UNIVERSITE KASDI MERBAH - OUARGLA FACULTE DES SCIENCES DE LA NATURE ET DE LA VIE DEPARTEMENT DES SCIENCES BIOLOGIQUES Projet de Fin d’Etudes En vue de l’obtention du diplôme de Licence Domaine : Sciences de la nature et de la vie Filière : Biologie Spécialité : Microbiologie fondamentale et appliquée Thème SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE SUR L’ANTIBIRESISTANCE CHEZ LES ENTEROBACTERIES. Présenté par: DAGHOR Hadjira SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE SUR Encadreur : SOUID Wafa Année universitaire : 2013/2014 Dédicace Je dédie ce mémoire: À ma chère mère Ma douce et tendre mère. Quoique je fasse, je ne pourrais te rendre ce que tu as fait pour moi. Si je suis arrivée là, c’est bien grâce à toi. Que dieu te donne longue vie et te protège pour moi. À mon cher père Ton soutien, tes encouragements m’ont suivi et m’ont permis d’atteindre le bout du chemin. Sois fier de moi aujourd’hui et vois à travers ce travail mon amour sincère et ma gratitude profonde. À Mon frère et mes sœurs, Que ce travail les rend fière de leur petite sœur. À mes neveux et nièces Que Dieu fasse que vous suiviez mes traces et que vous fassiez plus que moi. Que Dieu tout puissant vous donne longue vie, beaucoup de santé et vous préserve du mal. Je vous aime. À toute ma famille. À tous mes camarades de promotion, surtout Roumaissa, Mouna. À tout qui aime Hadjira Je les remercie de m’avoir accompagnée tout au long de mon parcours. Remerciement Je tien à remercie en premier lieu mon bon Dieu le tout puissant qui me donner la santé, le courage et la patience de faire ce travail Je remercie profondément Mes parents, pour leurs sacrifices, leurs soutiens et leur patience Mes plus vifs remerciements vont à demoiselle SOUID Wafa, maitre assistante classe B à l’université Kasdi Merbah de Ouargla, de m’avoir accepté d’encadrer, de me guider et diriger ce thème avec une grande sagesse et dévouement. Mes remerciements s’adressent également à Monsieu BENSASSI Bacharra Messaoud maitre assistant classe B, pour avoir accepté en toute modestie d’examiner ce travail. Mes plus Vifs remerciements à toutes les personnes qui de prêt ou de loin m’ont aidé à mener à bien ce travail, et que je ne peux citer individuellement. Liste des abréviations ADN: Acide Désoxyribonucléique AFSSAPS : Agence Française de Sécurité Sanitaire et Produit de Santé APHA: American Public Health Association ARN: Acide Ribonucléique C1G: Céphalosporine de première génération C2G: Céphalosporine de deuxième génération C3G: Céphalosporine de troisième génération Carb: Carbapénème CMB : Concentration Minimale Bactéricide CMI : Concentration Minimale Inhibitrice DHFR : Dihydrofolate Réductase EAggEC: Entéroaggréatifs E. coli EHEC : Entérohémorragiques E. coli EIEC : Entéroinvasives E. coli EMB: Eosine Methylene-Blue gélose EPEC : Entéropathogène E. coli ETEC : Entérotoxiconogène E. coli LPS : Lipopolysaccharides MLST : Multi Locus Sequence Typing OMS: Organisation Mondiale de la Santé ONPG: Ortho-Nitrophényl -β-D - galactopyranoside PDA: Potato Déxtrose Agar PLP : Protéine Liant au Pénicilline rpo B : Gène qui code pour une sous unité d’ARN plymérase SIDA : Syndroe d’Immuno Déficience Acquise VP: Réaction de Voges-Proskauer VRBGL : Violet Red Bile Glucose Lactose Agar VT : Véro-Toxine Liste des tableaux N° Titre Page 01 Classification des Entérobactéries courantes et rares 3 02 Caractères d'identification des genres le plus fréquemment rencontrés 5 03 Antibiotiques bactéricides et les antibiotiques bactériostatiques 10 04 Principaux antibiotiques et leur classification 13 Comportement des Entérobactéries à certains antibiotiques de la famille 05 β-lactamines 23 Liste des figures N° 01 Titre Aspect des cultures des différentes espèces d’Entérobactéries sur gélose spéciale Page 4 Penicillium chrysogenum au centre de la boîte produit une zone 02 d’inhibition sur les bactéries jaunes qui l’entourent. À droite les 9 sporanges du champignon 03 Méthode de dilution en milieu liquide 11 04 Méthode par diffusion Mesure d’un diamètre d’inhibition en mm 11 05 Mode d’action des antibiotiques 15 06 Rôle des antibiotiques sur l’émergence et la sélection de la résistance 17 07 Transmission de gènes de résistance par conjugaison, transformation et transduction 21 08 Mécanismes de résistance des β-lactamines 24 09 Modification des PLP 25 10 Excrétion d’antibiotique par l’efflux actifs 26 11 Mécanismes de résistance aux quinolones chez les Entérobactéries 27 Table des matières Titre Page Liste des abréviations Liste des tableaux Liste des figures Introduction…………………………………………………………………………. 01 Chapitre I : Entérobactéries 1.1. Définition……………………………………………………………………… 1.2. Taxonomie……………………………………………………………………. 1.2.1. Historique………………………………………………………………. 1.2.2. Habitat…………………………………………………………………... 1.2.3. Classification…………………………………………………………… 1.3. Caractères bactériologiques des Entérobactéries……………………………… 1.3.2. Caractères morphologiques…………………………………………….. 1.3.2. Caractères culturaux……………………………………………………. 1.3.3. Caractères biochimiques………………………………………………... 1.4. Isolement des Entérobactéries…………………………………………………. 1.4.1. Milieux d’enrichissements sélectifs liquides…………………………… 1.4.2. Milieux d’isolements sélectifs…………………………………………. 1.5. Pathogénicité des Entérobactéries chez l’homme……………………………... 1.5.1. Pathogénicité d’Escherichia coli……………………………………………. 1.5.2. Pathogénicité de Salmonelle …………………………………………… 1.5.3. Pathogénicité de Shigella ……………………………………………… 02 02 02 02 02 04 04 04 05 06 06 06 06 07 08 08 Chapitre II : Antibiotiques 2.1. Définition des antibiotiques…………………………………………………… 2.2. Histoire des antibiotiques……………………………………………………… 2.3. Types d’antibiotiques…………………………………………………………. 2.4. Classification des antibiotiques……………………………………………….. 2.5. Mécanismes d’action…………………………………………………………... 2.6. Spectre d’activité des antibiotiques……………………………………………. 09 09 10 12 12 15 Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries 3.1. Définition de l’antibiorésistance………………………………………………. 3.2. Origine de phénomène de l’antibiorésistance…………………………………. 3.3. Evolution de l’antibiorésistance………………………………………………. 3.3.1. Sélection de la résistance………………………………………..………. 3.3.2. Diffusion de la résistance……………………………………..…………. 16 16 16 17 18 3.4. Types de résistance…………………………………………………………….. 3.4.1. Résistance naturelle…………………………….……………………….. 3.4.2. Résistance acquise…………………………………….………………… 3.5. Déterminisme génétique de l’antibiorésistance………………………………... 3.5.1. Déterminisme chromosomique…………………………………………. 3.5.2. Déterminisme extra-chromosomique…………………………………… 3.6. Déterminisme génétique de l’antibiorésistance chez les Entérobactéries…....... 3.6.1. Déterminisme chromosomique…………………………………………. 3.6.2. Déterminisme extra-chromosomique…………………………………… 3.7. Mécanismes biochimiques de l’antibiorésistance……………………………… 3.7.1. Inactivation de l’antibiotique…………………………………………… 3.7.2. Modification de la cible………………………………………………… 3.7.3. Diminution de la perméabilité………………………………………….. 3.7.4. Excrétion de l’antibiotique par un mécanisme d’efflux………………… 3.8. Mécanismes biochimiques de l’antibiorésistance chez les Entérobactéries…… 3.8.1. Inactivation de l’antibiotique…………………………………………… 3.8.2. Modification de la cible………………………………………………… 3.8.3. Diminution de la perméabilité………………………………………….. 3.8.4. Excrétion de l’antibiotique par un mécanisme d’efflux………………… 3.9. Prévention et surveillance……………………………………………………… Conclusion………………………………………………………………………….. Références bibliographiques Glossaire 19 19 19 19 20 21 22 22 23 24 24 25 25 25 26 26 27 27 28 28 30 Introduction Introduction Les antibiotiques ont été la révolution du vingtième siècle pour le traitement des maladies infectieuses bactériennes. Ils sont indispensables et personne ne songerait à discuter leurs indications pour le traitement des infections. Mais il est clair que leur facilité d’utilisation, l’habitude de traiter des maladies supposées infectieuses a conduit à la généralisation de l’usage des antibiotiques dans des circonstances cliniques qui ne se justifient pas. Les effets indésirables sont nombreux, immédiats, individuels, secondaires et collectifs, (SEKHRI-ARAFA, 2011). Le phénomène de résistance aux antibiotiques n’est pas du tout récent, il existait bien avant la découverte des antibiotiques par l’Homme. L’évolution des bactéries vers la résistance est inévitable car elle représente un cas particulier de l’évolution générale des bactéries. Certaines espèces bactériennes ont développé cette « résistance naturelle » dans leur propre milieu il y a de cela des millions d’années, soit parce qu’elles étaient elles-mêmes productrices de molécules antibiotiques et devaient donc les tolérer, soit pour contrer l’effet d’antibiotiques produits par d’autres organismes présents dans leur entourage. La résistance aux antibiotiques est donc une conséquence de la compétition entre les micro-organismes pour occuper une même niche écologique. Toujours est-il que l’Homme n’a que récemment commencé à diriger et accélérer cette résistance de façon importante, par une utilisation parfois inadéquate et abusive d’antibiotiques en santé humaine. La résistance peut être dramatiquement augmentée par la présence de faibles concentrations d’antibiotiques dans l’environnement des bactéries (COURVALIN, 2012 ; GATEAU, 2012). Les Entérobactéries sont des bacilles à Gram négatif qui constituent une part importante des bactéries isolées lors du diagnostic bactériologique des infections humaines. Leur abondance dans l’intestin, leur mobilité, leur rapidité de multiplication, leur fréquente résistance aux antibiotiques et leur pouvoir d’adaptation expliquent la variété des espèces et les multiples circonstances dans lesquelles elles sont isolées. L'importance médicale des Entérobactéries, et leur grand intérêt comme matériel de recherche, font de ce groupe bactérien l'un des mieux connus et des plus étudiés (MEZIANI, 2012). Dans ce travail, on essaye de réaliser une étude bibliographique sur l’antibiorésistance chez les Entérobactéries. Le travail est réparti en trois chapitres : Chapitre I concerne les Entérobactéries leur taxonomie, leurs caractères bactériologiques, leur pathogénicité…etc. Chapitre II est réservé aux antibiotiques leur classification, leur mécanismes d’action, leur spectre d’activité…etc. Chapitre III est consacré à étudier le phénomène d’antibiorésistance chez les Entérobactéries leur origine, leur évolution, leur mécanismes…etc. Finalement une conclusion qui englobe et résume notre étude bibliographique avec quelques prescriptions recommandés. 1 Chapitre I Entérobactéries 1 Chapitre I : Entérobactéries Chapitre I : Entérobactéries 1.1. Définition Les Entérobactéries correspondent à un groupe relativement homogène au niveau phylogénétique parmi les Gamma-protéobactéries (MADIGAN et MARTINKO, 2007). Les membres de cette famille, souvent appelés Entérobactéries ou bactéries entériques (du grec enterikos, appartenant à l’intestin) (PRESCOTT et al, 2003). La famille des Enterobacteriaceae est constituée de genres bactériens qui sont rassemblés en raison de leurs caractères bactériologiques communs (AVRIL et al, 1992). 