54 LA QUESTION PALESTINIENNE : CHRONOLOGIE. ______________________________________________ 1517-1920 DANS L’EMPIRE OTTOMAN. 1860 ± 1880 1882 Création de l’Alliance israélite universelle. Début de l’immigration juive. La population juive de Palestine compte 24 000 habitants ; en 1895, 47 000 ; en 1910, 81 000. Télégramme des notables de Jérusalem au gouvernement turc, pour réclamer l’interdiction aux Juifs d’immigrer en Palestine et d’y acheter des terres. Un firman (décret) fait droit à leur requête, mais une intervention britannique le rendra sans effet. Publication de L’Etat juif, ouvrage de Théodore Herzl* (1860-1904), écrivain juif de Hongrie, qui expose la doctrine sioniste (programme politique). Création de l’Organisation sioniste mondiale au 1er congrès du mouvement sioniste, tenu à Bâle sous la présidence de Théodore Herzl. Des congrès suivront annuellement. Création d’un Fonds national juif destiné à l’achat de terres en Palestine. Entente cordiale : accord franco-britannique réglant le contentieux colonial notamment à propos du Maroc, dont le protectorat est laissé à la France moyennant renonciation de celle-ci à l’Egypte. Le 7e Congrès sioniste rejette tout projet de colonisation juive ailleurs qu’en Palestine et dans les pays voisins, suite à la proposition faite en 1903 par le gouvernement britannique d’offrir à l’organisation sioniste un territoire autonome dans les hautes terres inhabitées de l’Ouganda (cette proposition avait été favorablement accueillie par une minorité de sionistes). Convention de Saint-Petersbourg, réglant le contentieux entre la GrandeBretagne et la Russie en Asie : la Perse est partagée en deux zones d’influence, tandis que l’Afghanistan et le Tibet sont reconnus par la Russie comme zone d’influence britannique. Confirmation de la Convention de Saint-Petersbourg. - N.B. L’expression de Triple Entente (ou, plus simplement, l’Entente) désigne non pas un traité d’alliance en particulier, mais bien l’entente réalisée entre France, GrandeBretagne et Russie de 1907 à 1917. Elle ne sera consacrée par un acte officiel que le 3 septembre 1914, lorsque les trois puissances s’engageront à ne pas conclure de paix séparée (engagement violé par les Bolcheviks en mars 1918). Création à Haïfa du journal El Karmel, appartenant à des Grecs orthodoxes et qui ambitionne de dévoiler les visées sionistes et les menaces que font peser sur la Palestine l’immigration juive et l’achat de terres par les colons. Rencontre entre le roi de Grande-Bretagne Edouard VII et le tsar Nicolas II à Reval (actuellement Tallin, Estonie). L’opinion publique turque est convaincue que les deux monarques se sont entendus sur un partage de l’Empire ottoman. La population juive de Palestine s’élève à 80 000 habitants. Fondation de la colonie de Tel-Aviv, au nord de Jaffa. Les députés arabes au nouveau parlement turc soulèvent le problème de l’immigration juive. Création des premières organisations politiques de lutte contre le sionisme (Haïfa, Jaffa). Fondation à Jaffa du journal Falastine (Palestine), également anti-sioniste et propriété de Grecs orthodoxes ; plus modéré qu’El Karmel, il 1891 (24-6) 1896 1897 1901 1904 (8-4) 1905 1907 (31-8) 1907 (13-9) 1908 1908 (11-6) 1908 1909 1911 La Question palestinienne. 55 soutient l’unité de l’Empire.. Entrée en guerre de l’Empire turc. La Palestine compte alors 730 000 habitants, dont 85 000 Juifs. 1915 (mai) Conférence secrète tenue à Damas par les comités des mouvements nationalistes arabes el Fatat (ou Jeunes Arabes, créé en 1911) et el Ahd (créé en 1914), en présence de l’émir Fayçal ibn Hussein. Le père de celui-ci, le chérif Hussein de La Mecque, est reconnu comme le porte-parole de la Nation arabe tout entière. Il est décidé (protocole de Damas) de déclencher la révolte des Arabes contre la Turquie pour appuyer la Grande-Bretagne, à la condition que celle-ci garantisse l’indépendance arabe de la Méditerranée au golfe Persique et de la frontière nord de la Syrie jusqu’au sud de la péninsule arabique. Dans le cadre de cette confédération sera constituée une Grande Syrie formée de la Syrie actuelle, du Liban, de la Palestine et de la Jordanie. Sur les promesses faites par Londres (24 octobre 1915), les Arabes engageront le combat en juin 1916. 1915 (24-10) Lettre adressée par sir Henry Mac Mahon, haut-commissaire britannique au Caire, au chérif Hussein de La Mecque, dans laquelle l’indépendance est promise aux Arabes dans une zone très vaste incluant implicitement la Palestine. C’est sur base de cette promesse que le chérif Hussein déclenchera la révolte des Arabes contre les Turcs le 5 juin 1916. 1916 (mai) Accord Sykes-Picot. Accord secret négocié (1915-1916) entre deux diplomates, le Britannique Mark Sykes (1879-1919) et le Français Georges Picot, sur un partage entre leurs pays des territoires à arracher à l’Empire turc après la guerre : Grande-Bretagne et France se déclarent disposées à reconnaître un Etat arabe (ou une confédération d’Etats) sous leur influence ; la Grande-Bretagne se verra confier les intérêts de la Basse-Mésopotamie et des territoires à l’est du Jourdain, tandis que la France assumera le protectorat du Liban, de la Syrie et de la Haute-Mésopotamie. La Palestine serait soumise à une administration internationale. L’accord sera ensuite avalisé par la Russie et signé par les trois puissances en mai 1916 ; mais, dénoncé par le gouvernement bolchevique en 1917 et ensuite condamné par les Arabes, il n’entrera jamais en vigueur. Cependant, il était totalement contraire aux promesses faites aux Arabes, ceci étant dû notamment à la ferme volonté de la France de préserver ses intérêts au Proche-Orient. 1916 (5-6) Entrée en guerre des forces arabes contre la Turquie. 1917 (2-11) Déclaration Balfour* : lettre adressée par Lord Arthur Balfour, ministre des Affaires étrangères britanniques, au Baron Lionel Walter de Rotschild (18681937), qui soutenait le mouvement sioniste. Le Royaume-Uni est favorable à la création d’un foyer national juif en Palestine, étant entendu que rien ne sera fait qui pourrait porter préjudice aux droits civils et religieux des communautés non-juives en Palestine, ainsi qu'aux droits et au statut politique dont les Juifs pourraient jouir dans tout autre pays. En dépit de cette réserve, la déclaration contredit ouvertement les promesses faites aux Arabes en 1915, mais elle sera bientôt reconnue par les gouvernements français, italien et américain. C’est une victoire pour le mouvement sioniste, et en particulier pour son chef en Grande-Bretagne, Chaïm Weizmann, tandis que les Arabes n’ont aucunement été consultés sur la question. 1917 (10-12) Prise de Jérusalem aux Turcs par les Britanniques (Général Allenby). 1918 (4-1) Le commandant Hogarth (Bureau arabe de la Grande-Bretagne au Caire) assure au chérif Hussein de La Mecque (devenu roi du Hedjaz) que le gouvernement 1914 (2-11) La Question palestinienne. 56 britannique ne s’opposera pas à l’immigration juive en Palestine pour autant qu’elle est compatible avec la liberté économique et politique de la population existante. 1918 (juin) Les promesses antérieures concernant l’indépendance et la consultation des populations sont confirmées par les autorités britanniques au Caire à sept notables arabes. 1918 (7-11) Déclaration franco-britannique largement diffusée dans toutes les zones occupées par les Alliés, selon laquelle l’objectif des deux Etats en Orient est l’affranchissement des populations du joug turc ; elle promet l’établissement d’Etats nationaux et l’autodétermination des populations. 1919 (6-2) A la conférence de la paix à Paris, le prince Fayçal du Hedjaz (fils du roi Hussein), accompagné du colonel Lawrence, vient plaider la cause arabe, mais n’obtient pas l’indépendance promise. 1919 (février) Premier congrès palestinien, à Jérusalem. Regroupant des associations palestiniennes chrétiennes et musulmanes qui se sont formées à Jaffa et à Jérusalem à la fin de l’année 1918. Foyers de la lutte palestinienne contre le mandat britannique et l’immigration juive, sept congrès de ce type se tiendront entre 1919 et 1928. La charte publiée à l’issue de ce premier congrès souligne que la Palestine (appelée Syrie du Sud par les Arabes) fait partie de la Syrie, dont l’indépendance et l’intégrité doivent être assurées, et à laquelle elle est attachée par des liens nationaux, religieux, linguistiques et économiques. Il envoie à la conférence de la paix à Paris un télégramme contenant le refus des délégués d’accepter l’établissement en Palestine d’un foyer national juif et demandant qu’aucune décision concernant leur pays ne soit prise sans que les habitants aient été consultés. 1919 (19-4) Charte de la Société des Nations, qui sera placée en tête des différents traités de paix, à commencer par celui de Versailles (28 juin 1919). Dans son article 22 instaurant le système des mandats à conférer par la S.D.N. à un Etat pour l’administration d’un territoire donné, le texte prévoit que « certaines communautés qui appartenaient autrefois à l’Empire ottoman ont atteint un degré de développement tel que leur existence en tant que nations indépendantes peut être provisoirement reconnue à la condition qu’un mandataire apporte ses conseils et son assistance à leur administration jusqu’au moment où elles seront capables de se diriger seules. Les voeux de ces communautés doivent d’abord être pris en considération pour le choix du mandataire. » 1919 (2-7) Congrès général syrien à Damas, avec la participation de délégués palestiniens. Il réclame l’indépendance politique totale pour la Syrie, qui ne doit pas être séparée de la région méridionale connue sous le nom de Palestine, ni de la région côtière occidentale, qui comprend le Liban. Il dénie à la France tout droit sur une partie quelconque de la Syrie et rejette la Déclaration Balfour. Amir Fayçal, fils du roi du Hedjaz Hussein ibn Ali, doit devenir roi constitutionnel de la Syrie unie (incluant la Palestine). Dès juillet 1920 cependant, le nouveau roi est déposé par les Français. Les dix résolutions prises par le congrès sont envoyées à une commission d’enquête américaine envoyée en Syrie pendant l’été 1919 par le président Wilson. 1919 (août) Deux membres de la commission d’enquête américaine en Syrie (Henry King et Charles Crane), rentrés à Paris, préconisent une profonde modification du programme sioniste en Palestine. Se référant à la Déclaration Balfour, ils indiquent qu’établir un foyer national juif n’équivaut pas à faire de la La Question palestinienne. 