Relation gène enzyme

publicité
Relation gène enzyme (de Morange)
INTRO : De 1900 à 1940, la génétique et la biochimie ont connues un fort bon en avant, mais
en travaillant chacune de leur côté, l’une sur les lois de l’hérédité et les cartes génétiques,
l’autre sur les métabolismes et leurs enzymes. Il a fallu attendre les expériences de Beadle et
Tatum en 1941 pour enfin réconcilier ces deux matières sous la biologie moléculaire.
I/ Les différentes tentatives pour relier les gènes aux enzymes
Fin du 19eme siècle : la chimie sait déjà caractériser les pigments issus de ségrégations
génétiques élémentaires.
1902 : Archibald Garrod et l’alcaptonurie. Ce médecin étudie l’alcaptonurie, une
maladie rare qui fait noircir l’urine à l’air. Ceci est dû à une substance chimique dérivée de la
tyrosine provenant de l’alimentation. Parmi ses patients, il trouve plusieurs enfants de la
même famille atteints. Intrigué, il remarque que les parents sont en fait cousins germains. Il
s’appuie alors sur les travaux du généticien William Batteson pour affirmer que ce trouble est
dû à un facteur mendélien récessif (qui a plus de chance de s’exprimer en cas de
consanguinité). Ainsi, il publie dans les « erreurs innées du métabolisme » que l’absence
d’une enzyme dans le métabolisme de la tyrosine abouti à l’alcaptonurie congénitale.
CCL : + lien évident entre hérédité et métabolisme accepté par la communauté
scientifique. Mais - la génétique n’en est qu’à ses débuts
- les techniques de détermination sont peu au point (chromatographie,
marquage moléculaire)
Il ont remarqué que le matériel humain est peu favorable à des études génétiques et
biochimiques.
Il existe d’autres travaux qui vont dans le même sens pour dire qu’il existe une relation
entre gènes et enzymes dont les travaux de Wheldale sur les pigments des plantes ou les
travaux de Beadle et Tatum sur la coloration des yeux de la drosophile. Mais ils se sont
heurtés au même problème : la grande complexité des voies métaboliques.
TH Morgan (généticien) et ses élèves dont Müller ont fait un énorme travail sur la
drosophile en établissant une carte génétique précise et en déterminant les effets du
positionnement des gènes et son mécanisme d’action, mais peu de scientifiques s’y intéressent
vraiment. Müller s’intéressera à la nature des gènes et seul Shultz s’intéressera aux
mécanismes d’action des gènes.
Pourquoi Morgan, autrefois embryologiste, ne s’est pas penché sur ce matériel pour étudier le
lien entre les gènes et les enzymes ?
 Il y avait un réel clivage dans la génétique entre l’hérédité (et sa transmission) et
son mécanisme d’action. La première représente la génétique de l’époque, elle est facile à
étudier et à démontrer. La seconde est beaucoup plus vague et complexe, elle passe dans le
cadre de la biologie (dont l’embryologie), histoire de simplifier la vie des généticiens.
 Il remarque aussi le peu de succès qu’on eu les travaux de Archibald Garrod
pourtant lourds et difficiles.
II/ L’approche originale de Beadle et Tatum (1941)
Beadle était convaincu que la synthèse des pigments de l’œil de la drosophile résultait
d’une chaîne de réactions catalysées par plusieurs enzymes contrôlées par des gènes. Mais la
complexité du système rendait impossible la transformation de cette conviction en
démonstration.
Il a donc décidé de partir de composés métaboliques connus et d’étudier le
déterminisme génétique de leur production ou de leur utilisation.
L’originalité vient du sujet d’étude : Neurospora Crassa, un champignon
microscopique qui a de nombreux intérêts : une multiplication rapide et un cycle de vie
haploïde (n chromosome), ce qui favorise l’expression des mutations. Pour se faire, Beadle
recrute Tatum, spécialiste en culture de micro-organismes et alors commencent leurs travaux.
Principe de l’expérience : Il bombarde le champignon de rayons UV pour favoriser les
mutations. Ensuite, ils isolent ceux qui ne savent plus pousser sans la vitamine B6. Par
croisement, il démontre que cette auxotrophie dépend d’une mutation sur un seul gène. Ils
reproduisent cette expérience avec le tryptophane (acide aminé), et ils montrent que sa
synthèse dépend de plusieurs gènes, relatifs aux différentes étapes de sa biosynthèse.
CCL : Ces résultats ont été très bien reçus par l’académie des sciences et ils reçoivent
le prix Nobel en 1958. En 1945, Beadle affirme avoir enfin relier la génétique et la biochimie
malgré les différends entre ces deux institutions.
III/ Une découverte ambiguë
Ces travaux ont eu un impact énorme sur la biologie et ont permis entre autres
d’établir les cartes métaboliques des êtres vivants (cycle de Krebs et autres…). Cependant,
quand on se replonge dans l’histoire tout n’était pas aussi évident.
Contexte historique étrange : 2ème guerre mondiale
 Comment ont-ils réussi à conserver leurs moyens et leur main d’œuvre dans de tels
circonstances ?
Beadle avait le soutien financier de la fondation Rockefeller, mais le secret vient
d’ailleurs. Leurs travaux étaient indirectement utilisés par les industries agro alimentaires car
ils permettaient de mesurer les quantités de vitamines ou d’acides aminés dans les aliments.
Des intérêts ne se sont donc pas limités à la recherche fondamentale.
Tous les travaus de Beadle et Tatum se concluaient de la même manière : chaque étape
chimique élémentaire d’une voie métabolique était contrôlée par un gène d’où la relation « un
gène, une enzyme »
Un gène, une enzyme, attention !
 un gène peut être contrôlé par plusieurs enzymes et inversement et c’est ce que
défend Delbruck, à la tête du groupe des phages.
 Attention au piège, un gène=une enzyme ! A l’époque les chromosomes étaient
encore mal connus, on supposait qu’ils avaient un rôle de support, et que les protéines et
enzymes du noyau formaient l’information génétique. Le noyau renfermerait alors une
enzyme géante qui se répliquerait pour donner celles que l’on trouve partout ailleurs.
IV/ Les travaux de Franz Moewus
D’après le livre de Jan Sapp, Moewus est considéré comme l’un des 1ers biologistes à
tenter une analyse génétique des micro-organismes dans les années 1930.
Grâce à ses expériences, Moewus a réussi à trouver que la synthèse et la conversion
d’hormones étaient dues à des enzymes contrôlées chacune par des gènes différents localisés
sur les chromosomes. Mais ces résultats ont été mis en doute à cause de doutes sur ses
expériences.
On peut tout de même aujourd’hui lui attribuer le mérite d’avoir vu l’intérêt des
microorganismes.
CONCLU : Le rapprochement entre la génétique et la biochimie a donc été long et difficile
malgré les multiples tentatives. On voit alors qu’une découverte, au-delà de ses difficultés
propres peut se heurter à de nombreux problèmes comme le contexte historique, les
motivations financières, les aspects pratiques (techniques, sujets d’études) ou la
reconnaissance de la communauté scientifique (il est difficile d’aller à l’encontre des idées
reçues). Et quand cette découverte parvient enfin à percer ce mur, on l’idéalise, en oubliant
ses précurseurs et ne retenant que ce qui convient aux théories actuelles.

Téléchargement