10www.ProfessionSante.ca19 janvier 2011
LES SOINS À LA CLIENTÈLE ÂGÉE NE
CONCERNENT PAS SEULEMENT CEUX DE
LONGUE DURÉE. EN EFFET, 88 % DES
AÎNÉS VIVENT À DOMICILE DE
FAÇON SOUVENT AUTONOME ET
CONSULTENT POUR DES SOINS DANS
TOUTES LES SPÉCIALITÉS. À L’HÔPITAL,
LES PATIENTS DE PLUS DE 75 ANS
CONTRIBUENT POUR PRÈS DE 40 % AUX
JOURNÉES D’HOSPITALISATION1. LE MI-
LIEU HOSPITALIER DOIT DONC S’ADAP-
TER AUX PARTICULARITÉS DE CETTE
CLIENTÈLE. LE CHUM S’Y EMPLOIE AVEC
L’APPROCHE OPTIMAH2, DÉPLOYÉE
DANS QUATRE UNITÉS DE SOINS, DONT
DEUX URGENCES. ON VISE À L’IMPLAN-
TER DANS LA MAJORITÉ DES UNITÉS.
Le séjour à l’hôpital, ou à l’urgen-
ce, constitue en soi un risque
pour la personne âgée si l’ap-
proche de soins n’est pas adap-
tée. Ainsi, 30 % des gens âgés se re-
trouvent avec un syndrome d’im-
mobilisation ou un délirium. Le
déconditionnement débute souvent
dès leur arrivée. « Or, il est possible
de prévenir en bonne partie ce syn-
drome dysfonctionnel, disent en
chœur la Dre Annik Dupras, géria-
tre, et Sylvie Lafrenière, infirmière
et conseillère en soins spécialisés
(clientèle des personnes âgées). On
reconnaît les particularités des en-
fants. De même, l’ensemble des pro-
fessionnels de la santé doit être sen-
sibilisé et formé aux particularités et
aux vulnérabilités liées au vieillisse-
ment, souvent accéléré en présence
de maladies chroniques. »
La prévention, ça marche, affirment
la Dre Dupras et Sylvie Lafrenière. Là
où l’on a procédé à des interventions
de soins adaptés, selon des études, on
observe une amélioration de l’état
fonctionnel au congé et du taux de
délirium d’au moins 30 %. On note
aussi une diminution de l’usage des
contentions physiques et chimiques,
et du taux d’hébergement.
Responsables du développement de
l’approche Optimah du CHUM,
Sylvie Lafrenière et la Dre Dupras
ont conçu, entre autres, un outil
baptisé « Les signes vitaux-
AÎNÉES » (SV-AÎNÉES). Il cible six
aspects de la santé reconnus, pour
lesquels une détérioration est indi-
cative ou prédictive de complica-
tions et de déclin fonctionnel chez
l’aîné. Six signes vitaux que l’équipe
médicale doit surveiller au quoti-
dien et intégrer dans sa routine de
soins auprès de chaque patient âgé :
Autonomie et mobilité
Intégrité de la peau
Nutrition et hydratation
Élimination
État cognitif et comportement
Sommeil
À l’équipe soignante de vérifier
d’abord l’état habituel et actuel de ces
six SV-AÎNÉES à l’arrivée à l’hôpital.
Dès l’admission, on met en place des
interventions préventives systémati-
ques, et des interventions de traite-
ment des problèmes cernés. Pour les
patients connus comme étant à haut
risque, ces interventions sont inten-
sifiées en collaboration avec l’équipe
interprofessionnelle et avec l’implica-
tion active du patient et de ses pro-
ches aidants. L’équipe s’assure enfin
de la continuité de cette vigilance
tout au long du parcours de soins.