57 Palestine un Etat juif. La création d’un Etat juif ne pourrait se faire sans porter les plus graves atteintes aux droits civils et religieux des communautés non-juives en Palestine. Ils ajoutent : « Le fait est constamment apparu que les sionistes envisagent une complète dépossession des habitants non-juifs actuels de la Palestine, par diverses formes d’achat de terres. » 1920 (27-2) Proclamation officielle du général Louis Bols, chef de l’administration militaire britannique, selon laquelle son gouvernement a l’intention d’appliquer la Déclaration Balfour. ; il en résulte des manifestations de protestation (Jérusalem, Haïfa), des pétitions aux autorités britanniques, des grèves. La réunion du deuxième congrès palestinien, prévue pour février à Jaffa, a été interdite. 1920 (8-3) Le second congrès pansyrien proclame le prince Fayçal roi de la Syrie indépendante et souveraine. 1920 (18 au 26-4). Conférence de San Remo (Ligurie) entre les chefs de gouvernement français (Millerand), britannique (lloyd George) et italien (Nitti), sur l’exécution du traité de Versailles et la préparation du traité de Sèvres avec la Turquie. La Syrie est officiellement partagée entre la France (Syrie) et la Grande-Bretagne (Transjordanie et Palestine), contre le voeu des populations. Le mandat britannique sur la Palestine fait obligation à la Grande-Bretagne d’appliquer la Déclaration Balfour. 1920 Fondation en Palestine de la Haganah* (mot hébreu = défense), milice juive d’autodéfense. Son objectif était d’assurer l’implantation et la défense des colonies juives de Palestine contre la population arabe. Tolérée, mais non officiellement reconnue par le gouvernement britannique, la Haganah condamnera l’action des groupes terroristes extrémistes juifs (Irgoun, Stern) jusqu’en 1945. A cette date, forte de 60 000 volontaires environ, elle se lancera à son tour dans ce type d’actions, prenant part à la lutte contre la puissance mandataire. Son action contribua à l’exode massif des populations arabes en 1947-1948. 1920 (1-7) L’administration militaire britannique (général Louis Bols) fait place à une administration civile dirigée par un haut-commissaire ; le premier sera sir Herbert Samuel (un Juif qui saura garder ses distances à l’égard du sionisme). 1920 (24-7) Syrie : entrée des troupes françaises (général Gouraud) à Damas. 1920 (28-7) Syrie : départ pour l’exil du roi Fayçal, chassé de Syrie par les Français ; il sera ensuite roi d’Irak (1921-1933). 1920 (13-12) Ouverture à Haïfa du 3ème congrès palestinien. Il réclame la constitution d’un gouvernement palestinien indépendant et élit un Comité exécutif arabe (24 membres), présidé par Moussa Kazem al-Husseini, ancien maire de Jérusalem et parent du grand mufti. Ce Comité a pour mission d’appliquer le programme défini par le congrès : dénonciation de la politique britannique visant à appliquer la Déclaration Balfour ; refus de l’immigration juive ; formation d’un gouvernement palestinien représentatif et indépendant. 1921 (mars) Visite de Winston Churchill, secrétaire d’Etat aux colonies, au Caire et en Palestine. Désignation d’Amin al-Husseini (1897-1974) comme mufti de Jérusalem (le mufti est un docteur en droit religieux musulman qui remplit des fonctions religieuses, judiciaires et civiles). Etant donné l’importance de Jérusalem, il fait figure de chef de la communauté musulmane palestinienne, d’autant plus qu’à partir de janvier 1922 il présidera le Conseil suprême musulman nouvellement créé. Ce conseil, important sur le plan politique, nomme en outre les juges musulmans et surtout gère les immenses revenus des La Question palestinienne. 58 biens appartenant aux institutions religieuses (mosquées, hôpitaux, écoles, etc.). 1921 (1-4) Entrée en fonction de la première administration autonome de Transjordanie. Cette région, promise aux Arabes (correspondance Mac Mahon - Hussein en 1915) et revendiquée par les sionistes (bien qu’il ne s’y trouve aucune colonie juive), a été remise par les Britanniques à l’émir Abdullah ibn Hussein (18821951), fils du chérif Hussein (dynastie hachémite toujours en place actuellement) ; il sera émir de Transjordanie (1921-1946), puis roi de Transjordanie (1946-1949), et enfin de Jordanie (suite à l’annexion à son royaume de la Cisjordanie). 1921 (mai) Violentes luttes armées entre Arabes et Juifs. 1921 (fin mai) 4ème congrès palestinien. Décision d’envoyer une délégation à Londres (plutôt qu’auprès du haut-commissaire, au Caire) pour défendre le programme du Comité exécutif arabe auprès du gouvernement britannique. 1921 Le rapport de la commission d’enquête britannique Haycraft souligne que le mécontentement et l’hostilité de la population arabe à l’égard des Juifs est dû à des causes économiques autant que politiques. 1921 (juill.) La délégation palestinienne constituée au 4ème congrès part pour Londres. 1922 (3-2) Accord franco-britannique de Beyrouth sur la limite des zones d’influence respectives de ces deux puissances. Le découpage territorial déçoit les sionistes, privé de régions qu’il revendiquait pour la Palestine (Liban sud, rive orientale du Jourdain et autorité sur le golfe d’Aqaba). 1922-1948 MANDAT BRITANNIQUE* 1922-1948 Mandat britannique* [A 128]. Le texte du mandat a été approuvé par le Conseil de la S.D.N. le 24 juillet 1922. Livre blanc (white paper) du gouvernement britannique (rédigé par Winston Churchill) donnant son interprétation du foyer national juif. Celui-ci est à établir en Palestine, mais il n’est pas question qu’il recouvre l’ensemble du pays, ni qu’il entraîne la subordination ou la disparition de la population, de la langue et de la culture arabes en Palestine ; l’immigration ne doit pas dépasser les capacité d’absorption du pays sur le plan économique ; on mettra progressivement en place un Conseil législatif. D’autre part cependant, la communauté juive est en Palestine de droit et non pas par tolérance. Ces propositions sont rejetées par les Arabes, à la fois par principe et parce que l’immigration juive, qui poursuit un but politique, va être régulée par des critères économiques. Le Conseil de la Société des Nations approuve définitivement le texte du mandat britannique sur la Palestine, y compris son préambule imposant à la puissance mandataire de mettre à exécution la Déclaration Balfour ; il n’y a pas un mot sur une future indépendance palestinienne. 5ème congrès palestinien, à Naplouse (foyer du nationalisme arabe le plus radical). La délégation envoyée à Londres (juillet 1921) fait rapport sur son échec ; décision de boycotter les élections pour le Conseil législatif. En effet, Londres a décidé d’instituer en Palestine un Conseil législatif (22 membres, dont 10 Britanniques nommés par le haut-commissaire, celui-ci disposant d’un droit de veto). L’abstention des électeurs arabes fera échouer le projet britannique, et on en reviendra à l’ancien Conseil consultatif. La Transjordanie, bien que comprise dans le mandat britannique sur la 1922 (juin) 1922 (24-7) 1922 (22-8) 1922 (sept.) La Question palestinienne. 59 Palestine, est exclue du champ de la Déclaration Balfour, au grand dépit des sionistes. 1923 (15-5) Herbert Samuel, haut commissaire britannique, annonce officiellement, à Amman, que le gouvernement britannique reconnaît l’indépendance de l’émir Abdallah de Transjordanie. 1923 (29-9) Entrée en vigueur officielle du mandat britannique sur la Palestine. 1924 (6-2) La S.D.N. approuve l’accord franco-britannique du 3 février 1922. 1924 Arrivée de 12 856 immigrants juifs ; en 1925, il y en aura 33 801, et en 1926 13 081. 1928 (mars) Création en Egypte de la confrérie des Frères musulmans par l’instituteur Hasan al-Banna ; c’est l’avènement du mouvement intégriste musulman, qui restera longtemps marginal, pour prendre un formidable essor suite à la défaite des pays arabes face à Israël en 1967. 1928 (juin) 7e congrès palestinien, tenu à Jérusalem, à propos de la création par la puissance mandataire d’un Conseil représentatif (refusé par la jeune génération, plus radicale, qui milite pour une Palestine indépendante, mais néanmoins décidé) ; toutes les résolutions des congrès précédents restent en vigueur. 1928 (août-sept.) Violents accrochages entre Arabes et Juifs. Très grave tension entre les deux communautés à Jérusalem, sur les conditions d’accès au Mur des Lamentations. Par la suite, une commission d’enquête dirigée par sir Walter Shaw, dont le rapport demandera une clarification de la politique britannique en Palestine, stigmatisant une immigration juive excessive et l’éviction des paysans comme facteurs principaux de la contestation arabe. 1930 (mai) Commission d’enquête britannique (Colonial Office) en Palestine, dirigée par sir John Hope Simpson. Elle confirme les conclusions de la commission Shaw : les paysans arabes sont dépossédés de leurs terres et privés de moyens de subsistance ; la superficie totale des terres à cultiver par les colonies juives est à revoir à la baisse. 1930 (oct.) Déclaration de lord Passfield, secrétaire aux Colonies, sur la politique du gouvernement britannique en Palestine (Livre blanc Passfield). Elle appuie les conclusions de la commission Simpson, déclarant qu’il n’y a plus de terres libres pour la création de nouvelles colonies agricoles juives. La tempête provoquée en Grande-Bretagne (presse, Parlement) par ces déclarations va amener le gouvernement travailliste, qui ne disposait que d’une étroite majorité, à faire marche arrière (voir 13-2). 1931 (13-2) Lettre de James Ramsay MacDonald, chef du gouvernement travailliste britannique, au Dr Weizmann, réaffirmant que la Grande-Bretagne est toujours engagée dans les termes du mandat. Le document est appelé lettre noire par les Arabes, qui y voient la soumission britannique aux visées sionistes, alors que, quelques mois auparavant, une délégation arabe s’était rendue à Londres pour réclamer la fin de l’immigration juive et des transferts de terres, ainsi que l’établissement d’un gouvernement démocratique en Palestine, avec représentation proportionnelle de tous les habitants du pays.. 1931 (déc.) Congrès islamique mondial à Jérusalem, réunissant les délégations de 22 Etats musulmans pour discuter de la menace que représente le mouvement sioniste. 1933 L’accession au pouvoir d’Hitler en Allemagne renforce le mouvement d’immigration juive en Palestine : 30 000 en 1933, 42 000 en 1934, 61 000 en 1935 - bien que la majorité de ces immigrants venait d’autres pays que l’Allemagne. 1933 (automne) Emeutes arabes contre les autorités britanniques. La Question palestinienne. 