curriculum Forum Med Suisse 2008;8(11):204–209 208
cliniques de phase III, qui examinent notamment
un avantage éventuel par rapport au régime thé-
rapeutique basé sur un inhibiteur de la calcineu-
rine dans la greffe de reins marginaux.
Les anticorps monoclonaux dans le traitement
des rejets
L’anticorps monoclonal murin OKT3 (muronomab)
a été le premier anticorps monoclonal à trouver
une application dans la médecine des transplan-
tations. Il est très efficace dans le traitement pri-
maire de la réaction cellulaire du rejet aigu après
greffe de rein et dans le traitement d’induction
lors de greffe rénale, de greffe du foie et de trans-
plantation cardiaque, mais il a aussi de nombreux
effets indésirables graves, tels que le «systemic
inflammatory response syndrome» (SIRS), les
infections par des germes opportunistes et le dé-
veloppement de tumeurs malignes (surtout des
lymphomes post-transplantation). C’est la raison
pour laquelle l’OKT3 n’est plus du tout utilisé
aujourd’hui dans le traitement d’induction. Les
anticorps anti-récepteur de l’interleukine-2 sont
en effet très efficaces et présentent des taux d’ef-
fets indésirables nettement plus faibles. L’OKT3
est actuellement encore utilisé principalement
dans le traitement des rejets sévères résistant
aux corticostéroïdes, lorsque l’ATG a également
échoué, ou en cas de contre-indication pour d’au-
tres raisons (par ex. allergie). Concernant l’effica-
cité du traitement en cas de rejet de la greffe rénale
résistant à la corticothérapie, l’OKT3 et l’ATG se
valent plus ou moins. L’OKT3 peut également être
utilisé dans la même indication, que ce soit après
transplantation cardiaque, pulmonaire ou hépa-
tique.
Après sa première description par P. Halloran, le
rejet humoral associé à certains anticorps HLA,
en plus du rejet cellulaire, est devenu un sujet d’in-
térêt primordial en immunologie de la transplan-
tation durant ces quinze dernières années. De
nouvelles méthodes diagnostiques de cette entité
ont de plus été développées: mise en évidence des
dépôts de C4d dans le matériel de biopsie par im-
munofluorescence et immunohistochimie; nou-
velles techniques très sensibles pour la recherche
d’anticorps spécifiques du donneur (FACS cross-
match et technologie Luminex). La classification
de Banff du rejet aigu des greffons rénaux a été
adaptée en conséquence. Les anticorps sont pro-
duits par des plasmocytes qui constituent la der-
nière étape de la cascade du développement des
lymphocytes B. Avec l’anticorps monoclonal ritu-
ximab,qui reconnaît le CD20, on dispose actuelle-
ment d’une alternative pour la déplétion des cel-
lules B – analogue au OKT3 du côté des cellules
T. Le CD20 est exprimé à la surface des cellules B
dans la plupart de leurs stades de développement,
sauf à leurs stades tout àfait initiaux et à l’ex-
ception des plasmocytes. Le rituximab a d’abord
été admis en pratique clinique dans le traitement
des lymphomes à cellules B. Sa première utilisa-
résultats, l’alemtuzumab a été par la suite égale-
ment utilisé dans les greffes de poumon et du foie.
Dans la greffe de poumon, on a pu démontrer la
supériorité de l’alemtuzumab versus ATG en com-
binaison avec une immunosuppression standard
(taux de rejet inférieur et meilleure survie du gref-
fon). Dans deux grandes études sur la greffe du
foie, on a trouvé un taux de rejet plus bas lorsque
l’alemtuzumab, combiné à une immunosuppres-
sion réduite constituée de tacrolimus et d’une cor-
ticothérapie, était comparé à une immunosup-
pression standard, mais cela uniquement dans
les cas HCV négatifs. Malgré ces bons résultats,
de nombreux centres hésitent encore à appliquer
systématiquement l’alemtuzumab par crainte
d’infections graves suite à la déplétion de longue
durée des cellules T. Un travail paru récemment,
consacré à l’analyse systématique des infections
chez plus de 500 patients sous alemtuzumab, n’a
cependant pas confirmé le bien-fondé de ces
craintes. En Suisse, l’alemtuzumab est, pour l’ins-
tant, admis dans le traitement des lymphomes
mais pas dans le traitement d’induction lors de
transplantations.
Les anticorps monoclonaux dans le traitement
d’entretien
L’utilisation des anticorps monoclonaux dans le
traitement immunosuppresseur d’entretien est
difficile, car ils doivent être administrés par des
perfusions intraveineuses régulières. Une subs-
tance a cependant été testée dans cette indication
dans le cadre d’essais cliniques de phase III lors
de greffe rénale. Il s’agit du belatacept, qui n’est
pas un anticorps monoclonal dans le sens clas-
sique du terme, mais une protéine de fusion com-
prenant une variante mutante de la molécule de
costimulation CTLA4 et un fragment Fc d’IgG1
humaine, appelé CTLA4-Ig. Lié au CD80/CD86,
le belatacept est capable de bloquer le signal 2
d’activation des cellules T émis par les cellules pré-
sentatrices d’antigène (fig. 1). R. Schwartz a mon-
tré en 1990 que le blocage de la costimulation des
cellules T entraîne une inhibition antigénique spé-
cifique des cellules T, autrement dit une anergie.
Après plus de quinze ans de recherches chez les
rongeurs et les primates, le belatacept est le pre-
mier agent bloquant classique de costimulation
utilisé avec succès dans la pratique clinique de la
transplantation. Une étude de phase II portant
sur la greffe rénale a comparé le belatacept en
combinaison avec le mycophénolate et les corti-
costéroïdes au traitement standard cyclosporine,
mycophénolate plus corticostéroïdes. Il n’y avait
aucune différence entre les deux groupes en ter-
mes de survie des patients et/ou des greffons, ni
d’incidence des rejets aigus. En revanche, la fonc-
tion rénale était meilleure à un an, et l’importance
de la néphropathie chronique de l’allogreffe, prou-
vée par biopsie, était significativement moindre
dans le groupe belatacept [9]. Cette molécule pro-
metteuse est actuellement testée dans des essais
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