la strategie de lisbonne et les aides d`etat

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UNIVERSITE PARIS I PANTHEON-SORBONNE
Master 2 recherche droit public économique
Monsieur le Professeur Gérard Marcou
LA STRATEGIE DE LISBONNE ET LES
AIDES D’ETAT
Directeur de mémoire : Maître Christophe Barthélémy
Soutenu par Anne Wuillèmme
Année universitaire 2005-2006
2
SOMMAIRE
INTRODUCTION
I.
4
LES OBJECTIFS ANNONCES DE LA STRATEGIE DE LISBONNE : VERS
UNE REMISE EN CAUSE DE L’ANCIENNE POLITIQUE DES AIDES D’ETAT.
14
A. LA STRATEGIE DE LISBONNE : UN BILAN A MI- PARCOURS.
14
B. UNE NECESSAIRE REMISE EN CAUSE DES AIDES D’ETAT A L’AUNE DE LA STRATEGIE DE
LISBONNE
37
II.
DEUX POLITIQUES DESORMAIS LIEES PAR UN OBJECTIF COMMUN :
RELANCER L’ECONOMIE DE L’UNION EUROPEENNE.
63
A. LA CONCENTRATION DE LA POLITIQUE DES AIDES D’ETAT SUR LES OBJECTIFS DE LA
STRATEGIE DE LISBONNE.
63
B. DANS LE CADRE DE LA MONDIALISATION DES ECHANGES, QUELLE EST LA MARGE DE
MANŒUVRE DE L’UNION EUROPEENNE ?
90
BIBLIOGRAPHIE
103
INTRODUCTION
« La faute, cher Brutus, n’est pas à chercher dans les étoiles – mais en nous-mêmes »
William Shakespeare, Jules César1
La volonté des Etats d’intervenir dans une économie de marché n’est pas un
phénomène propre au XXIème siècle.
Sans remonter jusqu’à Colbert, les économistes du XIXème siècle, justifiaient l’intervention
des pouvoirs publics dans une économie de marché, par les défaillances du marché, à l’instar
d’Adam Smith « Père » du libéralisme économique qui par le biais de la «main invisible de la
concurrence assurant l’intérêt de tous », démontre que le marché se régule de lui-même.
Cependant, l’on peut rétorquer que dans certains cas l’intervention des Etats peut améliorer le
fonctionnement des marchés, en identifiant et en évaluant ses défaillances ou imperfections.
La défaillance du marché peut se définir comme une situation dans laquelle le marché, d’un
point de vue économique ne fonctionne pas de manière efficiente à cause : des externalités,
des biens publics, de l’asymétrie d’information, des problèmes de coordination, du pouvoir de
marché.
Comme le souligne le Professeur Hertzog 2 : « le sens moderne d’aide accordée par le
gouvernement ou par un organisme de droit public n’apparaît qu’à la fin du XVIIIème siècle.
Pour Littré, les subventions sont des secours d’argent ou des fonds accordés par le
gouvernement pour soutenir une entreprise »
Ce type d’aide s’est considérablement développé dans un premier temps au sortir de la
première guerre mondiale, afin de reconstruire les pays dévastés et soutenir les entreprises
lors de la crise des années 30, et dans un second temps à la fin de la seconde guerre mondiale.
1
W. SHAKESPEARE, « Jules César », in Samuelson/ Nordhaus « Economie », 16ème edition, économica, p
432
2
R. HERTZOG, « linéament d’une théorie des subventions », in J-M. Communier « le droit communautaire des
aides d’Etat », LGDJ coll systèmes, 2000, p 5
4
Cette forme d’interventionnisme de l’Etat s’est diversifiée et concentrée au moins au début
sur le secteur industriel afin de rendre les entreprises plus compétitives sur le marché mondial.
Or, on a pu constater que l’interventionnisme étatique sous la forme d’aides aux
entreprises en même temps qu’il se développait, a été remis en cause et ce sous l’impulsion du
General Accord on Tariffs and trade (GATT) et par le traité instituant la Communauté
Economique Européenne (CEE).
La logique de la construction communautaire est d’obédience libérale en s’inspirant du
principe « d’une économie de marché ouverte où la concurrence est libre ».
Par conséquent, la mise en place de règles de concurrence dans l’économie de marché est un
préalable au marché unique, qui lui permet en autre, la libre circulation des marchandises, des
capitaux et des personnes, et enfin la libre prestation de services.
La politique de concurrence ainsi mise en place dans le Traité de Rome, est « garante » des
règles du jeu du marché comme : l’égalité d’accès au marché, la non discrimination, la
récompense des entreprises selon leurs mérites face au marché, l’interdiction d’ententes et
d’abus de position dominante3.
Les objectifs de la politique de concurrence s’avèrent par conséquent particulièrement
ambitieux. En effet, elle doit contribuer et ce de manière large, à la réalisation et à la
continuité du marché intérieur, et doit « concourir à des objectifs aussi divers que le
développement équilibré des activités économiques, la cohésion économique et sociale ou la
protection de l’environnement »4.
Le but étant par le biais de cette politique de concurrence de dépasser les particularismes
nationaux afin de réaliser pour le mieux le marché intérieur.
3
T. KLEINER, A. ALEXIS, « politique des aides d’Etat : une analyse économique plus fine au service de
l’intérêt commun », Concurrences, n° 4, 2005, p. 45
4
T. KLEINER, A. ALEXIS, « politique des aides d’Etat : une analyse économique plus fine au service de
l’intérêt commun », Concurrences, n° 4, 2005, p. 46
5
Dans ce contexte d’une économie ouverte, les Etats ne doivent plus intervenir dans
l’économie via des aides d’Etat, car ces dernières procurent des avantages aux entreprises
bénéficiaires, et par conséquent sont sources de distorsions de concurrence et sont donc
contraires au principe d’équité entre les entreprises parties au marché.
En effet, selon la logique économique ainsi retenue, l’avantage procuré résultant de l’aide
d’Etat est la conséquence d’une décision étatique et non le résultat d’un mérite de l’entreprise
sur le marché.
Ainsi comme le montre Alain Alexis et Thibault Kleiner 5 « on peut donc légitimement se
demander si le fait pour un Etat de favoriser certaines de ses entreprises avec les aides
massives n’est pas économiquement plus important que le fonctionnement de tel accord entre
entreprises ou tel système de distribution sélective ».
Les aides d’Etat sont des aides attribuées par les Etats en vertu de leur pouvoir
discrétionnaire quelque soit l’encadrement communautaire. Elles sont au cœur de l’économie
publique en tant que forme d’interventionnisme public revêtant de multiples formes
(subventions, fiscalités préférentielles…).6
Il y a par le biais des aides d’Etat, une volonté certaine d’améliorer l’équité en redistribuant
les richesses, dans la mesure où ces aides sont justifiées par des objectifs qui ne sont pas
exclusivement économiques. En effet, les aides d’Etats peuvent, d’une part corriger des
résultats inéquitables en modifiant les incitations pour les acteurs économiques, et d’autre part
contribuer à améliorer l’efficacité du marché, quand ce dernier est victime d’une défaillance.
Par ailleurs, la politique d’aides d’Etat a des conséquences non négligeables au niveau du
commerce international.
En conséquence de quoi, les aides d’Etats permettent aux Etats de poursuivre des objectifs de
politique nationale, ce qui justifie un contrôle par les autorités communautaires.
5
Op cit n°4
V. RABASSA, « quelle place pour l’analyse économique des aides d’Etats ?(1) », colloque Concurrences « la
reforme de la politique des aides d’Etats » 8 décembre 2005 Paris, concurrences, n°1, 2006, p65.
6
6
Les aides d’Etat apparaissent aussi comme un enjeu politique : en effet, la politique des aides
se traduit aussi par une concurrence accrue entre les Etats pour octroyer des aides, mais aussi
entre les Etats membres et l’Union dans l’octroi de ses aides, dans la mesure où la « politique
européenne en matière d’aides d’Etat pourrait être interprétée comme traduisant la volonté
de la Commission de substituer ses propres aides aux aides nationales.7 »
Le contrôle des aides d’Etat est rendu nécessaire du fait de leur possible entrave à la libre
concurrence en empêchant la répartition la plus efficace des ressources et en menaçant l’unité
du marché intérieur. De plus, dans le cadre du contrôle des aides aux entreprises en difficultés,
la Commission peut s’interroger les bienfaits de ce type d’aides sur le long terme.
Le droit des aides d’Etat est réglementé par les articles 87 CE à 89 CE, le principe général est
celui de l’interdiction des aides d’Etat posé à l’article 87CE. Ces articles ont servi de base
juridique à l’intervention de la Commission. En effet, au terme de l’article 88CE, la
Commission se voit attribuer un rôle central dans le domaine du contrôle des aides.
Dans le cadre du contrôle des aides, la Commission est en mesure de contrôler les politiques
nationales dès lors qu’elles prennent la forme de politique d’aide, rôle d’autant plus facilité
par la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) qui a une conception large des
aides d’Etat8.
Le principe posé à l’article 87 §1 CE est celui de la prohibition de aides d’Etat : « sauf
dérogation prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la
mesure où elles affectent les échanges, les aides accordées par les Etats ou au moyen de
ressources d’Etat sous quelques formes que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la
concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions » mais des
dérogation au principe sont possibles elles sont inscrites au paragraphe 2 et 3 de l’article 87.
La Commission peut donc autoriser des aides d’Etat. Elle a donc dans ce contexte une
compétence exclusive pour l’appréciation de la compatibilité de l’aide et les conditions de la
procédure de contrôle sont posées par l’article 88 CE.
7
L VOGEL « introduction au colloque : le nouvel essor des aides d’Etat en droit de la concurrence », ateliers
de la concurrence, revue de la concurrence te de la consommation, n°133, mai-juin 2003, p 6
8
J-Y. CHEROT, « les aides d’Etat dans les communautés européennes » économica, 1998, p. 6
7
En effet, toute aide est interdite par principe, sauf si l’Etat arrive à démontrer qu’elle répond à
un objectif d’intérêt commun défini dans le Traité. Par conséquent, l’appréciation des aides
d’Etat est l’objet d’une négociation constante entre la Commission et les Etats membres.
Dans ce cadre, le contrôle exclusif des aides d’Etat par la Commission s’avère d’autant plus
nécessaire que le contrôle des aides ne doit pas se limiter à la sphère de l’entreprise, mais doit,
de manière plus vaste s’étendre à l’ensemble des Etats membres.
En effet, les aides d’Etat peuvent avoir potentiellement des effets négatifs sur les autres Etats
membres, par exemple : « déplacement d’activité économique vers cet Etat, favoritisme au
détriment des entreprises nationales, au détriment des entrants des autres Etats, hausses
potentielles de prix dans les Etats voisins pour compenser les prix artificiellement bas
découlant des aides dans un autre Etat membre…9 ».
Par conséquent, il est du devoir de la Commission de veiller à ce que les aides ne nuisent pas
à l’intérêt général communautaire.
Il n’en demeure pas moins, que la Commission n’est pas compétente pour juger de
l’opportunité des choix politiques des Etats membres, elle doit se contenter d’examiner la
compatibilité des aides au regard des articles 87 CE à 89 CE.
Une spécificité des aides d’Etat est que d’un point de vue juridique, les textes qui la fondent
sont suffisamment imprécis pour en autoriser diverses interprétations. L’article 87 CE pose
quatre conditions cumulatives afin de qualifier si une aide est une aide d’Etat. Mais, la nature
du système des aides s’est avec le temps complexifié et cela a eue pour principale
conséquence de rendre l’application des critères de plus en plus difficile. Au fil des diverses
jurisprudences, la notion d’aide d’Etat s’est peu à peu vidée de son sens.
Cependant depuis les années 2000, il y a une volonté affichée de la part de la Commission de
« poursuivre les efforts visant à favoriser la concurrence et à réduire le niveau général des
aides d’Etat », ce qui a pour effet, de redéfinir l’aide d’Etat.
9
T. KLEINER, A. ALEXIS, « politique des aides d’Etat : une analyse économique plus fine au service de
l’intérêt commun », Concurrences, n° 4, 2005, p. 47
8
C’est ainsi que nous sommes passés d’une définition juridique de l’aide à une définition
économique : ainsi, si l’on retient une définition économique, l’on peut dire que quelques
soient les conditions juridiques de l’intervention publique, celle-ci constitue une aide dès lors
qu’elle a produit certains effets que le marché.
l’Union Européenne doit faire face actuellement à de multiples problèmes : une
croissance économique faible, un élargissement accru, une baisse de la compétitivité et de
l’attractivité de l’Union, des contraintes budgétaires fortes pesant sur les Etats membres ainsi
qu’une concurrence « féroce » au niveau international. Il apparaît donc nécessaire, de
réfléchir à une meilleure utilisation et répartition des deniers publics. De repenser, d’une part
aux différents objectifs communs en matière d’intervention des Etats dans l’Union, et d’autre
part à l’attractivité européenne et par extension le système des aides d’Etat. De plus, il
apparaît nécessaire de donner un nouvel élan aux politiques déjà mises en place.
Il semblerait, que les autorités communautaires privilégient, la relance du pacte de
stabilité et de croissance d’une part, et celle de la stratégie de Lisbonne d’autre part.
Les axes essentiels de cette relance sont : « connaissance et innovation en tant que moteur
d’une croissance durable, un espace attrayant pour investir et travailler, la croissance et
l’emploi au service de la cohésion sociale10 ».
Le pacte de Stabilité et de croissance est le fruit d’un accord politique constaté lors du
Conseil européen d’Amsterdam en juin 1997. Il a pour buts : d’assurer une gestion saine des
finances publiques au sein de l’Union, dans l’intention d’éviter qu’une politique budgétaire
moins rigoureuse d’un Etat membre ne pénalise les autres Etats à travers les taux d’intérêts.
Ainsi que la confiance dans la stabilité économique, et de « favoriser une convergence
soutenue et durable des économies des Etats membres de la zone Euro11 ».
La Commission a dans ce cas un rôle de surveillance de la mise en œuvre du pacte de
stabilité et de croissance. L’année 2005 a été synonyme de relance de ce pacte de stabilité, en
prenant plus en compte l’évolution économique.
10
11
Rapport Général sur l’activité de l’Union Européenne 2005
Op cit n°8
9
Cependant, il a été décidé de conserver, la valeur de référence de 3% pour le ratio entre le
déficit et le PIB, et aussi la valeur de 60% qui est celle du rapport entre la dette et le PIB.
Cette même année, le Conseil européen de printemps a décidé de relancer le processus
de Lisbonne.
Le postulat de base était le suivant : à l’aube du troisième millénaire, l’Europe est à la
« croisée des chemins 12 », elle doit faire face tant à des défis intérieurs qu’à des défis
extérieurs tels que le vieillissement de la population qui « menace » aussi bien le dynamisme
de l’économie que les dépenses publiques. Elle doit aussi faire face à l’accélération du rythme
de la mondialisation qui a pour conséquence de soumettre l’économie de l’union à une
concurrence étrangère de plus en plus féroce.
En l’an 2000, les indicateurs économiques étaient très optimistes quant au taux de croissance
de l’économie européenne et l’on a pu ainsi envisager une politique stratégique, globale et de
long terme.
Il a été décidé de mettre en place des politiques favorables à la connaissance, à l’éducation et
aux compétences dans l’intention de renforcer la compétitivité de l’Union Européenne et son
développement durable. Tout ceci devant permettre de rattraper les Etats-Unis, tout en
garantissant la cohésion sociale et territoriale.
La stratégie de Lisbonne est donc une politique intégrée, cohérente à l’échelle de l’Union
Européenne, politique se focalisant sur certains secteurs. Elle repose sur trois piliers :
économique, sociale ainsi que l’emploi.
Cette politique vise pour la prochaine décennie, à augmenter les taux de croissance et
d’emploi dans l’Union Européenne afin d’atteindre son objectif de viabilité économique,
sociale et environnementale. Comme l’atteste les conclusions de la session du Conseil
européen de Lisbonne de 2000 :
12
H. REICHENBACH, « permettre à l’Europe de renouer avec la croissance et l’emploi : présentation de la
stratégie de Lisbonne/perspectives futures sur la base des propositions de la Commission », les petites affiches :
les dossiers de l’Europe « Lisbonne : où en est-on ? », 19 décembre 2005, n° 251, p 12
10
« Le conseil européen a fixé un objectif stratégique fort à atteindre au cours des dix années à
venir : promouvoir l’Union Européenne au rang d’économie fondée sur la connaissance la
plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d’une croissance économique
durable accompagnée d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus
grande cohésion sociale13 ».
Cependant c’est un document qui n’a pas de valeur juridique si ce n’est que d’inciter les Etats
membres à suivre les orientations de cette stratégie, de plus son non respect n’entraîne pas de
sanctions juridiques sur le plan communautaire.
La mise en œuvre de cette stratégie reposait principalement sur deux piliers : la
méthode ouverte de coordination (MOC), et sur une stratégie financière. Cette stratégie va
donc pour l’essentiel utiliser « des outils incitatifs pour favoriser la convergence souhaitée14 ».
Cependant, cinq ans après la mise en place de cette stratégie, il semble que l’on puisse
affirmer qu’elle n’a pas répondu aux attentes fixées. Le rapport présenté par l’ancien Premier
Ministre néerlandais Wim KOK présenté au conseil en novembre 2004, fait « l’inventaire »
des nombreux disfonctionnement qui ont conduit à l’échec partiel de la stratégie à miparcours.
A l’aube de l’année 2005, il semble plus que nécessaire de la réformer. Or, la
Commission doit tenir compte des échecs, des piliers politique (échec de la MOC), et
économique. Elle va donc tenter de relancer la stratégie en s’appuyant sur les aides d’Etat. Ce
n’est pas un concept nouveau, mais il bénéficie de multiples avantages : c’est une notion qui
est en évolution, en effet sa nouvelle définition prend plus en compte l’économie
qu’auparavant.
La Commission en a le monopole par le biais de son pouvoir de contrôle, et cela permet de
contrôler les initiatives des Etats tout en leurs laissant une certaine marge de manoeuvre dans
leurs choix.
13
Conclusions de la Présidence, Conseil européen de Lisbonne, 23 et 24 mars 2000, doc/00/8
P. AGHION, E. COHEN, J. PISANI-FERRY, « politique économique et croissance en Europe », Conseil
d’Analyse Economique, la documentation française, mars 2006, p 79
14
11
Le 22 mars 2005, le Conseil de printemps a adopté un nouveau programme afin de relancer la
stratégie de Lisbonne. Cette nouvelle relance a le mérite, de se concentrer sur des objectifs
pour lesquels elle a des prérogatives. Ainsi, un nouveau partenariat est défini avec les Etats,
ces derniers doivent préparer des « programmes nationaux de réformes », qui doivent les
amener à s’investir pour la bonne marche de ce nouveau programme. Ce plan s’attache donc à
relancer l’économie en rendant le territoire européen attractif. Il a également pour but de
mettre en place une politique cohérente en matière de recherche et développement, afin de
faciliter l’innovation, et de créer base industrielle solide. Il s’appuie sur le nouveau plan
d’action des aides d’Etat (PAAE), qui a pour objectif de réformer la politique des aides d’Etat,
et va en modifier la réglementation. Cette nouvelle réforme se fonde sur quatre idées fortes :
Faire des aides moins nombreuses et mieux ciblées, avoir une analyse économique plus fine
dans le cadre du contrôle des aides d’Etat ainsi que de mettre en place des procédures plus
efficaces et une amélioration de la prévisibilité et de la transparence. Enfin, réaliser un partage
des responsabilités entre la Commission et les Etats membres.
La Commission recentre sa politique sur l’économie de la connaissance, en mettant en avant
l’innovation comme moteur de l’économie. On peut penser que la Commission se base sur les
concepts économiques développés par Schumpeter : en effet, l’économiste autrichien décrit
l’alternance des cycles de prospérité et de dépression en les justifiants par l’innovation : les
innovations en suscitant d‘autres déclenchent l’expansion économique, puis dans un second
temps, ayant épuisé les effets, l’expansion s’éteint une remise en ordre monétaire intervient,
c’est la crise suivie d’une dépression.
Une des difficultés majeures posées par la stratégie de Lisbonne est relative à son financement.
Une autre tout aussi importante est celle de la répartition des compétences entre la
Commission et les Etats membres dans la mise en place de cette stratégie. Les aides d’Etat
apparaissent comme l’outil le plus efficace pour contraindre les Etats membres à s’impliquer
dans la stratégie de Lisbonne. Or n’y t il pas contradiction entre un Traité qui prône le
principe d’incompatibilité des aides d’Etat, et une politique de la Commission qui utilise les
aides comme moyen de relance ?
12
Cependant, le levier des aides d’Etat est un monopole de la Commission, elle n’a donc pas
besoin de l’aval du Conseil pour déterminer les modalités de sa politique, elle a ainsi une plus
grande marge de manœuvre. De même, en utilisant ce levier parmi tant d’autres, la
Commission doit revoir sa politique des aides en particulier ses encadrements pour qu’elles
deviennent un instrument d’application de la stratégie de Lisbonne. On réoriente ainsi la
dépense publique.
Dans un contexte de concurrence mondiale, l’union européenne est à la recherche d’un
nouveau souffle. Elle doit mener une politique de relance en cohérence avec sa philosophie
économique, tenir compte des sensibilités nationales et négocier dans le cadre de
l’organisation mondiale du commerce. Cette stratégie marque la volonté de mettre en place
des réformes structurelles profondes et un embryon de politique industrielle commune.
Dans quelle mesure les objectifs affichés de la stratégie de Lisbonne vont influencer la
politique des aides d’Etat et quelles en seront les conséquences ?
La politique des aides d’Etat, telle que menée jusqu’alors par la Commission va être remise en
cause par la stratégie de Lisbonne (I), afin de devenir un outil plus performant pour atteindre
l’objectif final : relancer l’économie de l’Union Européenne (II).
13
I. Les objectifs annoncés de la stratégie de Lisbonne : vers une remise en
cause de l’ancienne politique des aides d’Etat.
Lors de sa session extraordinaire de Lisbonne en mars 2000, le Conseil européen s’est
fixé un objectif stratégique fort à atteindre pour les dix années à venir : faire de l’économie
européenne une économie basée sur la connaissance la plus compétitive et dynamique du
monde. Cinq années plus tard le constat est plutôt mitigé, les objectifs fixés n’ont pas été
atteints, et le dispositif mis en place basé sur l’incitation n’a pas été à la hauteur de ses
ambitions (A). Les aides d’Etat dont les règles sont en pleine évolution ces dernières années
sont apparues comme l’un des instruments, permettant d’encourager, les Etats membres à
contribuer à la réalisation des objectifs de la stratégie de Lisbonne (B).
A. La stratégie de Lisbonne : un bilan à mi- parcours.
L’union européenne s’est fixée à l’aube du nouveau millénaire un objectif stratégique
ambitieux. Lors du sommet de Lisbonne préparé par la présidence portugaise les 23 et 24mars,
les Etats membres ont donc adopté une nouvelle stratégie pour les dix prochaines années :
devenir l’économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde15.
Cinq années après, un bilan est élaboré (1) qui met en évidence que la stratégie avait une
faille : « la très grande majorité des actions à entreprendre ne reposait que sur la bonne
volonté des Etats, l’Union n’ayant aucune compétence dans la plupart des domaines
concernés (éducation, formation, effort de recherche, systèmes sociaux, marché du
travail …16 » (2).
15
Conclusions de la Présidence, Conseil européen de Lisbonne, 23 et 24 mars 2000, point n°5
E. FILIBERTI, J. QUATREMER, « éditorial », petites affiches les dossiers de l’Europe : Lisbonne où en eston ? , 19 décembre 2005, n° 251, p 3
16
14
1. La stratégie de Lisbonne : un bilan à mi parcours
Après avoir rappeler dans quelles conditions et pour quelles finalités cette stratégie a été mise
en place (a), le bilan organisé en 2004, permet de comprendre quelles ont été les raisons de
l’échec et comment y remédier (b).
a) Historique de la stratégie de Lisbonne
Cette stratégie est le résultat d’un long processus de réflexions intracommunautaires,
dont le but est de poursuivre l’intégration économique par le bais de l’achèvement du marché
intérieur, et de mettre en place une stratégie coordonnée de l’emploi.
