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Analyse du discours journalistique
Prof. Mercier : ecrire@arnaudmercier.com
Aller voir le prof pour le mémoire : manuels sont très riches des représentations
stéréotypique nationales sur les sujets traités.
1 examen : avec un sujet distinct pour le master 1 et Master 2.
Complément : note de synthèse issue de lecture. François Heinderyckx « La Malinformation »,
ed. Labor. Ou articles de la revue « Question communication ». D. Dayan (défend Israël) sur la
couverture israélo-palestinienne avec 3 articles de réactions (Walter et Fleuri de résumée,
Mercier contre, J. Bourdon, position intermédiaire).
Résumé des arguments (2/3) et avancer notre propre point de vue et arguments (1/3).
Demander textes à Mme Bellocchio.
Tous les travaux à rendre le 4 juin (7 juin pour Mercier)
25.4.07
Analyse du discours journalistique
Sociologie du discours journalistique
Introduction
Le journalisme est inséré dans un système de contraintes très strict. Des contraintes techniques,
professionnelles, identitaires, juridiques et politiques. Il est indispensable de faire une sociologie
des pratiques journalistiques : définir dans quel cadre social les journalistes sont amenés à
intervenir. Le journalisme est une construction sociale qui peut aboutir à des phénomènes de
mal-information, désinformation.
Sujet du cours : comment expliquer les phénomènes de mal information ?
Insertion idéale de la fonction de journalisme dans une espace public démocratique
Pacte de communication
La communication médiatique appartient à une catégorie générale de la communication, où un
support technologique sert de canal de transmission entre une instance d’émission et des
récepteurs qui sont forcément multiples, par la quantité et par la façon dappréhender les choses.
La communication médiatique s’organise en suivant un pacte de communication qui a pour
finalité la transmission de l’information. Le travail de journaliste s’inscrit dans un rapport de
dépendance au réel. La fiction est exclue. Les producteurs de l’information sont des journalistes
(discutable). L’information est adressée à des destinataires, à des publics. Le type de mise en
forme de l’information en ressent. Dans la norme professionnelle, le journaliste n’est pas
producteur d’évènement, il ne fait que relayer, il est un médiateur. Le journaliste a une triple
mission :
- il doit chercher (internet, terrain, enquêtes, etc.)
- triller
- mettre en forme (informer = mettre en forme)
Cette mission il doit la remplir dans un système de contraintes fort avec un premier niveau de
problème : la temporalité, la première contrainte du journaliste qui est sensé retenir l’actualité, ce
qui est actuel. Le journaliste vit dans l’urgence. La norme professionnelle semble tenir pour
acquis ce qui fait actualité. C’est souvent une fausse évidence : il y a des milliards d’évènement
qui se déroulent simultanément. Ce qui est sélectionné est ce qui est considéré important. Il y a
une hiérarchisation de l’information.
Les publics confient cette mission aux journalistes dans leur qualité de citoyens qui veulent être
informés pour agir en connaissance de cause. Le flux d’information dans une formation est tel
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que les citoyens ne peuvent pas chercher en permanence de l’information. Il faut triller
l’information selon le modèle d’économie psychique du moindre effort. On confie donc aux
journalistes ce travail de tri.
Le tri doit être fait selon des principes clairs définis à l’avance qui nous permettent d’être
certains de l’intention de communication des journalistes. Ceci correspond à la ligne éditoriale qui
permet aux publics de savoir à quoi s’attendre. Il y a des principes de tri selon des critères
idéologiques (qui donnent lieu à une presse d’opinion), thématiques (magazines thématique
«Surfmagazine »), le ton (Canard enchainé, guignol de l’info, etc.) etc.
Les journalistes établissent ainsi un rapport clair avec leurs publics. Si ils trouvent leur public, ils
sont pleinement légitimes « Disposition à tolérer des décisions encore indéterminées quant à leur
contenu à l’intérieur de limites définies ». (Nicholas Luhmann). Ceci renvoie à l’idée de la
confiance des publics vis-à-vis des j.
L’ensemble de ces phénomènes définissent un pacte de communication qui se décline
en 3 types de contrat d’information :
1. Contrat d’information : le devoir d’informer, retenir des faits afin de faire connaitre à
des publics ce qu’ils doivent savoir pour évoluer au mieux dans l’univers qui les
entoure et pour le comprendre.
