ce monde ne s’est fait sans passion. « Non rien de rien, non je ne regrette rien » de ce voyage. Les défis que nous ont lancés les philosophies, les sciences, les religions, les technologies, les politiques, les arts, les cultures et notre propre nature deviennent titanesques. Si vous trouvez parfois mon histoire trop pesante, vous pourrez vous rafraichir les idées en nous identifiant à des bergers essayant de rassembler par mont et par vaux des troupeaux de chèvres cabriolantes. Si par contre ces choses vous captivent, alors abordez-les comme une quête initiatique et vous serez tels des compagnes et compagnons du Graal. Ayez de l’assurance et des fulgurances et avancez pas à pas comme ce fameux funambule entre les Twin Towers. Le voyage dans le royaume des morts est le plus extraordinaire qu’il soit. Cela n’est pas aisé, mais cette antichambre de la renaissance, est celui qui a fait les antiques héros ou héroïnes. Hélas tout le monde n’achève pas la quête d’immortalité, mais sur cette voie béante qui s’est ouverte à moi dans ce jardin aux allures de paradis, je me propose de vous y guider aussi par ce récit. Je vais tenter de vous dévoiler un monde nouveau qui peut être pensé avant d’être né. Entre ce monde que nous devons quitter et celui que nous aborderons, il n’y a en fait qu’un grand pas. Il faut juste tenir votre attention. Cette histoire vous fera autre et vousmême à la fois, ce récit est le vôtre. Devant nos yeux incrédules s’opèrent des transformations qui semblent ne plus finir et effectivement elles ne termineront pas. Nous vivons sur notre bonne vieille terre une accélération exponentielle de connaissances, de notre écosystème, de notre humanité, de notre identité d’homme, de notre planète en bordure de galaxie et de notre soleil bien aimé qui brille magnanime pour chacun d’entre nous. Après cinq siècles de bouleversement où l’homme sûr de sa science et de sa technologie a martyrisé toutes les natures sur son passage. Les catastrophes s’enchainent à présent les unes après les autres et l’avenir nous apparait comme un grand trou noir. Tout le monde cherche les solutions pour sauver la biosphère, la biodiversité, nos bourses, nos civilisations les peuples et la paix à Jérusalem. Les sommets internationaux se succèdent avec les cortèges de limousines de tous les puissants de la terre, mais ils nous avouent en creux leur impuissance dans de longues circonvolutions qui doivent les faire tenir jusqu’aux prochaines élections. Les rois sont nus, les tomates poussent hors sol et le plancher des vaches pourrait bien se vitrifier dans une apocalypse thermonucléaire. Nous l’avons déjà frôlé à Cuba pendant la troisième guerre mondiale entre l’empire des USA et celui de l’URSS. Une guerre que l’on a dite froide mais qui a causé de très nombreuses victimes de par le monde. C’est tout simplement vertigineux, le sol se dérobe, comme si une intelligence farceuse nous tirait un tapis sous les pieds pour une sorte de gag cosmique. L’homme marche se tient sur un podium, sûr de son importance, imbu de son érudition, de ses biens et de sa prestance, puis il trébuche s’assomme et se retrouve douloureusement à terre, impuissant et misérable. Le proverbe nous dit bien que c’est en s’appuyant sur la terre que l’on doit se relever à nouveau, mais la sagesse est souvent longue et laborieuse à venir. Zeus lui-même roi des dieux, dut demander à Prométhée un bon coup de hache sur sa tête pleine de spasmes douloureux pour enfin accoucher d’Athéna la déesse de la sagesse. Qu’est-ce qui pourra nous guider dans ce futur incertain et sur quelle science et quelle sagesse reposera notre foi ? Qui d’entre nous est capable de refaire la célèbre équation d’Einstein ? Pour la plupart, nous sommes obligés de le croire sur parole. Aux mieux nous essayerons de comprendre la relativité générale, les technologies qui en sont issues n’ont fait que renforcer notre foi dans la formule simplifiée Matière = Énergie. Qui est capable de refaire ou certifier le cheminement de l’arbre de la vie, des particules élémentaires en passant par les bactéries unicellulaires jusqu’à l’homme moderne ? Là aussi nous devons accorder notre crédit à des spécialistes ou essayer de comprendre leurs débats. Franchement comment la