Le point de départ de la stratégie européenne de l’emploi peut être associé au sommet d’Essen
de décembre 1994 17 qui est la première orientation au niveau communautaire pour une
coordination des politiques nationales de l’emploi, en se basant sur les résultats du livre blanc
sur la croissance, la compétitivité et l’emploi. L’année suivante est marquée par la mise en
place lors du Conseil de nouveau à Essen, de la première stratégie coordonnée de l’emploi au
niveau européen. A ce titre les Etats membres doivent préparer des plans nationaux
pluriannuels dans lesquels, ils doivent intégrer les cinq axes prioritaires définis par le Conseil :
« promouvoir les investissements dans le domaine de la formation professionnelle, augmenter
l’intensité de croissance de l’emploi, réduire les coûts du travail indirects surtout pour les
travailleurs peu qualifiés, améliorer l’efficacité des politiques de l’emploi, mettre en œuvre
des mesures pour les groupes défavorisés (jeunes, chômeurs de longue durée…) ». Cependant
il n’y pas de réelle obligation pour les Etats membres à intégrer (dans leurs politiques
nationales) les cinq axes prioritaires, en partie parce qu’il n’y a pas de base juridique contenue
à ce sujet dans le traité.
Le Traité d’Amsterdam marque une avancée sur ce sujet. En effet, les Etats membres
confèrent à la Communauté une nouvelle compétence : l’article 125 du Traité indique « une
stratégie coordonnée en faveur de l’emploi » dans le même temps on redéfinit la compétence
nationale en matière d’emploi, l’article 127 ajoute qu’il y a nécessité à atteindre un niveau
élevé d’emploi.
17
S. MARTINELLI, « politique sociale - l’Union européenne se donne une nouvelle priorité : miser sur une
société de pleine emploi », revue du droit de l’Union européenne, 3/2000, p 601.
15
En ce qui concerne la méthodologie, l’article 128 définit un mécanisme qui reprend le thème
de la convergence dans le domaine de l’Union Economique et Monétaire (UEM), qui a été
imposée par les critères de Maastricht et qui doit être de plus compatible avec les grandes
orientations de politique économique. Si les Etats n’ont pas mis en œuvre des plans nationaux,
la sanction n’est que morale, en effet le Conseil adresse à l’Etat membre fautif une
recommandation.
Les sommets suivants détermineront qu’il est urgent de mettre en place une politique concrète
européenne en matière d’emploi, afin de trouver une réponse au problème des 18 millions de
chômeurs en Europe.
Dans cette optique les Etats membres adoptent quatre piliers qui seront chaque année
confirmés dans le cadre des deux réunions du Conseil: l’employabilité, la culture d’entreprise,
l’adaptabilité, et l’égalité des chances.
Les sommets de Cardiff (1998), de Vienne (décembre 1998) et de Cologne de 1999 sont les
étapes successives qui mènent au pacte européen pour l’emploi, ce pacte a pour objectif final
de réduire et ce de manière durable le chômage. C’est lors de la Présidence allemande de
l’Union européenne, que le chancelier Gerhard Schröder a proposé un pacte ambitieux pour
l’emploi, ce dernier étant basé sur trois axes :
-
« L’interaction entre l’évolution des salaires et la politique monétaire, budgétaire et
financière à travers une relance du Dialogue Sociale macro-économique qui prévoit la
participation de la Commission européenne, du Conseil, des partenaires sociaux et
également – fait nouveau – de la Banque centrale européenne. Ce dialogue est destiné
à libérer une dynamique de croissance durable et non inflationniste et a été rebaptisé
« processus de Cologne ».
-
La poursuite et le développement de la stratégie coordonnée en faveur de l’emploi afin
de consolider le processus de Luxembourg (point de départ de la mise en place de la
stratégie d’Amsterdam et adoption des quatre piliers),
-
la promotion de réformes en profondeur des marchés du travail, des capitaux et des
produits. Il s’agit du processus de Cardiff18 ».
18
S. MARTINELLI, « politique sociale - l’Union européenne se donne une nouvelle priorité : miser sur une
16
L’Europe veut ainsi démontrer que la politique de l’emploi est devenue sa toute première
priorité, et que cette politique, qui est au cœur de toutes les politiques communautaires, a des
conséquences pour l’ensemble de ses politiques. A ce titre, d’autres politiques
communautaires vont être associées à la réalisation de cet objectif : la mis en place d’une
politique en faveur des PME, ainsi que d’une politique de fonds structurels axée sur l’objectif
de l’emploi. De même la politique des réseaux transfrontaliers ainsi que la politique de la
recherche et de la société de l’information et de l’éducation et formation professionnelle vont
y être associées.
Le document « Prodi » (à cette date l’Italien Romano Prodi était le Président de la
Commission). La Commission propose des pistes afin d’améliorer l’emploi et de profiter de
l’embellie économique : afin de miser sur une société de plein emploi, tout en garantissant la
durabilité du système européen de protection sociale, ainsi que de mettre en place des
politiques de lutte contre l’exclusion sociale 19 . Le point central de cette réforme est de
préparer la transition vers une société et une économie fondées sur la connaissance.
L’union européenne doit ainsi mettre en avant ses multiples atouts afin de réussir le passage
vers « la nouvelle économie » et ainsi concurrencer les Etats-Unis, mais elle doit aussi tenir
compte de sa principale faiblesse à savoir un chômage de masse touchant 10% de la
population active. D’après les travaux de la Commission, il y a six raisons qui expliquent
pourquoi ce taux est si élevé comparé au marché du travail nord américain :
-
la disparité entre le taux de travail masculin et le taux de travail féminin
-
un secteur tertiaire en net retard par rapport au secteur tertiaire américain
-
de profonds déséquilibres régionaux
-
le chômage structurel de longue durée
-
le manque de qualifications en particulier dans le secteur des nouvelles technologies
-
la disparité entre les classes d’âge, en effet la classe des 55-65 ans a un taux d’emploi
trop bas.
société de pleine emploi », revue du droit de l’Union européenne, 3/2000, p 607.
S. MARTINELLI, « politique sociale - l’Union européenne se donne une nouvelle priorité : miser sur une
société de pleine emploi », revue du droit de l’Union européenne, 3/2000, p 609.
19
17
Le rapport Prodi préconise de mettre l’accent sur six priorités afin de réformer et de relancer
l’économie européenne :
-
mettre en place l’initiative e-europe
-
relancer l’activité du marché intérieur dans les secteurs insuffisamment ouverts ou
libéralisés comme les marchés publics, les marchés de l’énergie ou des transports aériens
-
améliorer les services financiers
-
maintenir et développer l’esprit d’entreprise en stimulant les capacités d’innovation
des entreprises européennes
-
construire un véritable espace européen de la recherche
-
réexaminer les différents instruments financiers
Réunis à Lisbonne les 23 e 24 mars 2000, les représentants des Etats membres se sont
dotés d’un nouvel objectif stratégique pour les dix prochaines années : « devenir l’économie
de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable de croissance
économique durable accompagnée d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi
et d’une plus grande cohésion sociale ». Il y a principalement deux objectifs à atteindre : le
premier est de réduire le fossé qui sépare l’Europe des Etats-Unis en matière de recherche et
d’innovation, le second est d’arriver au « plein-emploi ».
La réalisation de cet objectif nécessite donc une stratégie globale qui vise à : préparer la
transition vers une société et une économie fondée sur la connaissance, au moyen de
politiques répondant mieux aux besoins de la société de l’information et de la recherche et
développement, ainsi que par l’accélération des réformes structurelles pour renforcer la
compétitivité et l’innovation et par l’achèvement du marché intérieur. Moderniser le modèle
social européen en investissant dans les ressources humaines et en luttant contre l’exclusion
sociale ; et enfin d’entretenir les conditions d’une évolution saine de l’économie et les
perspectives
de
croissance
favorables
en
dosant
judicieusement
les
politiques
macroéconomiques20.
20
Conseil Européen de Lisbonne, conclusions de la présidence, DOC/00/8, 23 et 24 mars 2000.
18
Pour réaliser ces objectifs, l’Union européenne s’engage dans un vaste programme de
réformes, afin de concilier le modèle économique prôné avec le modèle social européen tout
en tenant compte du développement durable, qui a eu, jusqu’à présent, des résultats mitigés.
Les responsables européens vont définir un agenda novateur afin de renouer avec la
croissance et l’emploi, car depuis quelques années, en plus des politiques communautaires
mises en place, l’Union européenne bénéficie de conditions économiques exceptionnelles. Le
sommet de Lisbonne est synonyme de coup d’accélérateur.
L’Union se base à l’époque sur des perspectives économiques plus que favorables, environ
3% de croissance sur l’ensemble de l’Union et est optimiste quant aux perspectives de
croissance sur les années à venir comme elle le précise « les perspectives macroéconomiques
qui s’offrent actuellement sont les meilleures que l’Union ait connues depuis une génération
(…) la croissance a repris de même que la création d’emplois21 ».
De plus, l’Union veut profiter de l’embellie économique tout en conservant ses
« fondamentaux », à savoir : une politique monétaire axée sur la stabilité et soutenue par des
politiques budgétaires saines dans un climat de modération salariale, l’inflation et les taux
d’intérêts sont peu élevés, des déficits publics réduits de manière remarquable et une balance
des paiements communautaires saine.
Il y a de plus comme le montre certains économistes22 une « véritable philosophie Lisbonne :
l’Europe, après s’être consacrée à la désinflation compétitive, à la stabilisation de l’économie,
au lancement de l’euro, doit traiter de nouveaux problèmes résumés dans le triptyque :
innovation, emploi, croissance que l’Europe découvre en l’an 2000, sous la pression des
succès américains ».
Cette stratégie est une réponse aux défis posés par la mondialisation, comme l’exacerbation
de la concurrence et délocalisation au profit de pays à bas coût de main d’œuvre, l’arrivée de
nouveaux pays disposant de hautes technologies capables de nous concurrencer sur le marché,
le creusement d’un fossé technologique entre l’Europe et les Etats-Unis.
21
Conseil Européen de Lisbonne, conclusions de la présidence, DOC/00/8, 23 et 24 mars 2000
P. AGHION, E. COHEN, J. PISANI-FERRY, « politique économique et croissance en Europe », Conseil
d’Analyse Economique, la documentation française, mars 2006, p 80
22
19
Afin de parvenir à ce but, la stratégie met en place un certain de nombres de moyens avec de
nouvelles orientations macroéconomiques, des programmes économiques sectoriels et
instaure une méthode nouvelle de coordination. L’Union européenne assigne donc un but à
l’économie et de nombreuses politiques communautaires y font référence. Comme le précise
l’auteur Marie-Annick Barthe « la stratégie est le prototype même de la grande machinerie
bureaucratique communautaire. Elle repose sur cinq engagements, déclinés en 28 objectifs et
120 sous objectifs, qui sont dotés de 117 indicateurs de suivi23 ».
On peut donc dénombrer les cinq engagements suivants que sont : de réaliser la société de la
connaissance, de faire aboutir le marché intérieur, tout en créant un environnement favorable
aux entrepreneurs. Mais aussi d’établir un marché du travail inclusif pour renforcer la
cohésion sociale, tout en travaillant à un avenir durable.
Cependant cette stratégie touche à des domaines qui sont de la compétence exclusive
des Etats, ce qui pose un problème de taille : comment faire coopérer les Etats membres ?
Dans cette optique, la Commission va mettre en place une nouvelle méthode de
coopération. Tout d’abord, il est intéressant de noter que les priorités inscrites dans la
stratégie devront être obligatoirement poursuivies par les différentes présidences, ce qui
renforce naturellement le rôle de la présidence, mais aussi à première vue celui du Conseil, en
particulier dans les domaines économique et social et, qui en plus doit assurer à chaque
réunion un suivi de cette stratégie :« un rôle renforcé d’orientation et de coordination de
manière à ce que cette stratégie soit dirigée de façon plus cohérente et que les résultats
obtenus fassent l’objet d’un suivi effectif ».
Grâce à son rôle dans la préparation de la procédure ainsi que dans l’élaboration des
programmes d’action, la Commission semble ainsi renforcer sa position.
Afin donc de remédier aux difficultés de coordonner les politiques nationales et les politiques
communautaires,
on
va
mettre
en
place
une
nouvelle
pratique
institutionnelle
s’intitulant :« méthode ouverte de coordination (MOC ) ».
23
M-A. BARTHE, « économie de l’union européenne », 3ème édition, Economica, 2006, p 97
20
La MOC se situe sur le terrain de la nouvelle gouvernance, que l’on peut définir comme « un
partage de pouvoirs dans l’élaboration des politiques, politiques qui s’étendent sur plusieurs
niveaux, dans un esprit de diversité, de décentralisation, de flexibilité et d’expérimentation
des solutions 24 ». La MOC a pour finalités de coordonner et de diffuser les meilleures
pratiques dans le but d’assurer une meilleure convergence eu regard des principaux objectifs
de l’Union Européenne.
Elle consiste à : « définir des ligne directrices pour l’Union, assorties de calendriers
spécifiques pour réaliser les objectifs à court, moyen et long terme fixés par les Etats
membres ; établir, le cas échéant, des indicateurs quantitatifs et qualitatifs et des critères
d’évaluation par rapport aux meilleures performances mondiales, qui soient adaptés aux
besoins des différents Etats membres et des divers secteurs, de manière à pouvoir comparer
les meilleures pratiques. Traduire ces lignes directrices européennes en politiques nationales
et régionales en fixant des objectifs spécifiques et en adoptant des mesures qui tiennent
compte des diversités nationales et régionales ; tout en procédant périodiquement à un suivi,
une évaluation et examen par les pairs, ce qui permettra à chacun d’en tirer des
enseignements25 ».
Or, les conclusions de la Présidence n’ont pas explicité le rôle des différents acteurs comme
celui des institutions, des organes européens, les conclusions n’annoncent que son utilisation
en quatre étapes pour parvenir aux objectifs définis dans la stratégie. De plus, la Commission
circonscrit le rôle de la MOC : elle n’est qu’un complément de l’action communautaire.
Pourtant la MOC fait intervenir de nombreux acteurs : il y a tout d’abord le Conseil européen
qui a vu son influence grandir en s’arrogeant un nouveau rôle qui est d’établir des lignes
directrices ainsi qu’un agenda, et un bilan, la périodicité des Conseils (2 fois par an) fait qu’il
devient un acteur incontournable.
Quant à la Commission, elle se dit activement associée à la MOC, tout en conservant un rôle
de coordinateur.
24
O. DEBARGE, P-Y. LAURENT, O. RABEY, « quel avenir pour l’Union Européenne ? la stratégie de
Lisbonne définie par le Conseil européen en 2000 », Bruylant, 2004, p 64
25
Conclusions Conseil Européen de Lisbonne, point n° 37
21
Elle concrétise les lignes directrices déterminées par le Conseil Européen, puis elle détermine,
compare et évalue les différentes pratiques afin de mettre en place un suivi du processus de la
pratique qui a été choisie, comme le souligne rapport de la Commission « mieux légiférer
2003 » : « les choix politiques doivent être fondés et actualisés à travers les meilleures
connaissances disponibles26. D’autres membres y sont associés comme, les Etats membres,
les collectivités territoriales, ainsi que les partenaires sociaux et la société civile dont la
mission est de participer à la préparation et la mise en œuvre des orientations.
Cependant, deux acteurs non négligeables de l’Union sont exclus de cette méthode : le
parlement européen n’y est pas associé, pourtant en tant que représentant des peuples, il
devrait être parmi les premiers concernés.
Le Conseil de l’Union se trouve quant à lui partiellement exclu du fait du rôle prépondérant
du Conseil Européen, pourtant, il est le principal instigateur des Grandes Orientations de
Politiques Economiques (GOPE), dont la MOC n’est que le prolongement naturel.
L’efficacité de la MOC repose aussi sur les instruments choisis pour l’évaluer : on utilise
principalement dans un premier des temps des statistiques que l’on affine afin de permettre un
ciblage plus précis, il faut donc au préalable, bien choisir les points de référence les standards
les objectifs et les mesures.
Puis dans un second temps, on doit procéder à l’évaluation des performances ou
« benchmarking ». Cette méthode permet ainsi d’évaluer les effets de la méthode qui a été
adoptée par un Etat, puis de la proposer si elle est satisfaisante aux autres Etats. A chaque
Conseil Européen de printemps, on évalue les différentes méthodes employées, puisque ce
Conseil de printemps à vocation « d’orientation et d’impulsion politique qui lui est dévolu en
matière économique et sociale ».
Par conséquent, la Commission peut ainsi surveiller l’exécution des objectifs, elle met
aussi à la disposition des Etats une centaine d’indicateurs qui mesurent le degré de réalisations
des objectifs comme :
26
Rapport de la Commission, « mieux légiférer 2003 », com (2003) 770 final, 12 décembre 2003
22
-
« ceux qui concernent l’évolution du marché de l’emploi
-
ceux qui retracent l’investissement dans l’innovation
-
ceux qui mesurent l’évolution du taux de pauvreté
-
ceux qui balisent la marche vers le développement durable notamment en matière
environnementale27 ».
Cette méthode repose donc sur la bonne volonté des Etats membres, puisqu’ils se doivent
de coopérer volontairement dans ces domaines et d’adopter la meilleure pratique. Or le non
respect n’entraîne pas de sanction, la Commission n’use que de la pression des pairs, elle
n’interfère pas dans le choix et les méthodes des Etats membres.
Les conclusions du Conseil européen de Lisbonne vont servir de base de travail et de
test, au cours des cinq prochaines années, ces conclusions seront le point de repère de toutes
politiques de l’Union, comme par exemple le GOPE qui a totalement intégré les objectifs de
la stratégie de Lisbonne.
La stratégie de Lisbonne a pour objectif principal d’augmenter le taux de croissance et
d’emploi dans les Etats membres de l’Union européenne, le but étant d’atteindre à long terme
une certaine viabilité économique, sociale et environnementale. Au bout de quatre années de
fonctionnement, un constat s’imposait.
b) Le bilan à mi-parcours de la stratégie de Lisbonne
L’année 2004 est l’année des remises en question : en effet on envisage de réviser la stratégie,
car l’ensemble des partenaires font un même constat, la stratégie de Lisbonne est en panne. En
effet le bilan est décevant :
Les résultats attendus ont été très insuffisants pour les différents axes de la stratégie :
En ce qui concerne l’économie, tous les pays à l’exception de la Finlande et de la
Suède n’ont pas atteint les objectifs de 3% du PIB consacré à la recherche et au
développement.
27
P. AGHION, E. COHEN, J. PISANI-FERRY, « politique économique et croissance en Europe », Conseil
d’Analyse Economique, la documentation française, mars 2006, p 81
23
De même, l‘objectif d’un investissement des entreprises privées en recherche et
développement représentant 2% du PIB.
En matière de nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC), les
résultats attendus sont eux aussi nettement insuffisants, puisque l’investissement des secteurs
publics et privés sont bien en deçà des objectifs attendus, ce qui a pour principal effet de
creuser l’écart avec ses concurrents directs que sont les Etats-Unis et le Japon. Enfin,
l’achèvement du marché intérieur était l’un des principaux objectifs de la stratégie de
Lisbonne, or on peut constater, que cinq Etats membres seulement ont dépassé l’objectif en
matière de transposition des directives de l’Union sur le marché unique.
Pour ce qui est du second axe qui est le volet social, on peut certes noter des progrès
significatifs, mais il n’en demeure pas moins que seulement sept Etats membres devraient
atteindre l’objectif en l’an 2005 d’un taux d’emploi de la population de 67%, l’objectif final
étant d’atteindre en l’an 2010, un taux d’emploi de la population de 70%. Les raisons de cet
échec partiel peuvent s’expliquer par le fait que les efforts n’ont pas été en directions des
femmes et des travailleurs de plus de 50 ans. Mais aussi les réformes structurelles du marché
du travail se font toujours attendre dans certains pays comme par exemple la France.
Enfin en ce qui concerne le troisième axe qui est le volet environnemental, quatorze
pays sur quinze restent en dessous des objectifs de Kyoto en matière d’émissions de gaz à
effet de serre. Cet échec peut s’expliquer par le fait que la croissance du trafic automobile
excède encore de loin celle du PIB.
De plus dans le domaine économique, depuis l’an 2000, en plus du ralentissement
économique constaté dans la zone euro, de nouveaux phénomènes ont placé l’Europe dans
une situation délicate. Une nouvelle division internationale du travail a émergé et cela au
profit des pays émergents du sud comme la Chine, l’Inde, et le Brésil.
Ce phénomène a ainsi accentué les difficultés de spécialisation de l’économie européenne en
effet :
24
« une fraction croissante de la chaîne de la valeur ajoutée est soumise à la concurrence des
pays émergents tandis que la pression des Etats-Unis et du Japon sur les industries de haute
technologies et sur les services reste forte28. »
De plus, l’Europe peine à améliorer sa balance commerciale. Il est frappant de constater que
l’Europe ne concentre pas tous ses efforts sur les industries de haute technologies,et que dans
la balance commerciale européenne, « des postes tels que la graisse de porcs et de volailles
ou les bateaux à détruire comptent dans les exportations les plus dynamiques29 ».
Dans l’optique du Conseil de printemps 2005, il y a une volonté certaine de la future
Commission de redonner une nouvelle impulsion à la stratégie de Lisbonne en la recadrant
principalement sur la croissance et l’emploi et de trouver un nouveau partenariat entre l’Union
et les Etats membres. La Commission va donc se baser sur les conclusions du rapport Kok.
Commandé par la présidence Irlandaise, soucieuse de lui redonner les bases nécessaires à son
crédit et à son succès, le rapport fait un bilan sans concession des quatre premières années
d’existence de la stratégie.
Le rapport fait donc le constat suivant : il faut que l’Europe puisse adapter son modèle
économique et sociale, car cette dernière doit faire face à « deux bombes » : d’une part la
bombe démographique qui est le vieillissement de la population européenne, et d’autre part la
bombe de la concurrence internationale, des pays comme l’Inde et la Chine qui rivalisent avec
l’Union européenne sur des secteurs de l’industrie et des services avec des coûts de main
d’œuvre nettement inférieurs.
Le rapport Kok, tient à souligner la pertinence d’une telle stratégie, en effet elle était fondée
(en particulier sur les risques encourues par l’économie européenne) et elle reste d’autant plus
nécessaire que l’écart technologique et de croissance ne s’est pas résorbé avec les Etats-Unis,
et qu’avec l’Asie l’écart de croissance s’est même accentué. Mais il reste très critique sur la
capacité de la stratégie à se matérialiser :
28
H. REICHENBACH, « permettre à l’Europe de renouer avec la croissance et l’emploi : présentation de la
stratégie de Lisbonne/perspectives futures sur la base des propositions de la Commission », petites affiches, les
dossiers de l’Europe Lisbonne : où en est on ? , 19 décembre 2005, n° 251, p 12.
29
Op cit n°38.
25
« il reste beaucoup à accomplir pour éviter que Lisbonne devienne synonyme d’objectifs
manqués et de promesses non tenues30 ».
Le rapport met en avant quatre raisons de cet échec partiel de la stratégie : l’euphorie
économique de l’année 2000 a vite disparu, à cause en particulier de l’explosion de la bulle
internet et des attentats du 11 septembre 2001 à New York et Washington, ce qui a eu pour
principale conséquence en autre une conjoncture économique dégradée. Cette stratégie
souffrait la surcharge de demandes, d’ambitions, alors que dans un même temps l’existence
de contraintes financières fortes pesait sur les Etats membres.
En d’autres termes, la stratégie de Lisbonne a pêché par excès d’ambitions, mais elle a
principalement souffert du fait qu’elle n’a été portée par aucune volonté politique, l’exemple
le plus marquant est l’échec de la MOC qui devait servir d’exemple en matière de partenariat
politique entre les Etats membres et les institutions communautaires. En effet, le rapport
dénonce le fait d’une part que les Etats membres se sont appropriés insuffisamment la
stratégie de Lisbonne, et d’autre part qu’il est très difficile de les faire travailler ensemble tant
dans certains secteurs leurs intérêts sont divergents.