1.2. Taxonomie 1.2.1. Historique La naissance de la famille des Enterobacteriaceae se situe entre 1937 lorsque Otto RAHN proposa le genre Enterobacter pour regrouper les micro-organismes présentant des propriétés biochimiques et morphologiques communes et parmi les quels on trouvait déjà des noms tels que Escherichia, Salmonella, Klebsiella, Proteus, Serratia ou Shigella. Les travaux des équipes de Don BRENNER et de Patrick A.D. GRIMONT ont permis une véritable explosion de cette famille avec un très grand nombre de nouveaux genres et espèces décrits depuis une vingtaine d’années (BAKHOUM, 2004). En 1972, Edwards et Ewing rapportaient 11 genres et 26 espèces dans la famille des Enterobacteriaceae. En 1985, FARMER et COLL décrivaient 22 genres comprenant 69 espèces et 29 groupes entériques. En 1997, 31 genres et 139 espèces étaient caractérisés. A la date du 20 février 2006, 46 genres ont été validement publiés au sein de la famille des Enterobacteriaceae (MEZIANI, 2012). 1.2.2. Habitat Le nom d’Entérobactéries a été donné parce que ces bactéries sont en général des hôtes normaux ou pathologiques, suivant les espèces microbiennes, du tube digestif de l’homme et des animaux. Mais ce caractère écologique n’est pas exclusif des Entérobactéries pouvant proliférer en abondance dans l’environnement (sols et eaux) et participer aux grands cycles de dégradation des matières organiques (BAKHOUM, 2004). 1.2.3. Classification L’ère de la génomique (hybridations ADN-ADN, gènes des ARN ribosomaux, rpo B, MLST, séquençage complet) a bouleversé la taxonomie des Entérobactéries. De nouveaux genres tels Hafnia et Pantoeas sont apparus (issues du genre Enterobacter). A l’opposé, des genres et des espèces ont été réduits à l’état de sous-espèces ou de sérovars (DENIS et al, 2007). Domaine : Eubacteria. Phylum XII : Proteobacteria. Classe : Gammaproteobacteria. Ordre des Enterobactériales. Famille des Enterobacteriaceae. 44 genre (Bergey’s Manual, 2004) dont les genres récent Alterococcus, Arsenophorus, Brenneria, Pectobacterium, Raoultella, Samsonia, Sodalis. 2 Chapitre I : Entérobactéries Les genres de cette famille sont regroupés en cinq tribus, d’après leurs propriétés fermentatives : Escherichiae, Klebsielleae, Proteae, Yersiniae, Erwiniae (DELARRAS, 2010). Tableau 01 : classification d’Entérobactéries courantes et rares (DELLARRAS, 2010). Genres Escherichia Salmonella Shigella Citrobacter Klebsiella Enterobacter Entérobactéries courantes Hafnia Serratia Proteus Morganella Providencia Yersinia Entérobactéries rare ou récemment décrites Erwinia Cedecea Ewingella Pantoea Rahnella Budvicia Buttiauxella Kluyvera Leclercia Moellerella Trabulsiella Yokenella Edwardsiella Leminorella Obesumbacterium Pragia Photorhabdus Tatumella Xenorhabdus Espèce Six espèces : Escherichia coli… Salmonella bongori, S.enterica, S. subterranean… Quatre espèces : Shigella dysenteriae, S.flexnero, S.sonnei, S.boydii. Douze espèces : Citrobacter freundii, C. youngae, C.braakii, C. koseri… Quatre espèces : Klebsiella pneumoniae, K. pneumoniae subsp. ozaenae … Quatorze espèces : Enterobacter aerogenes, E. cloacae, E.sakazakii... Espèce unique : Hafnia alvei Onze espèces : Serratia marcescens subsp. marcescens,S. odorifera, S. rubidaea… Six espèces : Proteus vulgaris, P.mirabilis, P. penneri… Une espèce : Morganella morganii subsp. morganii Cinq espèces : Providencia alcalifaciens, P.stuartii, P. rettgeri... Onze espèces : Yersinia pestis, Y.enterocolitica subsp. enterocolitic, Y. pseudotuberculosis… Onze espèces 3 Chapitre I : Entérobactéries 1.3. Caractères bactériologiques d’Entérobactéries 1.3.1. Caractères morphologiques Toutes les Entérobactéries ont une morphologie habituellement typique, sous forme de bacilles à Gram négatif de 2 à 3μm de long sur 0,6μm de large, généralement polymorphes. Certaines espèces sont mobiles grâce à une ciliature péritriche, par contre les autres sont immobiles (Klebsiella, Shigella, Yersinia pestis). Dont le genre de Klebsiella est caractérisé par La présence d’une capsule visible au microscope. La plupart des espèces pathogènes chez l’homme possèdent des pili (fimbriae) qui constituent des facteurs d’adhésion (MEZIANI, 2012). 1.3.2. Caractères culturaux L’ensemble de ces bactéries poussent habituellement très aisément sur milieux ordinaires. La température optimale de croissance est généralement de 35 à 37 °C à l’exception des Yersinia (30 à 37°C), des Pantoea et des Erwinia (27 à 30°C) certaines ne poussant pas à 37°C. Elles sont toutes aéro-anaérobie facultatives encore que certaines Erwinia puissent donner une culture plus lente en anaérobiose (DENIS et al, 2007). Enterobacteriaceae se développent bien dans un bouillon ou sur une gélose ordinaire incubés 18 heures à 37°C. Les formes S (smooth) sont l'aspect habituel au sortir de l'organisme. Les colonies sont lisses, bombées, brillantes et humides, elles ont 2 à 4 mm de diamètre. Le bouillon est trouble de façon homogène. Les formes R (rough) s'observent surtout avec des souches ayant subi plusieurs repiquages. Les colonies sont rugueuses, sèches, à contours irréguliers et de teinte mate. En bouillon, les formes R donnent un aspect grumeleux. Les colonies muqueuses sont habituelles avec les Klebsiella. Leur diamètre peut dépasser 10 mm ; elles ont une tendance à la confluence. On peut les rencontrer aussi avec d'autres espèces, notamment Salmonella paratyphi B. Les colonies naines s'observent avec des souches déficientes dans certaines de leurs chaînes métaboliques. Elles ne sont pas exceptionnelles chez les Escherichia coli isolés d'infections urinaires (AVRIL et al, 1992). Figure 01: Aspect des cultures des différentes espèces d’Entérobactéries sur gélose spéciale (DENIS et al, 2007). 4 Chapitre I : Entérobactéries 1.3.3. Caractères biochimiques C’est dans le domaine des Enterobacteriaceae que l’évolution technologique a été la plus importante en bactériologie médicale. L’ère des galeries d’identification en tubes est quasi révolue en pratique quotidienne pour faire place à celle des systèmes prêts à l’emploi (DENIS et al, 2007). Les propriétés qui définissent la famille doivent être mises en évidence pour affirmer que la souche est une Entérobactérie. Les caractères d’identification sont essentiellement « biochimique » et utilisent des tests qui étudient le métabolisme protéique (présence d’uréase, production d’indole, dégradation du tryptophane ou la fermentation des sucres (glucose, lactose, saccharose etc..), la capacité d’utiliser le citrate, la présence d’enzymes (décarboxylases, désaminases), la production d’hydrogène sulfuré ou la formation de gaz (DOCOSTER, 2008). Escherichia Citrobacter Enterobacter Klebsiella Serratia Salmonella Shigella Proteus Providencia Yersinia Tableau 2 : Les caractères d'identification des genres le plus fréquemment rencontrés (DECOSTER, 2008). + + + + - - - - - - + + + + + - +/- - - + Indole + VP (Acétoïne) Citrate + Mobilité + + Urée PDA H2S +/* à 20°C seulement - +/- - - +/- +/- + +/- + + + - - - - +* + + - + + - + + - +/+ + - +/+ + + +/- + + + - +* + - Lactose ONPG 1.3.4. Caractères antigéniques Antigènes O : antigène de paroi constitués de lipopolysaccharides (LPS) thermostables, perdu chez les souches R (colonies rugueuses) qui deviennent autoagglutinables en eau distillé (DENIS et al ,2007) ; Antigènes H : antigène flagellaire (bactéries mobiles) constitués de flagelline thermolabiles (DENIS et al ,2007). Les réactions d'agglutination où ils interviennent se produisent rapidement, sont constituées d'agglutinats floconneux, facilement dissociables par agitation (AVRIL et al, 1992) ; Antigènes K : antigène capsulaire (Klebsiella et certaines souches d’E. coli, Shigella, Citrobacter et Salmonella « antigène Vi ») constitués de couches externes de 5 Chapitre I : Entérobactéries polysaccharides qui peuvent masquer l’antigène O. Une ébullition de 2 heures permet de démasquer l’antigène O chez ces souches (DENIS et al ,2007) ; Antigène Kunin : ou Enterobacteriaceae common antigen (ECA) constitué d’un glycophospholipides spécifique des Entérobactéries ; Antigène d’adhésines : (pili, fimbriae) (DENIS et al ,2007). 1.4. Isolement des Entérobactéries La recherche des Entérobactéries comporte un enrichissement en bouillon Mossel après dilution de l’échantillon lactosé, suivi d’un isolement sélectif (DELARRAS, 2010). 1.4.1. Milieux d’enrichissements sélectifs liquides Bouillon lactosé : est utilisé comme diluant des produits pharmaceutiques non stériles pour la recherche des Entérobactéries et autres bactéries Gram -. La présence de l’hydrolysat et du lactose (disaccharide) favorisent la revivification des Entérobactéries et autres germes Gram - dans ce bouillon (DELARRAS, 2010). Bouillon Mossel : est utilisé pour l’enrichissement des Entérobactéries Gram-, recherchées dans des produits pharmaceutiques non stériles. La bile et le vert brillant inhibent les bactéries autres que les Entérobactéries et autres germes Gram - alors que l’hydrolysat et le glucose facilitent leur développement (DELARRAS, 2010). 1.4.2. Milieux d’isolements sélectifs Gélose Drigalski : est un milieu d’isolement sélectif et de différentiations destinées à la recherche des Entérobactéries et autres bactéries Gram-, à partir des prélèvements cliniques. Le lactose peut être fermenté ou non par les Entérobactéries(DELARRAS, 2010). Gélose Mac Conkey (avec cristal violet) : est un milieu d’isolement sélectif et de différentiation destiné à la recherche des Entérobactéries, à partir de prélèvement d’origine diverses. L’indicateur de pH est le rouge neutre, rose à rouge en milieu acide et incolore en milieu basique. Dans ce cas, le milieu de culture et les colonies ont la couleur beige d’une gélose nutritive (DELARRAS, 2010). Gélose EMB (avec lactose et saccharose) : est un milieu d’isolement sélectif et de différentiation destiné à la recherche des Entérobactéries en bactériologie médicale. Le bleu de méthylène sert d’indicateur d’oxydo-réduction. L’utilisation du lactose et/ou du saccharose par des Entérobactéries libère des acides et s’exprime en présence des deux colorants par des colonies de couleur violette (DELARRAS, 2010). Gélose EMB (avec lactose) : conçue par Levine (1918, 1921) pour isoler Escherichia coli et Enterobacter et pour identifier candida albicans. Ce milieu ne contient qu’un seul sucre, le lactose (DELARRAS, 2010). Gélose VRBGL : son mode d’action presque comme gélose Mac Conkey (DELARRAS, 2010). 1.5. Pathogénicité des Entérobactéries chez l’homme Parmi les Entérobactéries, beaucoup d’espèces sont pathogènes pour les humains, les animaux ou les plantes ; d’autres ont une importance industrielle. La plus connue de toutes les espèces bactériennes est assurément Escherichia coli (MADIGAN et MARTINKO, 2007). 6 Chapitre I : Entérobactéries Les Entérobactéries constituent une très vaste famille qui représente près des trois quarts des isolements d’un laboratoire de bactériologie médicale. Les Entérobactéries sont responsables de deux grands types de manifestation pathologiques : pathologie spécifique telle la typhoïde avec Salmonelle typhi ou d’une pathologie opportuniste notamment dans le cadre d’infection nosocomiales (DENIS et al, 2007). 