plupart d’entre nous sauraient que la terre est ronde si on ne nous avait pas transmis l’information ? Nous pouvons regarder avec condescendance nos ancêtres, mais en fait nos connaissances exactes ou erronées nous viennent par d’autres. Nos parents, nos professeurs nos livres et bien sûr la nature ; nous ne savons que réciter les connaissances transmises d’âge en âge et si nous pouvons en expérimenter nous-mêmes quelques-unes, cela permet de gouter à une victoire d’enfants qui ont compris la leçon. La sagesse forgée depuis des temps immémoriaux par la longue odyssée de l’homme sur cette bonne vieille terre nous a conduits jusqu’à présent et les mythes et les religions nous ont évoqué cette histoire. Les bruits et les fureurs n’ont pas été racontés que par des idiots pour des idiots, ne partageons-nous pas les mêmes sentiments et les mêmes interrogations que nos ancêtres face à un monde en perpétuelle transformation ? Une multitude de surprises quasi magique apparaissent au quotidien et aujourd’hui comme hier des monstres terrifiants peuvent surgir à chaque instant pour nous pétrifier de peur ? Écrivons-nous notre avenir, tissons-nous notre destin ? Dressés les uns contre les autres nous avançons vers une grande extinction des espèces comme notre terre en a déjà vécu le long de ses seize milliards d’années. Après les attaques d’astéroïdes et les ères de glaciation, la menace la plus imminente pour nous c’est nous. Notre géniale espèce et son équilibre précaire de la terreur peuvent à présent s’exterminer. Nous avançons dans une sorte de processions suicidaires où l’apocalypse est finalement devenue rationnelle pour tout le monde. Dans quel état allons-nous sortir de cette mauvaise passe. L’exterminateur vit en nous, et les armes de la bête sont la science et ses techniques. Comment en sommes-nous arrivés là ? Comment en l’espace de dix milles années avons-nous conquis, maitrisé et dominé notre environnement et qu’avons-nous fait de ce fabuleux progrès ? Possédons-nous des ressources pour faire face à ces immenses défis, trouverons-nous une nouvelle terre ou un espace vierge à explorer ? Les sciences et les techniques nous sauveront elles, vers quel dieu, prophète guru ou messie nous tourner ? Pouvons-nous compter sur des extraterrestres compatissants ou paternels pour nous aider ? Nos ancêtres avaient-ils deviné et préparé nos troubles ? Nous ont-ils laissé des clés d’un monde oublié ou caché à redécouvrir ou avançaient-ils eux aussi en aveugles, pleins de furies et de désespoirs ? Que faire des sagesses, des légendes et de l’histoire pleine de carnages ? Avez-vous une idée sur la question ? Êtes-vous victime ou coupable ? Êtes-vous un coupable qui se victimise ou une victime qui se culpabilise ? Nous avons arpenté la terre et avons étayé le ciel comme on construit un temple, mais à présent, où donc se trouve la voie, depuis que les sciences et les techniques ont décodé et violenté les lieux sacrés ? Où coule la liqueur d’ambroisie des druides et des dieux ? Pouvons-nous encore nous laisser bercer des chants qui ont bercé nos ancêtres. Des épopées mythiques ont pourtant tracé cette quête vers les réponses de l’absolu. Nous pouvons encore parcourir leurs sommets et leurs abîmes et sans craindre que les flots nous engloutissent, n’oublions pas ces mains secourables les amis. Il faut lire au-delà des images métaphoriques et même au-delà des exposés les plus rationnellement didactiques pour s’instruire et vivre libre. Que ceux qui ont des yeux voient. Que ceux qui ont des oreilles entendent. Que ceux qui ont un cerveau comprennent. Que ceux qui ont de l’esprit s’assagissent Que vivent à nouveau les grandes épopées. Vive Gilgamesh à la recherche du Super Sage. Vive la conquête du glorieux Rama pour retrouver son honneur et son trône. Vive le Mahabaratha bondé d’actions et de réflexions et d’ordre du fascinant Krishna. Vive Hanuman et le Chalisa, le chant du glorieux homme singe serviteur du tout puissant. Vive l’Odyssée d’Ulysse à la pensée chatoyante et à son immortel retour. Vive l’incroyable exode de Moïse dans la quête de l’Eden. Vive le testament de Jésus Christ dans la quête de la paix. Vive Ovide et ses métamorphoses Vive Merlin l’enchanteur Que le vent de la liberté soufflant