Cependant si le constat fait un excellent bilan de la situation, il est qualifié comme décevant
au vu des solutions recommandées.
Le rapport préconise de renforcer le capital humain, la capacité d’innovation des
entreprises européennes ainsi que sa créativité, son dynamisme économique et social, le tout
est de créer les conditions de réalisation d’une économie innovante.
Wim Kok insiste sur le fait que l’on devrait mettre plus l’accent sur la croissance et
l’emploi. Il inverse la tendance en considérant que « la compétitivité devient alors un
instrument pour parvenir à la croissance et à l’emploi et non plus un objectif en soi31.
30
W. KOK (sous la présidence de), « relever le défi : la stratégie de Lisbonne pour la croissance et l’emploi »,
Rapport du groupe de haut niveau, office des publications officielles des communautés européennes, novembre 2
2004
31
O. BAILLY, « la relance de la stratégie de Lisbonne ou la quête d’un partenariat politique », Revue du
marché commun et de l’Union Européenne, juin 2005, n° 489, p 357 et 358
26
Rares sont les rapports ayant fait l’objet d’un tel consensus de la part des Etats
membres, malheureusement cette unanimité n’a pas été suivie dans les faits pour mettre en
place une nouvelle donne. Or, on ne peut que regretter le manque d’ambition du rapport,
puisqu’il ne constate que l’échec partiel de la stratégie, et se contente d’énoncer des mesures
« classiques » de relance.
En effet, le rapport énonce cinq priorités qui sont destinées en finalité à donner les
impulsions nécessaires à la croissance : comme le marché intérieur, la connaissance,
l’entreprenariat, l’emploi et l’innovation environnementale.
Le rapport souhaite que l’on procède plus à des réformes microéconomiques comme
finir le marché unique et réformer le marché du travail, mais ne souhaite pas « chambouler »
en soi les structures de fonds :
le design institutionnel reste le même, en effet il n’apporte guère de solution à ce qui fait
principalement défaut dans cette stratégie : qu’il n’y ait pas de véritables instruments pour
atteindre les objectifs.
2) La carence majeure de la stratégie de Lisbonne : l’absence d’instruments
efficaces pour atteindre ses objectifs.
Si la stratégie de Lisbonne souffre en premier lieu d’un manque de soutien politique,
les raisons de son échec sont aussi dues aux difficultés rencontrées lors de sa mise en
coordination (a). La relance de la stratégie de Lisbonne en 2005 va essayer de remédier à ces
imperfections (b).
a) L’échec de la stratégie de Lisbonne : l’échec de la MOC et un éparpillement des
objectifs.
27
L’échec de la stratégie de Lisbonne ne s’explique pas seulement par un changement de
conjoncture économique, mais aussi par la conjonction d’une part d’un agenda surchargé, de
priorités inconciliables, et d’autre part par une coordination plus que médiocre. Il est vrai que
l’absence de réelle volonté politique lui a été fatale. Pourtant le temps presse.
Les institutions européennes, avec la stratégie de Lisbonne ont voulu innover en
mettant en place une nouvelle manière de réguler les relations entre les Etats membres et les
institutions européennes qui s’intitule : la méthode ouverte de coordination (MOC).
Comme, la plupart des politiques inclues dans la stratégie de Lisbonne relevaient par essence
des Etats, il fallait trouver un moyen de les faire participer et de les pousser à mettre en œuvre
des politiques internes correspondantes à la stratégie. Afin donc que les Etats s’approprient de
manière optimale cette politique de compétitivité européenne, la Commission joue sur « la
pression des pairs et l’intérêt bien compris 32».
A ce titre, la Commission a donc mis en place des centaines d’indicateurs mesurant le
degré de réalisation des objectifs, afin de surveiller l’exécution de la stratégie des Etats
membres.
Le but n’était pas uniquement coercitif, mais il s’agissait pour la Commission de favoriser
l’échange des expériences et de favoriser les bonnes pratiques. La Commission a un rôle
renforcé qui est de coordonner les opérations mises en place par les différents Etats membres,
la diffusion des informations, mais aussi de veiller en particulier à ce que les politiques dont
elle a la prérogative soit bien en adéquation avec l’ensemble des points définis dans la
stratégie.
A terme comme le souligne dans son article Horst Reichenbach 33 , la stratégie de
Lisbonne symbolisait une nouvelle approche de la politique communautaire en faisant de la
comparaison un vecteur de changement.
32
P. AGHION, E. COHEN, J. PISANI-FERRY, « politique économique et croissance en Europe », Conseil
d’Analyse Economique, la documentation française, mars 2006, p 81.
33
H. REICHENBACH, « analyse critique du bilan et des résultats obtenus », petites affiches, les dossiers de
l’Europe Lisbonne : où en est on ? , 19 décembre 2005, n° 251, p 5.
28
Or, si cette méthode a des points positifs, elle n’a pas été à la hauteur de ce qu’on en attendait.
L’un des atouts de la MOC, en plus de faire participer l’ensemble des acteurs concernés par la
mise en œuvre des politiques communautaires et ce de manière décentralisée, est que la MOC
est adaptable mais sous contrainte : procédurales, politiques, temporelles.
De plus l’utilisation de données statistiques favorise les changements.
D’un point de vue institutionnel, le conseil européen s’est trouvé à assumer de nouvelles
missions sans pour autant avoir les moyens institutionnels à la hauteur des ambitions de la
stratégie.
Pourtant il faut se souvenir que lors du Conseil européen de Lisbonne, il s’est arrogé « un rôle
renforcé d’orientation et de coordination de manière à ce que cette stratégie soit dirigée de
façon plus cohérente et que les résultats obtenus fassent l’objet d’un suivi effectif ».Le conseil
européen a ainsi mis en avant et fait la promotion de la MOC par défiance à la méthode
communautaire. Il convient de rajouter qu’il ne faut pas confondre la MOC avec les autres
procédures coordinatrices inscrites dans le traité.
En effet, la MOC a un champ d’application illimité, elle peut être appliquée en effet en
complément des différents processus que le Conseil Européen met en place comme les
grandes orientations de politique économique et d’emploi (GOPE), ainsi que de la procédure
inscrites dans l’article 128 CE.
Le conseil européen par l’entremise de la MOC (qui est une procédure qui n’est pas inscrite
dans les traités) s’est ainsi approprié de nouvelles fonctions comme la possibilité d’établir des
lignes directrices dans des domaines qui imposent normalement la concertation. Le Conseil
européen a donc pris de l’ampleur et joue un rôle central au sein des institutions européennes,
or, il ne peut tout assumer. Il faut aussi tenir compte du fait que la MOC ne bénéficie pas
d’une bonne assise juridique :
Or, elle n’est pas inscrite dans les Traités, elle est simplement décrite dans les conclusions du
Conseil européen et dans les communications de la Commission, et ces textes ne lient pas les
Etats membres. De plus sa définition et ses implications ne sont que partiellement dessinées,
on peut donc avancer que son caractère juridique est très faible.
29
Il n’en demeure pas moins que la MOC a renforcé le rôle de la Commission, puisque elle a
ajouté une nouvelle compétence à savoir un rôle dans la préparation de la procédure et dans
l’élaboration des programmes d’action.
En plus d’un manque d’assise institutionnelle, cette méthode a eu aussi des effets négatifs :
On a tenu à l’écart le Parlement européen. Pourtant dès la mise en place de la stratégie, le
Parlement européen en tant que représentant du peuple souhaitait être plus impliqué dans les
réalisations ultérieures. Comme, le souligne le Député Joseph Daul (Président du groupe de
coordination de Lisbonne), il a été suggéré que les trois institutions s’entendent sur un accord
interinstitutionnel 34 . Le Parlement voulant ainsi s’assurer que la méthode communautaire
resterait la base des décisions futures. Or le Parlement s’est aperçu que la méthode ouverte de
coordination a en réalité favorisé les autres acteurs de la politique communautaire, le
Parlement garant du contrôle politique de l’Union a ainsi perdu de son influence.
Quant à la méthode elle-même, il semblerait que le choix de plus d’une centaine de critères ne
soit guère judicieux. En effet, cela permet aux Etats membres de faire des choix de
performance en favorisant ceux qui seront le plus facile à atteindre et en laissant de côté les
autres.
La MOC base son efficacité sur la pression des pairs, or cette pression prend souvent la forme
de débats entre les Etats membres qui ne sont restrancrits que de manière lapidaire dans les
conclusions des réunions. De plus les pays qui ont le plus besoin de réformes sont souvent
ceux qui sont le plus imperméables aux pressions.
Il semblerait que l’un des moyens de sauver la méthode ouverte de coordination de ses
imperfections serait de la« communautariser » d’une part et d’autre part inscrire dans les
traités le rôle de chaque institution et organe communautaire.
L’échec de la MOC ne serait pas tant visible s’il n’avait pas manqué à la stratégie de
Lisbonne un véritable pilote.
34
J. DAUL, « la stratégie de Lisbonne : point de vue du Parlement européen suite à l’évaluation réalisée à miparcours », petites affiches, les dossiers de l’Europe Lisbonne : où en est on ? , 19 décembre 2005, n° 251, p 24.
30
Comme il a été déjà souligné, les éléments clés de la stratégie de Lisbonne comme la
recherche, l’éducation, l’emploi, ne relèvent pas de la compétence communautaire, mais sont
du ressort exclusif des Etats membres, par conséquent aucune des institutions
communautaires n’a véritablement émergé afin de mener à bien l’ensemble de la stratégie. Il a
découlé de cette situation trois conséquences :
-
« lorsque les institutions communautaires ont été appelées à intervenir, elles l’ont
toujours été dans des termes vagues ;
-
aucun chantier législatif communautaire véritablement nouveau n’a été programmé,
les conclusions de Lisbonne se référant à des chantiers déjà engagés ;
-
les interventions de la Commission européenne destinées à pallier cet état de fait
n’ont pu se faire que sur des micro-sujets ou dans des domaines situés à la marge de
ses compétences et pour lesquels son effet de levier était très faible 35».
Si la stratégie a souffert d’un manque de « leadership » politique et d’une structure
juridique véritablement efficace, la stratégie n’ a pas non plus bénéficié d’un réel engagement
des moyens financiers tant au niveau communautaire qu’au niveau des Etats membres. En
effet dans ses conclusions, le Conseil européen de Lisbonne semblait privilégier
« essentiellement sur le secteur privé et sur des partenariats entre les secteurs publics et privé
[…] et sur une mobilisation des ressources disponibles sur les marchés et des efforts
consentis par les Etats membres ». En réalité, les moyens communautaires mis à la
disposition de la stratégie se limitaient à une « utilisation optimale des programmes
communautaires existants » c'est-à-dire, pour l’essentiel les fonds structurels et le programme
cadre de recherche et de développement technologique.
Par conséquent, il n’était pas possible de savoir, comment étaient affectées les dépenses, de
faire une évaluation chiffrée du coût de la stratégie de Lisbonne, et cela a pour principale
conséquence de déresponsabiliser les décideurs.
La conception politique de la stratégie de Lisbonne n’était donc pas suffisamment optimale
pour en permettre sa réussite, mais si le volet politique était mal structuré on peut reprocher à
35
J. BIZET, « rapport de la commission des affaires économiques et du plan du Sénat », session ordinaire 20052006, n° 70.
31
la stratégie d’avoir pêché par optimisme en voulant mettre en avant des objectifs trop
nombreux et pas suffisamment précis.
Dans un premier temps, l’objectif principal de dépasser les Etats-Unis sur le plan
technologique d’ici 2010 semble, être un objectif difficile à atteindre. Avec ce genre d’effet
d’annonce, cela à l’effet inverse espéré et surtout cela décharge les gouvernements de leur
responsabilité tant l’objectif semble hors d’atteinte.
L’inconvénient majeur, de ce type de programme, est donc la multitude d’objectifs à atteindre,
et que certains étaient de suite trop imprécis pour que les Etats membres y soient tenus.
Par exemple il était tenu de « favoriser une meilleure compréhension de l’exclusion sociale
par la poursuite du dialogue et des échanges d’informations36 ».
De plus, quant aux objectifs les plus « raisonnables », comme la mise en place d’un brevet
européen, ou du marché des services, il s’est avéré qu’ils se sont noyés dans la masse des
autres objectifs. En effet aucuns d’entre eux ne se détachaient véritablement ce qui ne
permettait pas d’avoir une plus grande visibilité quant aux avancées et aux retards cumulés.
Par ailleurs, l’application de la stratégie s’est révélée être un échec sur le plan interne, elle n’a
pas su donner l’impulsion afin de mettre en œuvre les réformes nécessaires.
Ce phénomène s’est d’autant plus amplifié, que les objectifs étaient profondément inadaptés
aux réalités nationales, l’élargissement n’a fait que le confirmer les disparités nationales. Ce
fut donc une erreur que de fixer de façon identique et pour l’ensemble des Etats membres des
objectifs et des indicateurs, alors qu’il existe de fortes disparités entre les Etats membres.
La stratégie de Lisbonne fait l’objet à mi parcours de nombreuses critiques. Les différents
leviers mis en place afin de la faire appliquer s’avèrent être peu efficaces. Il n’en demeure pas
moins que le Conseil Européen des 23 et 24 mars 2005 estime que les nombreuses difficultés
rencontrées par la stratégie ne remettaient pas en cause son bien fondé. En effet il est plus que
nécessaire de continuer l’offensive en faveur de la croissance et de l’emploi.
36
J. BIZET, « rapport de la commission des affaires économiques et du plan du Sénat », session ordinaire 20052006, n° 70.
32
Ce « nouvel élan pour la stratégie de Lisbonne » mis en place par la nouvelle équipe Barroso,
conjugue objectifs plus réalistes et nouveau levier de mise en œuvre.
b) La nouvelle stratégie de Lisbonne : les aides d’Etat vues comme un nouvel
instrument pour atteindre les objectifs.
Dans le cadre du réexamen à mi-parcours de la stratégie de Lisbonne, le Conseil
européen de printemps des 23 et 24 mars 2005, a donné l’impulsion politique nécessaire en
faveur de la relance de la stratégie de Lisbonne. A ce titre la Commission a adopté un « esprit
d’optimisme réaliste », elle a donc fait de la croissance et de l’emploi l’objectif central de la
« nouvelle » stratégie de Lisbonne, mais sous condition d’une économie dynamique. En effet,
le dynamisme de l’économie européenne est la condition sine qua none, pour nourrir des
ambitions de grande ampleur dans les domaines sociaux et environnementaux. Comme le
souligne Horst Reichenbach « Lisbonne devient ainsi un élément de la stratégie européenne
de développement durable ».
L’objectif de cette relance est on ne peu plus clair : il faut renverser la tendance. La
communication de la Commission de février 2005 qualifie en termes policés le bilan de la
stratégie de Lisbonne d’ « au mieux mitigé », alors que le luxembourgeois Jean-Claude
Juncker, Président du Conseil européen est plus direct en qualifiant le bilan « les résultats sont
lamentables ».
La nouvelle stratégie doit rapidement tirer les leçons de l’échec à mi–parcours : elle doit être
plus claire, plus concentrée sur des objectifs réellement stratégiques, et elle exige d’avoir un
dispositif de mise en œuvre réellement efficace.
La « nouvelle stratégie » est axée sur deux priorités mises en avant par le rapport Kok :
« réaliser une croissance plus forte et durable ; créer des emplois plus nombreux et de
meilleure qualité ».
La réussite de cette relance passe aussi par un nouveau partenariat avec les Etats membres.
Ces derniers doivent se réapproprier la stratégie, en mettant en place un partenariat et des
programmes nationaux de réformes comportant des engagements fermes de réformes.
33
La finalité étant d’améliorer la gouvernance : en effet, le Conseil européen prévoit de mettre
en place un dispositif simplifié. Son objectif est triple :
-
« faciliter l’identification des priorités tout en respectant l’équilibre global de la
stratégie et de la synergie entre ses différents éléments
-
améliorer la mise en œuvre de ces priorités sur le terrain en veillant à impliquer
davantage les Etats membres
-
rationaliser la procédure de suivi afin de mieux appréhender l’application de la
stratégie au niveau national37 ».
Cette nouvelle gouvernance est basée sur un cycle de trois ans à compter de l’année 2005, et
elle comprend les étapes suivantes :
-
« examen et débat par le Conseil européen de la synthèse de la Commission dit
« rapport stratégique », on arrêtera ainsi les orientations politiques pour les dimensions
économique, sociale et environnementale de la stratégie ;
-
le Conseil adoptera un ensemble s’intitulant « lignes directrices intégrées (LDI)»
constituées, des grandes orientations des politiques économiques (GOPE) et des lignes
directrices pour l’emploi (LDE). Le GOPE assurera la cohérence économique générale des
trois dimensions de la stratégie ;
-
enfin, sur la base des lignes directrices intégrées, les Etats membres mettront en place
des « programmes nationaux de réformes dont ils en seront responsables », programmes qui
devront répondre à leurs besoins et à leur situation spécifique38 ».
Le renforcement de la coordination entre Etats membres passera aussi par la nomination d’un
« coordinateur national Lisbonne39 ».
La Commission a pris par la suite un ensemble de mesures visant à mettre en œuvre la
nouvelle stratégie de Lisbonne.
37
Conclusions de la Présidence, « Conseil Européen de Bruxelles », DOC/05/1, 22 et 23 mars 2005, p 11.
Op cit n°37.
39
Op cit n°37.
38
34
Ainsi, le 12 avril 2005, elle a présenté les lignes directrices intégrées pour la croissance et
l’emploi couvrant la période 2005-200840.
C’est l’instrument politique principal du développement et de la mis en œuvre de la stratégie
de Lisbonne.
Dans ce document, il est intégré les recommandations de la Commission sur le GOPE, et les
propositions sur les lignes directrices pour l’emploi (LDE).
C’est donc un instrument de politique intégrée qui couvre les domaines macro,
microéconomique, ainsi que l’emploi (ce document compte 23 lignes directrices).
Le 20 juillet 2005, elle a de même présenté un « programme communautaire de Lisbonne41 »
couvrant ainsi toutes les actions de la Communauté pour la croissance et l’emploi. Ses
mesures comprennent :
-
« le soutien à la connaissance et à l’innovation en Europe,
-
la réforme de la politique des aides d’Etat
-
l’achèvement du marché intérieur des services
-
l’appui aux efforts de traitement des conséquences sociales de la restructuration
économique…42»
Il est intéressant de noter qu’il y a une volonté de responsabiliser les Etats membres. Ils se
voient attribuer un rôle nouveau afin de s’approprier cette nouvelle relance, et à ce titre les
aides d’Etat vont jouer un nouveau rôle.
Afin d’améliorer les performances de l’économie européenne, la stratégie de Lisbonne
s’attache à relancer des secteurs d’activités à fort potentiel de valeur ajoutée.
Les leviers politiques et économiques traditionnels s’avèrent insuffisants pour faire contribuer
les Etats à la réalisation de la stratégie de Lisbonne (une des raisons est que de nombreux
domaines de la stratégie de Lisbonne sont de la compétence des Etats membres).
40
LDI : ligne directrice intégrée pour la croissance et l’emploi (2005-2008), 2005/601/CE, 12 avril 2005.
Communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen, « actions communes pour la
croissance et l’emploi : le programme communautaire de Lisbonne », COM(2005) 330 final, 20 juillet 2005.
42
Op cit n°41, p 4.
41
35
La Commission propose de mettre en avant un levier dont elle en a le monopole à savoir les
aides d’Etat. En effet, elle propose de maximiser l’effet de levier que peut exercer la dépense
publique dans le respect des règles du pacte de stabilité. Ce levier permettra donc à la
Commission de contrôler les initiatives des Etats membres.
Le 20 juillet 2005, la Commission a donc présenté un plan d’action sur cinq ans, dont l’objet
principal est une réforme exhaustive de la politique communautaires des aides d’Etat.
Son principal objectif, est d’utiliser les règles sur les aides d’Etat figurant dans le traité pour
encourager les Etats membres à contribuer à la réalisation de la stratégie de Lisbonne en axant
les aides sur les éléments suivants :
-
« l’amélioration de la compétitivité de l’industrie européenne
-
la création d’emploi durable
-
d’avantages d’aides pour la recherche, l’innovation, le capital – investissement
destiné aux PME
-
la garantie de la cohésion sociale et régionale
-
l’amélioration des services publics43 ».
La Commission souhaite, dans le même temps, rationaliser les procédures afin que les règles
soient plus claires, que le nombre d’aides à notifier diminue, et que l’on accélère la prise de
décisions.
Dans cette optique de renouvellement, la Commission affirme pour la première fois qu’il est
nécessaire de réduire les aides et de mieux les orienter. Cette nouvelle approche sous
l’impulsion de la « nouvelle stratégie de Lisbonne », consiste à favoriser les aides qui peuvent
facilement s’insérer dans la stratégie de Lisbonne et les aides qui sont aux yeux de la
Commission fondamentalement mauvaises et envers lesquelles il faut montrer la plus grande
sévérité.
Cependant une relance de la stratégie de Lisbonne au moyen les aides d’Etat se heurte à deux
obstacles :
43
Op cit n°41
36
L’obstacle juridique puisque au titre de l’article 87CE du Traité les aides d’Etat sont
prohibées sauf exceptions qui sont posées au paragraphe 2 et 3 de l’article.
L’obstacle économique, puisque les Etats membres sont tenus au respect des principes
énoncés dans le pacte de stabilité.
Cela suppose une nouvelle approche dans la définition des aides d’Etat, mais aussi de voir si
au titre de l’intérêt communautaire, on ne pourrait pas qualifier les objectifs de Lisbonne,
d’objectifs à intérêt communautaire ?
B. Une nécessaire remise en cause des aides d’Etat à l’aune de la stratégie
de Lisbonne
Le droit des aides d’Etat reflète le caractère politique du droit de la concurrence. Or
depuis une dizaine d’années, on a assisté à l’évolution dans un premier temps de la notion
d’aide sous l’impulsion de la Cour de justice et de la Commission (1), et dans un second
temps elles ont évolué afin qu’elle s’aligne sur les priorités de la stratégie de Lisbonne (2).
1) L’évolution de la notion d’aides d’Etat
Les aides d’Etat ont pris une importance plus grande au sein de la politique de concurrence de
la Commission, du fait des enjeux politiques qui en découlent, ce qui suppose une évolution
de ses critères de définition (a). Cette évolution va se traduire par une prise en compte de
l’économie dans la définition des aides (b).
a) L’évolution de la notion
Au terme du paragraphe 1 de l’article 87 CE du Traité « sauf dérogations prévues au
présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent
les échanges entre Etats membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de
37
ressources d’Etat sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou qui menacent de fausser la
concurrence en favorisant certaines productions (…) ».
Il est intéressant de noter que l’article 87CE ne définit pas ce qu’est une aide d’Etat, il pèse
donc une incertitude juridique autour de la notion d’aide. La Commission de dispose pas en
réalité d’un pouvoir discrétionnaire pour interpréter l’article 87 paragraphe 1 du traité et les
critères de définition qu’il fixe. Il en revient normalement à la jurisprudence de s’en charger.
S’il existe un principe de prohibition des aides d’Etat, des exceptions au principe ressortent
des paragraphes 2 et 3 de l’article 87CE.
De même, au titre de l’article 88CE, il est intéressant de constater que l’appréciation des aides
d’Etat peut faire l’objet de « négociations » entre l’Etat membre en cause et la Commission.
En effet si une aide est jugée incompatible par la Commission, elle peut être « sauvée » par le
Conseil : « le Conseil peut malgré tout si des circonstances exceptionnelles le justifient
autoriser à l’unanimité une aides nationale44 ».
Les paragraphes 2 et 3 posent donc les exceptions au paragraphe 1, et il est distingué deux
sortes de dérogations : « celles jouant de plein droit et dites automatiques et celles laissées à
la libre appréciation de la Commission dite facultatives 45».