1.5.1. Pathogénicité d’Escherichia coli 1.5.1.1. Infections extra-intestinales : E. coli est responsable d’infections diverses. Infections urinaires : la majorité des infections urinaires est due à E. coli. De plus, certaines souches d’E. coli sont dotées à leur surface de structures, les adhésines, qui leur permettent d’adhérer spécifiquement aux épithéliums de l’appareil urinaire. Infections abdominales : ce sont des cholécystites, péritonites ou salpingites. Infections méningées : les méningites néonatales sont souvent graves (80% des souches possèdent l’antigène capsulaire K1). Les bactériémies consécutives à une infection localisée peuvent évoluer vers un choc septique gravissime dû à l’action du LPS ou endotoxine (FAUCHERE et JAVRIL, 2002). 1.5.1.2. Infections intestinales L'existence de diarrhées à E. coli est connue depuis 1940. Ces diarrhées sont dues à des souches de sérotypes particuliers qui provoquent soit des cas sporadiques, soit des petites épidémies. Les différents syndromes cliniques sont dus à des E. coli différents dont nous préciserons plus loin le support de la virulence (AVRIL et al, 1992). A/- E. coli Entéropathogènes (EPEC) Elles étaient responsables, de diarrhées infantiles graves ou toxicoses survenant par épidémies dans des crèches ou des maternités. Ces souches sont plus rarement rencontrées aujourd'hui (AVRIL et al, 1992). Les EPEC colonisent la muqueuse intestinale et adhèrent très fortement aux entérocytes. Ils produisent des lésions d’attachement et d’effacements caractérisés par la destruction localisée des microvillosités de la bordure en brosse et induisent des altérations du cytosquelette des cellules épithéliales (FAUCHERE et JAVRIL, 2002). B/- E. coli Entérotoxinogènes (ETEC) Elles sont responsables de diarrhées très liquides survenant dans les pays en développement. Ces diarrhées s'observent principalement chez les voyageurs. Elles sont souvent épidémiques chez les enfants de ces pays (AVRIL et al, 1992). ETEC peuvent produire deux entérotoxines LT et ST. L’entérotoxine thermolabile (LT) est, du point de vue immunologique, apparentée à la toxine cholérique. L’entérotoxine thermostable (ST), de plus faible poids moléculaire, n’est pas antigénique. Ils permettent à la bactérie d’adhérer à la muqueuse de la partie haute de l’intestin grêle, sans être éliminée par les mouvements péristaltiques et là, de produire l’entérotoxine (FAUCHERE et JAVRIL, 2002). C/- E. coli Entéro-invasives (EIEC) Elles sont isolées de syndromes dysentériques tant chez l'adulte que chez l'enfant. La présence de leucocytes dans les selles est le témoignage du processus invasif (AVRIL et al, 1992). Les EIEC ne produisent pas d’entérotoxines, mais pénètrent dans les cellules de l’épithélium intestinal (FAUCHERE et JAVRIL, 2002). 7 Chapitre I : Entérobactéries D/- E. coli Entéro-hémorragiques (EHEC) Ces souches ont été décrites en Amérique du Nord où elles ont été responsables d'épidémies de diarrhée aqueuse puis hémorragique. Ces souches sont aussi responsables du syndrome hémolytique-urémique (AVRIL et al, 1992). Le pouvoir pathogène d’EHEC est dû à la production de grandes quantités de vérotoxines VT1 et/ou VT2 ou toxines « shigella-like ». Passant dans la circulation, ces toxines provoquent une thrombose de la microcirculation intestinale et rénale (FAUCHERE et AVRIL, 2002). E/- E. coli Entéro-aggrégatif (EAggEC) Ces souches sont responsables de diarrhées persistantes (> 14 jours) chez des enfants dans les pays sous-développés. Elles adhèrent aux cellules en formant des agrégats, d’où leur nom. Cette adhésion est à l’origine de nécroses du pôle apical des villosités avec œdème et hémorragies dans la sous-muqueuse. Ces souches produisent une entérotoxine thermostable et une hémolysine thermolabile (FAUCHERE et AVRIL, 2002). 1.5.2. Pathogénicité de Salmonelle : Ce sont d’abord les fièvres typhoïdes et paratyphoïdes dues aux S. typhi, S. paratyphi A, B, ou C. Elles sont caractérisées par une bactériémie avec fièvre, tuphos et des signes digestifs chez le nouveau-né ou le jeune enfant, d'autres sérotypes donnant des épidémies, comme S. Panama ou S. Wien, peuvent être responsables de formes septicémiques qui mettent en jeu le pronostic vital (FAUCHERE et AVRIL, 2002). Les toxi-infections alimentaires à Salmonella se manifestent par des diarrhées, des vomissements et de la fièvre. Les premiers signes surviennent 8 à 10 heures après l'ingestion de l'aliment contaminé. L'évolution de ces gastro-entérites est en règle générale spontanément favorable en deux ou trois jours. Certains sujets guéris restent porteurs sains et éliminent des Salmonella dans les selles. La grande fréquence des entérites dues à des Salmonella au cours du S.I.D.A. est à souligner. Elles sont plus rares : cholécystistes, méningites, ostéomyélites, spondylodiscites, glomérulonéphrite, atteinte pulmonaires. Ces formes surviennent plus volontiers chez des malades immunodéprimés. Les déficits enzymatiques des globules rouges et la drépanocytose sont des circonstances favorisantes (FAUCHERE et AVRIL, 2002). 1.5.3. Pathogénicité de Shigella Le bacille de Shiga (S. dysenteriae sérotype 1) est l’agent des grandes épidémies historiques de dysenterie bacillaire. Le syndrome dysentérique est accompagné d’un syndrome infectieux sévère et de troubles neuropsychiques. Les autres sérotypes provoquent des colites infectieuses chez l’adulte et des gastroentérites chez l’enfant. Les Shigella provoquent des ulcérations de la muqueuse intestinale et une réaction inflammatoire. En conséquence, les selles sont sanglantes avec des leucocytes, des glaires et des fausses membranes. Douleurs abdominales, épreintes et ténesme caractérisent le syndrome dysentérique. Les localisations extra-digestives sont peu fréquentes. Les moins rares sont les infections urinaires. On observe parfois des formes bactériémiques, des arthrites, des méningites (FAUCHERE et AVRIL, 2002). 8 Chapitre II Antibiotiques Chapitre II : Antibiotiques Chapitre II : Antibiotiques 2.1. Définition des antibiotiques Les antibiotiques sont des molécules à activité antibactérienne. Ils sont soit d'origine biologique (β-lactamines, aminosides, macrolides, polypeptides), semi-synthétiques ou synthétiques (sulfamides, quinolones). Ils agissant spécifiquement sur des cibles moléculaires perturbant une étape essentielle du métabolisme des bactéries (synthèse protéique, synthèse des acides nucléiques, réplication, transcription, transport transmembranaire…) (BELOUNI et al, 2009). 2.2. Histoire des antibiotiques Dès 1877, Pasteur et Joubert mettent en évidence la notion d’antagonisme microbien (antibiose) : des cultures de bactéries charbonneuses poussent mal lorsqu’elles sont souillées par certaines bactéries saprophytes En 1889, Vuillemin crée le terme d’antibiose (anti= contre, biose= vie) action exercée par les substances antibiotiques En 1912, Vandenner montra que les extraits obtenus à partir d’Aspergillus fumigatus avaient une activité anti-staphylcoccique En 1928, A. Fleming découvre la pénicilline G En 1935 les sulfamides sont découverts Entre 1938-1942, la pénicilline G est purifiée et utilisée en clinique par H. Florey, E. Chain En 1940, le terme d’antibiotique à été proposé par R. Dubos En 1940, Waksman isole l’actinomycine produite par un Streptomyces et il découvre la streptomycine active en particulier sur le bacille de Koch A partir de cette date, de nombreux antibiotiques sont découverts : Chloramphénicol, Tétracyclines en 1949, Aminosides en 1950, Macrolides en 1952, Glycopeptides en 1958, Streptogramines en 1962, Triméthoprime en 1970 et Oxazolidinones en 2000 (BELOUNI et al, 2009). Figure 02 : Penicillium chrysogenum au centre de la boîte produit une zone d’inhibition sur les bactéries jaunes qui l’entourent. À droite les sporanges du champignon (FAVET, 2013). 9 Chapitre II : Antibiotiques 2.3. Types d’antibiotiques Les antibiotiques peuvent être distingués sur base du type d'activité qu'ils exercent. Un antibiotique bactériostatique arrête la croissance des bactéries. Un antibiotique bactéricide tue les bactéries. La distinction entre les deux types d'activité peut se faire en comparant in vitro la CMI (concentration minimale inhibitrice) et la CMB (concentration minimale bactéricide) (BAMBEKE et TULKENS, 2008). Tableau 3 : les antibiotiques bactéricides et les antibiotiques bactériostatiques (JOFFIN et LAYRAL, 2006). Bactériostatique Bactéricide Macrolides Sulfamidés Tétracyclines Lincosamides Nitrofuranes Phénicolés Ethambutol Cyclosérine β-lactames fluoroquinolones aminoglycosides nitroimidazoles glycopeptides (bactéricidie lente) polymyxines synergistines ansamycines acide fusidique isoniazide pyrazinamide CMI : est définie comme la plus faible concentration d'un antibiotique inhibant en 18 à 24 heures la multiplication des bactéries (bactériostase). Cette valeur permet de classer une souche bactérienne dans les catégories: "sensible" ; "résistante" ; "intermédiaire". Une souche est dite sensible à un antibiotique lorsque sa CMI est inférieure à la concentration sanguine obtenue après administration d'une dose utilisable en thérapeutique. Une souche est dite résistante lorsque la CMI de l'antibiotique est trop élevée pour être atteinte in vivo sans utiliser des doses toxiques. une souche a une sensibilité intermédiaire lorsque la CMI se situe entre ces deux valeurs extrêmes. Pour la détermination de la CMI, on a recours à une méthode de dilution ou à une méthode de diffusion; ceci dans des conditions bien standardisées. Les conditions standards: milieu Mueller-HINTON et inoculum bactérien = à 106 bactériens/ml (NDAW, 1998). 1/- Méthode de dilution a) Dilution en milieu liquide C'est la méthode de référence, on distribue dans un premier temps, pour la macrodilution, dans une série de tube à hémolyses stériles ou pour la microdilution dans les cupules d'une plaque, sous un même volume, des concentrations décroissantes d'antibiotique puis on ajoute dans chacun des tubes ou cupules sous un même volume, une culture de bactéries en phase exponentielle de croissance. La CMI est définie comme la plus faible concentration inhibant, après 18 à 24 heures de contact à 37°C, toute croissance visible à l'œil nu (NDAW, 1998). 10 Chapitre II : Antibiotiques Figure 3 : Méthode de dilution en milieu liquide (ARCHAMBAUD, 2009). 2/- Méthode par diffusion: (Disques) Une boîte de milieu gélosé adéquat est ensemencée avec une culture pure de l'organisme pathogène ; avant de mettre à incuber, on dépose sur le milieu ensemencé, en différents endroits de la boîte, plusieurs petits disques de papier adsorbant, imprégnés chacun d'un antibiotique différent. Pendant l'incubation, l'antibiotique diffus à partir des disques et une zone d'inhibition de la croissance apparaît autour de chaque disque contenant un antibiotique auquel l'organisme est sensible (NDAW, 1998). Figure 4: Méthode par diffusion Mesure d’un diamètre d’inhibition en mm (VINCENT, 2006 ; uni-tours 2011) CMB est définie comme la plus faible concentration d'antibiotique détruisant après 18 heures de contact à 34°C 99,9 % d'une population bactérienne. La CMB est déterminée à partir de la CMI ; la méthode employée consiste à ensemencer, sur un milieu gélosé dépourvu d'antibiotique, une quantité définie de tous les tubes ou cupules ne présentant pas de trouble visible et à dénombrer les suivantes. Le nombre de survivants est comparé au nombre des bactéries initialement présentes. - Si le rapport CMB/CMI = 1 ou 2 l'antibiotique est dit bactéricide. - Si le rapport CMB/CMI = 4 à 16 l'antibiotique est dit bactériostatique (NDAW, 1998). Malheureusement beaucoup d’antibiotiques ont des effets secondaires! La majorité des antibiotiques tue les bactéries (effet bactéricide). Mais dans certains cas, on préfère que 11 Chapitre II : Antibiotiques l’antibiotique inhibe la croissance sans tuer les bactéries (effet bactériostatique). En particulier quand les cellules mortes relâchent en grande quantité des toxines (surtout les Gram négatif). Dans ce cas, on inhibe les bactéries pathogènes jusqu’à ce que le système immunitaire fasse son travail de nettoyage par phagocytose (FAVET, 2013). 