2. Le contrat de confiance : concerne la manière de traiter l’information, de la mettre
en forme, en fonction des attentes supposés des publics, des caractéristiques
sociales présupposées des récepteurs. Cela implique que le j. sont retenus comme
« sérieux », que l’information est jugée « digne de foi ». Dans les métadiscours
justificatifs des journalistes comme dans la mise en scène de leur travail, les j.
s’emploient à donner des gagnes de leur sérieux et de leur compétence (soit par des
signes qui renvoient au témoignage, des lieux, des objets symboliques). On mobilise
aussi des arguments (objectivité, dévouement pour la recherche de l’information). On
fait appel au réalisme des images et des témoignages. Notion de neutralité (non
directement d’objectivité) est aussi prise en compte : donner la parole aux 2 camps
c’est une gagne de neutralité (principe du pour/contre), le micro de trottoir.
Les journalistes doivent donner des preuves de leur neutralité. Il y a 3 moyens
discursifs pour accréditer le sentiment de véracité des énoncés et des images : 1)
l’authenticité, 2) la vraisemblance, 3) l’explication selon la terminologie adoptée par
(P. Charaudeau, Les médias et information, 2005).
1) L’authenticité : c’est le fait que l’on puisse attester l’existence de ce qu’il appelle
les êtres au monde (la réalité, le réel) sans artifices et sans écran entre ce qui
serait la réalité empirique et la perception du journaliste. Ca repose sur un réel
de transparence gagnée par la production de document, objets exposés comme
des pièces à conviction. Dans le journalisme audio-visuel c’est l’image qui a ce
rôle. Le modèle absolu de cela est l’idée des images prises par des caméras
automatiques (aucune intervention de l’homme) qui permettent a priori un
effacement de la subjectivité du cameraman (ex. images de bombardement
aériens, de formule 1, etc.). La tendance au « brut », évider montage, coupure,
truquage etc. Pour éviter d’être accusé d’avoir trafiqué le document. Réalisme
par le refus d’une certaine mise en forme.
2) La vraisemblance : Le monde (ensemble de ceux qui peuvent observer) n’étant
pas présent, les évènements se sont déjà produits ; on a pas de pièce à
conviction, de trace forte de l’évènement ; il faut renvoyer à un travail de
reconstitution. On est donc dans un réel de supposition. Le type de travail
journalistique est le journalisme d’investigation : recherche de témoignages,
directs ou indirects. C’est le recours de plus en plus fréquent à la palette
graphique pour reproduire des animations qui permettent de visualiser des faits :
plan sommaire des faits, petit schéma avec flèches, voir des images de synthèse
(reconstruction de scènes de guerre) etc.
Le recours à la vraisemblance est un vrai problème de la déontologie
journalistique : l’image est là pour attester mais les j. se contentent de la logique
du vraisemblable. L’image n’a en effet souvent aucune valeur informative. Elle ne
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sert qu’à illustrer un propos qui est construit hors d’elle. Le j. audio-visuel à une
forte contrainte : « il faut faire image ». Il recourt donc souvent à des images
prétexte. Les images n’illustrent pas au sens strict ce qui est dit. La barrière
ontologique est ainsi souvent franchie.
3) L’explication : repose sur l’idée que le fait peut être compris parce qu’on accède
à la motivation des acteurs, leur finalité. Ce sont des procédés d’élucidation en
remontant à l’origine des faits, aux intérêts en jeu. D’où le recours à la parole de
spécialistes, d’experts qui sont sensés apporter des preuves de type scientifique.
Cette pratique pose aussi problème : l’information retenue n’est pas forcément
représentative de l’intégralité de l’intervention de l’expert.
L’interview et les débats essayent de faire émerger une sorte de vérité moyenne
par la confrontation des opinions.
3. Le contrat de captation est e troisième contrat de communication constitutif du
pacte de communication. Il y a un cout de fonctionnement qu’il faut amortir, soit en
vendant le contenu du support, soit l’espace publicitaire que le support peut contenir.
Les journalistes ne peuvent se contenter de faire l’information qu’ils voudraient faire
pour eux-mêmes. Il leur faut de trouver les moyens d’intéresser leur public. D’où
l’existence d’un troisième contrat, le contrat de captation notamment. Il s’agit de
séduire les publics, de les attirer à soi et d’autant plus qu’on est dans un
environnement informatif hyper concurrentiel. L’épreuve de la captation est
renouvelée tous les jours.
La couverture d’un News Magasine amène des variations de tirage et de vente
spectaculaires. La mise en forme de l’information prend des allures de mise en
spectacle et de mise en récit. Les journalistes ont parfaitement intégré la contrainte
commerciale et ils reconnaissent donc la mise en scène de l’info, quelque soit le
support, et ils s’évertuent à montrer que ce n’est pas contradictoire avec le devoir
d’informer. Le style scientifique, monocorde et ennuyeux, n’est pas un gage de
véracité. C’est la logique du spectaculaire qui l’emporte souvent dans l’information.