Les dérogations de plein droit sont au nombre de trois, et elles sont devenues d’importance
moindre en comparaison de l’importance prise par les dérogations facultatives :
-
« Les aides à caractère sociale octroyées aux consommateurs individuels, à condition
qu’elle soient accordées sans discrimination liée à l’origine des produits,
-
les aides destinées à remédier aux dommages causés par les calamités naturelles ou
par d’autres événements extraordinaires,
-
les aides octroyées à l’économie de certaines régions de la République Fédérale
d’Allemagne affectées par la division de l’Allemagne, dans la mesure où elles sont
44
L. DUBOUIS, C. BLUMANN, « droit matériel de l’Union européenne », 2ème édition, Montchrestien, 2001,
point 803, p 455.
45
Op cit n°44, point 812, p 459.
38
-
nécessaires pour compenser les désavantages économiques causés par cette
division46 ».
Dans les cas présentés la dérogation est automatique.
Les aides facultatives sont énoncées au paragraphe 3 de l’article 87, les auteurs Dubouis et
Blumann47 les regroupent en trois catégories :
Les dérogations générales que sont les aides régionales et les aides sectorielles. Les
aides régionales sont versées en priorité aux régions en difficulté, mais aussi pour le
développement régional en général. Quand aux aides sectorielles, ce sont les aides au
développement de certaines activités (industrie, transport, textile, automobile).
Les dérogations ponctuelles rassemblent les aides destinées à promouvoir un projet
d’intérêt européen commun, et les aides visant à remédier à une perturbation grave de
l’économie d’un Etat membre.
Il est à noter que la notion « de projet d’intérêt commun », sert de plus en plus fréquemment
de justification croissante aux aides dites horizontales (aides qui sont allouées à la recherche
et développement, à la protection de l’environnement…)
Il y a les aides à la promotion de la culture et à la conservation du patrimoine culturel.
Ces dernières doivent quand même se soumettre aux conditions du marché commun.
Dans tous les cas, ces aides ne doivent altérer les échanges, et ne porter atteinte à la
concurrence sous peine d’incompatibilité.
L’article 87§3 point e prévoit que sont compatibles avec le marché commun « les
autres catégories d’aide déterminées par décision du Conseil statuant à la majorité qualifiée
sur proposition de la Commission ». Ce type d’aide est difficile à délimiter, par contre son
avantage est que le Conseil puisse contourner le pouvoir discrétionnaire de la Commission.
Il y a plusieurs catégories d’aides d’Etat :
Les aides régionales : ce sont des aides au développement des régions de l’Union les
moins avancées.
46
Article 87 §2 CE
L. DUBOUIS, C. BLUMANN, « droit matériel de l’Union européenne », 2ème édition, Montchrestien, 2001,
point 816 et suivants, p 460.
47
39
Les aides sectorielles : la Commission définit ces aides : « sous réserve du respect du
principe de libre concurrence, les aides sectorielles doivent être admises pour corriger les
déséquilibres régionaux graves, faciliter
les adaptations industrielles, éviter les
bouleversements sociaux ou neutraliser certaines distorsions de concurrence 48».
Les aides horizontales ou transversales : elles sont accordées aux entreprises,
indépendamment de la région d’implantation ou de l’activité exercée.
Du fait qu’elles ne sont pas inscrites dans l’article 87, le rôle d’encadrement et de création de
ses aides est revenu à la Commission.
Les aides à la recherche et développement (R&D), les aides à l’environnement, ainsi que les
aides relatives à la sauvegarde des entreprises bénéficient de la part de la Commission de
préjugé favorable.
Depuis le règlement 994/98 du 7 mai 1998 49 , la Commission peut adopter sous forme de
règlements des exemptions catégorielles au profit de certaines catégories d’aides horizontales
que sont : les aides à la R&D, les petites et moyennes entreprises, la protection de
l’environnement ainsi que l’emploi et la formation.
Seulement ces exemptions par catégories auront « une durée de vie limitée », seront très
encadrées, et devront être régulièrement réexaminées pour qu’elles soient le plus cohérent
possible par rapport à la situation économique.
Or, depuis quelques années, on assiste à un essor des aides d’Etat, tant sur le plan quantitatif
que qualitatif ce qui a eu pour principale conséquence de renforcer leur contrôle par la
Commission, mais aussi de s’apercevoir que les critères de définition des aides d’Etat dégagés
par la jurisprudence ne correspondent plus à la nouvelle situation.
L’essor de ces aides ne se mesure pas en termes quantitatifs50. En effet, la Commission
enregistre depuis une dizaine d’année une baisse significative des aides d’Etat notifiées par
48
Communication de la Commission au Conseil, mai 1978 ; in L. DUBOUIS, C. BLUMANN, « droit matériel
de l’Union européenne », 2ème édition, Montchrestien, 2001, point 826, p 466.
49
Op cit n° 48, point 830, p 469
50
L. VOGEL « introduction », les ateliers de a concurrence : le nouvel essor des aides d’Etat en droit de la
concurrence, Revue de la concurrence et de la consommation, mai -juin 2003, n° 133, p 6.
40
rapport au PIB, pour représenter en 2003 « 0,4% du PIB EU- 1551 ». Il faut de plus rappeler
que la baisse du nombre d’aides notifiées était l’un des objectifs de la stratégie de Lisbonne.
Elle comportait la recommandation suivante à savoir la réduction « du niveau général des
aides d’Etat en mettant l’accent sur le soutien à des sociétés ou des secteurs individuels, mais
plutôt, sur la poursuite d’objectifs horizontaux d’intérêt communautaire comme : l’emploi, le
développement régional, l’environnement, et la formation et la recherche ».
Mais c’est sur le plan qualitatif, que l’affirmation prend tout son sens : en effet les aides
revêtent des formes de plus en plus nombreuses et complexes :
-
subventions, primes, dégrèvements ou abattements fiscaux
-
prêts sans intérêts ou crédits à taux réduits, prêts participatifs, octroi de garanties
-
dégrèvements de charges sociales dans un secteur
-
exonération ou réductions d’impôts…
Comme les aides d’Etats sont une forme particulière d’intervention des pouvoirs publics qui
implique des transferts de ressources, elles sont donc aussi au cœur de l’économie publique.
Cette facette incite d’une certaine manière les gouvernements à utiliser les aides d’Etat afin de
poursuivre leurs objectifs économiques sauf affectation du commerce entre Etats membres, ce
qui au titre de l’article 87 CE justifie un système de contrôle communautaire des aides.
Le contrôle des aides est l’apanage de la Commission et il se déroule en deux temps : D’abord,
la Commission contrôle la présence d’un élément « d’aide dans une mesure ou dans un
dispositif national, qui détermine la compétence de la Commission pour intervenir au titre de
l’article 88 CE et de l’obligation de l’Etat membre de la saisir52».Par la suite, la Commission
se doit de contrôler la validité des justifications de l’Etat incriminé, ainsi que de leurs
caractères proportionnés aux distorsions induites, et finalement en cas de litige sur la
compatibilité de ces aides.
Car les aides d’Etat sont l’enjeu d’une « lutte » entre les Etats membres et la Commission, les
uns voulant garder leurs prérogatives sur cette forme d’interventionnisme public, l’autre
51
V. RABASSA, « quelle place pour l’analyse économique des aides d’Etat ? (1) », Colloque « la réforme de la
politique des aides d’Etat », Concurrences, n°1, 2006, p 66.
52
H. LEGAL, « quelle place pour l’analyse économique des aides d’Etat ? (2) », colloque « la réforme de la
politique des aides d’Etat », concurrences, n° 1, 2006, p 70
41
voulant contrôler au nom de « la concurrence libre et non faussée », les initiatives des Etats
membres.
Cela se traduit aussi par une concurrence accrue entre les Etats membres et la Commission
pour l’octroi des aides. En effet, la Commission peut utiliser les aides d’Etat comme un
moyen de pression, et surtout comme une possibilité se substituer ses propres aides aux aides
nationales.
Afin de faire face à la diversification de ces dernières années, les autorités
communautaires en collaboration avec la jurisprudence, ont élaboré de nouveaux critères de
définition des aides.
Dans son rapport de la concurrence de 1996 53 , la Commission tenant compte de son
expérience en tant que contrôle, et de la jurisprudence de la Cour de justice des communautés
européennes (CJCE) a donné des critères très précis de la définition des aides d’Etat au sens
de l’article 87 paragraphe 1 CE « pour qu’une mesure soit considérée comme une aide qui
relève du principe d’incompatibilité avec le marché commun énoncé à l’article 92
paragraphe 1 CE, elle doit satisfaire à quatre critères :
-
elle doit procurer un avantage à l’entreprise
-
elle doit être accordée par l’Etat ou au moyen de ressources d’Etat
-
elle doit avoir un caractère spécifique, c'est-à-dire ne favoriser que certaines
entreprises et certaines productions
-
elle doit affecter les échanges entre Etats membres.
Ces quatre conditions sont cumulatives54, l’année suivante la Commission dans son nouveau
rapport de la concurrence a ajouté le critère de la distorsion de la concurrence produite par
l’aide.
Or, si ces quatre critères étaient satisfaisants pendant un temps, leur application est devenue
au fil des années plus problématique du fait de la complexité des systèmes d’aides.
53
Commission européenne, « XXVIème rapport sur la politique de concurrence 1996 », office des publications
officielles des communautés européennes, 1997, n°166 et suivantes.
54
J-M. COMMUNIER, « le droit communautaire des aides d’Etat », collection systèmes droit, LGDJ, 2000, p 9
et suivantes.
42
Cependant, l’ensemble des critères de qualifications pose des difficultés de mise en œuvre.
A l’exception du critère d’affectation du commerce entre Etats membres qui semble
clairement défini, en effet, ce critère se divise en deux éléments : la restriction de concurrence
et l’affectation des échanges entre Etats membres.
Pour que la condition soit remplie, il faut que la mesure menace de créer une distorsion de
concurrence et qu’elle soit susceptible d’affecter les échanges.
Les autres critères suscitent des d’interrogations. Le critère de la sélectivité par exemple, si
son principe est clair pour la Commission : « des mesures générales s’appliquant à
l’ensemble des entreprises et des secteurs d’activités relèvent de la politique économique des
Etats. Ce ne sont pas des aides au sens de l’article 87 du traité55 ».
Or, son application peut se révéler compliquée. Ainsi la Cour de justice des communautés
européennes (CJCE) a considéré une mesure de réduction de charges sociales sur les
rémunérations de la main d’œuvre féminine comme une aide d’Etat sous prétexte que certains
secteurs emploient plus de femmes que d’hommes56.
De même, peut être considéré comme une aide une mesure bénéficiant à l’économie en
général, si le bénéfice de la mesure n’est pas automatique. Comme le précise la Cour,
« lorsque l’organisme qui octroie des avantages financiers dispose d’un pouvoir
discrétionnaire qui lui permet de déterminer les bénéficiaires ou les conditions de la mesure,
la mesure ne saurait êtres considérée comme représentant un caractère général57 ».
Les critères que sont « la ressource étatique » et « l’avantage procuré par l’aide à son
bénéficiaire » qui vont poser le plus de difficultés à la Cour en matière d’interprétation. En
effet, la Cour va l’interpréter de manière trop large ce qui va petit à petit vider cette définition
de son sens.
Pour le critère de « la ressource étatique », ce dernier se subdivise ne deux:le critère de l’Etat
qui est à l’origine de la mesure, et le critère de l’argent publique qui est à l’origine de la
ressource.
55
L. VOGEL « les nouveaux critères de définition des aides d’Etat en droit de la concurrence », les ateliers de
la concurrence : le nouvel essor des aides d’Etat en droit de la concurrence, Revue de la concurrence et de la
consommation, mai -juin 2003, n° 133, p 7.
56
CJCE 14 juillet 1983, « Commission c. Italie », aff. 203/82.
57
CJCE 29 juin 1999, « déménagements –manutention transport SA », aff C-256/97.
43
Pour ce qui est du premier critère « l’origine publique de la mesure », la jurisprudence en a
défini assez tôt les contours : « qu’il n’y a pas lieu de distinguer entre le cas où l’aide est
accordée directement par l’Etat ou par des organismes publiques ou privés qu’il institue où
désigne en vue de gérer l’aide58 ».
Dés lors, on peut avancer qu’une aide d’Etat est constituée quand elle est octroyée par un
organisme, privé ou public, mais qui doit être contrôlé par l’Etat.
Quand au critère de «l’origine publique de la ressource », la jurisprudence a ainsi consacrée
dans deux arrêts, l’indifférence quand à la forme de l‘engagement, la durée de détention ou la
nature des fonds.
Ainsi dans l’arrêt Ladbroke59, la Cour affirme « les ressources étatiques comprennent tous les
moyens pécuniaires que le secteur public effectivement utiliser pour soutenir des entreprises
(…), que ces moyens appartiennent ou non de manière permanente à l’Etat ».
De même, l’arrêt pose aussi le principe que « le simple fait que l’Etat soit investi à un moment
donné de la faculté de décider de l’orientation des fonds a suffi à rendre ces fonds publics au
sens de l’article 87 CE ».
Dans la même lignée, l’arrêt stardust 60 , affirme pour la première fois que « toutes les
ressources publiques pouvaient constituer des ressources d’Etat au sens de l’article 87. Toute
intervention financière ou investissement d’une entreprise publique est susceptible de
constituer une aide d’Etat, même si les fonds utilisés ont à leur origine des fonds privés ».
En réalité, cette nouvelle définition n’est guère satisfaisante, la notion étant trop élargie, elle
finit par perdre de sa force et de son sens, la frontière entre public et privé plus floue.
Une jurisprudence fluctuante, des critères de moins en moins bien adaptés à
l’importance que prennent les aides d’Etat, sont à l’origine de l’évolution récente de la
définition.
Si la Cour retient toujours la définition jurisprudentielle des aides d’Etat, elle va innover en
modifiant son analyse de l’aide. En effet, pour qualifier une aide d’Etat,
elle ne va plus se tenir à cette définition juridique stricto sensu.
58
CJCE 23 mars 1977, « Steinike », aff. 78/76.
CJCE 16 mai 2000 « Ladbroke ».
60
CJCE 16 mai 2002, « République Française c. Commission », aff. C-482/99.
59
44
Elle va s’attacher à une analyse plus pragmatique qui retient comme critère l’effet
économique de l’aide sur le marché.
b) Vers une prise en considération de l’effet économique dans la définition des aides
La définition de l’aide a été modifiée par un élargissement de ses conditions. Cette nouvelle
approche jurisprudentielle a pour principale conséquence de modifier l’approche dans la
définition de l’aide.
En effet, nous allons assisté au passage d’une définition juridique de l’aide (on retient ses
conditions) à une définition plus économique qui tient compte de ses effets sur l’économie.
On peut y voir l’influence de la stratégie de Lisbonne : la stratégie a pour objectif de
maintenir un niveau bas d’ aides et par conséquent de mieux les orienter d’où l’importance
d’une définition plus appropriée, plus souple, et plus économique.
Les aides d’Etat prennent une importance de plus en plus grande au sein des économies
nationales malgré le principe de prohibition. Elles peuvent être un moyen de relance d’un
secteur de l’économie et cette position est renforcée par le fait aussi qu’elles peuvent
« internaliser » des externalités, et qu’un contrôle plus efficace peut permettre « de résoudre
des problèmes d’engagements des gouvernements 61».
A la différence de la définition de la position dominante ou du contrôle des concentrations, où
l’analyse économique à toute sa place, elle est quasi inexistante en matière d’aides d’Etat.
Cela s’explique, parce que les traités ne prévoient pas de cadre favorable à une analyse
économique des aides d’Etat, mais aussi parce que les contours économiques du contrôle des
aides d’Etat sont flous.
Par exemple, la Commission dans le cadre de son contrôle doit tenir compte aussi bien
d’objectifs d’efficacité économique que d’équité62.
61
62
Op cit n° 47.
Op cit n°48.
45
Or, la recherche d’une plus grande efficacité économique, d’une meilleure gestion des deniers
publics ainsi que d’une définition plus cohérente des aides d’Etat sont à l’origine d’une
redéfinition des aides d’Etat qui privilégie cette fois la prise en compte de l’analyse
économique.
La nouvelle interprétation qui élargit les conditions de la définition a eut l’effet inverse
attendu, elle n’a pas clarifiée la situation au contraire, ce qui a contraint la Cour à redéfinir les
aides d’Etat.
Cette nouvelle approche dans la définition des aides, va être symbolisée dans un premier
temps par la prise en compte du critère de l’investisseur privé en économie de marché, et dans
un second temps par le prise en compte du critère économique de l’effet compensatoire.
La prise en compte de l’analyse économique apparaît dans la jurisprudence avec le principe
de « l’investisseur dans l’économie de marché ». Le critère de la comparaison est basé sur le
comportement d’un investisseur privé.
La Commission, dans la cadre de son pouvoir de contrôle détermine s’ il y a une aide
dans une intervention des pouvoirs publics, en se référant au critère du comportement
prévisible d’un opérateur privé agissant dans les conditions normales d’une économie de
marché.
Son examen met plus l’accent sur la démonstration de la rentabilité de l’intervention étatique,
que sur le contrôle de la viabilité de l’entreprise, comme le souligne Jean-Paul Keppenne63 :
« une mesure de soutien financier qui s’avère rentable pourra ainsi échapper à la
qualification d’aide tandis qu’une mesure assurant la viabilité de l’entreprise sera considérée
comme une aide, susceptible d’être déclarée compatible le cas échéant ».
Les prémices de l’application de ce principe sont issues de la jurisprudence, dès le début des
années quatre-vingt dix (1991), où l’on affirme que ce principe permet de valider des
investissements publics dans une entreprise s’ils « sont réalisés dans les conditions normales
de marché64 ».
63
J-P. KEPPENNE, « guide des aides d’Etat en droit communautaire », Bryulant, Bruxelles, 1999, p 36.
CJCE 3 octobre 1991, « Italie c. Commission », aff. C-42/93, in L. VOGEL « les nouveaux critères de
définition des aides d’Etat en droit de la concurrence », les ateliers de la concurrence : le nouvel essor des aides
64
46
Mais elle a été confirmée par une communication de la Commission 65 , dans laquelle elle
invite à appliquer le principe de l’investisseur privé pour déterminer si une intervention
publique constituait une aide : « afin de s’assurer le respect du principe de l’égalité de
traitement, il y a lieu d’évaluer l’aide comme la différence entre les conditions auxquelles
l’Etat procure des ressources aux entreprises publiques et les conditions auxquelles un
investisseur privé jugerait acceptable de mettre des ressources à la disposition d’une
entreprise privée comparable lorsqu’il opère dans des conditions normales d’une économie
de marché ».
Par exemple dans le cadre d’un apport en capital, si des ressources publiques sont mises à la
disposition d’une entreprise publique et ceux à des conditions plus favorables, que les
conditions auxquelles un propriétaire privé fournirait des ressources à une entreprise privée se
trouvant dans une situation financière et concurrentielle comparable, l’entreprise publique
bénéficiera d’un avantage que les propriétaires privés ne peuvent consentir à leur entreprises.
Ce critère de l’investisseur privé en économie de marché est donc vu comme une « émanation
du principe d’égalité de traitement entre les secteurs public et privé inscrit à l’article 295
CE66 ».
Or, l’application de ce critère est parfois contestée au motif que le comportement de
l’investisseur privé n’est pas soumis à une telle contrainte, et que par conséquent la personne
publique serait victime de discriminations.
Ce motif a déjà été soulevé dans une affaire 67 , que le tribunal de première instance des
communautés européennes (TPICE) a rejeté au motif que « l’investisseur public ne se trouve
pas dans la même situation que l’investisseur privé et peut donc faire l’objet d’un traitement
différencié68 ».
d’Etat en droit de la concurrence, Revue de la concurrence et de la consommation, mai -juin 2003, n° 133, p 9.
Communication de la Commission sur l’application des articles 92 et 93 du traité et de l’article 5 de la
directive 87/723/CE de la Commission aux entreprises publiques dans l’industrie manufacturière, JO, n°C 307,
13 novembre 1993, p 3, in M. DONY, C. SMITS, « aides d’Etat », éditions de l’université de Bruxelles, 2005, p
57.
66
C. SMITS, « la notion d’avantage et le critère de l’opérateur en économie de marché », Aides d’Etat,
Bryulant, 2005, p 58, principe de la neutralité du traité à l'égard du régime de la propriété des entreprises prévu à
l'article 295 CE.
67
Aff. Jointes T-228/99 et 233/99, « WestLB », 6 mars 2003.
68
In note n° 58, point 272.
65
47
La Commission met donc en place, un test de l’opération envisagée dont l’analyse
repose tantôt in concreto, tantôt in abstracto. De même que les critères utilisés pour son
analyse n’ont pas tous la même valeur.
Dans le cadre de son contrôle, la Commission appliquera le critère de l’investisseur privé en
tenant compte de la situation de l’entreprise concernée, mais aussi des caractéristiques de
l’opération qui est envisagée.
L’aide est supposée inexistante, quand l’Etat intervient de concert avec des opérateurs privés,
ce qui a comme conséquence pour l’Etat de ne pas apporter de preuves supplémentaires.
En l’absence de concomitance d’action de la personne publique et de la personne privée, il
revient à la Commission de démontrer « qu’un investisseur fictif et idéalement prudent69»,
bien informé sur la situation de l’entreprise ainsi que sur les caractéristiques de l’opération et
surtout désireux de concrétiser cette opération par un profit sur le long terme n’aurait pas dans
des conditions similaires adoptés le même comportement.
Si le cas se présente, il appartiendra dès lors à la Commission, de montrer que l’intervention
étatique n’est pas conforme au critère de l’investisseur privé en économie de marché.
La Commission utilise dans son analyse de nombreux critères issus de la jurisprudence, ceux
qui vont suivre sont considérés comme déterminants:
Le critère de « l’intervention simultanée d’opérateurs privés », sous entend que
l’intervention de la personne publique est réalisée dans les mêmes conditions que celle de la
personne privée, et l’existence d’un avantage et par conséquent d‘une aide est présumée
proscrite, sous conditions de réunir trois critères :
-
« que l’intervention privée soit vraiment significative
-
que l’intervention privée soit réellement comparable. Tel n’est pas le cas d’une prise
de participation des salariés dans le capital de l’entreprise concernée
-
que l’intervention privée soit concomitante à l’intervention publique70
69
C. SMITS, « la notion d’avantage et le critère de l’opérateur en économie de marché », Aides d’Etat,
Bryulant, 2005, p 58
70
C. SMITS, « la notion d’avantage et le critère de l’opérateur en économie de marché », Aides d’Etat,
Bryulant, 2005, p 59
48
Le critère de « la situation financière de l’entreprise bénéficiaire », dans ce cadre là,
la Commission vérifie si en tenant compte de la situation économique et financière de
l’entreprise bénéficiaire, un investisseur en économie de marché aurait investi les mêmes
montants dans les mêmes conditions.
Cette condition joue particulièrement dans le cadre des aides apportées aux entreprises en
difficulté et nécessitant d’un plan de restructuration, mais depuis l’arrêt « WestLB » du 6 mars
200371, il a été admis que le critère de l’investisseur privé en économie de marché puisse
s’appliquer à une entreprise qui est rentable.
En effet, pour le tribunal, il est important « de savoir si l’entreprise bénéficiaire d’une aide
n’est pas en soi déterminante pour établir si un avantage existe 72».
Le critère de « la nature de la participation détenue par les pouvoirs publics », la
Commission tient compte de la spécificité du comportement de la personne publique
investisseur. Cette dernière peut à la différence des investisseurs privés être moins préoccupée
par la rentabilisation à court et moyen terme de son investissement.
On peut en conclure d’après la jurisprudence que, « lorsque les apports en capitaux de
l’investisseur public font abstraction de toute perspective de rentabilité, même à long terme,
ils doivent être considérées comme des aides au sens de l’article 87 CE paragraphe 173».
Le critère de « l’effet engendré par la qualité de propriétaire », est un principe selon
lequel, l’investisseur privé agit faisant abstraction de toute considération de caractère social
ou de politique régional.
Quant au dernier critère qui est le celui du « taux de rendement », la question que se
pose la Commission est de savoir quel est le taux minimal qu’exigerait un investisseur privé ?
La jurisprudence WestLB, a fixé le taux de rendement escompté au niveau de la rentabilité
moyenne du secteur considéré.