On peut s’étonner que cela ne soit
pas déjà une réalité tant ces princi-
pes semblent évidents. Mais plus les
soins deviennent sophistiqués sur le
plan technique, plus on tend à
oublier la base. Et surtout, note la
Dre Dupras, chez certains méde-
cins, c’est tout un changement de
culture qui s’impose. « Parallèle-
ment au traitement de la maladie
aiguë, il faut prêter une attention
particulière à l’aspect cognitif et
fonctionnel de la santé, afin d’assu-
rer un réel succès de nos interven-
tions de pointe », ajoute-t-elle.
En effet, il ne s’agit pas simplement
de viser la survie de la personne
âgée, mais d’être attentif à sa qualité
de vie et de personnaliser ses objec-
tifs thérapeutiques en fonction de sa
vulnérabilité propre. En bref, d’insé-
rer les SV-AÎNÉES dans le plan de
suivi et de traitement individuel.
Une proportion significative de
médecins ne reconnaît pas les fac-
teurs de risque des complications
iatrogènes chez sa clientèle âgée3. Il
est donc essentiel de mettre à jour
les connaissances et de les intégrer
dans les soins quotidiens de l’en-
semble des soignants, incluant le
corps médical. Et ce, particulière-
ment en ce qui a trait au délirium, au
syndrome d’immobilisation et aux
particularités liées à la prescription
de médicaments pour cette clientè-
le. Ainsi, il sera possible, à travers
leurs interventions de soins, d’inté-
grer des mesures d’intervention pré-
ventives, de dépistage et de traite-
ment précoce de ces complications
fréquentes, afin d’éviter la spirale
malheureuse entraînant la perte
d’autonomie, autrement évitable.
Soigner une personne âgée peut
être complexe, car les symptômes
des maladies sont souvent atypi-
ques chez elle. « Ils peuvent se pré-
senter uniquement par un change-
ment des signes vitaux-AÎNÉES »,
note la Dre Dupras. De plus, les
SV-AÎNÉES permettent d’évaluer
le retentissement des problèmes de
santé dans une perspective globale
et fonctionnelle. « Cet outil peut
donc aussi être utile pour le suivi
des personnes âgées en première li-
gne, lors de l’examen périodique,
par exemple. »
Par ailleurs, les équipes de béné-
voles collaborent également en
effectuant des « visites de stimula-
tion cognitive et sensorielle » au
chevet des aînés plus vulnérables,
identifiés par l’équipe soignante.
« Optimah est une approche de
petits pas », résume Sylvie Lafre-
nière. Mais c’est aussi une priorité
au CHUM, la haute direction et
les autorités médicales, DSP en
tête, appuyant l’initiative. Une
trousse d’implantation aidera à
soutenir, étape par étape, l’implan-
tation de l’approche Optimah. Elle
sera disponible sous peu aux éta-
blissements intéressés.
Pour en savoir plus
sur les SV-AÎNÉES
et l’approche Optimah :
Approche adaptée à la personne âgée
en milieu hospitalier
1. Info Med-Echo, bulletin no10, mai 2008.
2. Acronyme pour « Approche interdisciplinaire
d’optimisation des soins aux personnes âgées
à l’hôpital ».
3. Fernandez, Arch Int Med 2008; 168 (4): 390-
6.
par
P
14,3 %
double
7500 $
3 %
PAR AILLEURS
quart
60 %
3 jours de récupération
3 semaines de récupération
1 % à 3 %
1. Étude canadienne sur les événements indésirables (2004).
2. Forum Gestion des soins de santé. Adverse events in older patients admitted to acute
care, 2009. CHUM.
3. Sager, 1998, Clin Ger Med 14(4) 669-79.
4. JAGS 2004 52(8) 1263-70.
PROCESSUS DE SOINS FAVORISANT
LE DÉCLIN FONCTIONNEL
Prévalence plus importante de maladies chroniques;
Trouble de la mobilité et atteinte cognitive et fonctionnelle de base
fréquents;
Comorbidités et symptômes communs;
Présentation atypique de maladies fréquentes;
Polypharmacie fréquente.