2.4. Classification des antibiotiques Classification selon l’origine Antibiotiques naturels : Pénicilline : à partir de la moisissure de genre Pénicillium Céphalosporine C : à partir d’une culture de Cephalosporium acremonium, Sterptomycine, tétracycline, chloramphénicol. Antibiotiques semi-synthétiques : 1965 : bêta-lactamines Antibiotiques synthétiques : quinolones, sulfamides Classification selon l’effet Antibiotiques bactéricides : bêta-lactamines, aminosides, polypeptides, rifamycine s, nitro-imidazolés, cotrimoxazole. Antibiotiques bactériostatiques : phénicolés, cyclines, sulfamides, triméthoprime. Classification selon le spectre Antibiotiques à large spectre : aminosides, phénicolés, cyclines, ulfamides. Antibiotiques à spectre étroit : Pénicilline, macrolides, polymyxines, glycopeptides. Classification selon le site d’action Antibiotiques actifs sur la paroi bactérienne : β-lactamines, glycopeptides (vancomycines), phosphopeptides (fosfomycines). Antibiotiques actifs sur la membrane cytoplasmique : Gramicidines, polymyxines, nitrofuranes Antibiotiques actifs sur la synthèse des protéiques : aminosides, cyclines, phénicolés, macrolides, lincosamides, streptogramines, kétolides, cotrimoxazole, rifamycines, acide fusidique. Antibiotiques actifs sur la réplication d’ADN : quinolones, inhibiteurs de β-lactamases (acide clavulanique) (NDIAYE, 2005). Classification selon la nature chimique : tableau 4. 2.5. Mécanismes d’action Les antibiotiques ont une cible précise dans le métabolisme bactérien. Ce sont en général des molécules qui présentent une analogie structurelle avec le substrat d’enzymes jouant un rôle important dans les principales synthèses. L’enzyme se fixe à l’antibiotique et la synthèse est stoppée. Il arrive aussi que l’antibiotique trouve un site de fixations sur l’enzyme, provoquant sa déformation et le rendant inefficace. Ils agissent donc presque exclusivement sur des bactéries en voie de croissance. Une bactérie au repos (par exemple sans source d’énergie, donc sans activité) peut cohabiter avec un antibiotique sans dommage! Les synthèses concernées sont (FAVET, 2013) : 12 Chapitre II : Antibiotiques Tableau 04 : principaux antibiotiques et leur classification (JOFFIN et LEYRAL, 2006) Classe d’antibiotiques Exemple Aminosides Streptomycine, kanamycine, Gentamycine, Amikacine Molécules actives seulement sur Amphotéricine B, Fluorocytosine, Kétoconazole les mycobactéries tuberculeuses Antifongiques Amphotéricine B, Fluorocytosine, Kétoconazole Bêta-lactamines Pénams : Pénicilline G, Aminopénicillines Pénicillines A, Carboxypénicillines, Noyau de type Pénicilline : Uréidopénicillines ou Pénams, Carbapénèmes, acyluréidopénicillines, Amidinopénicillines, Oxapénams Pénicilline M Carbapénèmes (Imipénème) Oxapénams ou clavams Céphalosporines de 1er génération (Céfalotine,…) Céphalosporines de 2e génération Céphalosporines de 3e Noyau de type génération Céphalosporine : Céphalosporines de 3e Céphèmes et génération orales Oxacéphèmes (Cefixime…) Céphalosporines anti Pseudomonas (Cefsulodine) Aztréonam Noyau bêta-actame seul Monobactams Fosfomycine Fosfomycine Glycopeptides Vancomycine Imidazolés (nitro-5-imidazolés) Métronidazole Macrolides et apparentés Macrolides vrais : Erythromycine, Spiramycine, Josamycine… Lincosamides : Clindamycine, Lincomycine Streptogramines : Pristinamycine, Virginiamycine Nitrofuranes Nitrofurantoine Phénicolés Chloramphénicol, Thiamphénicol Polypeptides Bacitracine, Colistine, Polymixine Quinolones 1er génération (acide nalidixique…) 2e génération ou Fluoroquinolones (norfloxacine…) Sulfamides et Diamino-2-4Sulfaméthoxazole, Triméthoprime… pyrimidines (sulfones) Tétracyclines Tétracycline, Minocycline… 13 Chapitre II : Antibiotiques synthèse de la paroi : certains antibiotiques interfèrent avec ou se fixent sur une enzyme de la voie de biosynthèse du peptidoglycane et bloquent son activité. De plus, d’autres mécanismes peuvent être mis en jeu. - β-lactamines (pénicillines céphalosporines et dérivés). - Cyclosérine, Bacitracines, Vancomycine, Fosfomycines. synthèse des protéines (traduction) : - chloramphénicol : se fixe sur la sous-unité 50 S des ribosomes et empêche la fixation du complexe tARN-AA. - Streptomycine : se fixe sur l’ARN 16 S de la sous-unité 30 S du ribosome et empêche l’initiation. - Autres aminosides : la fixation sur l’ARN 16 S de la sous-unité 30 S du ribosome empêche l’élongation. - Tétracyclines : se fixe sur la sous-unité 50 S du ribosome et empêchent la fixation du complexe tARN-AA. - Erythromycine : se fixe sur la sous-unité 50 S du ribosome et bloque la translocation. - Josamycine et Spiramycine : empêchent la fixation du tARN-AA sur le ribosome. - Lincosamides et Streptogramines : inactivent la peptidyl-transférase du ribosome. - Acide fusidique : bloque la translocation synthèse de l’ADN (réplication): - Mitomycine C, Quinolones : bloquent l’ADN gyrase, entraînant une destruction de l’ADN. - 5-nitro-imidazolés et Nitrofuranes : provoquent une fragmentation de l’ADN. - Novobiocine : empêche la fixation de l’ATP sur l’ADN gyrase (ou topo-isomérase, enzyme qui assure le passage de la forme superenroulée de l’ADN à une forme enroulée). - 5-fluorocytosine : antifongique inhibant la synthèse de la thymine entre autres. synthèse de l’ARN (transcription) : - Rifampicine se fixe sur la sous-unité β de l’ARN polymérase ADN dépendante. - 5-fluorocytosine : antifongique incorporé à la place de la cytosine et altérant ainsi le message. Membrane : - Tyrocidine et Gramicidines : se fixent sur les phospholipides membranaires et désorganisent la membrane. - Polymyxines et Colistine : se fixent sur les phospholipides et les polyosides membranaires et désorganisent la membrane. - Polyènes (Amphotéricine B) : antifongiques se fixant sur les stérols membranaires provoquant la formation de pores. - Imidazole : antifongique bloquant la synthèse des stérols membranaires. Antimétabolite : - Sulfamides et 2,4-diaminopyrimides ; inhibent le métabolisme d’un coenzyme, l’acide folique. - 5-fluorocytosine : antifongique incorporé à la place de la cytosine et altérant ainsi le message. 14 Chapitre II : Antibiotiques - Isoniaside, Ethionamides,… : inhibent la synthèse des acides mycoliques de la paroi des mycobactéries. Ethambutol : inhibe le transfert vers la paroi à travers la membrane des acides mycoliques de la paroi des mycobactéries. Mupirocine : inhibe l’isoleucine- tRNA-synthétase (JOFFIN et LEYRAL, 2006) Figure 05 : Mode d’action des antibiotiques (FAVET, 2013). 2.6. Spectre d’activité des antibiotiques Le spectre antibactérien d’un antibiotique est destiné à caractériser l’activité microbiologique d’un antibiotique sur une espèce bactérienne en tenant compte des résistances naturelles et acquises (MERENS et CAVALLO, 2008). Pour un antibiotique donné l’activité antibactérienne ne s’exerce que vis-à-vis de certaines espèces bactériennes, ce qui définit son spectre d’activité (NAUCIEL, 2005). Le champ d’efficacité d’une substance antibiotique ou spectre antibiotique est soit étroit (efficacité des antibiotiques sur une variété restreinte de micro-organismes) soit large (les antibiotiques attaquent de nombreux types d’agents pathogènes différents) (DELERY, 1999). 15 Chapitre II : Antibiotiques Pour un antibiotique, l’établissement du spectre antibactérien repose initialement sur la répartition des CMI au sein de la population sauvage d’une espèce bactérienne et la définition de concentrations critiques, proposées par des Comités d’experts au sein de sociétés savantes et en particulier par l’European Committee on Antimicrobial Susceptibility Testing (EUCAST). L’établissement de ce spectre est une étape incontournable des études préalables à sa mise sur le marché d’un antibiotique et s’inscrit. Cependant, après mise sur le marché, ce spectre est éventuellement amené à évoluer en fonction de l’apparition de résistances acquises chez certaines espèces et de l’expérience clinique (MERENS et CAVALLO, 2008). Les spectres concourent ainsi à une meilleure information sur le médicament. La mise à disposition des spectres d’activité antimicrobienne a donc pour objectif d’orienter le choix du prescripteur vers une antibiothérapie adaptée et de contribuer ainsi à l’amélioration de la prise en charge des malades (AFSSAPS, 2005). 16 Chapitre III Antibiorésistance chez les Entérobactéries Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries 3.1. Définition de l’antibiorésistance La notion de résistance elle-même n’a pas grande signification dans l’absolu ; elle est très relative. Chaque biologiste, selon sa discipline donne une définition différente de la résistance bactérienne aux antibiotiques. Pour le bactériologiste, une souche est dite résistance lorsque la bactérie est uniformément inhibée par une concentration minimale inhibitrice CMI supérieur aux concentrations critiques tissulaires ou sériques qu’il est possible d’obtenir in vivo, à la suite d’un traitement aux doses et par les voies classiques. Cette résistance bactériologique est beaucoup plus complexe qu’on ne peut le penser de prime abord, car elle est sous-tendue par des bases génétiques et biochimiques de mieux en mieux connue actuellement (PELLERIN, 2012). 3.2. Origine de phénomène de l’antibiorésistance Les gènes de résistance aux antibiotiques pourraient avoir deux origines : Selon une hypothèse classique, l’origine semble devoir être recherchée chez les micro-organismes qui synthétisent naturellement des antibiotiques (de très nombreux antibiotiques, utilisés en thérapeutique, dérivent de ces antibiotiques naturels) et qui doivent se protéger de l’action de ces substances. La synthèse d’antibiotiques par des micro-organismes aurait pour fonction d’éliminer d’autres micro-organismes, présents dans la même niche écologique et susceptibles de rivaliser pour l’acquisition de nutriments. Le sol est certainement l’écosystème principal où se déroule cette lutte pour la vie. La plupart des micro-organismes producteurs d’antibiotiques sont telluriques. Un plasmide de résistance aux antibiotiques contient souvent des gènes de résistance aux métaux lourds (mercure, plomb, cadmium, bismuth, sels d’argent, ...) qui sont largement présents dans la terre (SEKHRI-ARAFA, 2011). Malheureusement, on a constaté que depuis l’introduction successive en thérapeutique des différents antibiotiques la sensibilité des bactéries à ces drogues a beaucoup évoluée, de sorte que le pourcentage de souches résistantes dans les différentes espèces pathogènes est actuellement important. Le phénomène d’adaptation des bactéries aux agents antimicrobiens remonte au tout début de la bactériologie. Les microbiologistes constataient que des souches microbiennes, appartenant à des espèces habituellement inhibées par une substance antibiotique donnée, peuvent devenir capables de croître en présence de concentrations plus élevées de cette substance : ces souches sont dites résistantes. Le phénomène de résistance modifie les spectres classiques d’activité des substances antibactériennes (MESSAÏ, 2006). 