71
Aff. Jointes T-228/99 et 233/99, « WestLB », 6 mars 2003.
C. SMITS, « la notion d’avantage et le critère de l’opérateur en économie de marché », Aides d’Etat,
Bryulant, 2005, p 61, in Aff. Jointes T-228/99 et 233/99, « WestLB », 6 mars 2003, point 208.
73
CJCE 21 mars 1991 « ENI-Lanerossi », aff. C-303/88, P. I-1433, point 22.
72
49
La Commission tient compte aussi, d’autres critères mais qui sont d’importance moindre,
tels que le statut juridique de la mesure en droit national, les coûts sociaux, et les effets
positifs indirects74.
L’analyse économique en matière de contrôle des aides d’Etat n’apparaît pas seulement qu’au
travers du critère de l’investisseur privé en économie de marché, mais aussi avec la doctrine
du contrôle et la compensation des charges publiques.
La doctrine du contrôle a été développée par la jurisprudence stardust75. Selon la Cour, toutes
les ressources des entreprises publiques constituent des ressources étatiques même quand les
fonds utilisés sont d’origine privée.
En l’espèce, la Commission a considéré que la recapitalisation de la société stardust ainsi que
d’autres mesures de restructuration adoptées par la banque SBT filiale d’Altus finance, ellemême filiale du crédit lyonnais, sont des aides d’Etat, et en ordonne la restitution.
L’Etat français soutient au contraire, que la mesure n’était pas une aide au motif qu’il n’y
avait pas d’emploi d’une ressource étatique, et que de toute manière cet emploi n’était pas
imputable à l’Etat.
La Cour utilise la doctrine du bilan afin de justifier sa décision ; en effet Comme l’affirme le
Professeur Vogel: « que l’imputabilité ne peut être la seule conséquence du contrôle exercé
par l’Etat mais doit être démontrée concrètement au cas par cas, en recourant aux besoins à
certains indices dont elle dresse une liste non exhaustive. Ainsi il ne suffit pas que le contrôle
existe, il faut également qu’il soit exercé76 ».
Par le biais du contrôle du comportement de la société mère sur ses filiales, on peut considérer
qu’il y a là encore consécration d’un critère économique dans le contrôle des aides d’Etat.
Dernièrement, l’analyse économique apparaît au travers des arrêts Ferring 77 mais plus
particulièrement avec le quatrième critère de la jurisprudence Altmark Trans78.
74
voir note n° 65.
CJCE 16 mai 2002 « république Française c. Commission », aff. C-482/99.
76
L. VOGEL « les nouveaux critères de définition des aides d’Etat en droit de la concurrence », les ateliers de
la concurrence : le nouvel essor des aides d’Etat en droit de la concurrence, Revue de la concurrence et de la
consommation, mai- juin 2003, n° 133, p 9.
77
CJCE 22 novembre 2001 « ferring SA c. Agence centrale des organismes de sécurité sociale », aff. C-53/00
78
CJCE 24 juillet 2003 « Altmark trans », aff C-280/00.
75
50
Dans les deux jurisprudences, il se posait la problématique du financement public des services
d’intérêt général. De manière plus générale, comme le souligne Marianne Dony79 « elle se
pose en effet la question politique de la légitimité de l’intervention des pouvoirs publics dans
la sphère économique au nom de l’intérêt général ».
Cette doctrine a été développée dans l’arrêt Ferring, qui concernait l’exonération de taxes
accordées aux grossistes répartiteurs de médicaments en France.
La Cour rejette la qualification d’aide d’Etat au motif « que l’exonération de taxe ne
s’identifie pas à une aide d’Etat parce qu’elle ne constitue pas un avantage, mais a pour effet,
et dans cette limite, de compenser le surcoût supporté par les grossistes répartiteurs du fait de
leur mission de service public ».
La jurisprudence détermine que le financement d’obligations de service public n’entre pas
dans la notion d’aide d’Etat.
La jurisprudence Altmark va finaliser cette approche de la jurisprudence :
Selon la Cour80 : « une compensation représentant la contrepartie des prestations effectuées
par les entreprises bénéficiaires pour exécuter des obligations de service public échappe à la
qualification d’aides d‘Etat, mais à la condition qu’elle remplisse quatre conditions strictes ».
Elle définie ainsi les conditions auxquelles une compensation peut échapper à la qualification
d’aide d’Etat.
L’analyse économique apparaît au travers du quatrième critère basé sur une régulation par les
coûts « …d’une entreprise moyenne, bien gérée… ».
Cependant, la Commission devra rapidement prendre des mesures en matières de calcul des
compensations, ainsi que d’une nomenclature des différents éléments qui seront pris en
compte pour le calcul.
En effet, des questions restent en suspend, telles que « comment juger si une bénéfice est
raisonnable ou encore que recouvre la notion d’entreprise moyenne, bien gérée et
79
80
M. DONY, « les compensations d’obligations de service public », Aides d’Etat, Bryulant, 2005, p 109.
CJCE 24 juillet 2003 « Altmark trans », aff C-280/00.
51
adéquatement équipée 81 », mais aussi quels paramètres pendre dans le calcul de la
compensation ?
Par ces jurisprudences, il n’est pas inopportun d’avancer que l’économie fait son entrée dans
le contentieux communautaire des aides d’Etat.
Cependant, il faut rester « modeste », comme le souligne H. Legal « des éléments d’analyse
économique existent certes (…) mais ils font appel qu’à des notions simples et plus souvent
d’ordre financier, comptable ou commercial que strictement économique82».
La substitution de l’analyse juridique au profit d’une appréciation économique est donc un
phénomène récent qui va bouleverser en profondeur l’approche des aides d’Etat, cette
nouvelle démarche rend compte que le modèle ancien des aides d’Etat n’était plus
véritablement adapté aux nouveaux emplois des aides.
La stratégie de Lisbonne entrée en vigueur en l’an 2000 et prônant une baisse générale du
niveau des aides afin de mieux les cibler, n’est pas étrangère à ce changement de cap.
2) Une modification de la politique des aides d’Etat à l’aune de la stratégie de
Lisbonne.
Les récentes évolutions de la définition des aides d’Etat ont démontré que les aides
d’Etat n’étaient plus vraiment adaptées aux nouvelles ambitions qui leur sont dévolues, en
particulier au travers de la stratégie de Lisbonne (a), ce qui a pour conséquence, un
changement de philosophie de la Commission dans sa perception de l’intervention
économique des Etats membres (b).
a) Une nouvelle politique des aides d’Etat adaptée à la stratégie de Lisbonne
81
Op cit n°76
H. LEGAL, « quelle place pour l’analyse économique des aides d’Etat (2) », colloque la réforme de la
politique des aides d’Etat, concurrences, n°1, 2006, p 70.
82
52
L’objectif principal d’une aide d’Etat est de fournir un appui financier sous quelques formes
que ce soit, à un projet élaboré par l’entreprise et répondant à son intérêt.
Afin de pouvoir bénéficier de cette aide, l’entreprise va devoir l’inscrire dans un cadre
délimité par l’autorité publique.
Mais un libre arbitre est laissé à l’entreprise, elle demeure libre de s’insérer ou pas dans ce
cadre définie par l’Etat et donc de bénéficier ou pas de l’aide.
Comme le souligne M. Dony : « dans ce contexte, la notion d’avantage trouve toute sa place :
les pouvoirs publics saisis d’un projet d’une entreprise, vont décider de prendre en charge
une partie des coûts afférents à ce projet, coûts qui auraient normalement grevé le budget de
cette entreprise, parce que le projet en cause, au-delà de l’intérêt «égoïste» de l’entreprise,
correspond également à l’intérêt général, tel que l’a défini l’autorité publique83».
C’est justement cette « force » des aides d’Etat que la Commission veut utiliser afin de faire
appliquer par les Etats les objectifs de la stratégie de Lisbonne.
La Commission va profiter en cette année 2005, pour procéder au nouvel examen des
dispositions horizontales sur les aides d’Etat, en mettant ainsi en place un nouveau cadre au
sein duquel il sera possible de tenir compte d’objectifs horizontaux tels que ceux issus de la
stratégie de Lisbonne.
Comme nous l’avons étudié auparavant, le programme communautaire de Lisbonne84de 2005,
tient à recentrer ses priorités sur la croissance et l’emploi.
Afin de parvenir à atteindre ses objectifs, l’Union se doit de mobiliser tous les moyens dont
elle dispose qu’ils soient communautaires ou nationaux.
Dans ce contexte, la Commission compte bien utiliser la politique des aides d’Etat comme
levier afin de relancer la stratégie dans le cadre d’une politique de concurrence active : « le
Conseil européen invite les Etats membres à poursuivre sur la voie d’une réduction du niveau
général des aides d’Etat, tout en tenant compte des éventuelles défaillances des marchés.
83
84
M. DONY, « les compensations d’obligations de service public », Aides d’Etat, Bryulant, 2005, p 132.
Conclusions de la Présidence – Bruxelles, 22 et 23 mars 2005, 7619/05, P 1.
53
Ce mouvement doit s’accompagner d’un redéploiement des aides en faveur du soutien de
certains objectifs horizontaux, tels que la recherche et l’innovation et la valorisation du
capital humain.
La réforme des aides régionales devrait en outre favoriser un niveau élevé d’investissement et
permettre une réduction des disparités conformément aux objectifs de Lisbonne85»
Cependant, comme le souligne le document de consultation présenté par la Commission dans
le cadre du plan d’action dans le domaine des aides d’Etat86 », les aides d’Etat ne sont qu’un
levier parmi d’autres et elles ne sont pas « la solution miracle ».
En effet, la Commission souligne que les aides d’Etat ont un coût que les contribuables
devront financer, mais aussi des inconvénients tels que « entraînent des coûts d’opportunité
en ce que l’octroi d’aides à des entreprises se fait au détriment d‘autres domaines
d’intervention publique87».
De ce fait et compte tenu de « la rareté » des ressources publiques et du fait que celles-ci
répondent à d’autres objectifs comme la santé, l’éducation, la protection sociale, la
Commission invite les Etats membres « à faire des choix dans la transparence et d’établir des
priorités88 »
La Commission redéfinit donc la politique des aides d’Etat à l’aune de la stratégie de
Lisbonne.
En effet, l’approche économique que l’on a vue s’amorcer dans la définition des aides d’Etat
sert d’instrument afin « de mieux concentrer certaines aides d’Etat sur les objectifs de la
stratégie de Lisbonne 89».
Par le biais de l’analyse économique, les aides d’Etat se sont modifiées et se sont vus attribuer
une nouvelle fonction, différente de la fonction traditionnelle. En effet, la politique des aides
d’Etat réside plus particulièrement dans le fait qu’elle ne répond pas uniquement à des
objectifs de nature économique, mais aussi largement politique, les aides d’Etat peuvent
85
op cit n° 31, point n°20, p 6.
Plan d’action dans le domaine des aides d’Etat, « des aides d’Etat moins nombreuses et mieux ciblées : une
feuille de route pour la réforme des aides d’Etat 2005-2009 », document de consultation, COM(2005) 107 final,
7 juin 2005.
87
Op cit n°85, point n°8, p 4.
88
Op cit n°85, point n°8, p 4.
89
J-Y. CHEROT, « chroniques aides d’Etat », concurrences, n°3, p 104.
86
54
corriger des résultats inégaux en incitant les acteurs économiques à changer leurs politiques.
De même, le mouvement de baisse général du niveau des aides d’Etat doit se poursuivre tout
en tenant compte des « éventuelles défaillances du marché », un redéploiement des aides
semble donc s’imposer.
Le traité dans son article 87CE dans le cadre d’une politique de concurrence permet des
exceptions à l’interdiction générale des aides d’Etat, en particulier si ces aides ont des effets
bénéfiques pour l’Union. En effet la Commission justifie sa politique des aides d’Etat : « les
aides d’Etat peuvent être déclarées compatibles avec le traité sous réserve qu’elles répondent
à des objectifs d’intérêt commun clairement définis et qu’elle ne faussent pas la concurrence
et les échanges intracommunautaires dans une mesure contraire à l’intérêt commun. Les
mesures d’aide d’Etat peuvent parfois constituer des outils efficaces pour réaliser des
objectifs d’intérêt général. Elles peuvent corriger certaines défaillances du marché, ce qui
permet d’en améliorer le fonctionnement et renforcer la compétitivité en Europe.
Elles peuvent également favoriser la cohésion sociale et régionale, le développement durable
ainsi que la diversité culturelle, qu’il y ait ou non correction des défaillances du marché90 ».
Or, les objectifs de la stratégie de Lisbonne sont en passe de devenir des objectifs d’intérêt
commun et donc pourront être considérés comme compatibles avec le marché commun.
Dans ce cadre la Commission se livre à une analyse de la compatibilité de ses aides, en
mettant en balance, les effets potentiellement négatifs des aides sur la concurrence, et les
effets potentiellement positifs en terme d’intérêts commun.
Ainsi les aides d’Etat selon la Commission « ne devraient être utilisées que lorsqu’elles
constituent un instrument approprié pour atteindre un objectif bien défini, lorsqu’elles créent
des incitants adéquats, lorsqu’elles sont proportionnées à leurs objectifs et lorsqu’elles
faussent le moins possible la concurrence91 ».
L’un des éléments de l’analyse économique est l’analyse des défaillances du marché. En effet,
la défaillance du marché constitue une justification importante d’une aide d’Etat.
90
Plan d’action dans le domaine des aides d’Etat, « des aides d’Etat moins nombreuses et mieux ciblées : une
feuille de route pour la réforme des aides d’Etat 2005-2009 », document de consultation, COM(2005) 107 final,
7 juin 2005, point n°10, p 4.
91
Op cit n°89, point 11, P 4,5.
55
Selon la Commission, la défaillance du marché « correspond donc à une situation dans
laquelle le marché ne fonctionne pas de manière efficiente du point de vue économique92.
L’analyse économique est donc finalement utilisée pour évaluer dans quel cas le marché
fonctionne correctement, et dans quel cas le marché est victime de défaillances.
Il est intéressant de noter que la Commission souhaite dans le cadre de sa nouvelle politique
des aides d’Etat, de mettre en avant, avec l’aide de la stratégie de Lisbonne, la volonté
d’améliorer l’efficacité du marché, quand ce dernier est en proie à une défaillance. Mais la
Commission se contente de juger de la compatibilité des aides au regard de l’article 87CE, et
en aucun cas, elle n’est compétente quand à juger de l’opportunité des choix politiques des
Etats membres.
Comme le souligne Thibault Kleiner et Alain Alexis93 « le plan d’action sur les aides d’Etat
souligne qu’en pareille hypothèse, en concentrant les aides sur le redressement de
défaillances de marché, les gouvernements peuvent augmenter l’efficacité économique et
stimuler la croissance ».
Les défaillances du marché ont selon la Commission des origines diverses :
« Les effets externes : il y a des effets externes lorsque les acteurs ne tiennent pas
pleinement compte des conséquences de leurs activités sur les autres acteurs de la société. Des
acteurs du marché peuvent ne pas avoir à supporter la totalité du coût social de leurs activités
(effets externes négatifs), comme dans le cas de la pollution industrielle, tandis que d’autres
peuvent ne pas être en mesure de retirer tous les bénéfices de leurs activités (effets externes
positifs), comme dans les domaines de la recherche et de l’innovation.
Les biens publics : ce sont des biens qui profitent à la société dans son ensemble, mais
qui ne sont généralement pas fournis par le marché, étant donné qu’il est difficile voire
impossible d’empêcher quiconque de les utiliser (et, partant, de les faire payer). Il peut s’agir
de la défense nationale et de certains types de chaînes publiques.
92
Op cit n° 89, point n° 23, p 7.
T. KLEINER, A. ALEXIS « politique des aides d’Etat : une analyse économique plus fine au service de
l’intérêt commun », Concurrences, N°4, 2005, p 50.
93
56
Une information imparfaite : une information imparfaite peut entraîner des coûts de
transaction, des coûts de délégation, des aléas de moralité ou une antisélection, qui peuvent à
leur tour empêcher un fonctionnement efficient du marché. Un exemple bien connu est celui
du marché financier, sur lequel les jeunes entreprises ont généralement des difficultés à
obtenir les financements qu’elles recherchent.
Les problèmes de coordination : les marchés peuvent également ne pas fonctionner
d’une manière efficiente lorsqu’il existe un problème de coordination entre les acteurs du
marché.
Il peut par exemple y avoir des problèmes dans les domaines de la normalisation ou des
infrastructures de transport, ou dans celui de l’innovation.
L’existence d’un pouvoir de marché : est une autre raison pour laquelle le marché peut
ne pas fonctionner d’une manière efficiente, par exemple dans une situation de monopole 94».
Dans le cadre de la relance de la stratégie de Lisbonne, le Conseil européen attire l’attention
des Etats membres sur les défaillances du marché.
Cependant, la condition selon laquelle l’aide d’Etat vise une défaillance du marché n’est pas
suffisante, en effet, dans le cadre d’une politique de concurrence optimale, les Etats membres
sont tenus de considérer tous les instruments, en particulier de mettre en œuvre le plus
approprié afin de corriger la défaillance tout en créant « les incitants nécessaires et en étant
proportionnée à ses objectifs95 ».
Si la défaillance du marché constitue la principale justification d’une aide d’Etat, il n’en
demeure pas moins que cet instrument doit être utilisé avec parcimonie.
Dans un cadre plus large, l’approche économique plus fine prônée par la Commission semble
avoir fait ses preuves.
En effet, on assiste depuis quelques années à une baisse générale du niveau des aides d’Etat,
et surtout à une réorientation des aides vers des objectifs conformes aux objectifs de la
stratégie de Lisbonne.
94
Plan d’action dans le domaine des aides d’Etat, « des aides d’Etat moins nombreuses et mieux ciblées : une
feuille de route pour la réforme des aides d’Etat 2005-2009 », document de consultation, COM(2005) 107 final,
7 juin 2005, point n°23, p 8.
95
Op cit n°93, point n°23, p 8.
57
Si la nouvelle politique des aides d’Etat semble être adaptée aux objectifs de la stratégie de
Lisbonne, cette nouvelle relance de la stratégie a aussi modifié la perception qu’a la
Commission de l’intervention économique des Etats membres.
b) Un changement de philosophie de la Commission dans sa perception de
l’intervention économique des Etats membres.
Dans un premier temps, il est à rappeler que la relance économique prônée par la
stratégie de Lisbonne s’inscrit aussi dans le cadre du pacte de stabilité et de croissance, dont
l’objectif est que « chaque Etat membre s’engage à faire en sorte d’avoir, à moyen terme, une
situation budgétaire proche de l’équilibre ou excédentaire96 ».
En cette année 2005, la Commission a procédé à une remise à jour du pacte dans le but qu’il
puisse être appliqué dans tous les pays et cela de manière « équitable et cohérente et être
compris de l’opinion publique97 ».
Ce « nouveau pacte de stabilité », prendra plus en compte l’évolution des différentes
économies des Etats membres, tout en « préservant la clé de voûte que constituent les deux
ancrages nominaux du pacte, la valeur de référence de 3% pour le ratio entre le déficit et le
produit intérieur brut (PIB) et celle de 60% pour le rapport entre la dette et le PIB 98».
Toutes ces modifications ont pour finalité de contribuer aux efforts en faveur de l’emploi et
de la croissance dans le cadre de la stratégie de Lisbonne.
Ainsi, le Conseil préconise des politiques macroéconomiques en faveur de la croissance et
l’emploi, tout comme des réformes microéconomiques visant à augmenter le potentiel de
croissance en Europe.
Selon le Conseil, ces politiques macroéconomiques doivent être mises en place dans un but
d’exploitation du potentiel de croissance mais « ces politiques sont indispensables à la mise
en place des conditions nécessaires pour promouvoir un niveau d’épargne et d’investissement
approprié ainsi qu’au renforcement de l’investissement dans la connaissance et l’innovation,
96
M-A. BARTHE, « économie de l’Union européenne », economica, 3ème édition, 2006, p 295.
RAPPORT GENERAL sur l’activité de L’union Européenne 2005, Commission européenne, p 10-11.
98
Op cit n°97, p 11.
97
58
afin d’inscrire durablement l’économie dans un scénario de croissance et d’emploi accrus,
tout en évitant l’inflation99 ».
Dans le cadre des réformes microéconomiques, elles seront centrées autour de la connaissance
et de l’innovation qui sont considérées comme les moteurs d’une croissance durable.
En effet selon la Commission « les politiques visant à accroître les investissements dans la
connaissance et à renforcer la capacité d’innovation de l’économie de l’Union sont au cœur
de la stratégie de Lisbonne en faveur de la croissance et de l’emploi.
C’est pourquoi les programmes nationaux et régionaux seront de plus en plus centrés sur les
investissements dans ces domaines, conformément aux objectifs de Lisbonne100 ».
L’un des objectifs est d’accroître et améliorer l’investissement dans la recherche et
développement qui est l’un des moteurs de la croissance économique.
Dans le cadre d’un environnement concurrentiel, la Commission recherche les différents
incitatifs à l’investissement : « il faut augmenter le niveau des dépenses publiques consacrées
à la recherche et améliorer les liens entre la recherche publique et le secteur privé. Il
convient de renforcer les pôles et réseaux d’excellence, de mieux exploiter, dans l’ensemble,
les instruments d’aide publique pour stimuler les innovations du secteur privé et de garantir
un meilleur effet de levier de l’investissement public par une modernisation de la gestion des
instituts de recherche et des universités101 ».
Les aides d’Etat pourront être un instrument supplémentaire afin de répondre aux exigences
de la Commission en matière d’augmentation de l’investissement dans la recherche.
Dans la même optique, la Commission cherche aussi à faciliter l’innovation et ce en
permettant de mettre en place des conditions optimales à savoir : « l’existence de marchés
financiers et de marchés des produits fonctionnant bien, ainsi que des moyens efficaces et
abordables de faire respecter les droits de propriété intellectuelle102 ».
Par exemple, la Commission met en avant, l’idée de mesures visant à encourager la création
et la croissance d’entreprises innovantes.
99
Op cit n°99, p 11.
Op cit n°99, P 17.
101
Op cit n°99, p 18.
102
Op cit n° 99, 18.
100
59
La Commission met donc en place une politique macroéconomique de relance et des réformes
microéconomiques, tout en respectant la stratégie de Lisbonne ainsi que le pacte de stabilité.
La Commission semble, dans le cadre de la stratégie de Lisbonne, infléchir sa position quand
à l’intervention de l’Etat dans l’économie. Si elle prohibe de manière générale l’intervention
de l’Etat dans l’économie, mais conformément à la théorie néoclassique, en
cas de
défaillance du marché, l’Etat peut intervenir et modifier la donne.
Toutefois il est intéressant de noter que la Commission semble s’être inspirée de deux
courants économiques dans la mise en place de ses réformes.
En effet, dans le cadre de la relance de la stratégie de Lisbonne, la Commission a tenu compte
des préceptes de l’économiste autrichien Schumpeter, mais aussi des travaux de l’économiste
Solow sur la croissance endogène.
L’économiste autrichien Joseph Aloïs Schumpeter, qui a consacré une partie de son œuvre à
l’analyse de l’évolution du capitalisme, démontre dans son ouvrage « Théorie de l’évolution
économique » datant de 1911, l’importance cruciale des innovations et la place non
négligeable de l’entrepreneur dans les cycles économiques et comme moteur de la croissance,
en effet « il met en œuvre de nouvelles méthodes de production et lance de nouveaux
produits 103».
Il étaye sa thèse dans son ouvrage « les cycles des affaires » datant de 1939, dans lequel il
distingue trois grands types de cycles économiques en les expliquant par l’émergence et
l’absorption de vagues d’innovations.
En effet, il définit le capitalisme comme un système « essentiellement dynamique dans lequel
les entrepreneurs, perpétuellement menacés de disparition par la concurrence et donc à la
recherche de nouvelles occasions de profits, introduisent des déséquilibres novateurs par
leurs innovations : nouveaux produits ou nouveaux procédés de fabrication, nouvelles
méthodes de gestion des entreprises, nouveaux marchés104 ».
103
104
C-D. ECHAUDEMAISON, « dictionnaire d’économie et de sciences sociales », nathan, 1993, p 362.