60 1935 1935 (nov.) 1936-1939 1936 (avril) 1937 1937 (7-7) 1937 (21-7) 1937 (août) 1937 (sept.) Fondation de l’Irgoun (Irgoun Z’vai Leumi, càd. Organisation militaire nationale), organisation de combat sioniste. Groupe d’extrême droite dissident de la Haganah, l’Irgoun avait pour objectif de répondre par des actions terroristes aux raids effectués par les Arabes contre les colonies juives (kibboutzim) de Palestine (ces actes terroristes commenceront dès les premières semaines de 1939); elle organisait aussi l’immigration juive clandestine. S’attaquant même aux Britanniques, l’Irgoun sera particulièrement active entre 1944 et 1948. Les partis politiques arabes réclament la cessation de l’immigration juive, l’interdiction d’aliéner des terres et l’établissement d’institutions démocratiques. En décembre, l’administration britannique propose l’établissement d’un Conseil législatif de 28 membres, au sein duquel il y aurait 14 sièges pour les Arabes (chrétiens et musulmans) et 8 pour les Juifs. Bien que la communauté arabe ne s’y trouvait pas représentée en proportion de son importance numérique, certains de ses membres souhaitaient prendre la proposition en considération, mais la farouche opposition des sionistes, relayée à la Chambre des Communes à Londres, va faire échouer le projet et déclencher une rébellion arabe. Rébellion arabe en Palestine. Les six partis politiques arabes forment un Haut Comité arabe présidé par le mufti de Jérusalem, Haj Amin al-Husseini, qui prend en main le mouvement palestinien et appelle à la grève générale ; celle-ci durera six mois. Simultanément, des rebelles arabes, rejoints par des volontaires des pays arabes voisins, s’installent dans les collines ; à la fin de l’année, le mouvement a pris les dimensions d’une révolte nationale. La grève a pris fin (octobre) à la demande des chefs d’Etats arabes voisins, mais la lutte armée s’est poursuivie. Fondation du groupe Stern*, organisation nationaliste juive extrémiste, par Abraham Stern. Dissidence de l’Irgoun, le groupe Stern se signala par des actions terroristes anti-arabes et anti-britanniques. Publication du rapport de la Commission d’enquête sur la situation en Palestine, présidée par Lord Peel (plan de partage). Considérant que le mandat britannique est impossible à exercer et que les revendications des deux camps sont absolument inconciliables le rapport recommande la partition du pays, prévoyant trois Etats en Palestine : l’un arabe, l’autre juif, et le troisième (les lieux saints) sous statut international.. La réaction des sionistes est ambivalente : d’une part, ils ont la satisfaction que le gouvernement britannique fasse explicitement mention d’un Etat juif, que la superficie allouée à cet Etat soit immensément plus vaste que les colonies juives existantes, et qu’on recommande même le transfert forcé des populations arabes du territoire alloué aux Juifs ; d’autre part cependant, les sionistes ont encore besoin de la puissance mandataire pour soutenir et protéger l’extension de la colonisation, ce qui les fait pencher en faveur du maintien d’une Palestine unitaire. Quant aux Arabes, ils sont horrifiés à l’idée d’un démembrement de leur pays, et en particulier à celle de transferts forcés de populations. Le rapport Peel entraînera une aggravation du soulèvement arabe, qui atteint son paroxysme en 1937 et 1938. Le grand mufti de Jérusalem rencontre le consul allemand Döhle en Palestine. 20e congrès sioniste, à Bâle. Le Conseil de la Société des Nations autorise la Grande-Bretagne à préparer un plan détaillé de partition de la Palestine. La Question palestinienne. 61 1938 (avril-août) Commission technique britannique en Palestine, dirigée par sir John Woodhead, chargée de proposer des plans concrets de partage du pays. 1939 (févr.-mars) Table ronde sur la Palestine à Londres ; elle n’aboutit à aucun résultat. La population juive de Palestine, passée de 175 000 personnes en 1930 à 445 457, représente alors 30 % des habitants. 1939 (17-5) Livre blanc (white paper) du gouvernement britannique sur la Palestine. Dans les cinq ans, le nombre de Juifs autorisés à immigrer se monte à 75 000 - après quoi l’immigration juive sera soumise à l’approbation des Arabes ; les transferts de terres ne seront plus autorisés que dans certaines zones du pays ; la création d’un Etat palestinien indépendant est à envisager dans les dix ans. - Les Arabes, bien que favorables à cette nouvelle orientation politique, ne pouvaient accepter, et cela à la fois par méfiance vis-à-vis de la GrandeBretagne et dans la perspective d’une prolongation du mandat britannique audelà des dix ans. Quant aux sionistes, choqués par le projet, ils considèrent qu’il enterre leur programme et s’oppose à la Déclaration Balfour. Le Livre blanc de 1939 a sonné la fin de l’entente entre le mouvement sioniste et la Grande-Bretagne - ce qui n’empêchera pas nombre de ses membres de combattre aux côtés de celle-ci contre les puissances de l’Axe pendant la guerre. Le déclenchement des hostilités, d’ailleurs, empêchera le Conseil de la S.D.N. d’entamer les discussions sur le livre blanc… 1941 (20-11) Le grand mufti de Jérusalem Amin al-Husseini, oncle de Yasser Arafat, est reçu à Berlin par Joachim von Ribbentrop, ministre des Affaires étrangères du IIIe Reich. 1941 (28-11) Rencontre, à Jérusalem, d’Hitler et du grand mufti de Jérusalem. Les relations établies par le mufti avec les autorités allemandes ont fait l’objet de vives controverses. 1943 Indépendance du Liban. 1944 (novembre). Assassinat, au Caire, de lord Moyne, ministre britannique en Egypte, par des terroristes sionistes. 1945 Les persécutions systématiques du régime nazi à l’encontre des Juifs allemands, puis sa politique d’extermination de l’ensemble des Juifs d’Europe ont profondément ému l’opinion mondiale sur le sort de ce peuple martyr. Dès lors, le projet sioniste de rétablir un Etat juif en Palestine rallie davantage de suffrages. 1945 (22-3) Création, au Caire, de la Ligue arabe, en vue de promouvoir la solidarité entre Etats arabes (notamment face aux puissances occidentales, la Grande-Bretagne en particulier) et de défendre les droits des Arabes en Palestine. 1946 Evacuation du Liban par les troupes françaises. 1946 (mars) Le mandat britannique sur la Transjordanie s’achève, suite aux services rendus contre les forces de l’Axe, au profit d’Abdullah ibn Hussein, qui prend le titre de roi de Transjordanie (on parlera de Jordanie après l’annexion de la Cisjordanie en janvier 1949). 1946 (juillet) Dans le cadre de la conférence anglo-américaine (juin-juillet 1946) préparatoire à la conférence de Londres qui doit réunir le gouvernement britannique avec les représentants arabes et sionistes sur la Palestine, les Britanniques proposent le plan Morrison (du nom du ministre britannique Herbert Stanley Morrison) : partage provisoire de la Palestine en trois zones, une juive, une arabe et la troisième, incluant Jérusalem, sous administration directe de la Grande-Bretagne. Ce plan est repoussé autant par l’Agence juive (5 août) que par les Arabes. Pour ces derniers, toute partition du pays est exclue La Question palestinienne. 62 par principe, et a fortiori contre la volonté de la majorité de ses habitants ; en outre, la zone allouée aux sionistes comporterait presque autant d’Arabes que de Juifs. En 1946, la population de Palestine compte 1 269 000 Arabes et 678 000 Juifs ; en 1949, les Arabes seront encore 230 000 dans le nouvel Etat d’Israël. 1946 (22-7) Les terroristes sionistes font sauter toute une aile de l’hôtel Roi David, siège du quartier général britannique à Jérusalem (91 tués). 1946 (11-8) Le Gouvernement britannique annonce qu’il continuera à s’opposer à l’immigration juive clandestine. 1947 (31-1) La Grande-Bretagne décide l’évacuation de Palestine d’une partie de ses ressortissants (femmes et enfants) face au terrorisme sioniste. 1947 (4-2) Echec et ajournement de la conférence de Londres, qui avait proposé le plan Bevin (du nom d’Ernest Bevin, secrétaire d’Etat britannique aux Affaires étrangères). Ce plan prévoyait de maintenir la tutelle britannique sur la Palestine pendant cinq ans, au cours desquels les zones arabe et juive jouiraient d’une large autonomie ; au terme de quatre ans, une assemblée constituante serait élue pour organiser un Etat indépendant. Si Juifs et Arabes ne parviennent pas à s’entendre, le problème palestinien sera déféré à l’O.N.U. 1947 (14-2) La Grande-Bretagne défère le problème palestinien à l’O.N.U. ; le 28 avril s’y ouvre l’assemblée générale extraordinaire consacrée au problème palestinien. 1947 (été) Affaire de l’Exodus : les réfugiés juifs doivent y réembarquer pour l’Allemagne. 1947 (31-8) La Commission d’enquête de l’O.N.U. conclut à un partage de la Palestine. Ce plan de partage, repoussé par les Arabes dès le lendemain, sera accepté (11 et 13 octobre) tant par l’U.R.S.S. que par les Etats-Unis. 1947 (29-11)* Résolution 181 de l’O.N.U. approuvant le plan de partage de la Palestine en deux Etats, l’un arabe, l’autre juif, la ville de Jérusalem étant sous administration internationale [A 129]. Cette partition reprend le plan Morrison (1946). La résolution est adoptée par 33 voix (dont les Etats-Unis, l’U.R.S.S. et la France) contre 13 (11 pays musulmans, plus Cuba et la Grèce) et 10 abstentions (dont la Grande-Bretagne). 1947 (fin) Début de la guerre entre Juifs et Arabes. 1948 (4-5) Message à l’O.N.U. du roi Abdullah de Transjordanie, qui définit la position arabe sur la Palestine : elle doit constituer un Etat arabe unitaire ; les Juifs pourront y jouir d’un statut complet de citoyens et, dans certaines régions, posséder une administration autonome. 1948 1948 (14-5) 1948 (15-5) CRÉATION DE L’ÉTAT D’ISRAËL. Fin du mandat britannique. A quelques heures d’intervalle, proclamation de l’Etat d’Israël* par David Ben Gourion, Juif originaire de la Pologne russe, dans la salle du musée de Tel-Aviv. Pour les Palestiniens arabes, c’est la nakba (la catastrophe). - Le mouvement sioniste n’en continuera pas moins d’exister, en dépit du fait que, par la suite, quelques mouvements et partis politiques israéliens, minoritaires, s’en désolidariseront, accusant l’idéologie sioniste d’être nationaliste, anti-arabe et impérialiste. Invasion des Etats de la Ligue arabe (Egypte, Syrie, Irak, Jordanie, Liban) farouchement opposés à tout Etat juif en Palestine. 1ère guerre israélo-arabe (1948-1949). Lors du cessez-le-feu imposé par l’O.N.U. (janvier 1949), l’Etat d’Israël, vainqueur, conserve les territoires conquis (Nazareth, Galilée occidentale, frange nord-ouest du Néguev), ce qui revient presque à doubler le La Question palestinienne. 63 territoire qui lui était alloué dans le partage de 1947 ; la Bande de Gaza se retrouve sous administration militaire égyptienne ; ce qui reste de la Palestine arabe (la Cisjordanie) sera annexé en 1950 au royaume de Jordanie1 (ancienne Transjordanie), et la ville de Jérusalem est coupée en deux [A 129, B]. Dès lors, la Palestine n’existe plus. Se pose en outre le grave problème des réfugiés palestiniens (exode des Palestiniens) qui ont fui vers les Etats arabes voisins d’Israël, où ils constitueront une lourde charge économique et une source de troubles. 