3.3. Evolution de l’antibiorésistance Depuis leur découverte, l'usage des antibiotiques n'a cessé de croître et de se diversifier. Ceci traduit le rôle précieux de ces substances dans la lutte contre les bactéries pathogènes; afin de réduire les effets des maladies dont elles sont responsables. Mais après la découverte de la pénicilline par Fleming en 1929 et avant son usage thérapeutique, Abraham et Chain avaient observé que des extraits de différentes bactéries pouvaient détruire cette molécule. Ainsi le monde bactérien était capable de s'adapter aux 16 Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries antibiotiques et l'on a pu observer que les bactéries isolées d'infections humaines et animales, progressivement, étaient de plus en plus résistantes aux antibiotiques successivement apparus. L'évolution de la résistance des bacilles à Gram négatif est assez importante. Le degré de résistance des bacilles à Gram négatif est inégal d'un groupe cellulaire à un autre. De 1950 à 1966, Smith a observé que la fréquence de résistance des E. coli aux tétracyclines, sulfamides, streptomycine, augmentait avec le temps et que la résistance à d'autres molécules (chloramphénicol, ampicilline, néomycine, ...) suivait leur usage thérapeutique. A coté des E. coli, les Salmonelles restent dans l'ensemble sensibles mais peuvent par acquisition de plasmides, résister aux antibiotiques majeurs tels que le chloramphénicol, les tétracyclines, les sulfamides, et l'ampicilline. La menace que représente, l'évolution du phénomène de résistance est directement liée au pouvoir infectieux des plasmides chez l'homme, l'animal, et dans leur environnement (FOFANA; 2004). 3.3.1. Sélection de la résistance Toute utilisation d'antibiotiques conduit tôt ou tard à la sélection de bactéries résistantes. On ne connaît pas d'exemple qui échappe à cette règle. L’utilisation d’antibiotiques dans les différents écosystèmes (plantes, animaux et homme) conduit à la sélection de souches bactériennes résistantes par l’élimination de la population sensible. La notion de pression de sélection des antibiotiques est très importante. La bactérie va devenir résistante si on la met en présence d'un antibiotique. Si elle n'est pas mise en contact avec l'antibiotique, elle n'a pas besoin de transférer des gènes qui vont porter la résistance aux antibiotiques (BEBEAR, 2011). L’émergence de la résistance est observée quel que soit l’antibiotique et quels que soient le mécanisme biochimique et le support génétique de la résistance. Les traitements antibiotiques sont un facteur capital de sélection de souches résistantes: Par sélection directe de la résistance mais, ces souches résistantes à l'antibiotique utilisé peuvent être également résistantes à d'autres antibiotiques par phénomène de sélection croisée (même gène de résistance à plusieurs antibiotiques) ; Par Co-sélection (plusieurs gènes de résistance sur un même support génétique) Cet effet de sélection croisée est dû à la présence, de bactéries porteuses de Figure 07 : Rôle des antibiotiques sur l’émergence et la sélection de la résistance (SALOMON, 2013) 17 Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries multirésistances plasmidiques. Les germes qui présentent une résistance à l’antibiotique utilisé seront sélectionnés et leur incidence s’accroîtra (sélection directe). Mais toutes les autres résistances, portées par le même plasmide ou par d’autres plasmides dans la même souche, seront du même coup indirectement sélectionnées (MESSAÏ, 2006). Lorsque la pression de sélection des antibiotique diminue, on peut observer certains cas une diminution du pourcentage de souches résistantes. Un des mécanismes en cause est la perte progressive des gènes résistance situés sur des éléments génétiques instables. Lorsque le niveau de résistance acquise évolue par palier, la pression de sélection contribue aussi à élever aussi le niveau de résistance. L’augmentation de niveau de résistance peut relever de différents mécanismes : augmentation du nombre de copies du gène de résistance, nouvelle mutation portant sur un gène déjà modifié, ou bien acquisition d’un deuxième mécanisme de résistance vis-à-vis de l’antibiotique (par exemple diminution de la perméabilité s’ajoutant à une modification de la cible). Lorsque plusieurs gènes de résistance sont portés par un même élément génétique (par exemple un plasmide), l’utilisation d’un antibiotique sélectionne non seulement le gène de résistance à l’antibiotique administré, mais aussi les gènes de résistance associés (NAUCIEL et VILDE, 2005). 3.3.2. Diffusion de la résistance La diffusion de la résistance s’effectue soit par la diffusion des gènes de résistance soit par la diffusion des souches bactériennes résistantes. Les plasmides, les éléments génétiques transposables et les intégrons peuvent diffuser entre bactéries phylogénétiquement éloignées. Après la sélection de la résistance, divers facteurs peuvent contribuer à sa diffusion (NAUCIEL et VILDE, 2005). a) Diffusion de la résistance chez les bactéries Chez les bactéries, les gènes de résistance sont transmis à la descendance (transmission verticale). Ils peuvent aussi être transmis, par conjugaison ou transformation, à d’autres bactéries de la même espèce et plus rarement à des bactéries appartenant à des espèces différentes (transmission horizontale) ce qui réalise une transmission épidémique de la résistance. De nombreux gènes de résistance sont situés sur des transposons. Ce sont des éléments génétiques mobiles, pouvant se déplacer d’une région à une autre du chromosome, ou bien du chromosome vers un plasmide et inversement. Cette situation favorise encore la diffusion des gènes de résistance (NAUCIEL et VILDE, 2005). b) Transmission interhumaine Les bactéries portant des gènes de résistance circulent dans la population humaine, en milieu communautaire et plus encore en milieu hospitalier. En milieu hospitalier, la situation est en effet aggravée par la forte pression de sélection des antibiotiques et par la transmission des bactéries par le personnel hospitalier, si les précautions d’hygiène ne sont pas assez strictes (NAUCIEL et VILDE, 2005). c) Transmission d’origine animale Chez les animaux domestiques, les antibiotiques ne sont pas utilisés seulement à titre thérapeutique, mais aussi comme additif dans l’alimentation. Des souches résistantes, ainsi 18 Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries sélectionnées chez l’animal, peuvent ensuite être transmises à la population humaine (NAUCIEL et VILDE, 2005). 3.4. Types de résistance 3.4.1. Résistance naturelle ou "innée" La résistance naturelle est un caractère présent chez toutes les souches appartenant à la même espèce. Ce type de résistance est détecté dès les premières études réalisés afin de déterminer l’activité d’un antibiotique et contribue à définir son spectre antibactérien. Elle peut être due à l’inaccessibilité de la cible pour l’antibiotique qui est une conséquence des différences existant entre les structures pariétales bactériennes, à une faible affinité de la cible pour l’antibiotique, ou encore à l’absence de la cible (POYART, 2003). La résistance naturelle est stable, transmise à la descendance mais pas ou peu transmissible sur un mode horizontal. La résistance naturelle a pour support génétique le chromosome bactérien. Ses mécanismes biochimiques sont nombreux, exemple : Les bactéries anaérobies sont naturellement résistantes aux aminosides car le passage des aminosides à travers la membrane cytoplasmique nécessite un système de transport actif absent chez les anaérobies. Pour les mêmes raisons, les bactéries aéro-anaérobies facultatives sont moins sensibles aux aminosides lorsqu’elles sont placées dans un environnement pauvre en oxygène (SEKHRI-ARAFA, 2011). 3.4.2. Résistance acquise Ce type de résistance constitue le problème majeur de l'antibiothérapie et explique l'usure des antibiotiques au cours du temps (FOFANA, 2004). La résistance acquise a été observée dès le début de l’antibiothérapie mais sa fréquence était faible. Ultérieurement, la généralisation de l’utilisation des antibiotiques a conduit à une sélection des souches résistantes et on constate, quotidiennement, que de très nombreuses souches ne se comportent pas à l’égard des antibiotiques conformément à ce que les spectres d’activité permettraient de le supposer. Ce phénomène a atteint une telle ampleur que la seule identification bactérienne ne permet plus de prédire le comportement d’une souche isolée vis à-vis des antibiotiques (SEKHRI-ARAFA, 2011) La résistance bactérienne acquise n’apparaît que chez quelques souches d’une espèce donnée normalement sensible, elle est due à l’emploi en thérapeutique des antibiotiques (POYART, 2003). L’acquisition d’un mécanisme de résistance se fait à la suite de mutations génétiques ou bien par acquisition d’un gène de résistance (gène transmissible entre bactéries, même d’espèces différentes) (CDAAS, 2012). 3.5. Déterminisme génétique de l’antibiorésistance La résistance aux agents antimicrobiens est due soit à la modification de l’information génétique du patrimoine chromosomique « endogène » par mutation chromosomique, soit à l’acquisition de matériel génétique « exogène » d’un élément mobile tels que les plasmides, les transposons ou intégrons (NDIAYE, 2005 ; DELERY, 1999). La résistance bactérienne aux antibiotiques peut résulter de l’un ou l’autre de ces grands déterminismes génétiques, mais le déterminisme chromosomique a une importance pratique très inférieure au déterminisme plasmidique et sera donc envisagé plus rapidement (PELLERIN, 2012). 19 Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries 3.5.1. Déterminisme chromosomique La résistance dont le support est chromosomique a comme caractéristique d’être stable, transmise à la descendance de la cellule bactérienne mais en général elle est peu ou pas transférable d’une bactérie à l’autre (DELERY, 1999). La résistance chromosomique peut être soit naturelle, soit acquise. 3.5.1.1. Résistance naturelle Ce qu’il faut retenir c’est que toutes les résistances naturelles sont portées par le chromosome. Ce caractère est constitutif (indépendant du milieu), stable c'est-à-dire transmissible à toute la descendance, et indépendant de toute pression de sélection. Le plus souvent il s’agit de la constitution même d’une structure-cible, comme par exemple la pauvreté en glycopeptide de la paroi des bactéries Gram (-), les rend résistants naturellement aux β-lactamines (G et M) (PELLERIN, 2012). Elle ne concerne que 10% des résistances acquises. La résistance chromosomique résulte d’une mutation dont elle en présente tous les caractères (SEKHRI-ARAFA, 2011). 