
E.Thiry Pathologie des maladies virales
1.3. LA MALADIE VIRALE
La maladie n'est pas la suite inéluctable de l'infection virale. Les virus possèdent une
spécificité d'hôte : l'infection d'une espèce animale résistante, réfractaire à l'infection, sera un
cul de sac pour le virus. Aucune cellule de l'organisme ne sera apte à permettre la
multiplication du virus. L'adaptation du virus à une ou plusieurs espèces animales cibles peut
se traduire par une très faible virulence du virus. En effet, beaucoup d'infections virales sont
inapparentes, subcliniques.
La gravité des signes cliniques dépend aussi du degré de virulence de la souche virale
infectante. En effet, dans une même espèce virale, plusieurs souches virales qui diffèrent par
certaines propriétés peuvent être décrites. Par exemple, les souches vélogènes, mésogènes et
lentogènes du virus de la maladie de Newcastle varient selon leur virulence. Ce caractère est
génétiquement déterminé et dépend de la faculté qu'a la protéine de fusion du virus d'être
clivée en deux sous-unités. Chez des virus plus complexes, comme les Herpesviridae, plus de
dix gènes sont responsables de la virulence.
Le virus peut également s'adapter aux nouvelles conditions. Les virus à ARN présentent un
taux important de mutations qui sont un véritable gisement pour la sélection de virus mieux
adaptés. Les virus influenza, responsables des grippes, subissent la dérive antigénique. Une
accumulation de mutations ponctuelles dans le gène de l'hémagglutinine provoque des
variations de l'antigénicité de cette protéine. Les "nouveaux virions" circulent plus facilement
dans une population animale qui est immunisée envers le virus précédent. Les phénomènes de
recombinaison chez les virus à ADN et de réassortiment de gènes chez les virus à génome
segmenté sont aussi responsables de modifications génétiques du virus qui l'autorisent
éventuellement à s'adapter à un nouvel environnement.
L'histoire récente de la virologie vétérinaire abonde d’exemples d'émergence de souches
virales plus virulentes et de nouvelles maladies provoquées par de "nouveaux" virus :
le parvovirus canin en 1978 ;
la réapparition de la maladie de Newcastle, début des années 80 ;
le syndrome hémorragique du lapin, 1984 ;
l’encéphalopathie spongiforme bovine, 1986 ;
le syndrome dysgénésique et respiratoire chez le porc, 1987 aux USA, 1990 en Europe ;
le syndrome d’immunodéficience féline, 1987 ;
le morbillivirus des phoques, 1988 ;
le morbillivirus équin, 1994 ;
le circovirus du porc, 1997.