1948 (11-12) Résolution 194 de l’O.N.U. prévoyant le libre retour des réfugiés (600 000 réfugiés arabes ont quitté Israël). 1950 La Knesset (Parlement israélien) vote la loi du retour*, qui établit, au nom du sionisme, le droit pour tout Juif de s’installer en Palestine. 1956 Nationalisation du canal de Suez par le président égyptien Gamal Abdel Nasser, allié de l’Union soviétique, qui prend la tête du monde arabe contre Israël. 2e guerre israélo-arabe, dans laquelle l’armée israélienne intervient aux côtés des Français et des Britanniques, ce qui contribue à renforcer l’hostilité des Arabes à l’égard d’Israël. Malgré ses défaites, l'Egypte est sauvée par la pression diplomatique des Etats-Unis et de l'U.R.S.S. Israël doit évacuer les zones occupées. 1959 Fondation, au Koweit, du Fatah, mouvement de résistance palestinien qui sera présidé plus tard par Yasser Arafat et prendra le contrôle de l’O.L.P. en 1969. 1964 (28-5) Création, à Jérusalem, de l’Organisation de Libération de la Palestine (O.L.P.)*, par la Ligue arabe, à l’initiative du président égyptien Nasser, qui craint d’être entraîné malgré lui dans une guerre contre Israël par des groupes palestiniens incontrôlés (notamment le Fatah, qui se veut indépendant des pays arabes) ; adoption d’une charte (d’orientation panarabe) rejetant l’existence d’Israël. C’est le premier mouvement de la résistance palestinienne, et le plus puissant. Affranchie de la tutelle égyptienne et ayant durci sa charte, l’O.L.P. sera contrôlée, à partir de 1969, par le Fatah, sous la présidence de Yasser Arafat. Elle adoptera la tactique du terrorisme (surtout entre 1970 et 1974), pour ensuite rechercher des solutions diplomatiques. En 1974 (28-10), l’O.L.P. sera reconnue par les pays arabes comme le seul représentant légitime du peuple palestinien ; elle sera admise à l’O.N.U. en qualité d’observateur en novembre 1974. 1965 Discours à Jéricho du président tunisien Habib Bourguiba, qui appelle à une solution de paix négociée avec Israël. Cet appel sera accueilli par des insultes dans le monde arabe, tant au niveau des gouvernants que des opinions publiques. 1967 (5 au 8-6) 3e guerre israélo-arabe, dite des Six Jours*. L’initiative est prise par Israël, soucieux de briser son encerclement par une nouvelle ligue arabe constituée sous l’égide du président Nasser (Egypte, Jordanie et Irak, rejoints par le Soudan, l’Algérie, le Maroc et la Tunisie). Après le cessez-le-feu décrété par l’O.N.U. (imposé le 8 juin, respecté le 10), Israël vainqueur conserve les zones qu’il a occupées [A 129, D]: à l’est, toute la partie cisjordanienne de la Jordanie (d’où la réunion des deux Jérusalem sous sa domination), au nord-est, le plateau du Golan (Syrie), au sud-ouest la Bande de Gaza et la péninsule du 1 Seul des coalisés arabes à avoir réalisé ses objectifs de guerre, le roi Abdullah de Transjordanie a annexé la Cisjordanie et Jérusalem-Est, un territoire attribué aux Palestiniens dans le plan de partage de 1947. Ce partage opéré avec l’Etat hébreu sur le dos des Palestiniens lui sera amèrement reproché, et il mourra assassiné le 29 juillet 1951. La Question palestinienne. 64 Sinaï (cette dernière sera restituée à l’Egypte en 1982). A la suite de cette guerre, Israël se lance dans un vaste programme d’établissement de colonies juives en Cisjordanie ; avec le temps, il deviendra de plus en plus évident que cette politique a pour objectif de rendre impossible, à terme, l’établissement d’un Etat palestinien. 1967- TERRITOIRES PALESTINIENS SOUS OCCUPATION ISRAÉLIENNE. 1967 (22-11) Résolution 242* du Conseil de Sécurité des Nations-Unies, qui réclame un juste règlement du problème des réfugiés et le retrait des territoires occupés lors du récent conflit - dans la version anglaise, from occupied territories in the recent conflict, ce qui est différent ! 1967 (27-11) Conférence de presse donnée par le Général de Gaulle dans la salle des fêtes du palais présidentiel de l’Elysée. Il condamne sans ambages la guerre des Six Jours menée par Israël, dont il avait prévenu l’ambassadeur, à la veille du conflit, lui disant en substance : « Vous avez bénéficié jusque-là de circonstances exceptionnelles. Contentez-vous de ce que vous avez. Si vous dépassez la ligne verte, croyez-en notre expérience, vous allez devenir des occupants. » Désormais, la France s’efforcera de contrebalancer le soutien inconditionnel des Etats-Unis à Israël par une politique plus soucieuse des légitimes revendications arabes. 1968-1969 Développement des actions de guerilla de l’organisation palestinienne El Fatah dans les territoires occupés. 1969 Yasser Arafat (1929-2004) président de l’O.L.P. 1970 (septembre) Septembre noir. Le roi Hussein, dans une position internationale intenable du fait que son pays était la principale base des opérations terroristes menées par l’O.L.P. contre Israël, chasse violemment de son pays les troupes palestiniennes, qui trouveront refuge au Liban (elles en seront chassées en 1982). 1972 (5-9) Massacre, organisé par l’O.L.P., de la délégation israélienne (11 athlètes) aux jeux olympiques de Munich. 1973 4e guerre israélo-arabe, dite du Kippour* (lancée à la faveur de la célébration juive de Yom Kippour, les Expiations ou le Grand Pardon, jour de prière, de jeûne et de confession publique). L’offensive conjointe, et partiellement victorieuse, de l’Egypte et de la Syrie aura pour conséquence un traité entre Israël et l’Egypte (1979). 1973 Les Etats arabes recourent à l’arme économique (notamment le pétrole) contre les alliés d’Israël. 1974 (26 au 29-10) Conférence des Etats arabes à Rabat ; l’O.L.P. est seule habilitée à établir un pouvoir national sur les territoires à libérer par Israël. 1975 (13-4) Début de la guerre civile au Liban (1975-1989). Les milices chrétiennes s’affrontent aux forces de gauche et musulmanes, appuyées, à partir de janvier 1976, par les Palestiniens. 1976 Le Front du Refus, groupant certains mouvements au sein de l’O.L.P. ou en rupture avec celle-ci, avec le soutien de la Libye et de l’Irak, manifeste sa volonté de libérer la Palestine dans sa totalité et de refuser toute négociation sur base d’un Etat palestinien limité à la Cisjordanie. 1976 (6-6) Intervention au Liban de l’armée syrienne, à l’appel des forces chrétiennes en mauvaise posture face aux forces palestiniennes et progressistes. 1976 (oct.) Sommets arabes de Riyad et du Caire, qui décident l’envoi au Liban d’une La Question palestinienne. 65 force arabe de dissuasion, composée en majorité de Syriens. Constitution, à Tripoli (Libye), du Front de la Fermeté, suite au voyage du président égyptien Sadate à Jérusalem. Réunissant l’Algérie, l’Irak, la Libye, la Syrie, le Yémen du Sud et l’O.L.P., le Front de la Fermeté récuse par avance toute négociation avec Israël. 1978 (mars) Occupation militaire du sud du Liban (jusqu’au fleuve Litani) par Israël. La résolution 425 de l’O.N.U. exige le retrait israélien (il se fera partiellement en juin, laissant la place aux milices chrétiennes). Déploiement de la force intérimaire des Nations-Unies (FINUL). 1978 (juill.) Pilonnage des quartiers chrétiens de Beyrouth par l’armée syrienne suite à un changement d’alliance, Damas s’étant rapproché des forces palestinoprogressistes. 1979 (26-3) Traité de Washington entre l’Egypte et Israël, faisant suite aux accords de Camp David (1978) et prévoyant la restitution de la péninsule du Sinaï à l’Egypte (cette restitution sera effective en 1982). 1981 (6-10) Assassinat du président égyptien Anouar el Sadate. 1982 (6 au 11-6) Invasion du Sud-Liban par Israël (opération Paix en Galilée). 5e guerre israélo-arabe, causée par la volonté israélienne de faire cesser les attaques en provenance du Liban contre la Galilée (occupée par Israël depuis 1949), et surtout de chasser les forces de l’O.L.P. Après le cessez-le-feu (11 juin), les forces de l’O.L.P. (11 000 combattants) évacuent Beyrouth (22 août au 3 septembre), à destination de Tunis, sous la surveillance d’une force multinationale d’interposition, tandis que quelque 400 000 Palestiniens restent dans les camps ; Israël, victorieux, après avoir évacué le pays, maintient sous régime d’occupation le Sud-Liban pour garantir sa sécurité (cette occupation prendra fin le 24 mai 2000). - Restitution du Sinaï par Israël à l’Egypte. 1982 (16 au 18-9). Massacre (un millier de morts au moins) dans les camps palestiniens de Sabra et de Chatila (Liban) ; un rapport officiel israélien établira la responsabilité directe des miliciens chrétiens des Forces libanaises, et indirecte des troupes israéliennes. Evolution de l’opinion internationale et israélienne face à la question palestinienne. Scandalisée par de telles violences, une bonne partie de l’opinion publique israélienne se prononce de plus en plus pour un règlement pacifique du conflit, et cela pour des raisons diverses (coût humain et matériel pour l’armée israélienne, pacifisme, souci d’équité dans l’appréciation du problème palestinien). 1983 (17-5) Accord de paix libano-israélien (il sera abrogé par les autorités libanaises). 1983 (20-12) Yasser Arafat, avec quelques milliers de ses partisans, quitte Tripoli (nord du Liban), où il était assiégé par des unités dissidentes du Fatah soutenues par la Syrie. 1985 (mai-juin) Au Liban, première guerre des camps entre combattants palestiniens et miliciens chiites d’Amal (pro-syriens). En juin, Israël achève son retrait du pays, mais maintient une force dans le sud pour soutenir l’Armée du Liban sud (A.L.S.). 1987 (9-12) - 1994 Première Intifada* (sédition des pierres) par la population palestinienne des territoires occupés, exaspérée par le blocage de sa situation. Grèves, manifestations, heurts violents avec la police et l’armée d’occupation israéliennes. 1987 Création, dans le cadre de l’intifada, du mouvement palestinien Hamas, émanation des Frères musulmans (groupes islamistes apparus dans tous les pays arabes dans les années 1970) de Cisjordanie et de Gaza. Ceux-ci, jusque1977 (2-12) La Question palestinienne. 66 là mobilisés sur un projet de réislamisation de la société (action religieuse, morale, humanitaire), se lancent ainsi dans le combat pour la libération de la Palestine en combinant leur objectif antérieur avec la lutte politique et terroriste, sous le slogan La Palestine est islamique de la mer au Jourdain, refusant toute légitimité à l’existence d’Israël. - Les positions radicales du Hamas et son audience croissante au sein de la population palestinienne suite au pourrissement de la situation vont amener l’O.L.P., déjà affaiblie, à accélérer son rapprochement avec les autorités israéliennes. 