3.5.1.2. Résistance acquise La résistance chromosomique acquise se définit selon l’OMS comme « une modification du patrimoine génétique d’une bactérie, qui lui permet de tolérer une concentration d’antibiotique nettement plus élevée que celle qui inhibe normalement la croissance in vitro des souches sensibles de la même espèce ». La résistance chromosomique acquise a pour déterminisme génétique une mutation que l’on peut définir comme : « une variation génétique spontanée, héréditaire et stable, c’est-à-dire : transmissible à la descendance » (PELLERIN, 2012). Cette résistance présente donc tous les caractères classiques des mutations : rares, aléatoire, discontinues, indépendantes et stables. Nous ne faisons que citer ces 5 caractères bien connus des mutations bactériennes. D’une manière générale, la mutation de résistance s’accompagne d’une déficience métabolique ou structurale de la cible d’action de l’antibiotique et rendre l’interaction avec l’antibiotique impossible ou encore rend les cibles pariétales (protéines liant la pénicilline, par exemple) ou intracellulaires (ARN polymérase, ADN gyrase, ribosomes,...) indifférentes à la présence du ou des antibiotiques. Les mutations chromosomiques apparaissent spontanément avec des fréquences de l’ordre de 10-6 à 10-9 selon les bactéries et les caractères considérés. L’antibiotique n’est pas directement mutagène, mais il sélectionne les rares mutants résistants au sein de la population bactérienne sensible. Les mutants chromosomiques sont donc le plus souvent des bactéries faibles et fragiles dont le taux de croissance est inférieur à celui des bactéries sensibles. C’est pourquoi la population bactérienne est en général contre-sélectionnée en l’absence d’antibiotique, dominée par la flore sensible, sauf si cet équilibre écologique est détruit par l’utilisation des antibiotiques. L’antibiotique exerce une pression de sélection sur des mutants résistants préexistants (PELLERIN, 2012 ; MIRABAUD, 2003 ; POYART, 2003). On a longtemps pensé qu’une mutation chromosomique ne pouvait être responsable de la résistance qu’à un ou plusieurs antibiotiques appartenant à la même famille. La probabilité d’obtenir en une étape des bactéries résistantes à deux antibiotiques (double mutant) est égale au produit des probabilités d’apparition de chacune des mutations considérées indépendamment (POYART, 2003). 20 Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries 3.5.2. Déterminisme extra-chromosomique Résistance par acquisition de matériel génétique exogène, concerne 90% de résistance acquise, la résistance acquise souvent médiée par le biais de plasmides ou par un élément génétique transposable, elle consiste en un transfert de fragments de gènes d’un endroit du chromosome bactérien à un autre. Si ces fragments sont incorporés à des endroits bien précis, ils sont appelés intégrons, alors que s’ils se déplacent librement, il s’agit de transposons. On parle alors de transfert horizontal de gènes de résistance qui sont parfois entre espèces différentes et les mécanismes utilisés sont conjugaison, transformation ou transposition (SEKHRI-ARAFA, 2011 ; MIRABAUD, 2003). a) Conjugaison Dans le phénomène de conjugaison, une bactérie donneuse transmet à une bactérie receveuse une copie de son plasmide porteur de gène de résistance. Ce mécanisme peut s’effectuer entre bactéries de la même espèce, au sein d’un même genre ou parfois entre bactéries de genres différents d’où son efficacité. Un plasmide peut contenir différents gènes de résistance. L’utilisation d’un seul des antibiotiques contre lesquels le plasmide est efficace permet alors sa sélection et son maintien dans son intégralité (PEYROU, 2001). b) Transformation La transformation est le résultat d’un réarrangement de séquences d’ADN échangées entre deux bactéries. On peut alors obtenir de nouveaux gènes de résistance. Ce processus se fait généralement entre bactéries de genre proche car il doit y avoir une forte analogie entre les séquences nucléotidiques pour permettre la recombinaison (PEYROU, 2001). c) Transduction Dans la transduction, un virus bactériophage incorpore une séquence d’ADN d’une bactérie et la transmet à une autre bactérie. Du fait de la spécificité des bactériophages, ce phénomène n’a lieu que pour les bactéries de la même espèce (PEYROU, 2001). Cette résistance est due à l’acquisition d'information génétique exogènes portés par des plasmides ou des transposons (POYART ; 2003) Figure 08 : transmission de gènes de résistance par conjugaison, transformation et transduction (BRYANT, 2005) Plasmides Les plasmides sont des éléments génétiques mobiles constitués de 10 à 400 paires de bases d’ADN. Ils sont autonomes dans la mesure où ils sont capables de se répliquer indépendamment. En effet, un plasmide peut établir une connexion entre une cellule donatrice 21 Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries et une cellule réceptrice, et être transféré dans la cellule réceptrice en même temps qu’il est répliqué dans la cellule donatrice où il demeure. Les premiers plasmides de résistance aux antibiotiques ont été décrits au Japon à la fin des années 1950, lors d’une épidémie de dysenterie bacillaire à Shigella flexneri. Depuis cette date, des plasmides de résistance ont été retrouvés chez de très nombreuses espèces et on a constaté que la résistance plasmidique concerne de très nombreux antibiotiques (MIRABAUD, 2003 ; SEKHRI-ARAFA, 2011). La résistance plasmidique est liée à la synthèse de protéines additionnelles et non à une modification des constituants normaux de la bactérie. Les bactéries porteuses de plasmides sont normales alors que les bactéries résistantes par mutation sont souvent fragilisées. Aussi, les bactéries porteuses de plasmides ne sont pas ou peu contre-sélectionnées en l’absence d’antibiotique. De nombreux plasmides de résistance sont conjugatifs ou mobilisables ce qui permet un transfert horizontal (conjugaison, mobilisation, transduction et transformation). Ces transferts sont à l’origine d’une dissémination très importante au sein des populations bactériennes ce qui fait qualifier la résistance plasmidique de contagieuse ou d’infectieuse. Cette dissémination des gènes de résistance est exacerbée par la présence d’éléments génétiques transposables et d'intégrons (SEKHRI-ARAFA, 2011). Éléments génétiques transposables et intégrons L’importance des éléments génétiques transposables et des intégrons inclus dans les transposons est considérable. Les transposons sont des éléments génétiques incapables de se répliquer par eux-mêmes, mais qui peuvent passer d’un chromosome à un autre, ou d’un chromosome à un plasmide. Les gènes de la résistance extra-chromosomique ne sont pas induits par l’utilisation des antibiotiques qui se contentent de sélectionner les bactéries porteuses de tels gènes. Les éléments génétiques transposables permettent la dissémination de gènes entre des bactéries phylogéniquement éloignées en permettant l’implantation d’un gène là où celle d’un plasmide échoue. Il est important de noter que la résistance extrachromosomique étant souvent une multirésistance, l’utilisation d’un seul antibiotique va sélectionner des bactéries multi-résistantes (SEKHRI-ARAFA, 2011 ; FAUCHERE et Avril, 2002 ; MIRABAUD, 2003). 3.6. Déterminisme génétique de l’antibiorésistance chez les Entérobactéries 3.6.1. Déterminisme chromosomique a. Résistance naturelle Les Entérobactéries opposent une résistance naturelle à : Pénicillines G et M, macrolides, vancomycine. Certaines d’entre elles sont naturellement résistantes à d’autres molécules : les membres de la tribu des Proteus sont naturellement résistants aux nitrofuranes et à la colistine, Serratia à la colistine, les Klebsiella et Levinea à l’ampicilline. Ces résistances naturelles définissent les phénotypes dits « sensible » ou « sauvage ». Concernant la sensibilité aux β-lactamines les Entérobactéries sont classiquement divisées en 4 classes : en testant 4 molécules : pénicilline A (ampicilline), caboxy-pénicilline, céphalosporine 1er génération (C1G) et C3G, on peut définir 4 types de comportement des Entérobactéries vis-à-vis des β-lactamines (DENIS et al, 2007 ; DECOSTER, 2008). Les Entérobactéries dont Klebsiella pneumoniae et Pseudomonas aeruginosa) sont naturellement résistants, le plus souvent à bas niveau, aux antibiotiques hydrophobes et/ou de masse moléculaire élevée (pénicilline G, pénicilline M, macrolides, 22 Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries rifampicine, acide fusidique, novobiocine, vancomycine) car ces antibiotiques ne peuvent traverser la membrane externe de la paroi (SEKHRI-ARAFA, 2011). Tableau 5 : comportement des Entérobactéries à certains antibiotiques de la famille βlactamines (DENIS et al, 2007 ; DECOSTER, 2008). Groupe Pen A Carb C1G C3G 1 S S S S Escherichia coli, Proteus Phénotypes mirabilis, sensibles Salmonella,Shigella 2 R R S S Klebsiella, Levinea, Pénicillinase Escherichia harmanni, chromosomique Citrobacter diversus, Citrobacter amalonaticus 3 R S R S Enterobacter, Citrobacter, Céphalosporinase Proteus indole+, Serratia, inductible Providencia 4 R R R S Yersinia enterocolitica Pénicillinase + Céphalosporinase b. Résistance acquise La résistance naturelle est cependant brouillée par l’acquisition de mécanismes de résistance, souvent d’origine plasmidique, comme le phénotype « pénicillinase de haut niveau » retrouvé chez près de la moitié des souches d’Escherichia coli et Proteus mirabilis. Les aminosides, quinolones et phénicolés sont normalement actifs contre les Entérobactéries mais les résistances acquises sont fréquentes (POYART, 2003). L’utilisation des associations d’antibiotiques en bi- ou tri antibiothérapie semblait pouvoir prévenir l’émergence de mutants résistants. En fait, des germes multirésistants aux antibiotiques BLSE, chloramphénicol, triméthoprime, tétracyclines et plus récemment aux céphalosporinases par mutation chromosomique sont actuellement isolés chez certaines Entérobactéries comme Klebsiella, Enterobacter et Serratia (DENIS et al, 2007 ; POYART, 2003). 3.6.2. Déterminisme extra-chromosomique Les plasmides des Entérobactéries peuvent se transmettre à des espèces de la famille des Pasteurellaceae mais les plasmides transférés ne peuvent pas se répliquer dans les cellules réceptrices. Si le plasmide transféré possède des éléments transposables, ceux ci peuvent s’intégrer dans une molécule d’ADN de la bactérie hôte, par exemple un plasmide. Ainsi engendré, ce plasmide modifié pourra se transmettre entre souches de la même espèce ou entre des souches d’espèces différentes mais phylogéniquement proches (SEKHRI-ARAFA, 2011). On peut retrouver des transposons, initialement localisés au niveau du chromosome, sur des plasmides : gène codant pour la pénicillinase SHV-1, d’abord naturellement trouvé sur le chromosome de Klebsiella pneumoniae et retrouvé ensuite sur des plasmides chez des espèces variées d’Entérobactéries (PHILLIPON et al, 1987). 23 Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries 3.7. Mécanismes biochimiques de l’antibiorésistance Les bactéries résistantes peuvent exprimer leur résistance aux antibiotiques à des niveaux de concentration différents. Leur résistance se manifeste par un ou plusieurs mécanismes, ces mécanismes pouvant être, pour un même antibiotique, différents d’une bactérie à l’autre. Les divers mécanismes impliqués dans la résistance bactérienne aux antibiotiques sont les suivants (MAURICE, 1901). 