sur ces récits et sur les légendes antiques nous berce et nous imprègne et nous amène à voir et sentir l’ancestrale vision de l’Univers, son unité et ces sagesses admises depuis l’aube de l’humanité avant la profusion avant la confusion. Cette antique vision du monde se révèle à nous en prenant de la hauteur et du recul, la compréhension du monde se fait jour, le passé se découvre et le futur s’offre à nous. Voici l’initiation des anciennes traditions où l’on doit se plonger dans les profondeurs de notre être que la modernité pressée a fini par nous voiler. Cette réalité va nous revenir bien familière, car la conscience du monde antique ressemble à la nouvelle conscience émergente de l’humanité qui s’est doublée d’une connaissance de la matière jamais atteinte. Mais cet univers restera toujours prodigieux devant nos regards stupéfaits. Protectrice et nourricière la nature nous présente une profondeur insondable, pleine de mystères et de dangers, pleine de créatures étranges et de terres inexplorées, un monde phénoménal et féerique, un monde plein d’esprit, un monde animiste. Que nous a dit Ulysse ce vagabond des limbes de son périple au cœur des mystères de la vie et de la mort ? Que révélaient les chants des chamans auprès du feu ? Ces sagesses on nous les a maintes fois contées avant : au temps des voyants des poètes et des prophètes. Cela demande une participation totale et de la passion et tous peuvent y prétendre. Le maître mot est : détente, se relâcher, être perceptif aux vibrations du corps du cosmos de l’être et du verbe. Le fil conducteur n’est pas le moi, c’est le soi. Nous rêvons tous et nous venons tous du même rêve : Nous nous débâtons dans un monde que nous ne comprenons pas. Il demeure attirant, beau et insolite, énigmatique et empli de périls. Éveillés, nous essayons d’interpréter nos visions, mais nous n’obtenons que de multiples explications que les communautés de pensées essayent toujours de rassembler depuis Babel. CHAPITRE I — J’aimais bien quand tu me racontais des histoires — Merci, mais qui es-tu l’enfant ? — Bien, je suis ta fille. — Je ne crois pas en avoir. — Si tu en as eu et tu en auras encore — Et quel rapport avec toi. — Voilà c’est tout, j’étais ta fille dans ta vie antérieure. — Ah, je ne me rappelle pas. Comment le sais-tu ? — Les anges savent çà. — Et tu seras un jour mon enfant, à nouveau ? — Je ne sais pas, j’hésite encore si je veux être ta fille, — N’ai-je donc pas été un bon père ? — Mais si, mais peut être que j’aimerais avoir une petite queue cette fois-ci. — Ah !!! Évidemment si on peut choisir c’est embarrassant. — Ça ne marche pas à tous les coups tu sais, parfois il y en a qui veulent être des filles et qui deviennent des garçons. — En fait je ne sais pas grand-chose des lois du monde des âmes, mais peut-être vaut-il mieux alors laisser faire la nature ? — Bien oui, mais alors je serais surement une fille, comme d’habitude. — Et comment dois-je t’appeler ? — Rose cœur — C’est joli, mais effectivement dans ce cas, le mieux serait que tu restes une fille. — Pourquoi ? — Crois-moi la vie n’est déjà pas si simple cela te causerait des problèmes. — Oui je sais tout doit être déterminé, ce n’est pas comme ici dans le monde des âmes. Mais j’aimerai bien enfin savoir ce que c’est d’avoir une queue. Et toi, tu ne voudrais pas savoir ce que c’est d’être enceinte de la queue d’un homme. — Bon, écoute si je dois être ton père, tu n’as pas d’autres sujets de conversation, quand même ! — Si, je voulais que tu m’amènes aux musées du jardin des plantes et dans son zoo. Par ici aussi il y avait donc des drôlesses — Dis-moi Rose cœur ce qu’une visite touristique de Paris peut apporter à un ange. — Beaucoup, la dernière fois que je me suis incarné ce n’était qu’un village et on dit que l’humanité a accumulé plein de savoir ces derniers temps. Ce n’est pas pour une visite touristique c’est pour savoir. — Excuse-moi, tu as raison, d’ailleurs il n’y a pas beaucoup de touristes au jardin des plantes. Ils sont aux Louvre à admirer le sourire ambigu de la Joconde. — Il paraît qu’on a la preuve que les singes eux aussi ont besoin de justice et de récompenses selon leurs bonnes actions. — Oui les primates sont nos cousins comme nous, ils séparent les