1988 (15-11)* Le Conseil national palestinien, réuni à Alger, proclame l’Etat de Palestine* et adopte la résolution 242 de l’O.N.U. - Décision historique, car elle reconnaît implicitement l’existence (et le droit à l’existence) d’Israël, même si la charte de l’O.L.P. considère comme palestinien l’ensemble du territoire sous mandat britannique de 1922 à 1948. L’acceptation de l’idée de deux Etats rend possible des négociations. - L’O.L.P., qui a été un des principaux acteurs de la guerre civile libanaise (commencée en 1975) et a été expulsée de Beyrouth par l’armée israélienne en 1982, s’en était trouvée affaiblie. En outre, elle s’est vue débordée à la fois par l’intifada, soulèvement populaire des territoires occupés par Israël, et par l’émergence du Hamas, mouvement radical. Cette nouvelle donne va l’amener à renoncer au terrorisme (déjà ralenti à partir de 1974) pour chercher une solution politique au conflit. 1989 (2-5) Arafat déclare caduque la charte de l’O.L.P. 1989 (29-10) Accords inter-libanais de Taëf (Arabie saoudite), qui établisent un nouvel équilibre entre les communautés et définissent le cadre de la présence syrienne. C’est la fin de la guerre civile (1975-1990), mais le général Michel Aoun, chef d’un gouvernement de militaires chrétiens non reconnu par les musulmans, et qui en mars a lancé une guerre de libération contre la Syrie, refuse ces accords. 1990 (janv.-mars) Guerre inter-chrétienne au Liban, entre les Forces libanaises (milices chrétiennes) et les troupes du général Aoun, opposé aux accords de Taëf. 1990 (oct.) A la suite d’une offensive syro-libanaise, le général Aoun est évincé du pouvoir au Liban et se réfugie en France. Fin de la guerre, qui a fait en 15 ans plus de 150 000 morts. 1991 (22-5) Traité syro-libanais de fraternité et de coopération, qui officialise le rôle prépondérant de la Syrie au Liban. LES ACCORDS NÉGOCIÉS. 1991 (30-10) Ouverture à Madrid de la Conférence sur la Paix au Proche-Orient entre Israël, les Etats arabes et les Palestiniens (grâce à la pression des Etats-Unis, réconciliés avec l’U.R.S.S.) ; les négociations se poursuivront à Washington et déboucheront sur un accord israélo-palestinien le 30 août 1993. 1992 (9-3) Décès de Menahem Begin. 1993 (19-1) Abrogation par la Knesset de la loi de 1986 interdisant aux personnes vivant sous juridiction israélienne tout contact avec les organisations terroristes. 1993 (9-4) Pour la première fois, Israël accepte la présence d’un proche d’Arafat (Fayçal Husseini) au sein de la délégation palestinienne (négociations de Washington). 1993 (juill.) Bombardements israéliens sans précédent au Liban depuis 1982 (132 morts). 1993 (30-8) Approbation réciproque de l’accord israélo-palestinien (grâce à la médiation de la Norvège, d’où le nom d’accords d’Oslo*) : déclaration de principes sur l’autonomie de Jéricho et de la Bande de Gaza, moyennant, pour les La Question palestinienne. 67 Palestiniens, reconnaissance de l’Etat d’Israël, abolition des articles de la charte de l’O.L.P. déniant à celui-ci le droit à l’existence, renonciation solennelle de l’O.L.P. au recours au terrorisme et à la violence, et son engagement à faire régner l’ordre dans les territoires concernés. 1993 (13-9) Ratification, à Washington, de l’accord israélo-palestinien du 30 août (accords d’Oslo), par le premier ministre Yitzhak Rabin et le président de l’O.L.P. Yasser Arafat. Un mois plus tard commenceront, en Egypte (à Taba, à côté d’Eilat) des négociations officielles afin d’établir les modalités d’application de cet accord. 1994 (29-4) Accord économique israélo-palestinien de Paris, fondé sur le libre-échange. 1994 (4-5) Accord du Caire sur l’autonomie de Gaza et de Jéricho. 1994 (18-5) La police palestinienne prend en charge la sécurité de ces deux territoires. 1994 (1-7) Installation de Yasser Arafat à Gaza. Les élections (prévues par l’accord pour le 13 juillet) pour le conseil de gouvernement palestinien sont reportées. 1994 (29-8) Transfert par Israël aux Palestiniens de l’éducation, la santé, les affaires fiscales, le tourisme et les affaires sociales. 1994 (26-10) Accord de paix entre Israël et la Jordanie2, prévoyant la restitution à celle-ci d’une bande de terre de 320 km2 au sud de la mer Morte, entre celle-ci et Eilat (Golfe d’Akaba, corne orientale de la mer Rouge), ainsi que 5 km2 à l’extrême nord de la Jordanie, le long de la frontière israélienne. 1995 (24-9) Signature, à Taba (Egypte), de l’accord entre Palestiniens (Yasser Arafat) et Israéliens (Shimon Pérès, ministre des Affaires étrangères du gouvernement de Yistzhak Rabin) sur l’autonomie de la Cisjordanie. 1995 (nov.-déc.) Evacuation par Israël de toutes les villes de Cisjordanie, à l’exception d’Hébron. 1995 (4-11) Yistzhak Rabin est assassiné à Tel-Aviv par un Israélien d’extrême droite. A propos des sionistes extrémistes rêvant du Grand Israël (de la Méditerranée à l’Irak) et prônant un militantisme impérialiste, fanatique et parfois raciste, sur base d’une lecture littérale et rétrograde de l’Ecriture sainte, le premier ministre israélien avait dit : « Ils lisent la Bible comme un cadastre. » 1996 (janv.) Yasser Arafat (1929-2004) est élu président de l’Autorité palestinienne. 1996 (18-4) Un poste de la F.I.N.U.L. (force internationale d’interposition des NationsUnies au Liban) établi à Cana (Liban) est bombardé par Israël (102 morts, 105 blessés), ce qui suscite la réprobation générale. Cet incident se situe dans le cadre de l’opération israélienne Raisins de la colère, destinée à briser le potentiel militaire du mouvement chiite Hezbollah. 1996 (24-4) Les articles contraires à la reconnaissance d’Israël sont supprimés de la charte de l’O.L.P. de 1964. 1996 (8-10) Première visite publique de Yasser Arafat en Israël, à l’invitation du président israélien Ezer Weizman. 1996 (15-11) La Cour suprême d’Israël autorise la torture de détenus palestiniens. 1996 (10-12) Le gouvernement israélien donne son accord pour l’édification, en plein coeur du secteur arabe de Jérusalem, de la première cité résidentielle réservée aux citoyens juifs. 1997 (17-1) Accord sur Hébron, qui est divisée en deux ; l’autorité palestinienne en couvre les trois quarts. 1998 (23-10) Accord de Wye Plantation (Etats-Unis) sur l’application des accords d’Oslo. Le roi Hussein († 1999) de Jordanie, formé à l’occidentale et animé d’un esprit de tolérance et de conciliation, a toujours multiplié les démarches en faveur d’accords négociés pacifiquement. La population de son pays était pour plus de 50 % palestinienne. 2 La Question palestinienne. 68 1999 (4-9) 2000 (24-5) 2000 (sept.) 2000 (28-9) 2000 (29-9) 2000 (nov.) 2002 (16-2) 2002 (12-3) 2002 (24-3) 2002 (29-3) 2002 (2-4) 2002 (10-5) 2002 (16-6) 2002 (16-7) 2002 (18-8) 2003 (17-5) 2003 Accord de Charm el-Cheikh. Israël se retire du Liban sud, après 22 ans d’occupation ; le Hezbollah prend possession de la zone. Début des opérations de destruction de maisons par l’armée israélienne dans la zone de la Bande de Gaza limitrophe de l’Egypte, afin d’y neutraliser des tunnels creusés pour acheminer des armes dans la Bande de Gaza. Visite d’Ariel Sharon, chef du Likoud (droite israélienne) sur l’esplanade des mosquées à Jérusalem, ce qui est perçu comme une provocation par les Palestiniens. La prière du vendredi tourne à l’émeute. Début de la deuxième Intifada*, qui va peser sur le processus de paix au Proche-Orient. Début de la politique israélienne d’assassinats ciblés d’activistes palestiniens. En Israël, grande manifestation à l’appel des partis de gauche et des associations pacifistes (dont le mouvement Peace now) pour exiger le retrait israélien des territoires palestiniens occupés et la création d’un Etat palestinien. Résolution 1397 du Conseil de Sécurité de l’O.N.U. préconisant deux Etats : Israël et la Palestine, vivant côte à côte à l’intérieur de frontières reconnues et sûres. Grande manifestation au Liban (plus de 350 000 partisans du Hezbollah, soit près de 10 % de la population) en faveur de la solidarité avec l’Intifada et pour refuser tout compromis avec Israël. Au surlendemain d’un attentat-suicide palestinien meurtrier, l’armée israélienne lance sa plus grande offensive en Cisjordanie depuis la guerre de juin 1967 (opération Rempart) et détruit la plus grande partie du quartier général d’Arafat à Ramallah ; celui-ci est cerné par une vingtaine de chars israéliens (le siège ne sera levé que dans la nuit du 1er au 2 mai). Rendu responsable des attentats contre Israël, Arafat est désormais considéré comme un ennemi par le Cabinet Sharon. Réoccupation par l’armée israélienne de la ville autonome palestinienne de Bethléem (après Ramallah, Kalkiliya - d’où elle se retirera le 26 avril - et Tulkarem - évacuée le 9, et réoccupée le 16). Levée par Israël du siège de la basilique de la Nativité à Bethléem, d’où sortent 123 activistes palestiniens qui s’y étaient retranchés depuis 39 jours ; conformément aux accords conclus, ils sont remis non pas à Israël mais à des Etats européens, dont la Grande-Bretagne. Le ministre israélien de la Défense Binyamin Ben Eliezer lance la construction d’une ligne de séparation (grillages, tranchées, murs équipés de systèmes électroniques de surveillance) le long de la ligne verte qui sépare depuis 1967 Israël de la Cisjordanie (premier tronçon : 130 km ; à terme, 360 km). Réunion à New-York du quartet (O.N.U., Union européenne, Etats-Unis, Russie) sur le Proche-Orient. Approbation de l’appel du président Bush à la création d’un Etat palestinien pour 2005 ; le calendrier du processus (appelé feuille de route) sera approuvé par les mêmes le 17 septembre. Accord israélo-palestinien sur un retrait progressif par l’armée israélienne des territoires occupés (plan Gaza et Bethléem d’abord). Première rencontre entre le président palestinien Abbas et Ariel Sharon, sur la mise en oeuvre de la feuille de route prévoyant l’instauration d’un Etat palestinien, à côté d’Israël, pour 2005. La maladroite intervention militaire de puissances occidentales sous l’égide des Etats-Unis contre l’Irak de Saddam Hussein, suivie d’une occupation prolongée La Question palestinienne. 69 et d’une guerre civile, amène une recrudescence de l’islamisme. La plupart des régimes arabes, déjà autoritaires, prennent prétexte de cette poussée pour retarder toute libéralisation, alors que les peuples arabes réclament la démocratie. 2003 (21-10) Résolution de l’O.N.U. (élaborée par l’Union européenne) exigeant qu’Israël arrête la construction du mur (dont le gouvernement israélien a approuvé, le 1er octobre, l’augmentation de 290 km), puis le détruise. 