3.7.1. Inactivation de l’antibiotique C’est le mécanisme le plus important en pratique, car c’est celui qui touche le plus grand nombre d’antibiotiques (PELLERIN, 2012). La synthèse de certaines enzymes peut réduire ou annuler l'efficacité d'un antibiotique (PEYROU, 2001). Cette sécrétion d’enzyme a de plus un déterminisme le plus souvent plasmidique, donc horizontal et transmissible. La modification enzymatique de l’antibiotique peut aboutir soit à son clivage ou sa destruction, soit seulement à son inactivation (PELLERIN, 2012). β-lactamases Ce sont des enzymes qui inactivent les β-lactamines par ouverture du noyau βlactame. Il en existe une grande variété et leur classification pose des problèmes. On peut les classer suivant les β-lactamines qu’elles hydrolysent de manière préférentielle (par exemple pénicillinase, céphalosporinase), suivant leur sensibilité à divers inhibiteurs, ou suivant qu’elles sont codées par des gènes chromosomiques ou plasmidiques (NAUCIEL et VILDE, 2005). Enzyme inactivant les aminosides On connait 3 classes d’enzymes pouvant inactiver les aminosides : les acétyltransférases, les nucléotidyltransférases et les phosphotransférases. Dans chaque classe il existe différentes enzymes possède donc son profil de substrat et va par conséquent donner naissance à un profil de résistance aux aminosides qui lui est propre. Les gènes codant ces enzymes sont le plus souvent plasmidiques ; Enzyme inactivant le chloramphénicol Le chloramphénicol peut être inactivé par une chloramphénicol acetyltransférase, habituellement codée par un gène plasmidique ; Enzyme inactivant les macrolides, lincosamides et synergistines Diverses enzymes peuvent inactiver l’érythromycine, la clindamycine ou la streptogramine A (NAUCIEL et VILDE, 2005). Figure 09 : Mécanismes de résistance aux β-lactamines (ARCHAMBAUD, 2009) 24 Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries 3.7.2. Modification de la cible Une mutation peut induire une modification de la cible de l'antibiotique utilisé. A cause d'une moindre affinité, l'efficacité sera réduite. On retrouve ce phénomène pour de nombreuses familles d'antibiotiques (PEYROU, 2001). Cette inactivation ou bien modification de la cible d’antibiotique se fait par : Modification des PLP. Modification du précurseur de peptidoglycane. Modifications du ribosome. Modification des topoisomérases. Modification de l’ARN-polymérase. Modifications des enzymes impliquées dans la synthèse des folates. Modification de facteur d’élongation G (NAUCIEL et VILDE, 2005). Figure 10 : Modification des PLP (ARCHAMBAUD, 2009) 3.7.3. Diminution de la perméabilité La diminution de la pénétration de l’antibiotique peut être la conséquence de différentes « stratégies » bactériennes. Certaines bactéries sont capsulées ou peuvent sécréter une zooglée qui les protège de l'action des antibiotiques par effet de barrière ou par modification de leur charge externe (PEYROU, 2001). Les antibiotiques peuvent passent par les porines, il s'agit d'antibiotiques hydrophiles et de petites tailles. Les antibiotiques hydrophobes passent par le LPS. Ils vont déstructurer les LPS et vont ensuite pénétrer à travers les phospholipides et les peptidoglycanes (BEBEAR, 2011). Des modifications affectant la quantité ou la qualité des porines membranaires peuvent réduire la concentration de l'antibiotique au niveau de son site d'action (MAMMERI, 2007). 3.7.4. Excrétion de l’antibiotique par un mécanisme d’efflux Il existe chez les bactéries des systèmes permettant d’excréter certains antibiotiques. Ces systèmes jouent un rôle dans la résistance naturelle et sont constitués de protéines jouant le rôle de pompe capable d'expulser l'antibiotique présent dans l'espace périplasmique ou dans le cytoplasme hors de la cellule. Ils peuvent concerner plusieurs familles d'antibiotiques ou une seule famille d'antibiotiques. Lorsque plusieurs familles d'antibiotiques sont concernées, on parle de MDR (Multi Drug Resistance). Sous l’effet de mutation, leur niveau d’expression peut augmenter et faire apparaitre une résistance acquise pouvant toucher simultanément plusieurs familles d’antibiotiques. Ce phénomène a été décrit tout chez les bactéries à Gram (NAUCIEL et VILDE, 2005 ; MAMMERI, 2007 ; BEBEAR, 2011). 25 Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries Des mutations dans les régions régulatrices des opérons des systèmes d'efflux multidrogues peuvent conduire à une surexpression des systèmes d'efflux constitutifs, associée ou non à une perte des porines, et conférer une multirésistance aux antibiotiques. Une acquisition de gènes peut être à l'origine de systèmes d'efflux spécifiques. Contrairement aux systèmes d'efflux multi-drogues, les systèmes d'efflux spécifiques ne permettent que l'exportation de molécules apparentées (SEKHRI-ARAFA, 2011). Figure 11 : Excrétion d’antibiotique par l’efflux actifs (ARCHAMBAUD, 2009) 3.8. Mécanismes biochimiques de l’antibiorésistance chez les Entérobactéries 3.8.1. Inactivation de l’antibiotique Résistance aux béta-lactamines Les Entérobactéries ont la capacité de produire des bêta-lactamases, enzymes qui inactivent les antibiotiques bêta-lactamines par ouverture du cycle bêta-lactame. Ce mécanisme fait partie des mécanismes classiques de résistance bactérienne. Les gènes de résistance des bêta-lactamases se situent soit au niveau du chromosome bactérien, soit sur des éléments extra-chromosomiques (MIRABAUD, 2003). Les pénicillinases d’origine plasmidique, rendent les souches qui en produisent résistantes aux pénicillines G, A et aux carbénicillines mais, si le niveau de production est élevé, la résistantes s’étend aux acyluréido-pénicillines, aux C1G et C2G et à quelques C3G. La production importante de céphalosporinase (céphalosporinase « déréprimée ») d’origine chromosomique, rend les souches résistantes à toutes les β-lactamines, sauf aux carbapénems. Depuis peu sont apparues, chez Klebsiella pneumoniae et Enterobacter aerogenes surtout, des β-lactamines à spectre étendu (BLSE), d’origine plasmidique qui inactivent toutes les β-lactamines, sauf certaines C2G et les carbapénems (DECOSTER, 2008). Résistance aux sulfamides Chez les Entérobactéries, le déterminisme génétique de la résistance aux sulfamides est essentiellement plasmidique. Cette résistance repose sur la production de dihydroptéroate synthétases dont l'affinité pour les sulfamides est réduite (MAMMERI, 2007). Résistance aux aminosides C'est le mécanisme de résistance le plus fréquemment décrit. Il repose sur l'action de trois groupes d'enzymes : Les aminosides phosphotransférases (APH), Les aminosides nucléotidyltransférases (ANT) et les aminosides acétyltransférases (AAC) qui catalysent la phosphorylation des groupements hydroxyles (OH), la nucléotidylation des groupements 26 Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries hydroxyle, et l'acétylation des groupements aminés (NH2), respectivement. Ces enzymes inactivatrices sont majoritairement acquises par des plasmides. On peut, en testant les 4 aminosides les plus fréquemment utilisés (gentamicine, tobramicine, nétilmicine et amikacine). Définir les phénotypes suivant : G, GT, GTN, TNA et GTNA. Ces résistances sont parfois difficiles à déceler et il faut une observation attentive et une interprétation correcte des résultats des antibiogrammes (DECOSTER, 2008 ; MAMMERI, 2007). Résistance aux triméthoprimes La résistance plasmidique au triméthoprime est fréquemment observée chez les Entérobactéries. Elle repose sur la production d'une DHFR possédant une faible affinité pour l'antibiotique (MAMMERI, 2007). Résistance aux phénicolés Une chloramphénicol-acétyl-transférase (CAT) est responsable de la résistance des entérobactéries aux phénicolés, en particulier de certaines souches de Salmonella (DECOSTER, 2008). 3.8.2. Modification de la cible Imperméabilité ou modification des cibles sont plus rarement causent de résistance chez les Entérobactéries : une mutation portant sur les porines est cause de résistance à haut niveau chez les Enterobacter, Citrobacter, Serratia, Proteus indologènes et rarement Salmonella. Une mutation affectant l’ADN gyrase détermine une résistance aux quinolones (Klebsiella, Serratia, Citrobacter, Providencia) (DECOSTER, 2008). Il s’agit d’un mécanisme de résistance récemment découvert dans des souches d’Entérobactéries. Il repose sur la production de protéines appelées Qnr (pour quinolone résistance) d’origine plasmidique et possèdent toutes une structure tertiaire pseudohélicoïdale similaire à celle de l’ADN. Ces protéines se fixent sur les topoisomérases II et IV en compétition avec l’ADN empêchant la fixation ultérieure des quinolones (MAMMERI, 2007). Figure 13 : mécanismes de résistance aux quinolones chez les Entérobactéries (VINCENT, 2006) 3.8.3. Diminution de la perméabilité Les mutations qui affectent les protéines ribosomales, entraînent une diminution de l’affinité des ribosomes pour les aminosides. De tels mutants sont rarement isolés en clinique (DECOSTER, 2008). 27 Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries Une ou plusieurs modifications des porines sont à l’origine d’une résistance acquise aux bêta-lactamines, aux quinolones, au chloramphénicol, aux sulfamides, au triméthoprime et aux tétracyclines chez Escherichia coli, les Enterobacter spp, les Serratia spp, les Klebsiella spp et Pseudomonas aeruginosa. Dans le cas des aminosides, l’imperméabilité résulte d’un mécanisme différent. Elle est due à des mutations modifiant le système de transport actif de ces molécules et provoquant une diminution d’activité de tous les aminosides. C'est alors une modification de la membrane cytoplasmique (SEKHRI-ARAFA, 2011). Si plusieurs antibiotiques utilisent la porine en cause, alors l'efficacité de tous ces antibiotiques s'en trouve altérée. Ce mécanisme se retrouve essentiellement chez les Entérobactéries. Enfin, le passage de la membrane cytoplasmique nécessite parfois des enzymes appelées perméases « énergie dépendantes » (PEYROU, 2001). 3.8.4. Excrétion de l’antibiotique par un mécanisme d’efflux Le premier exemple connu de résistance acquise par efflux transmembranaire spécifique est celui des tétracyclines. Des transposons (Tn 10 et Tn 1721) codent pour des protéines (protéines Tet) qui exportent les tétracyclines à travers la membrane cytoplasmique. Selon les protéines Tet synthétisées, la résistance concerne toutes les tétracyclines sauf la minocycline ou toutes les tétracyclines y compris la minocycline. Initialement, le gène cassette cmlA , inclus dans le transposon Tn 1696, code également pour un système d'efflux spécifique concernant le chloramphénicol et le florfénicol est décrit chez Pseudomonas aeruginosa. Par la suite, de nombreux autres gènes homologues de cmlA , portés par des transposons ou des plasmides, ont été identifiés chez diverses bactéries Entérobactéries. Ainsi, la mutation des gènes marRAB d'Escherichia coli entraîne une résistance aux quinolones, au chloramphénicol et aux tétracyclines et Chez Klebsiella pneumoniae c'est le gène acrRp qui code pour un système de pompe à efflux (SEKHRI-ARAFA, 2011). 