bagarreurs, protègent les plus faibles et aident les plus âgés. — Je sais, ils sont très patients avec les jeunes aussi et les sacrifices des parents pour leurs progénitures sont une règle partagée par beaucoup d’animaux. — Oui tu as raison, tu veux être éthologue pour étudier le monde animal ? — Je ne sais pas ça dépend ? Il faut beaucoup travailler ? — Oui bien sûr, mais tu sais les conséquences de ces travaux ont une portée universelle, puisque leurs conclusions est que la moralité ne viendrait pas d’en haut, mais plutôt d’en bas. Avec l’ocytocine, l’hormone de l’amour maternel, la nature travaillait depuis belle lurette à notre savoir-vivre en commun. C’est peut-être même l’origine de notre prodigieux progrès social. — Ils ne doivent pas être content les religieux de tous poils, les barbus, les tressés, les papillotés, et les chauves. C’est toujours eux les gardiens de la morale ? — Disons que les philosophies athées ont eu là un boulevard pour le fondement d’une morale sans Dieu, mais dés quand on parle des âmes on est forcément dans un domaine religieux. — Ah bon, tu vas me donner une religion ? Moi ça me fait peur les religions. — Dieu n’a pas de religion mon ange, mais elles sont au fondement des réflexions existentiel sans parler des rites du quotidien des hommes. Sans elles le monde apparaitrait comme absurde. — Mais ils n’arrêtent pas de se battre et de se contredire. — C’est vrai, mais comment pourrions-nous parler de la transcendance et du monde des âmes ? — Oui c’est vrai c’est important d’en parler et ceux qui n’y croient pas se battent autant. — Je pourrais te parler de grands mystiques ou d’athées pacifiques si ça t’intéresse. — OK Papa, mais là je veux aller au jardin des plantes et aux palais de la découverte. — Au palais de la Découverte ? — Oui, je m’intéresse beaucoup je prépare mon retour. J’y découvrirai peut-être si c’est mieux d’être une fille ou un garçon. — Rose cœur, je ne suis pas sûr que ce soit là où l’on parle le mieux des hommes et des femmes, c’est plutôt scientifique. Ah ce propos, normalement c’est les parents qui font le souhait du sexe et la science va prochainement nous donner les moyens de choisir. — Ah non ! Tu ne vas quand même ne pas choisir pour moi. — Je n’ai pas dit ça et je ne sais même pas qui est ta mère. — Et bien quand tu l’auras retrouvé et que tu lui feras un enfant, tu lui diras bien de me laisser faire. Promets-le ? — Voyons Rose Cœur je ne pourrais jamais lui raconter cette histoire, elle fuirait en criant au fou ! — Papa je t’en supplie promet moi de me laisser faire. — OK promis ! J’inventerai quelque chose d’autre, en plus, tu es déjà très imposante. Allons au jardin des plantes, mais promets-moi d’arrêter de parler sans arrêt et de m’appeler Papa ; après tout on n’est sûr de rien ! — D’accord Malki chéri, je te laisse tranquille pour un moment. Nous nous transposâmes vers les anciens jardins des plantes médicinales du roi, sur les bords de Seine. Depuis des centaines d’années, des savants y ont étudié et répertorié les origines de la vie et des espèces. La collection de 75 millions de spécimens du Muséum d’histoire naturelle nous a amené à comprendre l’évolution de la vie. Les pièces dites « types » sont les spécimens qui ont permis de décrire pour la première fois une espèce animale ou végétale, avec ces références on a pu établir la classification des espèces. La grande galerie de l’évolution nous entraine dans un face à face avec le processus du « temps biologique ». La galerie de minéralogie et de géologie nous plonge elle, avec ses cristaux et ses minéraux dans les longueurs du « temps géologique ». Cette collection figure parmi les plus anciennes et les plus précieuses du monde. Nous y avons écouté des géologues passionnés décrire la dérive des continents et le fonctionnement de ce qu’ils nomment la machine terre. Des âmes sensibles semblaient se concentrer pour sentir les rythmes et les pulsions de notre planète. Ils me faisaient penser aux originaux qui embrassent les arbres dans les parcs. Par l’observation des animaux, nous savions depuis longtemps que les qualités et les vertus des hommes peuvent se partager avec d’autres espèces. Dans les mythologies, on y a souvent imagé nos propres comportements. Hanuman