2003 (1-12) Signature, en présence de l’ancien président des Etats-Unis Jimmy Carter, du projet d’accord de paix israélo-palestinien dit Initiative de Genève (présenté dès le 12 octobre), résultat de négociations non officielles entre, notamment, deux anciens ministres, l’un Palestinien, l’autre Israélien, afin de débloquer la situation. Ce projet, soutenu par Arafat, est dénoncé par le gouvernement israélien. 2004 L’Etat d’Israël commence la construction d’un mur de séparation* d’avec la Cisjordanie, destiné à empêcher l’infiltration d’auteurs d’attentats suicides ; en plus d’un endroit, le tracé de ce mur, au lieu de suivre la ligne verte (frontières de 1967), empiètera sur le territoire dévolu aux Palestiniens. Néanmoins, il est indéniable que, là où il existe déjà (en décembre 2006), ce mur a effectivement rempli son rôle. 2004 (21-1) Incursion de l’armée israélienne dans la ville de Rafah (Bande de Gaza, à la frontière avec l’Egypte), pour y détruire des maisons censées cacher des tunnels servant à faire entrer des armes dans la Bande de Gaza. 2004 (22-3) Assassinat du Palestinien Cheikh Yassine, fondateur et chef spirituel du Hamas, dans un raid aérien ciblé mené dans la Bande de Gaza ; son remplaçant sera assassiné à son tour le 17 avril. 2004 (14 au 24-5) Incursion de l’armée israélienne (opération Arc-en-ciel et nuage sur la ville) à la frontière entre l’Egypte et Rafah (Bande de Gaza), pour neutraliser les tunnels de contrebande d’armes vers Gaza. 2004 (9-7) La Cour internationale de justice condamne la construction du mur de sécurité séparant la Cisjordanie de l’Etat hébreu. 2004 (juill.) Troubles inter-palestiniens dans la Bande de Gaza. 2004 (2-9) Résolution 1559 de l’O.N.U. (à l’initiative de la France et des Etats-Unis) réclamant le départ des troupes syriennes du Liban et appelant au désarmement des milices. 2004 (28-9) Incursion de l’armée israélienne dans la Bande de Gaza (opération Jours de Pénitence), pour empêcher les tirs de roquettes artisanales sur Israël (tirs revendiqués par les activistes du Hamas) et créer une zone-tampon d’au moins 9 km à l’intérieur du territoire palestinien. 2004 (26-10) Approbation par la Knesset du plan Sharon de retrait israélien de la Bande de Gaza. 2004 (11-11) Décès de Yasser Arafat (né au Caire en 1929), président de l’Autorité palestinienne depuis 1996 ; il sera inhumé à Ramallah le 12 novembre. 2005 (9-1) Election de Mahmoud Abbas (Abou Mazen) comme successeur de Yasser Arafat. 2005 (8-2) Conférence de Charm el-Cheikh (Egypte) entre Israéliens et Palestiniens ; reprise du dialogue sous l’égide du président égyptien Hosni Moubarak et du roi de Jordanie Abdallah II. 2005 (mars) Transfert par Israël aux autorités palestiniennes du contrôle des villes de Jéricho et de Tulkarem. 2005 (26-4) Fin officielle de la présence syrienne au Liban. La Question palestinienne. 70 2005 (12-5) Sommet de Brasilia (le premier entre Arabes et Sud-Américains), suite à 150 ans d’immigration arabe (syro-libanaise surtout) en Amérique latine (12 millions de descendants au Brésil). 2005 (25-5) L’armée israélienne dévoile les grandes étapes du retrait de Gaza ; elle devra évacuer au moins 8 000 colons des 21 colonies de la bande de Gaza et de quatre autres du nord de la Cisjordanie. 2005 (1-6) La municipalité de Jérusalem prévoit la destruction de 88 maisons de Jérusalem-Est appartenant à des Palestiniens, sous prétexte que la chose est prévue depuis 1974, pour faire place à un parc ; c’est la plus grosse démolition entreprise dans ce secteur depuis 1967. 2005 (27-6) Le ministre du Travail du Liban lève l’interdit qui frappait depuis 22 ans les Palestiniens du pays (entre 200 et 350 000 selon l’O.N.U.) concernant l’exercice d’une cinquantaine de métiers dans le secteur privé. Cette décision intervient au moment où une forte proportion de travailleurs syriens (centaines de milliers) ont quitté le pays, peu avant le retrait des troupes syriennes. 2005 (14 au 18-8) Evacuation forcée des colonies de la bande de Gaza par l’armée israélienne. 2005 (15-8) Début du retrait de l’armée israélienne de la Bande de Gaza (il sera achevé le 12 septembre). 2006 (janvier) Victoire du mouvement Hamas aux élections législatives de l’Autorité palestinienne. Après la constitution laborieuse d’un gouvernement d’union nationale, on verra s’affronter les partisans du Hamas et ceux du Fatah (parti du président Mahmoud Abbas, qui siège à Ramallah, en Cisjordanie). 2006 (28-6) L’armée israélienne envahit la Bande de Gaza (opération Pluies d’été) à la suite d’attaques menées de là contre le territoire israélien. 2006 (12-7) 6ème guerre israélo-arabe. Invasion du Liban par l’armée israélienne (par air et par mer, plus tard par terre), à la suite d’une embuscade du Hezbollah, qui a tué 8 soldats israéliens et en a capturé deux autres. 2006 (11-8) Résolution 1701 de l’O.N.U. exigeant la cessation immédiate des hostilités par le Hezbollah et par Israël , le déploiement de l’armée libanaise et de la F.I.N.U.L. et parallèlement le retrait de l’armée israélienne du Liban sud. Les dernières troupes israéliennes évacueront le Liban en septembre, sans avoir obtenu la libération des soldats enlevés et après avoir occasionné d’énormes destructions et la mort de très nombreux civils innocents. Pour la première fois, le pouvoir de dissuasion légendaire de l’armée israélienne est pris en défaut, elle a perdu de sa crédibilité et la démonstration est faite que la solution du conflit ne peut être trouvée dans une approche purement militaire. 2007 (13 et 14-6). Les milices du mouvement Hamas, au terme de violents affrontements avec la police régulière et les milices du Fatah, prennent le contrôle de la Bande de Gaza. Elles présentent ce putsch comme une libération nationale (destinée à s’étendre, dans un second temps, à la Cisjordanie) ainsi qu’une victoire sur les partisans du Fatah, assimilés à des suppôts des sionistes. Cette crise conclut des mois d’affrontements entre les deux mouvements palestiniens et ruine un intense travail diplomatique qui avait été mené dans le même temps par les Etats arabes modérés (Egypte, Jordanie, Arabie Saoudite) pour rassembler les Palestiniens sous l’égide du président Mahmoud Abbas et relancer le processus de paix avec Israël. _____________________________ La Question palestinienne. 71 LA QUESTION PALESTINIENNE : PROBLÉMATIQUE. LE PAYS. La Palestine tire son nom du pays des Philistins, peuple qui, dans l’Antiquité, occupait l’actuelle Bande de Gaza. Elle subira de nombreuses dominations étrangères : perse (VIe-IVe s.), hellénistique (333-64 aCn), romaine (64 aCn-330 pCn), byzantine (330-636, sauf courte occupation perse, 614-629), arabe (636-1516), turque (1517-1918). Dans le cadre de l’Empire ottoman, la Palestine comme telle n’existe pas, car son territoire est réparti entre plusieurs circonscriptions : au nord, le vilayet (province) d’Alep ; sur le littoral (de Lattaquieh jusqu’au nord de Jaffa), le villayet de Beyrouth, traversé en son milieu par le sandjak (district) du Liban ; en bordure du désert (de Hama jusqu’à Aqaba), le vilayet de Syrie ; au sud-ouest de la Syrie, un triangle qui s’avance jusqu’à Aqaba forme le sandjak de Jérusalem. Juifs, chrétiens et musulmans vivent sur un pied d’égalité et se côtoient en général pacifiquement, même si l’on enregistre sporadiquement des heurts violents entre Juifs et Arabes. DIMENSIONS DE LA PROBLÉMATIQUE. N.B. LES FAUSSES EXPLICATIONS. Les approches nombreuses et variées de la question palestinienne, qu’elles soient intéressées ou non, de bonne ou de mauvaise foi, sont très souvent erronées et maladroites, ce qui a énormément contribué à aggraver le problème jusqu’à nos jours. Parmi les facteurs principaux à l’origine de cette mauvaise compréhension de la question, il faut relever l’ignorance (feinte ou réelle) des antécédents historiques et des réalités locales, ainsi que des responsabilités multiples, mais aussi une approche passionnelle ou cynique du problème tant du côté des protagonistes que des grandes puissances. D’une manière générale, les Arabes (du moins ceux de la région) y voient plus clair que beaucoup d’Occidentaux qui, souvent sur base de partis pris simplistes, croient assister à un duel entre bons et mauvais (comme dans les westerns !) ou parlent de guerre de religion. En outre, les événements du Proche-Orient entraînent souvent de par le monde des manifestations spectaculaires, des réactions xénophobes et des violences totalement injustifiées là où elles éclatent, sur base d’amalgames stupides et sans aucun rapport avec la situation sur le terrain. Il faut bien se garder de mêler tous les aspects du problème pour créer des amalgames, ce qui aboutit à des conclusions complètement fausses et met de l’huile sur le feu, rendant toute solution impossible. Tel est d’ailleurs précisément le jeu des extrémistes. Ainsi, il ne saurait être question de présenter comme élément décisif un facteur religieux ou racial. En effet, on ne peut parler entre Juifs et Arabes de races différentes, mais plutôt d’ethnies ; ainsi, il est difficile d’expliquer qu’Ariel Sharon (président du Likoud), de type slave, était plus sémite que Yasser Arafat - Arabe né au Caire (bien qu’il se soit prétendu longtemps né à Jérusalem), président de l’O.L.P. de 1969 jusqu’à sa mort en 2004 -, dont le type juif était presque caricatural. Quant à la dimension religieuse, elle ne peut être retenue que moyennant une ignorance fort suspecte de l’histoire autant que de la réalité sociale passée et actuelle. En effet, les options dans ce domaine sont fort variées dans les deux camps, et il ne faudrait pas oublier les Arabes convertis au judaïsme ou les Arabes chrétiens, ni les Arabes possédant la nationalité israélienne tout en restant musulmans ; du côté des Juifs, le problème est compliqué par l’ambiguïté du terme, qui peut désigner des Israéliens (citoyens de l’Etat d’Israël, dit aussi Etat hébreu) ou des Juifs de la Diaspora, qu’ils soient plus ou moins religieux (une étiquette qui peut recouvrir bien des choses !) et même incroyants… La Question palestinienne. 