Op cit n° 105, p 436.
60
L’évolution du capitalisme est selon Schumpeter est marquée par une destruction créatrice :
« la disparition et l’apparition de nouvelles techniques, la mise en place de nouvelles
fonctions de production scandent son développement105.
Par conséquent, en mettant en avant des réformes microéconomiques de relance de
l’économie dans le GOPE, ces dernières étant basées sur la relance de la recherche et
développement ainsi que sur l’innovation, sont conformes aux idées de Schumpeter.
En plus de Schumpeter, les mesures de la Commission semblent s’inspirer des théories de la
croissance endogène en particulier des explications postérieures à celles de Solow : « les
théories de la croissance endogène expliquent la croissance économique par les
comportements des agents et par des variables macroéconomiques 106».
On parle de croissance endogène, car cette dernière dépend de paramètres que les pouvoirs
publics ou les comportements des personnes privées peuvent influencer.
Pour l’économiste Romer qui a poursuivi les travaux de Solow « il existe des externalités
dans l’accumulation du capital : les firmes, prises individuellement, négligent le fait qu’en
augmentant leur propre capital elles accroissent la productivité du capital des autres. Les
subventions gouvernementales peuvent compenser ces externalités107 ».
De plus cette théorie distingue quatre principaux facteurs de croissance endogène à savoir :
« la recherche et développement, qui permet davantage de découverte par l’accumulation de
connaissances et le dépôt de brevets, les infrastructures publiques (R. Barro) qui renforcent
le taux de croissance à long terme, et le capital humain (R. Lucas), défini comme « constitué
par les aptitudes, les qualifications et les connaissances d’individus particuliers
108
» (D.
Romer, 1997).
Par conséquent, une externalité (« un agent économique crée un effet externe lorsqu’il
procure à autrui par son activité ou son utilité, un avantage gratuit ou une désutilité, un
dommage, sans compensation monétaire109 ») sur une grande échelle est selon ses
105
Op cit n°105, p 107.
BEGG, FISHER, DANNBUSH, « macroéconomie », Dunod, 2002, p 300.
107
Op cit n°108, p 303.
108
Op cit n° 108, p 303.
109
Op cit n°105, p 171.
106
61
économistes une bonne base pour des pouvoirs publiques afin d’encourager l’éducation, la
formation et la constitution du capital physique.
En effet, l’Etat peut trouver une légitimité conforme à la logique du marché lorsque ce dernier
intervient pour provoquer l’internalisation des coûts externes, et par conséquent améliorer le
fonctionnement de l’économie et le bien-être social.
Les aides d’Etat auront un rôle à jouer dans le processus d’internalisation des externalités, en
particulier les externalités négatives, et justifier une intervention de l’Etat.
Selon Horst Reichenbach110, les réformes permettant de maximiser la stratégie de Lisbonne
sont « un policy mix maximisant la croissance tout en garantissant la stabilité des prix et la
bonne gestion des finances publiques est une condition sine qua non du renforcement de
notre modèle économique et social111».
De même, il propose de mettre les aides d’Etat au premier plan : « la Commission propose de
maximiser l’effet de levier que peut exercer la dépense publique. Elle va donc réformer
l’encadrement des aides d’Etat afin de favoriser celles qui contribuent à la recherche et à
l’innovation et pousser les Etats membres à se doter d’instruments fiscaux favorisant
l’investissement dans la recherche, notamment par le biais de crédits d’impôts112 »
La stratégie de Lisbonne est une stratégie de politique économique cohérente à l’échelle de
l’Union européenne, car elle est intégrée au pacte de stabilité.
Elle est fondée sur des postulats économiques qui « favorisent » d’une certaine manière
l’intervention des Etats dans l’économie, les aides d’Etat étant un de ces leviers.
Les aides d’Etat ne sont qu’un levier parmi tant d’autres, à la différence, que ce dernier n’est
pas grippé, et la Commission en dispose plus facilement. En effet, l’instrument des aides
d’Etat est du monopole de la Commission, elle a donc une marge de manœuvre
institutionnelle plus large, car elle n’a pas besoin de l’aval du Conseil.
Par conséquent, la prise en charge de la défaillance du marché par l’Etat via les aides d’Etat
reste conforme à la philosophie de la Commission.
110
H. REICHENBACH, « Lisbonne : où en est on?», les petites affiches, les dossiers de l’Europe, 19 décembre
2005, n°251, p 13.
111
Op cit n°112, p 13.
112
Op cit n°112, p 13-14.
62
On assiste donc à un changement de philosophie de la Commission quant l’interventionnisme
étatique par l’entremisse des aides d’Etat.
Sous l’impulsion de cette nouvelle stratégie, la Commission va réformer l’encadrement des
aides d’Etat, dans le but de pousser les Etats à mettre en œuvre la stratégie de Lisbonne
Ce nouveau plan d’action des aides d’Etat que nous allons étudier dans cette seconde partie va
devenir un outil plus performant au service de la relance de l’économie de l’Union
européenne.
II. Deux politiques désormais liées par un objectif commun : relancer
l’économie de l’Union européenne.
L’Union européenne s’est fixé comme principal objectif de relancer l’économie de
l’Union en la rendant plus compétitive et en mettant l’accent sur des secteurs à fort potentiel
de valeur ajoutée.
Comme nous l’avons vu précédemment, il devenait nécessaire de réformer la politique des
aides d’Etat, en la concentrant sur les objectifs de la stratégie de Lisbonne (A).
Mais on peut tout de même s’interroger sur la marge de manœuvre que possède l’Union
européenne pour mener à bien sa politique dans le cadre des accords GATT/OMC, mais aussi
dans sa volonté de crée un embryon de politique industrielle commune (B).
A. La concentration de la politique des aides d’Etat sur les objectifs de la
stratégie de Lisbonne.
63
Le plan d’action des aides d’Etat lancé en juillet 2005 a pour objectif de moderniser la
politique des aides d’Etat dans le cadre de la stratégie de Lisbonne pour la croissance et
l’emploi (1). Il préconise de relancer certains secteurs de l’économie grâce aux aides d’Etat
(2). Mais cette relance ne peut être un succès sans la participation des Etats membres, dans ce
contexte, la Commission leur demande de mettre en place des programmes de réformes
nationaux.
1) Le nouveau plan d’action des aides d’Etat.
Ce nouveau plan associe les objectifs de la stratégie de Lisbonne à la réforme des aides d’Etat
(a), ce qui n’est pas sans conséquence sur la politique des aides (b).
a) Le plan d’action des aides d’Etat
Dans un contexte de baisse du niveau général des aides d’Etat, la Commission
souhaite aller vers plus de qualitatif que de quantitatif dans l’octroi des aides d’Etat, comme le
souligne le discours du commissaire Kroes « The state aid action plan – delivering less and
better targeted aid 113».
Ainsi, dans le cadre d’une politique de concurrence et de relance économique, la Commission
souhaite mettre en place une nouvelle politique des aides d’Etat fondée sur « but efficient and
equitable state aid can also stimulate competition and support the economic reform process
in new ways, acting as a driver for the virtuous circle of economic growyh, better standards
of living, and more and better jobs. The commission‘s state aid action plan launches a
comprehensive, coherent and farreaching reform on state aid policy, as a direct contribution
to the renewed lisbon strategy. Our leitmotif is the European council’s call for “less and
better targeted state aid114”.
113
N. KROES, « The state aid action plan – delivering less and better targeted aid », UK presidency seminar on
state aid, London 14th july 2005, speech/05/440.
114
Op cit n°115, p 2.
64
L’approche des aides d’Etat s’est modifiée depuis quelques années, en effet on a tenu compte
de plus en plus de l’économie dans la définition des aides d’Etat, et ce qui a eu pour
principale conséquence de mettre en place une analyse concurrentielle des aides d’Etat, tout
en tenant compte « que l’objectif de la politique des aides d’Etat ne peut totalement se
confondre avec celui des règles applicables aux entreprises115 ».
La politique des aides d’Etat est une partie intégrante de la politique de concurrence, elle
participe de ce fait à l’unification du marché intérieur qui est une des finalités premières de la
construction européenne.
La politique de concurrence a donc plusieurs finalités : elle préserve au mieux les intérêts des
citoyens en particulier dans l’amélioration de leurs conditions de vie, ce qui est l’un des
objectifs du traité.
Dans l’ordre économique, elle assure le bon fonctionnement des marchés, condition sans
laquelle il serait difficile de fournir aux consommateurs des produits à bas prix.
De même, elle un offre un contexte favorable aux entreprises les plus innovantes et efficientes
qui en seront récompensées, sur fonds d’amélioration de la compétitivité.
Dans le cadre des aides d’Etat, la politique de concurrence est aussi nécessaire à la cohésion
économique et sociale de l’Union, la politique de concurrence est un complément évident des
politiques sectorielles comme par exemple, en matière d’industrie, d’énergie, de l’agriculture
ainsi que des transports.
De plus, la Commission veille tout particulièrement à ce que les aides concédées par les Etats
aux entreprises ne soient une forme nouvelle de protectionnisme.
De plus, la Commission justifie un contrôle accru des aides d’Etat, dans le but de « maintenir
des règles du jeu équitables116 » dans le cadre du marché unique.
115
AFEC, « observations de l’AFEC sur le plan d’action de la Commission dans le domaine des aides d’Etat »,
15 septembre 2005, p 1.
116
Plan d’action dans le domaine des aides d’Etat, « des aides d’Etat moins nombreuses et mieux ciblées : une
feuille de route pour la réforme des aides d’Etat 2005-2009 », document de consultation présenté par la
Commission, COM(2005)107 final, 7 juin 2005, p 4.
65
Les aides d’Etat peuvent entraîner d’une part des avantages sélectifs injustifiés à certaines
entreprises, ce qui n’est pas sans conséquence pour la compétitivité des entreprises
communautaires, car ces avantages ne récompensent pas les efforts des entreprises les plus
novatrices.
D’autre part, les aides d’Etat peuvent entraîner un pouvoir de marché qui peut être défini
comme le fait que : « tout agent économique qui a la possibilité d’influencer significativement
le prix du marché possède un pouvoir de monopole ou un pouvoir de marché. L’intervention
de l’Etat pour limiter le pouvoir de marché, par exemple en évitant des prix trop élevés, peut
améliorer l’allocation des ressources 117». Alors les entreprises ne bénéficiant pas de ce type
d’aide peuvent se voir contraintes de réduire leur présence sur le marché en question.
Dans ces cas présents, on peut alors affirmer que l’allocation d’aides d’Etat provoque des
distorsions de concurrence au détriment des consommateurs, ces derniers assisteront
probablement à une augmentation des prix, une détérioration de la qualité, ainsi qu’à un
ralentissement de l’innovation.
En plus des possibles distorsions de concurrence, les aides d’Etat ont un coût, comme le
précise le plan d’action des aides d’Etat « ce sont en définitive les contribuables qui doivent
les financer. Elles entraînent des coûts d’opportunité en ce que l’octroi d’aides à des
entreprises se fait au détriment d’autres domaines d’intervention publique.
Or les ressources publiques sont à la fois limitées et nécessaires pour répondre à de
nombreux objectifs essentiels, tels que l’éducation, la santé, la sécurité nationale, la
protection sociale…
Il y a donc lieu, pour les Etats membres, de faire des choix dans la transparence et d’établir
des priorités118 ».
La politique des aides d’Etat doit donc sauvegarder la concurrence sur le marché unique, et la
Commission doit garantir un traitement égal pour tous les Etats membres, ainsi que le respect
des règles du traité.
117
BEGG, FISHER, DANNBUSH, « macroéconomie », Dunod, 2002, p 55.
Plan d’action dans le domaine des aides d’Etat, « des aides d’Etat moins nombreuses et mieux ciblées : une
feuille de route pour la réforme des aides d’Etat 2005-2009 », document de consultation présenté par la
Commission, COM(2005)107 final, 7 juin 2005, p 4.
118
66
Mais cette politique des aides d’Etat doit évoluer, en effet, en plus de prendre en compte les
différentes politiques communautaires, elle doit aussi tenir compte du contexte internationale
et commerciale : « la politique communautaire des aides d’Etat doit prendre en compte
l’environnement international dans lequel les entreprises évoluent. L’existence de subventions
accordées aux entreprises dans des Etats qui ne disposent pas de législation en la matière ne
peut être ni occultée ni sous-estimée. Une trop grande rigidité des règles en matière d’aides
dans l’Union européenne risquerait d’affaiblir la compétitivité des entreprises européennes
qui opèrent, pour la plupart, sur un marché mondial119 ».
De plus, la politique des aides d’Etat souffre parfois d’un manque de cohérence ce qui est
source d’insécurité juridique.
Comme le souligne l’association française d’étude de la concurrence (AFEC), l’insécurité
juridique peut se traduire par :
« un grand nombre de textes (encadrements, règlements d’exemption) parmi lesquels
il est difficile de s’y retrouver ;
une obligation de notifier dans la majorité des hypothèses, avec ensuite des délais de
procédure longs ;
en cas de doute quant à la qualification de la mesure et en l’absence de notification,
un risque de voir une juridiction nationale déclarer la mesure illégale ;
un risque de remboursement non négligeable qui frappe les petites entreprises comme
les plus grandes, alors que l’obligation de notifier ne leur incombe pas et qu’elles n’ont bien
souvent aucune possibilité de vérifier que cette notification est intervenue (notamment dans le
cas des régimes d’aides)120».
Pour répondre à ces problématiques, ainsi qu’aux nouveaux défis de l’Union européenne
(nouvelle impulsion à la stratégie de Lisbonne, l’élargissement, complexité croissante de la
politique des aides d’Etat), le Conseil européen du printemps 2005 encourage la poursuite des
réformes et le mouvement de baisse général des aides d’Etat : « ce mouvement doit
119
AFEC, « observations de l’AFEC sur le plan d’action de la Commission dans le domaine des aides d’Etat »,
15 septembre 2005, p 2.
120
AFEC, « observations de l’AFEC sur le plan d’action de la Commission dans le domaine des aides d’Etat »,
15 septembre 2005, p «3, 4.
67
s’accompagner d’un éventuel redéploiement des aides en faveur du soutien de certains
objectifs horizontaux, tels que la recherche et l’innovation et la valorisation du capital
humain121 ».
Par conséquent, la Commission, la même année va présenter son nouveau plan d’action des
aides d’Etat, qui va allier des réformes tant sur le fonds que sur la forme : « répondre aux
nouveaux défis nécessite une révision en profondeur des règles actuelles sur les aides d’Etat,
tant ce qui concerne le fond que les procédures. Un examen effectif des effets allocatifs ou
distributifs des aides d’Etat doit prendre en compte leur contribution à des objectifs
politiques désirables qui ont été agrées en commun122 ».
Comme nous l’avons montré auparavant, une réforme des aides d’Etat permettra à la
Commission d’inciter les Etats membres à appliquer la stratégie de Lisbonne, c’est dans cet
objectif que la réforme est basée sur les éléments suivants :
« des aides d’Etat moins nombreuses et mieux ciblées ;
une approche économique plus fine ;
des procédures plus efficaces et une amélioration de l’application, de la prévisibilité
et de la transparence ;
un partage des responsabilités entre la Commission et les Etats membres : la
Commission ne pourra pas améliorer les règles et les pratiques dans le domaine des aides
d’Etat si elle ne bénéficie pas du soutien effectif des Etats membres et si ceux-ci ne s’engagent
pas pleinement à respecter les obligations qui sont les leurs, à savoir notifier toutes les aides
envisagées et bien appliquer les règles »123.
La Commission va mettre en place une analyse économique et juridique pour déterminer
quand une mesure est une aide d’Etat :
121
Plan d’action dans le domaine des aides d’Etat, « des aides d’Etat moins nombreuses et mieux ciblées : une
feuille de route pour la réforme des aides d’Etat 2005-2009 », document de consultation présenté par la
Commission, COM(2005)107 final, 7 juin 2005, point 14, p 5.
122
Op cit n°124, point 18, p 6.
123
Plan d’action dans le domaine des aides d’Etat, « des aides d’Etat moins nombreuses et mieux ciblées : une
feuille de route pour la réforme des aides d’Etat 2005-2009 », document de consultation présenté par la
Commission, COM(2005)107 final, 7 juin 2005, point 18, p 6.
68
En matière économique, la Commission a choisi une nouvelle approche dans sa perception
des aides d’Etat à savoir « une approche économique plus fine dans le domaine des aides
d’Etat devrait notamment entraîner une prise en compte plus systématique et plus
pragmatique des effets que peuvent avoir sur la concurrence diverse formes de soutiens –
directs ou indirects – dont peuvent bénéficier des entreprises non européennes, concurrentes
d’entreprises européennes 124».
Le test de la mise en balance devient l’un des outils économiques pour l’analyse de la
compatibilité des aides.
La Commission met ainsi en balance, les effets positifs de la mesure d’aide (atteindre un
objectif d’intérêt commun) et ses effets potentiellement négatifs (distorsions des échanges et
de la concurrence). Et c’est aux Etats membres qu’il incombe de fournir les preuves
nécessaires à cet égard, avant que la mesure envisagée ne soit mise en œuvre.
Seulement, la Commission se garde de préciser comment va se dérouler le test économique de
la mise en balance et quels seront les critères pris en compte.
Selon Thibault Kleiner et Alain Alexis125, l’analyse économique pourrait se réaliser selon les
trois étapes qui suivent :
Dans une première étape, la Commission sera tenu de vérifier que l’objectif de l’aide
est clairement identifié et qu’il vise bien un objectif d’intérêt commun, comme la croissance,
la protection de l’environnement, la cohésion économique et social.
On recherche par conséquent une défaillance du marché qui sera susceptible de justifier
l’intervention de l’Etat. Mais il faut rappeler que la défaillance du marché paraît être une
condition nécessaire mais pas suffisante à l’octroi d’une aide d’Etat.
Dans un second temps, la Commission devra vérifier que l’aide a été conçue de
manière adéquate pour atteindre l’objectif visé, d’un point de vue d’efficience et d’efficacité :
124
.Op cit n°123, point n°7, p 2.
125
T. KLEINER, A. ALEXIS « politique des aides d’Etat : une analyse économique plus fine au service de
l’intérêt commun », concurrences, n° 4, 2005, point 40, p 51.
69
Ainsi une première question se pose : l’aide est elle le bon instrument pour atteindre l’objectif
visé ? Les mesures mises en place ne devront pas être inefficientes, et c’est uniquement à
l’Etat membre d’apprécier l’opportunité de la solution choisie.
Une seconde question doit être abordée à savoir si la mesure envisagée est suffisamment
incitative. Cette mesure est-elle capable d’entraîner un changement de comportement chez le
bénéficiaire ? Le but est d’éviter que le bénéficiaire ne profite pas de l’aubaine que serait cette
aide.
Dans ce cas, une analyse économique poussée ne conduirait pas nécessairement à une
approche plus restrictive en matière d’aide, mais pourrait ainsi établir que, dans certains cas,
l’intensité de l’aide est insuffisante pour avoir un caractère incitatif.
Enfin, la troisième question se portera sur la proportionnalité de l’aide par rapport au
problème visé, c'est-à-dire que la Commission sera tenue de vérifier si le montant de l’aide et
son intensité ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire pour produire un effet incitatif.
La troisième étape quant à elle vise à faire la balance entre les aspects positifs de l’aide
et les aspects négatifs sur la concurrence afin de s’assurer qu’elle contribue réellement à
l’intérêt commun.
Les critères d’analyse seront différents selon les types d’aides présentés, mais les auteurs
soulignent qu’un certains nombres de critères utilisés en matière d’antitrust développés par le
Frontier Economics pour l’OFT 126 qui identifie plusieurs types d’effets sur la concurrence
résultant des aides d’Etat pourront être repris : « i) des effets sur le comportement des
entreprises (entrée/sortie du marché ; variations de prix, de quantités produites ; décisions
d’investissement) et ii) des effets sur l’efficacité des marchés (inefficacités allocatives,
productives, dynamiques).
Les deux éléments de l’analyse économique que sont le test de la mise en balance ainsi que
l’analyse des défaillances du marché vont renforcer l’approche économique de l’analyse des
aides d’Etat. Cette approche économique selon la Commission « sert d’instrument pour mieux
concentrer certaines aides d’Etat sur les objectifs de la stratégie de Lisbonne 127».
126
Op cit n° 128, point n° 43, p 51, OFT 750, annexe C – The effects of public subsidies on competition, A
report prepared for the Office of Fair Trading by Frontier Economics, November 2004.
127
Plan d’action dans le domaine des aides d’Etat, « des aides d’Etat moins nombreuses et mieux ciblées : une
feuille de route pour la réforme des aides d’Etat 2005-2009 », document de consultation présenté par la
Commission, COM(2005)107 final, 7 juin 2005, point 21, p 7.
70
Sans nul doute, que la Commission fait référence de nombreuses fois à la stratégie de
Lisbonne, au point que l’on peut s’interroger si la Commission ne s’en sert pas comme
principal pivot de la mise en œuvre de la stratégie de Lisbonne.
Après avoir présenté la nouvelle politique des aides d’Etat dans le cadre de la stratégie de
Lisbonne pour la croissance et l’emploi, la Commission dans un second temps comment elle
compte « concentrer les effets sur les grandes priorités 128».
La réglementation communautaire sur les aides d’Etat est fondée pour l’essentiel sur deux
catégories d’instruments que sont : les règlements d’exemption par catégorie et les
encadrements communautaire.
Cette réglementation a permis ainsi de réorienter les aides vers les objectifs de la stratégie de
Lisbonne. Puisque les objectifs de la stratégie de Lisbonne peuvent entrer dans une catégorie
d’exemption.
D’ailleurs ne serait il pas souhaitable de passer les objectifs de la stratégie de Lisbonne dans
un règlement général d’exemption ou de les encadrer?
Mais comme le souligne Thibault Kleiner et Alain Alexis129 « les encadrements ont permis
d’accroître la prévisibilité pour les Etats membres et ont contribué à réduire
considérablement le travail administratif des Etats membres comme de la Commission en
permettant la notification de régimes qui constituent en fait des minis règlements d’exemption
par catégorie […] les encadrements constituent une forme moderne d’intervention publique ».
De même, il ne faut pas sous estimée, l’importance juridique de ces instruments relatifs aux
aides. En effet, à la différence des lignes directrices par exemples, les encadrements et les
règlements d’exemption par catégorie détaille les critères de compatibilité des aides, tant en
ce qui concerne les coûts éligibles que les intensités d’aide.
128
Op cit n° 130, point II, p 8.
T. KLEINER, A. ALEXIS « politique des aides d’Etat : une analyse économique plus fine au service de
l’intérêt commun », concurrences, n° 4, 2005, point 44, p 52.
129
71
Dans cette optique, la Commission veut recentrer ses efforts sur l’innovation et la recherche
développement, un environnement stimulant pour les entreprises, l’investissement dans le
capital humain, des services intérêt économique général de meilleure qualité, un
développement écologique viable…
Pour la recherche et développement ainsi que l’innovation, la Commission souhaite
« créer et faire croître des secteurs à forte valeur, innovants et basés sur la recherche, qui
soient capables de concourir au plus haut niveau mondial 130».
Pour la Commission, des aides d’Etat dans ce secteur peuvent se justifier lorsqu’il est
nécessaire d’augmenter les mesures favorisant l’innovation et lorsque cela n’entraîne pas un
assèchement des initiatives privées ou une concurrence déloyale, mais l’encadrement se fera à
la lumière des objectifs de Lisbonne et de Barcelone.
La volonté affichée est de créer un environnement favorable à l’investissement par l’industrie
dans la recherche et développement, et de mettre ainsi à profit les avancées dans ce domaine.
L’encadrement futur devra aussi tenir compte de la volonté de la Commission de favoriser les
partenariats publics/privés dans ce domaine.
En ce qui concerne le monde de l’entreprise, la Commission souhaite « créer un
meilleur environnement pour les entreprises et stimuler l’esprit d’entreprise ».
En effet, son programme tient en un allégement des charges administratives, et en améliorant
la qualité de la législation.