le héros indien à la tête et à la queue de singe est la touchante incarnation du fidèle dévot servant dieu avec trop de zèle, dont la foi intacte finie quand même par exaucer les souhaits. Nos ancêtres avaient ainsi toutes sortes d’histoires peuplées de créatures mi-homme mi-bête. Des hommes à tête de lion, d’aigle ou de cheval. Des hommes à corps de taureaux, de chevaux ou de serpents. Par les expressions populaires, nous savions également que les hommes pouvaient être des cochons, des loups, des renards, des rats ou des vermines. Mais à présent pour compléter la photo de famille, les chercheurs d’histoires naturelles sont scientifiquement certains que nous avons une communauté de destin avec le vers bilatéral. C’est même l’étape cruciale de la création animale qui se mit en mouvement. — Mais c’est dégueulasse — Oui je sais Rose Cœur. Mais c’est un fait, le ver a l’honneur et l’avantage d’être notre plus lointain ancêtre et il nous faut bien admettre que comme pour les primates, la ressemblance peut être saisissante. Issus des matériaux du monde végétal, nous avons entrepris notre odyssée en rampant comme des tubes digestifs à la recherche de nourritures. Doté de cellules intérieures et extérieures et d’une bouche, d’un anus, d’un dos, d’un ventre, et voilà tout. Il ne nous resta plus ensuite qu’à perfectionner nos capacités de perceptions, de locomotions et de transmission puis de bien synchroniser le tout pour finalement former une belle bête à concours. Le grand vainqueur de l’explosion cambrienne d’où naquirent toutes les espèces est l’homme devenu moderne. Il va sans dire que pour beaucoup cela confirme que la plus élémentaire motivation de l’homme sur cette terre est de chercher à manger sans se faire bouffer. Beaucoup en feront une philosophie de vie indépassable au sein de leur système cérébral grossissant. Les plus agressifs en ont pris un parti bête et méchant ; en anticipant et en bouffant les autres avant d’être bouffés. Une stratégie plus vertueuse consiste à aider les autres à se nourrir afin qu’ils nous nourrissent à leur tour, mais cette grande loi de la nature, ne fait pas l’unanimité, car certains la trouvent décevante en retour. Ils se disent mal récompensés, voire perdants ! — Cà me fait peur Malky, je ne sais plus si je veux me réincarner à présent. Elles sont où les princesses ? — Chut ! Quand tu seras petite, je t’emmènerai au Louvre. Si la grande loi de la nature est l’adaptation aux événements, elle a pour compagne une intelligence prodigieuse et même si pour certain tout cela n’est que chaos et hasard, pour qui cherche un sens à la vie et à son histoire personnel, la volonté de ce monde et sans équivoque. Il avance avec opiniâtreté inébranlable dans le sens d’un accroissement de la conscience. Malgré les milliards d’années passées, les contraintes du corps et de la nature sont toujours aussi fortes et personne ne peut y passer outre même une parfaite maitrise de soi ne pourra jamais rien face à une forte envie de pisser. Pourtant petit à petit, nous nous sommes libérés de la nécessité qui fait loi. Nous avons même fait d’énormes progrès. Avec la liberté de mouvement nous sommes passés en rampant du monde végétal au monde animal, avec la différenciation des sexes nous sommes passées de la division cellulaire à la liberté de mixer nos gènes avec qui bon nous semble. Avec la variété génétique et culturelle, nous sommes passés d’un groupe uniforme à la liberté de penser. Avec la liberté de penser, l’homme s’est mis à vivre pour ses idées et pour ses rêves comme celui de changer l’ordre des choses. À vouloir changer l’ordre des choses nous avons rencontré l’Absolu, l’immuable, l’Éternel cet indépassable. — Oui ça je le connais ! On va voir les singes du zoo maintenant ? — Tu vas être déçu, car les misérables communards les ont tous mangés pendant la révolution de 1870. Le peuple de Paris assiégé par l’armée allemande et l’élite versaillaise se sont partagés affamés les animaux, même éléphant et la girafe ! — Oh ! C’est horrible tes histoires. — Elle est vraie, mais ne t’inquiète pas Rose Cœur, c’était pour te faire peur, depuis les nouveaux pensionnaires sont traités par la science moderne de leurs soigneurs. On ne sait pas si les primates ont pris