Qu’il s’agisse des réseaux off line (cédéroms, jeux interactifs…) ou on line (réseaux internet,
intranet…), certaines caractéristiques émergent dont l’interactivité et la convergence
constituent les principales. Le numérique permet la création d’espaces virtuels où convergent
et sont transcrites des données écrites, graphiques, sonores et des images fixes et animées. De
plus, ces espaces sont aussi des lieux où la communication par le biais de l’interactivité est
possible (forums de discussion, chat room…).
Des études dans les domaines de la cognition et de l’Apprentissage Assisté par
Ordinateur (AAO) tentent d’évaluer l’usage de l’ordinateur dans le développement
d’aptitudes particulières en matière d’acquisition des connaissances ou d’analyser les
opérations de traitement de l’information (tri, sélection ou classement des données) en
fonction des environnements et des supports techniques. Il semble que les facultés liées au
déploiement linéaire d’une idée buttent sur la notion du temps et de l’espace. Par exemple,
les logiciels de traitement de texte permettent la construction de textes qui passe par le
défilement écranique, le « couper-coller », la sauvegarde et autres fonctions informatiques.
Cette construction diffère de celle d’une personne qui utilise une plume pour écrire un texte
sur une feuille de papier. La question du droit à l’erreur disparaît avec l’outil informatique,
l’encre et le papier exigent quant à eux la correction ou le recommencement comme
l’expression d’une sentence voire d’une condamnation possible; le numérique évince l’erreur,
la faute, la chute ou bien s’il y a faute, il est possible de l’effacer totalement comme si elle
n’avait pas existé. Le papier laisse des traces, l’encre ne s’évapore guère ou si elle le fait, le
temps en aura été le témoin. L’idée de puissance, voire de toute puissance associée à
l’ordinateur se retrouve décuplée avec les réseaux internet et multimédia. Naviguer sur
internet, c’est vivre le leurre de la puissance défiant le temps et l’espace. Comment cette
illusion de puissance n’opérerait-elle pas un changement dans la pensée des navigateurs et des
utilisateurs des technologies de l’information et de la communication ? C’est la question que
je pose et qui selon moi, trouve des éléments de légitimité par exemple dans les dérives et les
effets pervers rencontrés sur la toile. Les forums de discussions et bavardoires collectifs ou
en « salon privés » ne sont-ils pas des lieux où l’expression, sous le couvert de l’anonymat,
devient maîtresse de la licence, où tout est permis, où l’illusion de la toute puissance prend la
forme de l’éclosion des tréfonds de la nature humaine. La liberté n’est pas licence or elle le
devient vite lorsque s’ouvrent des lieux qui échappent au contrôle et à toute instance au
pouvoir légiférant. S’ouvre alors la question éthique liée à l’usage des TIC.
Tout comme les autres images, les pages-écran d’internet où se juxtaposent textes,
images et sons revêtent un caractère d’immédiateté et de globalité dans la mesure où elles sont
perçues instantanément et dans leur ensemble. De plus, l’hypertexte ajoute une dimension
arborescente à ces pages-écran ou à ce que nous pourrions nommer des « images-écran ». Si
l’image donne à voir et fait saisir un fait globalement, qu’advient-il de la pensée de
l’observateur lorsque la globalité de l’image-écran est constituée de textes, de fenêtres, de
graphismes, d’images fixes et animées et de sons ? On est loin du caractère linéaire des pages
d’un livre par exemple ? Comment l’appréhension du réel s’opère-t-il lorsque ce réel est
multiple dans ses formes et lorsqu’il joue du virtuel ? Il s’ensuit une pensée de l’association,
de la fragmentation, de la superposition, mais aussi de ruptures successives. Nous
nommerons la culture du multimédia et du réseau internet une « culture de la rupture » et de la
parcellisation. La navigation, selon le terme consacré, sur internet entraîne l’utilisateur dans
les couloirs labyrinthiques d’un monde d’information en constant mouvement. Ces couloirs
sont ceux de données multiples stockées, consultables et pouvant être conservées, ceux
d’échanges d’information, de dialogues de groupe ou entre deux personnes, ceux de processus
de créations collectives dans les domaines de l’art, de la littérature ou même de la science,
ceux de formes nouvelles de l’exercice démocratique ou ceux encore d’expériences de
consultations ou de conférences à distance. Ces formes d’accès à l’information et de