La Commission tiendra à réexaminer sa communication sur le capital investissement, afin
« 131 d’encourager l’esprit d’entreprise et de stimuler l’investissement de capital risque,
notamment dans les start–ups et les jeunes PME innovantes, pour autant que cela permette de
remédier de façon adéquate à des défaillances avérés du marché».
130
Plan d’action dans le domaine des aides d’Etat, « des aides d’Etat moins nombreuses et mieux ciblées : une
feuille de route pour la réforme des aides d’Etat 2005-2009 », document de consultation présenté par la
Commission, COM(2005)107 final, 7 juin 2005, point 24, p 8, 9.
131
Plan d’action dans le domaine des aides d’Etat, « des aides d’Etat moins nombreuses et mieux ciblées : une
feuille de route pour la réforme des aides d’Etat 2005-2009 », document de consultation présenté par la
Commission, COM(2005)107 final, 7 juin 2005, point 30, p 10.
72
Dans le cadre de l’investissement dans le capital humain, la Commission rappelle que
la politique de l’emploi est une des pierres angulaires de la stratégie de Lisbonne, cette
dernière souhaite faire « une main d’œuvre qualifiée, formée et adaptable132».
Elle préconise donc l’emploi des aides d’Etat « lorsqu’il apparaît nécessaire d’inciter les
employeurs, par des mesures appropriées, à engager plus de travailleurs qui ont des difficultés
à accéder au marché de l’emploi et à y rester et à fournir une formation appropriée à leurs
travailleurs 133 ». En plus des aides aux travailleurs les plus en difficulté, la Commission
souhaite aussi l’octroi d’aide dans le but d’améliorer la qualité de l’enseignement et de la
formation.
Il est possible pour les Etats membres de financer des services d’intérêt économique
général, par le biais de compensation de services publics. Or ces missions doivent être
réalisées dans des conditions qui n’accordent pas de compensations excessives, ni de
distorsions de concurrence.
Depuis l’arrêt Altmark, la Commission se doit sur ce sujet d’assurer la sécurité juridique, ainsi
elle va au titre de l’article 86§3adopter une décision et des orientations « précisant dans
quelles conditions les compensations accordées au titre des missions de service public qui
constituent des aides d’Etat sont compatibles avec le traité134 ».
Dans la cadre du troisième pilier de la stratégie de Lisbonne, à savoir, le
développement durable, la Commission souhaite par le biais des aides d’Etat encourager un
développement écologique viable.
En plus d’être impérative, la Commission relève que cette politique peut « favoriser la
compétitivité de l’Europe, en apportant des possibilités d’innovation, de nouveaux marchés et
une augmentation de la compétitivité grâce à l’utilisation efficiente des ressources et à
l’investissement135 ».
Dans le cadre du nouvel encadrement qui sera renégocié en 2007, la Commission cherchera à
internaliser de façon complète des coûts environnementaux, et d’encourager l’eco-innovation.
132
Op cit n°134, point n° 31, p 10.
Op cit n° 134, point n° 31, P 10.
134
Op cit n° 134, point n°34, p 11.
135
Plan d’action dans le domaine des aides d’Etat, « des aides d’Etat moins nombreuses et mieux ciblées : une
feuille de route pour la réforme des aides d’Etat 2005-2009 », document de consultation présenté par la
Commission, COM(2005)107 final, 7 juin 2005, point 45, p 13.
133
73
Le nouveau plan d’action en matières des aides d’Etat, en plus de redéfinir les priorités en
matières de politique des aides d’Etat, profite de cette opportunité pour moderniser les
pratiques et les procédures dans le domaine des aides.
Dans un premier temps, la Commission tient à une simplification et à une codification de la
réglementation. En effet, elle adoptera un règlement général d’exemption par catégories qui
exemptera certaines catégories d’aides d’Etat de notification à la Commission.
De même, la Commission est en mesure de définir et ce pour l’ensemble des Etats membres
des critères de compatibilité généraux des aides.
La Commission se voit attribuer sous certaines conditions, compétence pour exempter des
aides dans certains secteurs comme, les PME, la recherche et développement,
l’environnement et l’emploi.
La Commission entend dans le même sens « simplifier et consolider les règlements actuels
(formation, PME et emploi) et intégrer un éventail plus large d’exemptions notamment en ce
qui concerne les aides destinées à soutenir les PME et la R&D136».
Dans un second temps, la Commission veut moderniser les pratiques et es procédures dans le
domaine des aides d’Etat.
Elle veut mettre en place une meilleure gouvernance, en partageant les responsabilités avec
les Etats membres.
L’un des principaux objectifs est de réduire la longueur des délais, en particulier d’équilibrer
la durée de la procédure et la garantie d’un contrôle effectif, tout en sauvegardant les droits
des tiers.
La Commission souhaite, par la suite mettre en place un code de bonnes pratiques afin
d’améliorer les procédures et de mieux gérer le contrôle des aides d’Etat.
La Commission souhaite ainsi réduire la bureaucratie et cibler les contrôles, en effet, elle veut
s’assurer que les aides d’Etat remplissent parfaitement leurs objectifs et qu’ainsi elles
constituent le meilleur type d’intervention de l’Etat pour un objectif donné.
136
Op cit n°138, point n°36, p 11.
74
Ce plan d’action des aides d’Etat veut ainsi créer une nouvelle dynamique communautaire
pour relancer l’économie européenne, mais ce nouveau plan n’est pas sans conséquences pour
les aides elles-mêmes.
b) Un plan qui n’est pas sans conséquence pour les aides d’Etat.
Si le nouveau plan d’action des aides d’Etat semble corriger, certains inconvénients liés à la
pratique des aides d’Etats, il n’en demeure pas moins que ne nouveau plan soulève quelques
interrogations.
En effet, le plan est basé sur un objectif posé par le Conseil européen à savoir « des aides
moins nombreuses et mieux ciblées », mais il suscite pour certains professionnels quelques
inquiétudes quant à ses conséquences : « l’a priori est celui de l’existence présumée d’un lien
de causalité entre l’aspect quantitatif « moins d’aide » et l’aspect qualitatif « mieux ciblées ».
Or, rien ne permet de présumer l’existence d’un tel lien : la quantité n’est ni un gage de la
qualité, ni un indice de la nocivité d‘une politique d’aides d’Etat 137».
De même, l’ AFEC souligne qu’il regrettable « que la Commission puisse établir un lien de
cause à effet entre volume et efficacité138 ».
L’AFEC s’interroge sur les conséquences de l’application de la stratégie de Lisbonne à la
politique des aides d’Etat.
En effet, une trop grande focalisation de l’attribution des aides sur les objectifs de Lisbonne
risquerait « l’insistance mise sur l’aspect quantitatif ne risque t elle pas de conduire vers une
trop grande sévérité en matières d’aides, de sorte que seules les aides qui répondent
précisément aux objectifs de Lisbonne pourront désormais être jugées compatibles avec la
marché commun et de […] fragiliser la situation des entreprises communautaires au plan
international ?139».
137
AFEC, « observations de l’AFEC sur le plan d’action de la Commission dans le domaine des aides d’Etat »,
15 septembre 2005, point 20, p 4.
138
Op cit n°140, point 20 p 4.
139
AFEC, « observations de l’AFEC sur le plan d’action de la Commission dans le domaine des aides d’Etat »,
15 septembre 2005, point 21, p 4.
75
Si une approche économique plus fine est plus que souhaitable dans la définition des aides, il
semblerait que dans le plan d’action des aides d’Etat, cette nouvelle approche ne serve que les
intérêts de la stratégie de Lisbonne « cette analyse économique renforcée ne concernerait que
les aides entrant dans les objectifs de la stratégie de Lisbonne. Dès lors, on peut se demander
pourquoi une analyse économique plus fine ne concernerait pas l’ensemble des aides140 ».
La stratégie de Lisbonne entraîne t elle une redéfinition même de la notion juridique des aides
d’Etats ? : es objectifs de Lisbonne dictent ils la qualification juridique des aides d’Etat ?
De même que la paragraphe 21 du plan d’action laisse entendre qu’on ne voudrait appliquer
cette approche économique plus fine qu’aux seules aides qui s’insèrent dans la stratégie
« pour mieux contribuer à la stratégie de Lisbonne en faveur de la croissance et de l’emploi
qui vient d’être relancée, la Commission renforcera, le cas échéant, son approche
économique de l’analyse des aides d’Etat. Une approche économique sert d’instrument pour
mieux concentrer certaines aides d’Etat sur les objectifs de la stratégie de Lisbonne 141».
En réalité, comme le souligne l’AFEC, ce nouveau plan d’action qui est censé redynamiser la
politique des aides d’Etat ne doit pas profiter uniquement aux secteurs privilégiés par la
stratégie de Lisbonne : « il ne serait ni acceptable ni souhaitable d’enfermer toute la politique
des aides d’Etat dans la seule perspective de Lisbonne, ou de réserver le privilège d’une
analyse économique sérieuse aux seules aides s’inscrivant dans cette perspective142 ».
Dans le cadre de la relance de la stratégie de Lisbonne, le nouveau plan d’action des aides
d’Etat s’attache à cibler ses effets sur les grandes priorités comme la recherche et
développement, le capital risque, la protection de l’environnement, et par conséquent de
réorienter ces objectifs horizontaux comme des objectifs d’intérêt commun.
La relance de certains secteurs par le nouveau plan d’action des aides d’Etat
140
Op cit n° 142, point 23, p 5.
Plan d’action dans le domaine des aides d’Etat, « des aides d’Etat moins nombreuses et mieux ciblées : une
feuille de route pour la réforme des aides d’Etat 2005-2009 », document de consultation présenté par la
Commission, COM(2005)107 final, 7 juin 2005, point 21, p 7.
142
Op cit n°142, point 32, p 6.
141
76
Comme il l’a été rappelé précédemment, la recherche et développement (R&D) ainsi que
l’innovation sont des éléments clés de la stratégie de Lisbonne, de même que les aides d‘Etat
sont en principe prohibées sauf s’il y a une défaillance de marché.
La Commission souhaite ainsi mettre en place une politique dynamique de relance en tenant
compte du fait que si la concurrence demeure aux yeux de la Commission le principal moyen
de relance de l’innovation et de la recherche et développement, les aides d’Etat peuvent
contribuer à améliorer l’investissement dans ces domaines.
De même, la Commission compte sur les Etats membres via les programmes nationaux de
réformes pour conjuguer leurs efforts afin de relancer l’économie européenne.
La recherche et développement ainsi que l’innovation souffrent en Europe d’un déficit
flagrant d’investissement.
L’objectif fixé lors du Conseil européen de Barcelone en 2002 de 3% du PIB consacré aux
dépenses en ces matières d’ici 2010 sera difficilement atteint par l’ensemble des pays de
l’Union. En effet, les dépenses publiques et privées affectées à la recherche et développement
est de l’ordre de 1,99% du PIB dans l’Union des quinze et à 1,94% dans celle des vingt-cinq.
Quand à ces principaux concurrents, ce taux s’élève à 2,8% du PIB aux Etats-Unis et 3,1% au
Japon143.
En plus d’un plan de financement global pour ce secteur, l’Union souhaite développer
l’Espace Européen de Recherche (EER), qui sera une base européenne d’action coordonnée et
intégrée au delà des disciplines et des frontières.
La finalité est « de pouvoir réaliser les mêmes performances que l’économie américaine afin
de préserver la croissance, l’emploi, et le modèle sociale de l’Europe, face au défi du
vieillissement de sa population, de ses élargissements et de l’intensification de la concurrence
notamment asiatique144 ».
La Commission s’appuie donc d’une part sur l'article 157 du traité CE qui invite la
Communauté et les États membres à mener des actions destinées à encourager l'innovation, la
recherche et le développement technologique, et d’autre part sur l'article 87 paragraphe 3, qui
143
A.BUZELAY, « la problématique de la recherche et développement et de son financement en Europe »,
Revue du marché commun et de l’Union européenne, octobre – novembre 2005, n° 492, p 562.
144
Op cit n°146, p 563.
77
considère comme compatibles avec le marché commun les aides d'État destinées : « à
promouvoir la réalisation d'un projet important d'intérêt européen commun » et « à faciliter
le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques ».
Le but de l’encadrement est de définir, les plafonds maximaux de subvention aux aides d'État
destinées à la recherche et au développement.
La Commission effectue un examen au cas par cas afin de tenir compte de la nature du projet,
des risques de distorsion de la concurrence et de l'incidence sur les échanges entre les États
membres, puis elle détermine les pourcentages de financement admissibles sur le total des
coûts du projet.
Il est à noter que, les effets que les aides d'État à la R & D produisent sur le marché sont
différents, la Commission distingue :
« recherche fondamentale, qui est une activité visant l'élargissement des
connaissances scientifiques et techniques qui ne sont pas liées à des objectifs industriels ou
commerciaux ;
recherche industrielle, qui est une recherche menée pour mettre au point des produits,
procédés ou services, nouveaux ou déjà existants ;
activité de développement préconcurrentielle, qui est la concrétisation des résultats de
la recherche industrielle dans un plan / schéma / dessin pour des produits, procédés ou
services (par exemple : création d'un prototype, projets démonstratifs, projets pilotes
etc.)145 ».
A l’exception du financement public de la recherche fondamentale, toute aide d'État à la R &
D est généralement soumise à l’encadrement communautaire des aides d’Etat à la recherche et
au développement.
La Commission dans son plan d’action des aides d’Etat, souhaite modifier l’encadrement des
aides à la recherche et au développement, afin de le rendre compatible avec les objectifs de la
stratégie de Lisbonne et du Conseil européen de Barcelone.
145
Site de la Commission européenne « disposition applicable aux aides d’Etat, aides à la recherche et au
développement», www.europa.eu.
78
Cette révision doit permettre : « de mieux tenir compte des priorités de la politique de R&D
de la communauté, notamment la promotion de la coopération transfrontalière et les
Partenariats public-privé (PPP) dans la domaine de la recherche, la diffusion des résultats de
recherche et les grands projets de recherche d’intérêt général pour l’Europe.
Les aides d’Etat à la R&D pourraient permettre aux Etats membres de cibler les défaillances
du marché et d’élaborer des mesures incitant l’industrie à investir plus dans la R&D. C’est
pourquoi la Commission adoptera, pour la révision de l’encadrement, une approche plus
axée sur un processus interactif d’innovation industrielle, qui puisse également prendre en
compte une rétroaction constante du marché146 ».
L’encadrement devra tenir compte donc des objectifs de la stratégie de Lisbonne mais aussi
« de l’importance de plus en plus grande des partenariats public-privé dans le domaine de la
R&D. Il devra notamment contenir des dispositions relatives à des recherches en
collaboration, couvrant aussi la détention de droits de propriété intellectuelle obtenus dans le
cadre de ce type de projet, ainsi que l’accès à ces droits et leur exploitation.
En outre, la nécessité de prévoir des aides à la diffusion devra également être pesée147 ».
A partir du mois de janvier 2007, il est fort probable que le 7ème programme cadre pour la
recherche et le développement entrera en vigueur.
Il donnera « une nouvelle impulsion à un espace européen de la recherche au bénéfice de tous
les Etats membres en renforçant la collaboration européenne, en mobilisant l’investissement
privé dans des domaines décisifs pour la compétitivité et en contribuant à combler le fossé
technologique.
Ce programme doit jouer comme un levier sur les budgets de recherche nationaux148».
146
Plan d’action dans le domaine des aides d’Etat, « des aides d’Etat moins nombreuses et mieux ciblées : une
feuille de route pour la réforme des aides d’Etat 2005-2009 », document de consultation présenté par la
Commission, COM(2005)107 final, 7 juin 2005, point 27, p 9.
147
Op cit n°148, point 28, p 9
148
Conseil européen de printemps, “conclusions de la Présidence”, Bruxelles, 22 et 23 mars 2005, point 9 p 3.
79
En plus de développer des partenariats publics privés afin de développer la R&D, le Conseil
propose d’étendre le mécanisme de financement de la banque européenne d’investissement à
des projets de R&D, et ainsi d’explorer avec la Commission de nouveaux moyens d’exploiter
les fonds communautaires.
De même, la Commission propose de « faire bon usage des marchés publics pour encourager
la recherche et l’innovation 149 ». A ce titre la Commission publiera un « manuel sur les
marchés publics, la recherche et l’innovation ».
Enfin, la Commission souhaite utiliser le levier des incitations fiscales afin de stimuler la
recherche dans les entreprises.
Le levier des aides d’Etat n’est pas le seul utilisé afin de d’encourager les entreprises à
investir dans la recherche et développement, mais il semblerait que ce soit le plus efficace et
surtout le seul qui permette un meilleur ciblage des objectifs spécifiques en matière de
recherche et d’innovation.
Dans un autre registre, la Commission souhaite ainsi « créer un marché du travail européen
ouvert et compétitif pour les chercheurs en valorisant la diversification des compétences et
les parcours professionnels au niveau transnational150 ».
La Commission souligne dans son plan d’action la nécessité de créer un encadrement
spécifique des aides d’Etat à l’innovation, dont l’objectif est de définir des critères clairs et
généraux de compatibilité, ainsi elle exemptera certaines mesures d’aides de l’obligation de
notification.
Dans cette optique, la Commission a proposé six mesures en faveur de l’innovation qui ont
reçu un accueil favorable: « focus on innovativing start–ups ; flexibilty for state aids to risk
capital ; expand the scope of current state aid rules for R&D ; subside SMEs to buy services
from innovation engineers ; and support the development of poles of excellence151».
149
COM(2005) 488 final “davantage de recherche et d’innovation – investir pour la croissance et l’emploi . Une
stratégie Commune », point 1.5, p 8.
150
Op cit n°151, point 1.4, p 7.
151
N.KROES, « intervention of Neelie Kroes », colloquium on state aid for innovation, European commission,
Brussels, 17 novembre 2005, p 2.
80
La Commission a lancé récemment une consultation152 sur les aides à l’innovation et tient à
souligner que si les aides d’Etat peuvent contribuer à encourager l’innovation par la détection
et la correction des défaillances du marché, elles ne sont qu’une réponse limitée au problème
du niveau insuffisant d’innovation en Europe, problème qui doit être pris dans sa globalité.
Dans cette consultation, la Commission confirme l’approche économique dans la définition
des aides d’Etat annoncé dans le plan d’action des aides d’Etat.
La Commission encourage par le biais des aides d’Etat les entreprises à prendre des
« risques » en matière d’innovation et d’expérimenter.
Elle souhaite la création d’entreprises innovantes, en particulier dans certains secteurs
couverts par la stratégie de Lisbonne comme la protection de l’environnement.
De plus, elle veut remédier à l’absence de fonds propres en particulier lors du démarrage de
l’entreprise, afin d’accroître l’apport de capital- risque au sein de l’Union.
Par la suite, elle souhaite obtenir par la conjugaison de ces différents éléments, le soutien à
l’expérimentation technologique et aux risques inhérents au lancement des produits novateurs.
La Commission veut mettre en place une politique de minimisation des risques pris par ces
entreprises tout en faisant jouer la concurrence qui demeure pour elle, le véritable moteur de
l’innovation.
Enfin, elle désire encourager la mobilité des travailleurs européens, ainsi que la mise en place
de pôle d’excellence grâce à la collaboration et au regroupement, afin de renforcer la
collaboration et l’émulation entre les entreprises et les universités par exemple.
Le Parlement européen note dans un rapport d’initiative153 que les aides d’Etat en matière
d’innovation ne sont pas la règle, et que dans le cas contraire elles devront être temporaires.
Ainsi, les aides d’Etat dans ce domaine « ne devraient être accordées qu’aux innovations qui
ne peuvent être financées par des moyens commerciaux normaux et qui contribuent aux
objectifs globaux de la vie des entreprises et de la société154 ».
152
Communication de la Commission, « document de consultation sur les aides d’Etat à l’innovation »,
COM(2005) 436 final, bruxelles, 21 septembre 2005.
153
Service de presse du Parlement européen, « le parlement souhaite cibler les aides d’Etat en faveur des
l’innovation », affaires économique et monétaire, 27 avril 2006, www.europarl.eu.int.
154
Service de presse du Parlement européen, « le parlement souhaite cibler les aides d’Etat en faveur des
l’innovation », affaires économique et monétaire, 27 avril 2006, www.europarl.eu.int.
81
Pour compléter ces dispositifs en matière de recherche et développement ainsi que dans
l’innovation, la Commission a modifié le règlement d’exemption par catégorie de minimis,
ainsi que les lignes directrices sur les aides d’Etat et le capital-investissement destinées aux
petites et moyennes entreprises.
L’objectif de la règle de minimis, est d’exempter de l'obligation de notification les aides de
minimis accordées par un État membre à une entreprise compatibles avec les règles de la
concurrence.
Le règlement en vigueur était le n°69/2001 concernant l’application des articles 87 et 88 du
traité CE aux aides de minimis, seulement ce dernier arrivait à expiration le 31 décembre 2006.
La Commission en a donc profité pour le modifier en particulier au niveau du montant du
plafond. Ce nouveau règlement entrera en vigueur le 1er janvier 2007.
Les aides de minimis sont des aides accordées par un État membre à une entreprise dont les
montants sont à considérer comme étant d'importance mineure. En conséquence, elles sont
exemptées de l'application des règles de concurrence. Le montant total des aides de minimis
ne peut pas dépasser 100 000 euros sur une période de trois ans en application du règlement
n°69/2001.
Cependant, dans le cadre d’une relance de certains secteurs dits stratégiques de l’Union
européenne, il est souhaitable de modifier la politique de minimis, en particulier de relever son
montant : « il peut être établi à la lumière de l’expérience de la Commission, que des aides
n’excédant pas un plafond de 150 000 euros sur une période de trois ans n’affectent pas les
échanges entres Etats membres et/ou ne faussent pas ou ne menacent pas de fausser la
concurrence, et ne tombent pas, par conséquent, sous le coup de l’article 87, paragraphe 1 du
traité155 ».
Le nouveau règlement de minimis, est exclusivement applicable aux aides accordées sous
formes de subventions et autres formes d’aides dont il est possible de calculer préalablement
et précisément l’équivalent-subvention brut, sans qu’il soit nécessaire d’effectuer une analyse
du risque.
155
COMMISSION, « projet de règlement concernant l’application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides
de minimis », 2006.
82
Le règlement s'applique aux aides octroyées aux entreprises de tous les secteurs.
Par exception, il ne s'applique pas aux aides :
- destinées au secteur du transport ;
- liées à la production, à la transformation ou à la commercialisation des produits
énumérés à l'annexe I du traité CE ;
- liées à l'exportation ;
- subordonnées à l'utilisation de produits nationaux plutôt qu'aux produits importés.
Le projet de règlement ajoute que « les aides consistant en des prêts, garanties, mesures de
capital-investissement et apports en capitaux ne sont pas traitées comme des aides de minimis,
sauf si la valeur totale de l’opération en cause n’excède pas le plafond de 150 000 euros sur
une période de trois exercices budgétaires156».
Le bénéficiaire d'un aide de minimis peut obtenir d'autres aides d'État pour le même projet,
puisque le montant de minimis ne constitue juridiquement pas une aide d'État. Par contre, pour
pouvoir assurer un contrôle sur le cumul des mesures de minimis, le règlement prévoit que
l'entreprise soit toujours informée du caractère de minimis de l'aide.
Le rehaussement du plafond d’exemption par catégorie de minimis semble ainsi libérer les
nombreuses petites et moyennes entreprises de secteurs dits « innovants » des lourdeurs
administratives de la notification. Ces mesures ont été prises en concomitance avec celles
relatives au capital investissement destinées aux petites et moyennes entreprises.
La stratégie de Lisbonne fait du soutien aux petites et moyennes entreprises (PME) un de ses
principales objectifs, ainsi que du soutien à l’innovation.
Mais dans un second temps elle remarque l’insuffisance du capital investissement proposé
aux jeunes entreprises innovantes, et souhaite y remédier en réformant les règles sur les aides
d’Etat dans un but de faciliter l’accès de ce type d’entreprises aux financements et au capital
investissement.
156
COMMISSION, « projet de règlement concernant l’application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides
de minimis », 2006, article 1, point 3, p 5.
83
L’objectif est de permettre, sous certaines conditions, l'octroi d'aides d'État au capital investissement d'entreprises.