conscience du changement de traitement et de considération que les hommes leur témoignent à présent ou alors si l’absence de liberté ne peut être remplacée ni par les petits plats préparés ni par les antibiotiques. — Qu’est-ce qu’il avait fait le peuple assiégé ? — Cent ans après la Révolution française, les Parisiens réclamaient encore des droits pour les ouvriers et les femmes et puis pour la liberté de la presse et la liberté d’expression. — C’est important çà ? — Bien sûr, chacun doit pouvoir dire avec ses mots ce qui l’oppresse, ce qui l’inquiète ou ce qui lui fait peur. — Ils se battaient pour avoir le droit de parler et de crier alors ? — Oui c’est ça, mais pas seulement ils voulaient que soit enfin mis en application le décret de séparation des Églises et de l’État dans les écoles et les hôpitaux. — C’est important çà ? — Oui tu sais bien avec les religieux, on est jamais assez comme ci ou jamais assez comme ça. Les citoyens voulaient que l’on applique les règles et les lois de la république votées par tous. — Oui c’est bien ça, mais si tous veulent la loi des religieux, cela revient au mêmes. — C’est pour ça que la liberté d’expression est la condition primordiale, si ces lois y survivent tout est possible. Mais dans ce temps-là à Paris, les lois des puissants l’emportèrent et tous finirent massacrés dans des cimetières et sur les barricades du parc Montsouris sans aucune stèle ni aucun mémorial pour leur combat. — Quand je serai né et que je serai grande, je leur ferai un grand dessin sur un mur. — Il y a d’autres destins injustes, tu sais. Regarde là-bas la statue des Jean Baptiste Lamarck, lui il a changé notre compréhension du monde d’une manière vertigineuse. Ses travaux ont sorti les hommes d’une ornière qui semblait indépassable jusqu’à là. Celle d’un monde fini qui devait son origine à un Dieu créateur plus ou moins barbu qui avait donné à chaque espèce une attention toute particulière et achevé. Il y a eu un avant et un après-Lamarck pour l’humanité, il a inventé la biologie, du grecque bio, la vie, et de logo qui est l’ordre. Il a soutenu le transformisme dans la théorie de l’évolution, il a proclamait que les espèces dérivent les une des autres par les voies ordinaires de la génération sans cesse modelée par la pression des conditions ambiantes. Mais il fut pourtant humilié jusqu’aux larmes pour ses idées par l’empereur Bonaparte et Lamarck a fini dans la fosse commune du cimetière du Montparnasse. C’est les travaux de Darwin à la même époque qui ont fait que le système de l’évolution soit reconnu par presque tout le monde. Malgré les divergences de point de vue de ces deux hommes sciences, un progrès prodigieux fût fait dans la compréhension du monde. Darwin voyait une nature agissante par hasard et exclusivement par adaptation aveugle alors que Lamarck voyait en plus une volonté, un désir dans cette évolution, comme exemple ces orchidées qui se transforment en insectes pour se faire butiner. Mais là encore le débat est éternel entre hasard et nécessités ou volonté et désir. — Malky ? Est-ce grave de ne pas savoir ce qu’on le veut ? — C’est gênant, faut au moins savoir ce que l’on ne veut pas. Ou alors comme je te disais, il faut s’en remettre au hasard. — Je te l’ai dit, à moins d’avoir la volonté de changer je suis sûr que je vais être une fille. — Ta volonté ne me paraît pas très déterminée pour changer l’ordre des choses et même si la vie était aussi simple, cela se saurait. — Bon, on va au palais de la Découverte Papa. — Ok, tu y apprendras que les probabilités peuvent être infinies et que le « temps astronomique » n’est pas bien loin de l’éternité et tu cesseras peut-être alors de m’appeler Papa. *** Je ne comprenais pas comment cette petite âme ce petit fantôme s’était entiché de moi et comment sa présence éclipsait toutes les autres. Comment nous nous comprenions et si même elle entendait mes doutes. Ce monde des ombres répondait à des règles que je ne comprenais pas et alors que nous arrivâmes au palais de la Découverte en bas des Champs-Elysées. J’en étais à espérer pouvoir rencontrer les spectres de Galilée, Newton, Hubble ou Einstein pour nous guider et nous expliquait la petite place physique que les hommes occupaient dans notre univers