72 * * * La problématique revêt différentes dimensions, plus ou moins importantes selon les époques et la conjoncture. * Dimension économique et sociale. Dans le cadre de l’Empire ottoman, l’établissement en Palestine de colonies juives de plus en plus nombreuses donnera au problème sa première dimension, qui est économique et sociale : les paysans (fellahs), qui représentent 71 % de la population arabe en 1922, sont victimes de la spéculation foncière provoquée par les achats de terre que les organisations sionistes réalisent grâce à des capitaux étrangers ; en effet, les propriétaires fonciers formant une aristocratie arabe (effendis) groupée autour de quelques grandes familles, augmentent leurs loyers ou vendent leurs exploitations ; les paysans sont alors endettés, expulsés ou dépossédés et beaucoup se trouvent sans travail, car généralement les entreprises sionistes refusent d’engager de la main-d’oeuvre arabe. Ainsi, les populations arabes de Palestine, qui n’étaient pas des nomades mais des agriculteurs (en dépit des allégations mensongères faites au sultan par Théodore Herzl), étaient propriétaires de leurs terres. Ceci, d’ailleurs, était reconnu implicitement par les colons juifs, puisqu’ils les leur ont achetées. Mais, de ce fait, les fermiers locataires se sont trouvés spoliés de leurs moyens d’existence et condamnés à s’établir ailleurs. Ces pertes territoriales seront amplifiées suite à la victoire d’Israël dans la guerre d’indépendance (1948-1949), qui a provoqué l’exode de centaines de milliers de paysans palestiniens - un certain nombre ayant vu leur ferme incendiée par les sionistes. Beaucoup plus grave sera la politique de colonisation menée par l’Etat d’Israël dans les territoires palestiniens occupés suite à la guerre des Six Jours (1967). Plus tard, quand des accords seront enfin conclus à partir de 1991, se poseront encore de graves problèmes économiques : accès et débouchés, relations avec l’Etat hébreu, accès à l’eau, emploi, etc. * Dimension politique et territoriale. - Point de vue juif : droit imprescriptible à reprendre possession d’une terre promise et donnée par Dieu au peuple juif. Pour une fraction de l’opinion, regroupant des mouvements et partis qualifiés d’ultra-religieux ou ultra-orthodoxes, politiquement rattachés à l‘extrême droite israélienne, c’est la revendication du Grand Israël s’étendant de la Méditerranée jusqu’à l’Irak inclusivement. Cette forme impérialiste et souvent xénophobe du sionisme forme une sorte d’intégrisme cramponné à une interprétation littérale de la Bible, dans une vision passéiste et sclérosée du nationalisme.3 La revendication d’un Etat juif s’est trouvée confortée par les souffrances de la Diaspora ainsi que les manifestations d’antijudaïsme et d’antisémitisme, surtout depuis la fin du XIXe siècle (en Russie particulièrement ; en Russie après 1917 et en Pologne après 1919), et par-dessus tout le génocide perpétré par les nazis. Ce dernier facteur a décidé la communauté internationale (O.N.U., 1947) à imposer un partage du territoire très favorable aux Juifs compte tenu des données démographiques, donnant largement satisfaction aux revendications sionistes. Cela n’empêchera pas l’O.N.U. d’avaliser une augmentation territoriale considérable (quasi-doublement de superficie) de l’Etat hébreu après la victoire israélienne dans la guerre d’indépendance (1948-1949). Mais en 1967, les nouvelles annexions réalisées par Israël à la faveur de la guerre des Six Jours auront des conséquences plus graves encore. Tout en renforçant la position d’Israël, qui dispose 3 Istzhak Rabin a dit à leur sujet : « Ils lisent la Bible comme un cadastre. » La Question palestinienne. 73 désormais d’une monnaie d’échange dans les négociations pour sa reconnaissance en tant qu’Etat, ces conquêtes vont compliquer singulièrement la problématique, car il ne s’agit plus là d’une annexion - refusée autant par la communauté internationale que par les vainqueurs eux-mêmes -, mais bien d’une occupation militaire. Celle-ci, aggravée par l’établissement de colonies juives dans ces territoires, sera très mal ressentie par la population, et va générer une résistance armée de plus en plus ferme et généralisée, avec l’avènement décisif d’un mouvement national palestinien. Avec le temps, il apparaîtra de plus en plus que les territoires occupés de Cisjordanie et de Gaza, colonisés sans vergogne, ne sont plus considérés par les autorités israéliennes comme butin de guerre et monnaie d’échange mais bien, au nom de mobiles sécuritaires, nationalistes et religieux, comme parties intégrantes de l’Etat hébreu. L’escalade de la violence, les provocations et représailles mutuelles, jointes à des excès commis à l’égard de réfugiés palestiniens avec la complicité de responsables israéliens, conduiront une partie de l’opinion publique israélienne à lutter pour une solution pacifique. De nombreux accords s’ensuivront, mais le pourrissement du problème et la mauvaise volonté ont fait leur oeuvre : les extrémistes des deux camps, disposant de puissants appuis, ont vu augmenter le nombre de leurs partisans et clients, et la plus grande division règne de part et d’autre sur le parti à prendre autant que sur les objectifs à poursuivre. - Au plan international : l’attitude des grandes puissances. Il n’y a, bien entendu, pas de point de vue unique, mais bien des politiques variables en fonction de la conjoncture et des intérêts supposés du moment. Dès avant la fin de la première guerre mondiale, la GrandeBretagne a fait des promesses contradictoires concernant le pays : indépendance aux Arabes, établissement d’un foyer aux Juifs ! Ensuite elle s’est entendue avec la France sur le démembrement de la Syrie. Enfin, sensibilisés à l’extrême par la Shoah, la plupart des pays du monde se sont plus ou moins ralliés au projet sioniste et l’O.N.U. a décidé d’un partage du pays (1947), avec pour conséquence presque immédiate la création d’un Etat juif (1948). La guerre d’indépendance (1948-1949) se solde par d’énormes gains territoriaux pour Israël vainqueur, dont les nouvelles frontières (la ligne verte), depuis reconnues par l’O.N.U., sont devenues légales. Cependant la guerre des Six Jours (1967) et ses conséquences (occupation puis colonisation des territoires de Cisjordanie et de Gaza) amèneront beaucoup d’observateurs à réviser leur position à l’égard de l’Etat hébreu : Israël n’apparaîtra plus forcément comme David face à Goliath, victime de persécutions séculaires et entièrement cerné d’ennemis, mais plutôt comme un Etat xénophobe, arrogant, impérialiste et impitoyable, devenu une des principales puissances de la région. - Point de vue arabe. A la base, refus de principe par les populations arabes de toute scission du pays habité par elles depuis des siècles (sans que cela n’ait été contesté par personne jusqu’au XXe siècle !), a fortiori contre la volonté de la majorité de ses habitants, et donc de la création d’un Etat juif en son sein (tout au plus peuvent-elles envisager pour les Juifs la concession de zones autonomes au sein d’un Etat palestinien). La création de l’Etat d’Israël (1948) est perçue par le monde arabe comme une nouvelle agression de l’Occident et une reprise de la colonisation. Les Arabes ne portent aucune responsabilité dans la shoah, trop souvent instrumentalisée par les Juifs ou par la communauté internationale pour justifier d’abord l’existence même de l’Etat hébreu, ensuite sa politique menaçante et impérialiste4. Volonté de reconstituer une grande Syrie incluant la Palestine, jusqu’à la Méditerranée - en opposition totale avec l’accord franco-britannique sur le démembrement de la Syrie puis la création du royaume de Jordanie et l’intégration à celui-ci (1949) de la Cisjordanie ; a fortiori en opposition avec l’occupation par Israël de la Cisjordanie à partir de 1967. Par la suite, la Cet argument a encore été repris - avec une violence condamnée par beaucoup d’Arabes - par le président iranien Mahmoud Amadinejad qui, après avoir suggéré que l’Allemagne et l’Autriche accueillent l’Etat d’Israël, a répété - lors d’une conférence (Review of the Holocaust) organisée à Téhéran les 11 et 12 décembre 2006, avec la participation de nombreux négationnistes - que l’Etat d’Israël était voué à disparaître. 4 La Question palestinienne. 74 Palestine se trouve fractionnée en deux territoires séparés qui connaîtront des destinées différentes : la Cisjordanie, plus bourgeoise, aisée et laïque, et la Bande de Gaza, plus démunie et plus pieuse… L’instauration de l’Autorité palestinienne et la mobilisation nationale face à l’occupation israélienne auraient dû les réunifier, mais il n’en a rien été. L’O.L.P., déjà créée en 1964, va prendre de l’ampleur et s’illustrer longtemps (jusque 1988) par des attentats terroristes ; ensuite viendra l’intifada, et plus tard des attentats suicides très meurtriers, oeuvre de groupes terroristes appuyés de l’extérieur (principalement la Syrie et le Liban). - Point de vue des Etats arabes voisins et autres En dépit de positions de principe très tranchées, les Etats arabes déjà constitués n’ont pas la même vision du problème palestinien et sont loin de parler et surtout d’agir dans l’unanimité. C’est ainsi qu’ils peuvent manifester soit de l’indifférence, soit des positions divergentes en fonction de leurs propres intérêts économiques et politiques, et aussi en fonction de leurs relations avec les grandes puissances (Grande-Bretagne et France d’abord, et par la suite surtout les Etats-Unis et l’U.R.S.S, ou encore l’Union européenne). Dans la guerre des Six Jours (1967), qui provoquera un formidable essor du nationalisme palestinien, l’intervention des Etats arabes, masquée par une apparente solidarité panarabe avec les Palestiniens contre l’ennemi commun israélien, a plutôt été dictée par des nationalismes égoïstes. Sur la question palestinienne, le monde arabe, tout en visant le panarabisme, reste partagé entre deux options : soit le soutien à la création d’un Etat palestinien, soit le refus de cette perspective, de crainte de créer un nationalisme arabe supplémentaire. En outre, plusieurs Etats arabes ont de bonnes raisons d’adopter une attitude modérée : ils connaissent la fragilité de leur position, leurs responsables étant fort peu populaires ; en outre, ils se méfient à juste titre face à la montée en puissance de divers groupes extrémistes et populistes, religieux ou non, appuyés ou téléguidés par des Etats arabes rivaux - ceux-ci cherchant avant tout à étendre leur influence à la faveur du drame palestinien5. La défaite de 1967 a provoqué la surprise et la consternation dans le monde arabe, dont les populations se sentent trahies par leurs dirigeants ; les sentiments de colère et de frustration vont entraîner un rejet de l’Occident et alimenter la montée de l’islamisme, mouvement militant fondé sur un repli identitaire qui, sous couvert d’intégrisme religieux, rompt avec la modernité et avec une tendance à la laïcité. * La question de l’accueil des réfugiés palestiniens. Les Etats arabes voisins d’Israël se sont montrés très réticents, voire hostiles, à accueillir les réfugiés palestiniens à partir de 1949. En effet : 1/ position de principe : cela revenait à reconnaître de facto l’Etat d’Israël (et même ses conquêtes), ce qui était pour eux exclu ; 2/ point de vue économique et financier : cet afflux risquait de provoquer de graves problèmes pour l’économie nationale ; 3/ point de vue social et politique : l’hébergement d’éléments incontrôlables, voire terroristes, constitue un risque majeur de troubles sociaux (criminalité, mouvements extrémistes influençant la population indigène) et d’instabilité politique menaçant le régime en place dans le pays ; 4/ point de vue international et diplomatique : accepter ces réfugiés revient à choisir clairement son camp comme ennemi déclaré d’Israël et de ses alliés, avec tout ce que cela suppose comme conséquences prévisibles - isolement sur la scène internationale, mesures de rétorsion, sanctions économiques, position très inconfortable face à la communauté internationale, avec une marge de manoeuvre quasi nulle. Les Palestiniens ont d’ailleurs conçu une grande amertume suite à la position opportuniste souvent adoptée par leurs frères arabes. C’est ainsi que, lors de l’invasion du Liban menée par l’armée israélienne en juillet 2007 pour contrer les attaques du Hezbollah pro-iranien contre l’Etat hébreu, celui-ci a reçu des messages officiels de félicitations et d’encouragements venant d’Etats arabes ! 