3.9. Prévention et surveillance Face à l'augmentation de la prévalence des bactéries pathogènes résistantes aux antibiotiques, la mise en place de réseaux qui permettent de suivre cette évolution est indispensable. Ces réseaux permettent la détection de nouveaux phénotypes de résistance et l'étude des mécanismes correspondants, ainsi qu'une meilleure connaissance globale de l'antibiorésistance et donc une meilleure orientation thérapeutique (FOFANA ; 2004). Depuis fin 2010 surtout, de nombreuses mesures de lutte contre l’antibiorésistance ont été mises en place soit volontairement par la profession, soit suite à de nouvelles réglementations, preuve d’une réelle prise de conscience du risque et d’une volonté d’améliorer la situation (PONCET, 2013). Il est important d’intervenir afin de contrer la progression de la résistance des bactéries pathogènes aux antibiotiques. La recherche incessante de nouveaux antibiotiques n’est pas la solution (SEKHRI-ARAFA, 2011). La prévention repose aussi sur des gestes simples, comme le lavage des mains, le personnel médical est un important vecteur de microorganismes pathogènes potentiellement résistants. La prévention doit aussi se faire auprès du public. Toute fièvre n'est pas infectieuse, toute infection n'est pas bactérienne, toute infection 28 Chapitre III : Antibiorésistance chez les Entérobactéries bactérienne ne justifie pas obligatoirement un traitement antibiotique et dans beaucoup de cas, le traitement antibiotique n'est pas une urgence, les antibiotiques ne sont pas le traitement symptomatique et systématique de la fièvre (AFSSPS, 2002). Les principaux éléments d’un plan d’action global pour la prévention et le contrôle de la résistance microbienne : Surveillance C’est la surveillance qui permet le mieux de prendre les décisions appropriées en fonction de l’ampleur du problème. Dans le cas de la résistance microbienne, la surveillance clinique et microbiologique permet de mieux définir l’ampleur et la nature du problème (YVES, 2002). Politique de prescription appropriée L’éducation du grand public et des médecins sur la pertinence d’une ordonnance d’antibiotiques, permet également de réduire la « pression d’adaptation » des microorganismes. L’objectif ici est surtout d’augmenter la pertinence de la prescription. Cela implique la révision périodique des protocoles de traitement et de prophylaxie (YVES, 2002). Amélioration des méthodes diagnostiques La prévention des prescriptions inutiles d’antibiotiques passe par l’accès à des méthodes diagnostiques rapides et fiables. On estime que ces ordonnances inutiles pourraient être réduites du tiers (YVES, 2002). Certaines applications médicales des nanotechnologies c'est-à-dire des technologies grâce auxquelles, on peut fabriquer des particules extrêmement petites (nanoparticules), qui pourront délivrer avec précision des médicaments directement dans les tissus ou les cellules que les médicaments classiques ne peuvent pas facilement atteindre. L’utilisation de composés photodynamiques, des colorants (porphyrines, phénothiazinium) et des composés fluorescents qui en présence de lumière, se comportent comme des agents phototoxiques dont l’action antibactérienne, antivirale et anticancéreuse a été démontrée récemment (SEKHRI-ARAFA, 2011). Réduction de la transmission À défaut de pouvoir empêcher l’émergence de moyens d’adaptation chez les micro organismes, il est au moins possible de réduire leur diffusion par l’utilisation des méthodes de prévention adjuvantes que sont les barrières à la transmission, dont la plus importante est le lavage des mains, mais aussi le port de masques, de gants, de blouses…etc (YVES, 2002). Politique de prévention et de contrôle des infections dans les milieux de soins Les milieux de soins, de par la nature des problèmes à traiter, la vulnérabilité, le nombre et la concentration des malades, sont des terrains particulièrement propices à l’émergence et à la diffusion de micro-organismes résistants, non seulement dans le milieu même, mais également dans la collectivité (YVES, 2002). Utilisation rationnelle des antibiotiques en agriculture On reconnaît bien maintenant la contribution de l’usage d’antibiotiques dans la production agricole à l’émergence de résistances dans l’écologie microbienne. Cette question est de plus en plus prise en compte dans les politiques agricoles (YVES, 2002). Recherche et développement Tout plan d’action doit inclure la recherche et le développement. La recherche devra permettre d’étudier les problèmes mis en évidence par le système de surveillance. Le développement s’orientera vers la mise en marché de nouveaux antibiotiques, de nouvelles méthodes diagnostiques, ou vers de nouvelles avenues préventives (YVES, 2002). 29 Conclusion Conclusion Les Entérobactéries c’est une famille très vaste et très diverse morphologiquement, biochimiquement et génétiquement, ce qui la confère d’être parmi les premières familles qui résiste aux antibiotiques. D’autre part, les mécanismes de transfert des gènes quelque soit horizontale ou verticale entre les souches de même espèce ou bien de différent espèces, jouent un rôle très important dans l’émergence et la dissémination de cette résistance. Les Entérobactéries possèdent une résistance naturelle aux β-lactamines tel que la pénicilline A et M, les carbapénèmes, les C1G et même les C3G…etc, ces derniers sont codés au niveau chromosomique et résultent d’une mutation. La résistance acquise est observée aussi chez les Entérobactéries, elle les permet de résister aux nouveaux antibiotiques par l’acquisition des nouveaux gènes extra-chromosomiques plasmidiques ou éléments transmissibles. Les mécanismes de résistance chez les Enterobacteriaceae se différent selon la classe d’antibiotique et selon l’espèce, généralement ils sont résistés par l’inactivation de l’antibiotique par enzyme, ce mécanisme est très répondu, il est presque présent chez touts les espèces d’Entérobactéries. Comme elles résistent par modification de cible, par diminution de la perméabilité ou par excrétion de l’antibiotique par un mécanisme d’efflux. La dissémination des souches pathogènes résistantes d’Entérobactéries et l’utilisation inadéquate des antibiotiques est un phénomène dynamique, évolutif dans le temps et difficilement réversible et constitue un enjeu de santé publique. En effet, la conservation de l’efficacité des antibiotiques est compromise, ce qui risque d’engendrer le retour à l’ère antérieure à la découverte des antibiotiques. Malgré l’ennemi est bien organisé et a une capacité d’adaptation séculaire, et la lutte ressemblera davantage à une guérilla de longue haleine qu’à une guerre classique et décisive, le seul espoir est de suivre des plans d’action où on essaye de retarder cette dissémination, de préserver l’efficacité d’antibiotiques pour les générations futures et de contrôler leurs utilisation en agriculture et en élevage, sans négliger les mesures d’hygiène simples, comme le lavage des mains, qui peuvent réduire la transmission des bactéries. 30 Références bibliographiques Références bibliographiques Références bibliographiques 1. AFSSAPS. 2002. Rapport de l’Agence Française de Sécurité Sanitaire et Produit de Santé. 2. AFSSAPS. 2005. 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Ils constituent un systèmes de capture et d’expression de gènes sous forme de cassettes, qui sont des éléments mobiles capables d’être intégrés ou excisés par un mécanisme de recombinaison spécifique de site médié par une intégrase. Multirésistance bactérienne est quant à elle résulte d’une accumulation de résistance à un nombre important d’antibiotiques appartenant à des familles différentes et donc ayant des mécanismes d’actions très divers. Niveau de résistance : est définit comme le rapport de CMI pour une bactérie résistante est celle de la bactérie sensible appartenant à la même espèce. On parle de bas niveau de résistance si la croissance est stoppée par de faibles concentrations d'antibiotique et de haut niveau de résistance si de fortes concentrations sont nécessaires. Ostéomyélite : Inflammation suppurative de l’os et de la moelle osseuse. Résistance croisée : entre deux antibiotiques est définie par même mécanisme de résistance, c’est en générale le cas de deux antibiotique de la même famille. Sels Biliaires : Sels de sodium et de potassium des acides biliaires, présents dans la bile. Ils favorisent l’émulsion des graisses et ils solubilisent les acides gras dont ils facilitent l’absorption à travers la muqueuse intestinale. Spondylodiscite : Inflammation conjointe d’une vertèbre et des disques intervertébraux sus ou sous-jacents. Transposition : est un phénomène consiste à additionner des gènes de taille définie au sein du chromosome bactérien ou du plasmide. Transposon : c’est un gène mobile, appelé gène « sautant », codant pour une résistance aux antibiotiques et qui possède des séquences d’insertion, ce qui lui confère la capacité de se transférer d’un plasmide vers un autre plasmide. Il ne peut pas se répliquer mais code pour des éléments de transposition. Résumé Les Enterobacteriaceae sont l’une des grandes familles, elle est découvert depuis plus d’une centaine d’années. L’antibiorésistance chez ces bactéries est la première a observé et ne cesse à évoluer et à continuer. Notre étude bibliographique consiste à étudier ce phénomène chez les Entérobactéries son origine, son dissémination et le plus important le support génétique et les mécanismes biochimiques qui jouent un rôle très important dans ce phénomène là. Les Entérobactéries sont responsables de plusieurs maladies pathogènes alors, leur résistance aux antibiotiques permet à ces maladies d’être plus néfastes et plus dangereuses, ce qui implique des modes d’actions de prescription et de surveillance doivent être appliqué. Mots clés : Entérobactéries, antibiorésistance, antibiotiques, surveillance. Abstract Enterobacteriaceae are one of the biggest families, it was founded about more than hundred years. Antibioresistance is in the first time remarked on these bacteria and it still evolves and develops. O3ur research bibliographic focuses on the study of this phenomenon in Enterobacteria to know its origin, its dissemination and the most important the genetic support and biochemical mechanisms which play a significant role in this phenomenon. Enterobacteria are the responsible of many pathogenic diseases. So, its resistance against the antibiotics makes these diseases more dangerous and fatal which imply the actions modes of prescription and the monitoring must be applied. Key words: Enterobactria, antibioresistance, antibiotics, monitoring ملخص ٍقبوٍت اىَضبداث اىحٍىٌت.ً امخشفج ٍنر أمثس ٍن ٍئت عب، هً ٍن أمبس عبئالث اىبنخٍسٌبEnterobacteriaceae حسحنز دزاسخنب اىنظسٌت عيى دزاست هره اىظبهسة.ىىحظج أوه ٍسة عند هرا اىنىع ٍن اىبنخٍسٌب وال حزاه فً حطىز ٍسخَس و ٍعسفت أسبببهب و طسق إنخشبزهب و األهٌ ٍن ذىل اىعىاٍو اىجٍنٍت و اىنٍٍَبئٍت اىخً حؤدي إىىEntérobactéries عند و ٍقبوٍخهب ىيَضبداث اىحٍىٌت حجعو هره األٍساض، هً اىَسؤوىت عن اىعدٌد ٍن األٍساضEntérobactéries .ظهىزهب .أمثس خطىزة و فخنب و هرا ٍب ٌسخيزً خطت عَو ىضبظ إسخهالك اىَضبداث اىحًوٌت و اىىقبٌت ٍن هره اىظبهسة . اىىقبٌت، اىَضبداث اىحٍىٌت، ٍقبوٍت اىَضبداث اىحٍىٌت، Entérobactéries :الكلمات المفتاحية