abyssal. Pour ma part, je pouvais à présent affirmer que les âmes ne se retrouvent pas au ciel cosmique, mais très proche de nous, nous partageons quasi le même monde dans un audelà de l’espace-temps. Je sais c’est compliqué et je n’y comprenais moi non plus pas grandchose. Si j’avais été anesthésié, je finirais bien par me réveiller, en attendant je n’avais qu’à me laissait balader. La terre n’est plus au centre de notre système solaire et des soleils il en existe des centaines de milliards dans notre galaxie. La Voie lactée n’est qu’une des milliards de galaxies qui naissent et s’éparpillent à des vitesses toujours plus sidérantes dans l’univers en expansion. Aujourd’hui cela est communément admis et malgré les distances et les temps colossaux évoqués, cela reste encore accessible à notre entendement. Pourtant cette explosion de départ ou cette inflation n’est plus le seuil infranchissable. Cette présentation du bing bang original est hypothétiquement qu’un des innombrables Bing bang qui ont pu jaillir. Notre univers ne serait alors qu’un des milliards de milliards d’univers qui ont déjà jailli et qui jailliront encore ! Chacun de ces cosmos ont produit des milliards de milliards de galaxies, qui ont produit chacun des milliards de milliards d’étoiles qui ont chacune eu, une farandole de planètes qui ont eu leurs propres histoires et dont une c’est sûr, la Terre, a eu ses propres créatures qui ont créé leurs propres mondes Des astrophysiciens supposent que notre monde, notre cosmos est 1 puissance 500 des univers possibles. Pourquoi ce nombre, pourquoi pas plus, pourquoi pas moins, mystère des mathématiques, mais c’est tellement poétique que je ne peux résister à l’envie d’écrire faute de pouvoir les décrire chacun de ces univers qui recèle je ne sais combien de mondes possibles. 100 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 00 0 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 00 0 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 00 0 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000 000000000000000000000000000000000000000000000000000 Chacun de ces cosmos ressemble à la danse de l’information qui se fait et se défait au cœur du firmament, au cœur des univers. Nous sommes une histoire, nous sommes des histoires, nous imaginons notre histoire, nous sommes des écrivains. Nous sommes des vagabonds des limbes. Tels les petits cailloux du petit Poucet qui laisse les traces de son passage dans l’espacetemps pour retrouver le chemin parcouru. Laissons des traces de notre passage dans cette forêt profonde et incommensurable. Notre monde nous semblait fantaisiste ! Et bien à présent nous savons à quel point la fantaisie n’a pas de limites, nous vivons dans une sorte d’éternité, faite de macro cosmos, de bulles de savon qui s’accroissent au gré des courants, suivant une énergie dynamique et invisible, ces univers tourbillonnent, se gonflent, éclatent et se dispersent à l’infini. Le vertige qui nous saisit est au-delà de la pensée et nous laisse muets de stupeur devant l’inimaginable nombre de combinaisons possibles de vies et d’expériences qui se répètent simultanément ou pas dans le temps et dans l’espace et à jamais. Nous pourrions dire que les promesses ont été tenues l’éternel est bien en train de se révéler à nous ; nous vivons une accélération prodigieuse de connaissances et sans doute que cet éternel sera pour toujours un puits sans fond de possibilités, de représentations d’événement prodigieux, mais sera pour toujours un profond mystère. L’explication de l’univers par les sciences est à des années-lumière des dogmes et des certitudes. Nous sommes loin du temps ou les encyclopédistes pensaient avoir l’ensemble des connaissances d’un monde immuable. Finalement, cette création est prodigieuse, fantaisiste, parfaitement compréhensible et parfaitement incompréhensible, pleine de promesses à perpétuité. Avec l’accroissement de l’information que nous avons du monde, nous nous approchons à grands pas vers un point de convergence où on ne saura plus rien, car cette connaissance de spécialistes va prendre une vitesse exponentielle et échapper à tout le monde, on appelle çà la singularité. Nous avions cru être bien plus raisonnables et bien plus sages que