5 La Question palestinienne. 75 ÉTAPES DE LA PROBLÉMATIQUE. L’étude de la question palestinienne doit être envisagée selon un certain nombre de grandes étapes, caractérisées par les enjeux et la nature des problèmes posés, par la politique des protagonistes autant que par celle des grandes puissances, mais aussi par le contexte international. C’est ainsi que l’on peut distinguer les périodes suivantes : 1880-1915, 19151922, 1922-1945, 1947-1967, 1967-1991 et depuis 1991. 1. L’antijudaïsme européen et l’essor du sionisme politique. Dans le cadre de l’Empire ottoman, il n’est pas question d’un nationalisme palestinien, le pays étant morcelé. A l’origine de la question palestinienne, il y a la poussée des mouvements nationalistes en Europe à la fin du XIXe siècle, ce qui amène une recrudescence de l’antijudaïsme et de l’antisémitisme, et, en réaction, l’essor d’un mouvement politique sioniste militant - surtout dans la Diaspora d’Europe orientale - pour l’établissement d’un Etat juif en Palestine. Cette entreprise, dès avant 1914, sera conçue par ses partisans comme le retour sur la terre ancestrale, alors que du point de vue arabe il s’agit de colonisation Le nationalisme palestinien se construira donc en réaction au mouvement sioniste. Celui-ci aura d’ailleurs longtemps peu d’écho au sein de la Diaspora : il faudra attendre l’électrochoc provoqué par le génocide nazi (shoah) dans l’opinion mondiale pour apporter une justification du projet sioniste aux yeux de très nombreux Juifs de par le monde, qui jusque-là n’avaient absolument pas adhéré aux thèses du mouvement. 2. Des promesses intenables. L’organisation de la tutelle franco-britannique sur la région (1915-1922). A la manière habituelle des grandes puissances, la Grande-Bretagne a surtout agi au mieux de ses intérêts supposés du moment. Elle a fait des promesses contradictoires : aux Arabes, une vaste confédération s’étendant de la Méditerranée orientale au golfe Persique, pour prix de leur aide dans la lutte contre les turcs ; au mouvement sioniste, avec la déclaration Balfour - tout en sachant que c’était irréalisable par suite des accords qu’elle a été forcée de conclure avec la France. Quant à cette dernière, soucieuse avant tout de ne pas laisser sa vieille rivale britannique profiter seule de la victoire, elle l’a acculée à accepter un partage territorial, et elle chassera le prince Fayçal quand il viendra prendre possession du trône de Syrie. Dans de telles conditions, le mandat britannique allait commencer sous de sombres auspices. 3. A partir du mandat britannique (1922-1948) - et surtout de la création de l’Etat d’Israël (1948*), peut-être inconcevable sans le bouleversement de l’opinion provoqué par le traumatisme de la shoah - jusqu’en 1967, le conflit prend la forme d’un duel pour la possession d’une même terre entre deux Nations différenciées aux plans ethnique et religieux. 4. Un nouvel enjeu : la récupération des territoires palestiniens occupés par Israël. A partir de 1967*, la problématique change de nature. Le conflit est essentiellement politique et territorial. Il a pour enjeu principal, du côté palestinien, la récupération des territoires occupés lors de la guerre des Six Jours, revendication à laquelle l’Etat hébreu opposera celle de sa reconnaissance par les Palestiniens autant que par les Etats arabes voisins. Ceux-ci vont d’ailleurs être amenés à adopter la même perspective, revendiquant la restitution des territoires occupés par Israël - et reconnaissant ainsi implicitement non seulement l’existence de l’Etat hébreu (qu’ils ne désignaient jusqu’alors que sous le vocable d’entité sioniste), mais aussi, et par le fait même, la partition de la terre palestinienne en deux entités, l’une juive et l’autre arabe. A cause de la guerre des Six Jours et de ses suites (occupation militaire, puis colonisation de territoires palestiniens par Israël), il sera de plus en plus évident que le camp arabe (Palestiniens et pays arabes) est incapable d’imposer sa volonté (refus d’un Etat juif) La Question palestinienne. 76 par la force (d’où, d’ailleurs, la formidable montée en puissance du nationalisme palestinien, bientôt exprimé par le terrorisme), et que l’issue du conflit doit passer par une reconnaissance réciproque et aussi par le partage de la Palestine - même si les circonstances politiques et les pressions extérieures en sens divers empêcheront très longtemps encore de mener des négociations tenant compte de cette nouvelle donne. D’autre part, d’un point de vue international, la victoire écrasante de l’Etat hébreu et son attitude volontiers arrogante, impérialiste, voire xénophobe, contribuent à modifier son statut aux yeux de nombreux observateurs, car l’éternelle victime persécutée apparaît désormais comme une des principales puissances de la région. Dès lors, on en viendra peu à peu à prendre davantage en compte - y compris, à partir de 1982, au sein même de l’opinion israélienne - les intérêts légitimes du peuple palestinien. 5. Le temps des accords négociés. A partir de 1991, la problématique palestinienne sort enfin du terrain des options violentes pour adopter celui des accords négociés. Cette nouvelle approche est inaugurée avec l’ouverture à Madrid (30 octobre 1991) de la conférence sur la paix au Proche-Orient entre les Palestiniens, Israël et les Etats arabes ; poursuivies à Washington, les négociations aboutiront aux accords d’Oslo (ainsi désignés suite au rôle de médiateur joué par la Norvège), concrétisés dans l’accord israélo-palestinien du 30 août 1993 (ratification à Washington le 13 septembre 1993). Les principaux facteurs à l’origine de ce rapprochement sont les suivants. - du côté de l’O.L.P. : 1/ au sein du mouvement nationaliste palestinien et de ceux qui prétendent défendre sa cause, l’O.L.P. se trouve isolée par sa relative modération à partir de 1988 (renonciation de fait au terrorisme, acceptation implicite de l’Etat d’Israël) ; elle se voit aussi, à la faveur du pourrissement de la situation (intifada* à partir de décembre 1987), concurrencée, voire débordée, par des groupes beaucoup plus radicaux et terroristes qui, soutenus de l’extérieur (Iran, Syrie), attisent les discordes à des fins sans rapport avec la cause du peuple palestinien ; 2/ des dissensions existent au sein de l’O.L.P., et même de son bureau politique, et le président Arafat prend de l’âge… ; 3/ au plan international, l’O.L.P. paie cher sa prise de position aux côtés de l’Irak dans la guerre du Golfe (2 août 1990-février 1991) : rejetée par les bailleurs de fonds arabes (émirats) et par la communauté internationale, elle connaît de graves difficultés financières et diplomatiques. - du côté d’Israël également, la politique d’intransigeance se révèle dangereuse à terme. En effet, 1/ Une grande partie de l’opinion publique israélienne - en particulier les travaillistes (socialistes) et le mouvement Peace now - réclame des négociations. Car la situation est sans issue : le maintien de l’occupation des territoires palestiniens, effroyablement coûteux pour Israël (notamment en vies humaines), empêche toute normalisation des relations avec les voisins arabes (Syrie et Liban en particulier) ; 2/ Les dirigeants de l’Etat hébreu, qui avaient précédemment soutenu contre l’O.L.P. un mouvement qui s’est révélé ensuite beaucoup plus dangereux, s’avisent qu’il est préférable de traiter avec une organisation affaiblie et assagie que de faire le jeu des extrémistes dans les deux camps sans compter le risque de dresser contre eux l’ensemble du monde arabe, voire de la communauté internationale. - au niveau international, la guerre froide a pris fin (1989-1990), et avec elle la longue rivalité entre l’Union Soviétique (soutenant les Arabes) et les Etats-Unis (alliés d’Israël). Dès lors ceux-ci, devenus seule superpuissance mondiale, multiplient les pressions en faveur de la paix, à la fois dans une perspective internationale (hégémonie militaire et économique) et pour des raisons de politique intérieure (forte majorité juive aux Etats-Unis). LES PROBLÈMES NON RÉSOLUS. La Question palestinienne. 77 La question palestinienne est cependant loin d’être résolue, et cela par suite de nombreux et graves obstacles : - le problème du retour des réfugiés ; - le statut de Jérusalem ; - les nombreuses colonies juives implantées dans les territoires palestiniens occupés, enviolation flagrante de la résolution 242 et des conventions internationales. La colonisation n'a jamais cessé de croître : entre 1993 (accords d'Oslo) et 2000 (début de la seconde intifada), le nombre des colonies israliennes a doublé ; - la division territoriale (Cisjordanie isolée de la Bande de Gaza) ; - le mur de séparation (construit à partir de juin 2002) : il fractionne des propriétés palestiniennes, sépare des familles et occasionne pour les travailleurs transfrontaliers de nombreux désagréments (trajets allongés par des détours, tracasseries administratives) ; sa construction a incoroporé 80 % des colonies israéliennes, équivalant à une annexion de facto par Israël de territoire palestinien ; - le jeu cynique des puissances régionales soutenant des mouvements extrémistes ; - la pression exercée dans les deux camps par des mouvements et partis extrémistes, ainsi que les aléas de l’opinion publique et des élections ; - les problèmes économiques (notamment l'accès à l'eau), y compris dans les relations avec Israël. ________________________ La Question palestinienne.