Sources
Multiples CONTRAT DE CONFIENCE
(Être crédible)
Producteurs d’information les publics
(chercher et triller) Mettre en forme Récepteurs
(Séduire)
CONTRAT D’INFORMATION CONTRAT DE CAPTATION
Faits
innombrables
Question du rapport au réel dans le travail journalistique
Les journalistes ont une mission sociale de présentation de la réalité. Ils sont sensés dresser un
portrait fidèle. Mais la réalité n’est considérée comme telle qu’à travers une communauté
d’interprétation qui présuppose partager une savoir et une certaine idée de la vérité. C’est tout
l’apport des Cultural Studies d’avoir insisté sur ce point. Entre l’encodage et le décodage il peut y
avoir un décalage : cf. exemple de la série Dallas. Les codes culturels et les communautés
d’interprétation comptent plus que le contenu même : un même contenu peut être interprété de
manière opposée, voir contradictoire.
Il n’y a aucune raison a priori qui dicte que le processus de décodage soit conforme au processus
d’encodage. D’où les phénomènes de malinformation. Problème que les journalistes rencontrent
tous les jours.
Pour limiter ces processus d’incommunication, le journalisme fait appel à un univers de sens
partagé par le plus grand nombre. Le j. se rabat sur le plus petit dénominateur commun afin
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d’être accessible au plus grand nombre. D’où l’utilité du recours à la notion de « sens commun »
au sens du célèbre anthropologue Clifford Geertz. Le sens commun n’est pas entendu au sens
négatif, pour Geertz le sens commun c’est un véritable savoir social qui est partagé par les
membres d’une société et qui « leur permet de reconnaitre les personnes et les situations en
fonction de certaines caractéristiques typiques ». Le sens commun c’est un système organisé
d’appréhension du monde, qui comporte des catégories de jugement ; le sens commun est un
« système culturel ». Le sens commun comporte 4 éléments de définition :
- Le naturel : le sens commun se définit par le naturel. L’explication du monde insiste sur
les évidences et rejette la posture critique systématique.
- L’esprit pratique : l’efficacité immédiate d’une idée est un bon critère de vérification de sa
pertinence. (« Ah tu vois ? ça marche ! »)
- La simplicité : la description et l’explication des faits suivent une économie du réalisme
et de la sobriété.
- L’accessibilité : tout un chacun peut comprendre le monde. Un premier niveau de
compréhension est la plupart du temps largement suffisant.
Ces 4 éléments se conjuguent, font synergie dans la réalité. Le travail des journalistes
s’apparente largement à un exercice de mise en forme des raisonnements et des explications du
sens commun.
09.05.2007
Quelle est donc la valeur de l’information journalistique ? Etant donné qu’il y a bien une
construction de sens ?
Mais en quoi l’information est-ce un construction ?
- Le tri de l’information : premièrement parce que le travail journalistique est un tri, les j.
sont des gate-keepers (concept issu dans les années ’50). Les professionnels de la télé
affirment d’ailleurs qu’avec l’info qu’ils ont à disposition ils pourraient faire 10 JT par jour.
Le tri peut être drastique, il y a inévitablement un certain arbitraire du choix. Mais il y a
des garde-fous : le tri est collectif car il se fait lors de la conférence de rédaction.
On assiste cependant à une évolution qui affaiblie le tri collectif des informations : les
blogs d’information gérés par les journalistes, par exemple, pose le problème de la
responsabilité de l’information qui n’est plus clairement assumée par le journal. Le
télétravail (travail à distance) des pigistes permanents pose également le problème de
l’absence de confrontation collective lors du tri de l’information et de la relative
responsabilité. C’est aujourd’hui le cas de la presse magazine.
- La mise en récit et la mise en scène : le journalisme c’est de la littérature, c’est une
mise en récit qui s’assume comme telle. La mise en récit suit un certain nombre de
règles. a) l’angle (la problématique, le type de regard développé sur l’ensemble du sujet)
qui est souvent la nouveauté, le spectaculaire, le dramatique, le chauvinisme (cf.
journalisme sportif, refuge toléré du nationalisme), l’utilité citoyenne (météo, services et
renseignements pratiques), l’institutionnel obligé routinisé (ce que les j. appellent les
«marronniers» : le congrès du parti, le changement de conseiller, la rentrée scolaire, etc.)