les cosmologies primitives et les mythes antiques. Nous prenions pour sornettes la joyeuse ou tragique pagaille que faisaient jouer les dieux de l’Olympe pour essayer de garder un ordre fragile. Bien loin était pour nous, les histoires des ancêtres sumériens et égyptiens, bien loin aussi les aventures abracadabrantesques de Brahma courant après Vishnu courant après Shiva avec des enjambés cosmiques titanesques et des durées pleines de 1 et de 0 qui semblaient êtres des élucubrations dans la cosmologie védique. Il nous faut à présent réviser nos contes pour comprendre leurs esprits enchantés et comprendre ce monde enchanteur. Comme Télémaque nous devrons savoir par où sont passés nos pères pour comprendre et vivre nos vies pleinement. — C’est qui Télémaque c’était ton fils — C’est le nom donné au fils Ulysse par Homère. — C’est joli aussi comme nom Télémaque. — Oui, mais curieusement personne n’appelle son fils Télémaque, pourtant quelle magnifique histoire d’amour filial, mais lui ce n’était pas un indécis, il était du genre très déterminé. Dismoi Rose Cœur les anges ne s’endorment-ils jamais ? Un barbu que l’on avait déjà croisé et qui me regardait en silence depuis un moment se mit à parler. Celui-là nous avait nous entendus. — Les âmes perdent conscience petit à petit après la mort du corps, celle-ci a dû être réveillée par ta puissante présence. Le plus souvent, elles ne peuvent se réveiller avant leur renaissance. Le gars semblait grand et pas très costaud, ses yeux un peu hallucinés semblaient plus vivants que les autres. — Je suis comme toi, je suis de passage dans ce monde, si tu as besoin d’un guide profites-en, nous sommes peu nombreux comme toi et moi et j’ai l’impression que tu viens par ici pour la première fois. — J’avouais avec précipitation que je ne savais pas grand-chose de ce monde parallèle et effectivement je serai ravi d’avoir quelqu’un qui puisse me donner un sens à tout çà. — Disons qu’il y a mieux à faire de cette expérience inouïe que de se promener dans des musées, mais dans ce monde comme dans l’autre chacun ne voit que ce qu’il peut appréhender, c’est la raison et le principe de l’initiation. — Et bien, je veux être initié, car je ne comprends pas bien ce qu’il m’arrive ni ce qu’il se passe par ici. — Par le passé, on faisait payer très cher ce genre d’initiation. — J’hallucinais à mon tour, on n’allait quand même pas me demander de l’argent ici. — Je veux dire que toi, tu as de la chance et je ne sais pas pourquoi. L’initiation était un passage de la vie, quand un individu encadré par sa collectivité devait mourir à une forme d’existence périmée et renaître à une nouvelle. La mort symbolique instaurait une rupture avec l’ordre ancien, mais c’était souvent une épreuve douloureuse physiquement et moralement. Parfois, après avoir effrayé et brutalisé le prétendant aux mystères dans des situations absurdes et alarmantes ; on l’enfermait dans une caverne sombre représentant la matrice. Sans repère, il devait traverser la faim, la soif, l’angoisse du trépas et de l’inconnu. Après des jours, des mois ou des années, l’initié était ramené à la surface et accueilli par la communauté des hommes avec une cérémonie rituelle. Au plus intime de ses cellules, il avait reçu l’information qu’un temps était révolu. Il devait ensuite faire face à la renaissance et selon son entendement trouver sa nouvelle place dans la société. — Je ne suis pas candidat aux sévices dis-je sur mes gardes. Rose cœur se faisait toute discrète derrière moi. — Je sais tout semble facile pour toi, tu dois être d’une autre lignée. Moi j’ai fait beaucoup de sacrifice pour en arriver là, je te propose de ne pas perdre trop ton temps. Je peux t’emmener voir l’Aïeul, il te donnera les explications dont tu as besoin. Les âmes comme cette petite que tu couves reperdra conscience et sera portée par les vents. Je m’appelle Jacques et toi ? — Moi c’est Malky. Il me tendait la main, je lui tendais la mienne et curieusement je sentis la chaleur de sa peau. Je me fis la remarque que j’avais encore la sensation des corps comme les amputés qui sentent encore leurs membres. — Bon, moi je vais vous laisser aller où vous voulez. Il me fait un peu peur celui-là. — À bientôt, Rose Cœur fais de beaux rêves.