- Le cadrage : le type d’interprétation associé implicitement ou explicitement aux faits
traités. Par le cadrage on induit un certain type de lecture. Souvent les j. adoptent un
cadrage psychologisant (rivalités de personnes, etc.), c’est d’abord la psychologie,
l’arrivisme, le carriérisme, etc., qui est le mobile majeur. On pourrait très bien cadrer la
politique de manière sociologisante.
- Le code narratif : le leitmotiv de la formation de journaliste est : « Il faut raconter une
histoire »
- Le personnage : Souvent les reportages télévisuels sont traités par le cas
exemplaire ayant une portée généralisant, il faut un personnage marquant, un héros,
l’antihéros, original ayant un point de vue iconoclaste.
- La logique du « bon sentiment ». Souvent, avec le code narratif, on
retrouve les « bons sentiments » mis en scènes de toutes les manières possibles
(pacifisme, etc.).
- Le relativisme du jugement social sur un fait donné : Il y a une relativisation
du jugement social sur les sujets médiatisés qui peut varier selon les contextes
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historiques et sociales (cf. Lucien Fèvre, parle de « l’outillage mental » qui permet de
penser certains concepts ou jugements).
Le même fait fera la une à certains moments et pas d’autres, la relativité se situe sur
certains mois, décennies ou siècles. La littérature est le résultat d’un auteur qui est
imprégné de l’air de son temps.
Les rédactions décident d’ailleurs de montrer certaines déviances sociales et pas
d’autres. La pédophilie, par exemple, est devenue un objet repoussoir considéré presque
tabou.
- La logique de la contradiction : La contradiction, le binaire : besoin d’avoir une
vision manichéenne de la réalité.
- Le marketing : Une partie de l’information est formatée selon les règles du
marketing. Il y a une nécessité d’attirer les annonceurs. Les unes, les titres accrocheurs.
Il y a des études d’audience très précises afin de déterminer ce qui marche au mieux. Le
sexe à la une est extrêmement accrocheur (échangisme, sado-masochisme, naturisme,
les tendances qui montent, etc.). Pour la presse magazine, ce ne sont plus les
rédacteurs en chef à décider la une mais les directeurs artistiques, les DA, d’après les
qualités des photos disponibles. Dans cette logique, ce qui est annoncé à la une par les
DA n’est pas nécessairement correspondant au contenu véritable du magazine. On
arrive jusqu’à vendre des pubs sous la forme d’articles.
D. Dayan propose une distinction entre « le journalistique » et « le journalisé ».
Le journalisé renvoie à l’idée qu’il y a un travail sociale de transformation d’un fait en un
produit médiatique.
Par Le journalistique (ou le médiatique pour Mercier) le journaliste véhicule une intention
persuasive et ne servent plus leur mission qui est de journaliser, d’être des médiateurs.
Les logiques de communications sont si contraignantes qu’elles s’imposent souvent aux
journalistes avec leur format.
Des idéaux journalistiques à la malinformation
Nous allons étudier 4 idéaux du journaliste, montrer quelles limites se rencontrent dans leur
application et en quoi cela abouti à des processus de malinformation.
Les 4 idéaux sont :
1. Chercher la vérité grâce à un travail de vérification
2. Conserver son indépendance vis-à-vis des sources
3. Agir en conscience au sein de sa rédaction et sans pressions économiques
4. Développer une information compréhensive et proportionnée (le plus neutre possible)
1. Chercher la vérité grâce à un travail de vérification
Une bonne information est une bonne info recoupée : il faut plusieurs sources avant de
médiatiser un fait. La vérification passa aussi par la découverte de preuve visuelle (images),
sonores (témoignages), des traces, des débris, (cf. travail Robert FIske) etc. La vérité est
fondatrice du pacte de confiance.
1.1 Première limite à la réalisation de l’idéal : l’entonnoir de l’information.
Dans les pays occidentaux, l’information recoupée repose sur une infime minorité de
journalistes membres des agences de presse qui sont considérées comme absolument
dignes de confiance Dans l’entonnoir de l’information, presque tout repose sur le petit socle
des agences de presse (AFP). Passer par le journalisme de presse c’est considéré comme
un gage de sérieux. Il y a aucune critique supplémentaire sur les infos distribuées par les
agences (que 6% des journalistes français fond du journaliste d’agence, les seuls à faire un
vrai travail de recoupement permanent).
Ce qui pose problème c’est quand une agence ne respecte pas des principes de
recoupement clairs car tout l’édifice s’effondre. C’est le cas quand l’AFP a découvert, avec
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