La Commission définit le capital–investissement comme « le financement par apport de
capitaux propres de sociétés jugées à fort potentiel de croissance au cours des premières
phases de leur croissance. La demande de capital – investissement provient de sociétés à fort
potentiel de croissance qui n’ont pas suffisamment accès aux marchés de capitaux et l’offre
de capital - investissement d’investisseurs qui sont prêts à prendre des risques accrus en
échange d’une rémunération de leur investissement en fonds propres plus élevée que la
moyenne157 ».
Le plan d’action des aides d’Etat reprend le constat de la stratégie de Lisbonne révisée,
souligne qu’il est important d’améliorer l’environnement économique et ainsi de faciliter le
démarrage rapide de nouvelles entreprises en particulier dans des secteurs innovants. « A cette
fin, il a annoncé une révision de la communication sur les aides d’Etat et le capital –
investissement (CAECI) dans un sens permettant de mieux s’attaquer aux défaillances du
marché, d’accroître l’efficience économique et de stimuler l’innovation. Dans ce contexte, la
Commission s’est engagée à réformer les règles sur les aides d’Etat, notamment dans un sens
facilitant l’accès aux financement et au capital – investissement158».
La Commission a une approche plus souple qui permet aux Etats membres de mieux cibler
leurs mesures en faveur du capital – investissement en fonction des défaillances du marché en
cause.
Dans le cadre de son application, la Commission considère qu'il existe trois types de
bénéficiaires d'aide, notamment, les investisseurs, les fonds à travers lesquels le financement
est canalisé et les entreprises auxquelles l'investissement est destiné.
La spécificité des aides au capital - investissement réside dans sa finalité commerciale.
De plus il apparaît que certaines mesures de soutien au capital - investissement n'ont pas
d'effet de distorsion sur la concurrence. La Commission a donc reconnu que les aides d'État
au capital - investissement sont admissibles lorsqu'il est prouvé qu’il existe une défaillance
dans le fonctionnement du marché.
157
COMMISSION « lignes directrices sur les aides d’Etat et le capital – investissement destinées aux petites et
moyennes entreprises », 2005.
158
Op cit n°157, point 1.1, p 2
84
Afin d'autoriser le financement de capital - investissement, la Commission s'appuie sur
l'article 87 paragraphe 3, et estime que ceux-ci ne doivent pas dépasser : « 500 000 euros ou
750 000 euros dans les régions pouvant bénéficier d'aides en application de l'article 87,
paragraphe 3, point c), ou encore 1 million d'euros dans les régions pouvant bénéficier
d'aides en application de l'article 87, paragraphe 3, point a)159».
La Commission doit toutefois veiller à ce que l'aide soit proportionnelle à la défaillance du
marché et à ce que l'effet de distorsion sur le marché soit minimal. La Commission accepte
différentes formes de financement tels que notamment les fonds d'investissement, les
subventions aux frais administratifs et de gestion, les garanties aux investisseurs ou aux fonds.
L’aide se doit aussi d’être proportionnée. En effet, une mesure de capital – investissement
n’est satisfaisante que si l’aide est nécessaire dans tous ses éléments pour créer des incitations
à apporter des fonds propres à des PME dans les phases qui suivent : l’amorçage, la création
ou le démarrage.
La Commission, au niveau des critères de compatibilité de la mesure considère la taille, le
niveau de développement des entreprises concernées, l'existence de niveaux de sauvegarde
contre la distorsion de la concurrence, etc.
Par contre, elle tient à préciser que tout régime d'aide ne remplissant les conditions de la
présente communication ou de la règle de minimis doit être notifié au moyen d'un formulaire
type.
La stratégie de Lisbonne a placé la protection de l’environnement au cœur de sa politique. Le
plan d’action des aides d’Etat encourage un développement écologique viable « elle
cherchera notamment à encourager l’éco – innovation et l’amélioration de la productivité
par l’éco – efficacité, conformément au plan d’action en faveur des écotechnologies (PAET).
Certaines mesures pourraient également être exemptées de l’obligation des aides au titre du
règlement général d’exemption par catégorie 160».
159
SCADPLUS : « aides d’Etat et capital – investissement », www.europa.eu.
Plan d’action dans le domaine des aides d’Etat, « des aides d’Etat moins nombreuses et mieux ciblées : une
feuille de route pour la réforme des aides d’Etat 2005-2009 », document de consultation présenté par la
Commission, COM(2005)107 final, 7 juin 2005, point 46, p 13.
160
85
La Commission et les Etats membres sont tenus par le protocole de Kyoto signé par la
Commission et les Etats membres, lequel prévoit que les signataires s’engagent pour la
période 2008-2012 à réduire ou à limiter leurs gaz à effet de serre.
L’objectif est de réduire les émissions de ces gaz par rapport au niveau atteint en 1990. Mais
il appartient à chaque Etat membre de définir sa politique en la matière.
La Commission surveille ainsi les différentes mesures prises par les Etats dans le cadre du
protocole de Kyoto, parce que certaines seraient susceptibles d’être des aides d’Etat.
De plus, la Cour de justice dans sa jurisprudence du 13 septembre 2005 « Commission c/
conseil sur les sanctions pénales », a dégagé le principe selon lequel la Communauté
européenne est compétente pour obliger les Etats membres à prévoir des sanctions pénales
afin de protéger l’environnement.
La surveillance de la Commission dans le cadre du Protocole de Kyoto a pour objectif de
déterminer dans quelle mesure et sous quelles conditions des aides d'État peuvent s'avérer
nécessaires pour assurer la protection de l'environnement et le développement durable sans
avoir des effets disproportionnés sur la concurrence et la croissance économique.
La Commission a donc adopté un encadrement 161 fixant les lignes directrices de son
appréciation des mesures financières accordées pour la préservation des ressources naturelles.
En réalité cet encadrement est un compromis entre la protection de l’environnement et le libre
jeu de la concurrence.
L’encadrement s’applique à « toute action visant à réparer ou à prévenir une atteinte au
milieu physique ou aux ressources naturelles, ou à encourager une utilisation rationnelle de
ces ressources ». Cependant l’agriculture est exclue du champ d’application de l’encadrement.
L’article 87 §3 pose des dérogations à l’interdiction des aides d’Etat qui présentent pour la
Commission un caractère facultatif. Dans le cadre de la protection de l’environnement il en
existe deux :
161
COMMISSION, « encadrement communautaire des aides d’Etat pour la protection de l’environnement »,
2001/C37/03.
86
- D’une part, les « projets portant intérêt commun ». La Commission admet en effet
que la protection de l’environnement est une action : « destinée à promouvoir la réalisation
d’un projet important d’intérêt européen commun162».
- D’autre part, les « mesures destinées à faciliter le développement de certaines
activités ou de certaines régions économiques ». L’article 87§3 (c) est désormais le fondement
juridique de principe de l’appréhension des aides en faveur de l’environnement.
Par conséquent, lorsque certaines aides ne satisfont pas aux critères de l’encadrement, elles
pourront être examinées soit au titre de l’exemption fondée sur un projet d’intérêt commun,
soit elles pourront être autorisées après une étude minutieuse.
De même, il existe des cas d’exclusion des aides à la mise en conformité. En effet, la
Commission fait une distinction entre les aides qui permettent un niveau élevé de protection
de l’environnement et celles qui ne se sont plus admises au motif de l’absence
d’internalisation des coûts : « la Commission est d’avis que l’octroi d’aides ne doit plus
suppléer une absence d’internalisation des coûts163 ».
L’objectif ainsi affiché est de supprimer les aides incitant à gaspiller les ressources naturelles
et d’encourager durablement à concevoir et à utiliser des équipements et des techniques moins
polluantes.
Désormais, la Commission met en place une politique de « responsabilisation » des différents
acteurs.
La Commission dispose de plusieurs critères d’approbation de l’aide :
-
principe général issu de l’encadrement « déterminer dans quelle mesure et sous
quelles conditions des aides d’Etat peuvent s’avérer nécessaires pour assurer la
protection de l’environnement et le développement durable sans avoir des effets
162
CJCE 8 mars 1988, « exécutif régional Wallon c/ Commission », aff 62/87 et 72/87.
COMMISSION, « encadrement communautaire des aides d’Etat pour la protection de l’environnement »,
2001/C37/03.
163
87
proportionnés sur la concurrence et la croissance économique164 ».
-
l’aide d’Etat doit satisfaire un intérêt communautaire
-
l’aide d’Etat doit apporter un avantage au niveau communautaire en contrepartie des
impacts concurrentiels qui en résultent
-
l’aide d’Etat doit respecter les principes d’efficacité, de nécessité et de
proportionnalité.
Les aides peuvent être des aides à l’investissement, des réductions ou exonérations fiscales et
des subventions à l’investissement.
La Commission par ses différents dispositifs met la politique de l’environnement au cœur de
sa politique de relance économique.
La « nouvelle » stratégie de Lisbonne instituée en 2005 souhaite, à la suite de l’échec de la
méthode ouverte de coordination, impliquer de manière plus concrète les Etats membres dans
le succès de cette stratégie.
Afin d’inclure les objectifs de la stratégie de Lisbonne dans leurs politiques nationales, le
Conseil européen a suggéré que les Etats membres mettent en place « des programmes
nationaux de réformes ». Ces programmes permettent ainsi un meilleur suivi par la
Commission, dans une optique de cohérence et de croissance à l’échelle de l’Union.
La France a donc présenté son programme de réforme en octobre 2005, dont l’objectif est de
retrouver une croissance forte et dynamique, tout en préservant notre modèle de justice
sociale. « C’est ce que le Premier ministre appelle la croissance sociale 165».
Cependant, la France tient à préciser que conformément à la stratégie de Lisbonne « cet
objectif implique que chacun des Etats membres mènent une politique volontariste tout en
gardant le choix des moyens pour y parvenir166».
164
Op cit n° 163, point n° 5, p 2.
Programme français de réforme pour une croissance sociale, octobre 2005, p 2.
166
Programme français de réforme pour une croissance sociale, octobre 2005, p 2.
165
88
Ce plan de réforme souhaite inscrire ses réformes selon un double objectif : tenir le cap de la
croissance en menant une politique volontariste en faveur de la croissance, et faire que sa
politique de croissance sociale participe à l’objectif de Lisbonne.
Afin de réaliser ce double objectif, la France souhaite entre autres mettre en place une
politique d’amélioration de la compétitivité des entreprises, mettre en œuvre un volontarisme
de l’Etat dans le domaine industriel et de la recherche, tout en maintenant une politique
budgétaire rigoureuse.
Pour améliorer la compétitivité des entreprises, le France recentre son développement
économique sur une politique industrielle et de recherche conquérante.
Elle s’appuiera sur « une politique de relance des investissement publics pour développer de
nouvelles infrastructures et préparer l’après-pétrole […] cette politique d’avenir sera
financée par la maîtrise de dépenses courantes de l’Etat et les recettes de privatisation167 ».
De plus, l’Etat souhaite dynamiser cette politique par des « financements innovants
168
»
comme les partenariats publics privés, pour profiter de l’effet de levier que sont les
financements publics.
La France souhaite rassembler ses partenaires autour de cet objectif ambitieux, en rassemblant
d’une part au niveau français par le renforcement des pôles de compétitivité, et d’autre part au
niveau européen par le biais « de l’agenda de Lisbonne et d’une meilleure coordination des
réformes et des ambitions industrielles (ITER, Galiléo) 169».
Au niveau strictement interne, la France a inauguré cette année son agence de l’innovation
industrielle, dont le but est de financer des projets de recherche d’envergure mondiale, dans
des domaines de high-tech, l’énergie, la chimie, le transport et l’automobile.
Ce projet national de réforme est donc une présentation des réformes que souhaite mettre en
place l’Etat afin de parvenir à ces objectifs.
167
Op cit n° 168, p 4
Op cit n °168, p 4
169
Op cit n°168, p 4
168
89
On dénote la volonté de mettre au cœur de la politique économique de la France la R&D ainsi
que la protection de l’environnement, mais le projet reste lacunaire quant aux moyens
financiers permettant de relancer ces politiques.
Certes, la France souhaite mieux cibler ses dépenses tout en utilisant le levier des dépenses
publiques, mais en aucun cas elle ne fait mention des aides d’Etat, et reste floue quant au
budget alloué à ces politiques.
La commission souhaite relancer au plus vite les secteurs à forts potentiels de croissance,
comme la R&D, l’innovation, la protection de l’environnement, en conjuguant principalement
le levier public comme les aides d’Etat, et les ressources privées.
Il demeure également nécessaire de revoir la politique des aides d’Etat comme le fait le plan
d’action des aides d’Etat, afin de les rendre plus efficaces.
Néanmoins dans un contexte de mondialisation de l’économie, on peut s’interroger sur la
marge de manœuvre dont dispose l’Union européenne vis-à-vis de ses partenaires
économiques, dans ses choix économiques.
B. Dans le cadre de la mondialisation des échanges, quelle est la marge de
manœuvre de l’Union européenne ?
Dans le cadre multilatéral des échanges commerciaux au niveau mondial, l’Union européenne
(UE) qui est une Union douanière, se doit de respecter ses différents partenaires commerciaux
ainsi que les règles qui les régentent. Or dans le cadre de l’Organisation Mondiale du
Commerce (OMC), nous pouvons nous interroger sur la marge de manœuvre dont dispose
l’Union, afin de mener d’une part sa « politique économique » (1), et d’autre part une
politique industrielle cohérente et indépendante à l’échelle de l’Union (2).
1) L’union européenne et les accords GATT/OMC
90
Les dispositions initiales du General Agreement on Tariff and Trade (GATT) signées à la
Havane en 1947, avaient pour idée fondatrice que la coopération économique allait être le
fondement de la stabilité économique à travers le monde.
En effet, au sortir de la seconde guerre mondiale, l’ensemble du « bloc occidental » croyait au
bénéfice de la croissance économique par le moyen de la libéralisation des échanges et par
conséquent que la prospérité économique générée par une région ou un continent contribuerait
au développement des échanges mondiaux.
Les accords du GATT voulaient rompre avec l’unilatéralisme et le protectionnisme qui
prévalaient entre les deux guerres mondiales.
Il est à noter qu’à cette époque, les droits de douane étaient forts élevés, et que des pratiques
de dumping et les dévaluations monétaires à des fins compétitives étaient fréquentes.
Les Etats devaient alors déployer de nombreux moyens pour développer et réglementer leurs
échanges commerciaux mutuels.
Le GATT était à l’origine un dispositif transitoire dans l’attente de la ratification de la Charte
de La Havane qui prévoyait la création d’une organisation mondiale du commerce (OMC). La
ratification est intervenue en 1995 au terme du cycle de négociation de l’Uruguay « des
négociations multilatérales commerciales », date de création de l’OMC. Ces accords OMC
ont été ratifiés par les différents parlements nationaux.
L’OMC peut être qualifiée comme : « une organisation internationale qui fixe les règles
mondiales régissant les échanges commerciaux entre les nations adhérentes. Au cœur du
système géré par l’OMC, "le système commercial multilatéral", se trouvent les accords de
l’OMC, qui fixent les règles juridiques de base du commerce international et rappellent les
engagements d’ouverture des marchés pris par ses membres.
Ces accords sont négociés et signés par tous les membres de l’OMC puis ratifiés par leurs
parlements170 ».
170
COMMISSION EUROPEENNE, « politique commerciale : l’UE et l’OMC », www.europa.eu.
91
L’OMC est une organisation internationale dirigée par ses membres, elle est donc composée
de gouvernements et d’entités politiques.
A ce titre, L’Union européenne est l’entité représentée la plus intégrée. En effet, si les 25
États membres coordonnent leur position à Bruxelles et à Genève, c’est la Commission
européenne seule qui parle pour l’ensemble de l’UE dans presque toutes les réunions de
l’OMC.
Dans les années 1950, six pays européens ont décidé de mettre leurs ressources économiques
en commun et ont élaboré un système de prise de décision en commun sur des questions
économiques. A cette fin, ils ont formé trois organisations:
?
la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA),
?
la Communauté européenne de l’énergie atomique (Euratom),
?
la Communauté économique européenne (CEE).
C’est une Union douanière régionale dont le but est le rapprochement des marchés nationaux.
La CEE puis l’UE a donc à l’origine une mission purement économique. Par la suite, à partir
du secteur économique, d’autres rapprochements de politiques nationales ont été orchestrés
dans différents secteurs comme la politique commerciale, la protection de l’environnement, la
recherche et l’innovation, la culture, la politique étrangère…
C’est donc une organisation internationale qui produit du droit dérivé et dans le cadre de son
action, elle est soumise au principe de spécialité. Ce droit communautaire à la différence du
droit international général a une efficacité dans le sens où il est d’applicabilité directe.
Le GATT/OMC et l’UE sont donc deux ordres juridiques inspirés par des logiques
économiques différentes :
Pour le GATT/OMC, l’accord aspire à créer un système libéral et universel « fondé sur les
principes de liberté des échanges, de non –discrimination et de réciprocité, tout favoritisme
étant en principe proscrit par la clause de la nation la plus favorisée171 ».
171
In M.LICKOVA, « la communauté européenne et le système GATT/OMC », Pedone « perspective
internationale n°25 », 2005, p 2
92
Alors que l’UE poursuit un objectif d’intégration régionale visant à établir des concessions
commerciales entre ses Etats membres à l’exclusion des autres. Grâce à son système juridique,
il y a un respect des règles de L’union par ses Etats membres.
Dans les deux cas, il a été mis en place un cadre juridique approprié au phénomène
économique.
Les Accords de l’OMC sont des textes juridiques portant sur un large éventail de domaines
d’activité:
l’agriculture,
les
textiles
et
vêtements,
les
activités
bancaires,
les
télécommunications, les marchés publics, les normes industrielles et la sécurité des produits,
la réglementation relative à l'hygiène alimentaire, la propriété intellectuelle... Cependant, les
Etats membres doivent respecter un certain nombre de principes qui sont le fondement du
système commercial multilatéral :
Le principe de non discrimination : chaque pays doit accorder aux autres la clause de
la nation la plus favorisée, c'est-à-dire que tout avantage accordé à un pays doit être étendu à
tous les autres. (article 1er de l’accord sur le commerce des marchandises)
Le principe de Consolidation : chaque Etat s’engage à ne pas revenir sur les
concessions qu’il accorde aux autres.
Le principe des négociations commerciales multilatérales : l’accord du GATT avait
pour objectif de supprimer les barrières tarifaires entre les pays afin de libéraliser les échanges
mondiaux dans les secteurs qui lui était imparti.
A ce titre, les Etats membres de l’OMC doivent négocier entre eux les barèmes douaniers,
c’est ce qu’ils font lors des « rounds » de négociations. ( Le dernier en date est le cycle de
Doha de novembre 2001 qui lance du programme de Doha pour le développement en plus de
la poursuite de l’accès aux marchés pour les produits industriels, les services ainsi que
l’agriculture).
D’autres principes sont mis en avant comme, la promotion d’une concurrence loyale,
encourager le développement et les réformes économiques.
Cependant, il est assez fréquent que les Etats membres de l’organisation ne respectent pas ces
règles en particulier pour défendre leurs intérêts nationaux.
93
L’OMC a mis alors en place un système de règlement des différends qui s’avère plus efficace
que celui du GATT et qui fait de l’OMC une véritable juridiction supranationale.
Il est intéressant de noter que l’OMC par cet organe de règlement des différends (ORD) crée
ses propres règles, et donc sa propre jurisprudence. En effet, elle ne se réfère pas
nécessairement aux différents textes et accords de droit international en vigueur comme la
déclaration
universelle
des
droits
de
l’Homme,
les
accords
multilatéraux
sur
l’environnement…
Le règlement des différends constitue la clef de voûte du système commercial multilatéral. En
effet, les législations des pays signataires en matière de rétorsions commerciales sont dans
l’obligation de se conformer aux procédures multilatérales de l’OMC.
Si le cadre général de l’accord prône une libéralisation des échanges par la baisse des tarifs
douaniers, il n’en demeure pas moins que des exceptions aux principes généraux qui le
fondent existent, ainsi que des exceptions.
En effet, la clause la nation la plus favorisée n’est plus respectée, quand elle concerne les
zones de libre échange et les unions douanières. Les pays font ainsi disparaître les droits de
douane entre eux, mais n’étendent pas cette disposition à leurs coéchangistes (article 24 de
l’accord général).
Les échanges entre les pays développés et les pays en voie de développement peuvent être
exonérés de la règle de la réciprocité selon les articles 36, 37, 38 de l’accord général.
Il existe d’autres exceptions à l’usage exclusif des droits de douane comme moyens de
protection comme l’agriculture, la pêche qui sont exemptés de droits de douane (article 11 de
l’accord général) ainsi que des pays qui doivent faire face à de graves troubles extérieurs
(articles 12 et 18 de l’accord général).
En plus de ses exceptions, l’accord général autorise dans certains cas des mesures
protectionnistes. Au titre de l’article 7 de l’accord général, il est autorisé de mettre en place
des droits anti-dumping, dans le cas où le partenaire commercial pratiquerait le dumping. Il
s’agirait alors « de neutraliser toute prime ou subvention accordée, à la production ou à
l’exportation d’un produit ». Dans ce cas précis et au titre du même article, des droits
compensateurs sont autorisés dans un souci d’équité. Mais il est à noter que de manière
générale ces deux procédés sont utilisés par les Etats dans un objet différent que celui du
rééquilibrage des prix.
94
Les Etats peuvent aussi mettre en place « des mesures de sauvegarde » au titre de l’article 19
de l’accord général. Ces mesures doivent viser l’ensemble des exportateurs d’un produit
donné, et ce indépendamment de leur efficacité, des volumes et de leur attitude commerciale.
Cet instrument connaît une nouvelle actualité après être tombé en désuétude, en effet des
mesures de sauvegarde peuvent être mise en place dans le cas où les importations en
provenance de certains pays auraient augmenté de façon très rapide et en peu de temps.
Le protectionnisme non tarifaire est la réponse apportée par les Etats à l’abaissement des
droits de douane. On peut en recenser plusieurs types : les contingents et les quotas, les
limitations volontaires des exportations de la part du pays exportateur, en particulier dans des
domaines de produits issus d’industrie en déclin ou par opposition d’industrie d’avenir, les
ouvertures de marchés négociés dans le cadre d’accord bilatéraux, les mesures sanitaires et
phytosanitaires et les obstacles techniques au commerce, enfin la préférence accordée lors de
la passation des marchés publics aux producteurs nationaux.
Comment la politique commerciale de l’Union européenne s’inscrit dans le cadre des accords
GATT/OMC ?
La politique commerciale de l’UE tire son fondement juridique de l’article 133 du Traité
instituant la Communauté européenne.
L’objectif de la politique commerciale au titre de l’article 131 est de contribuer « au
développement harmonieux du commerce mondial, à la suppression progressive des
restrictions aux échanges internationaux et à la réduction des barrières douanières ».
Ainsi, la Commission négocie-t-elle au nom des États membres, en consultation avec un
comité spécial, "le comité de l’article 133". Ce comité comprend des représentants des 25
États membres et de la Commission européenne. Il a pour principale fonction de coordonner
la politique commerciale européenne.
La Commission reçoit donc au titre de l’article 133 mandat du Conseil qui statue à la majorité
qualifiée dans presque tous les domaines sauf pour les services culturels et audiovisuels, les
services d’éducation, des services sociaux et de santé humaine, ainsi que des transports,
domaines dans lesquels l’unanimité est requise.
95
La politique commerciale de l’Union européenne contribue donc à cette libéralisation
mondiale des échanges. Par exemple dans le secteur des services, l’Union européenne a mis
en place une stratégie en faveur d’un marché unique des services afin de respecter les accords
issus de l’Uruguay round.
Mais l’union européenne se protège aussi, dans le secteur industriel par exemple avec la mise
en place de mesures de sauvegarde, mais aussi dans le secteur agricole. Ainsi, afin de se
« protéger » contre l’importation massive de viande bovine issue d’Amérique du sud, elle a
invoqué « le principe de précaution ».
La stratégie de Lisbonne s’attache à relancer la croissance européenne via un renforcement du
marché intérieur et l’amélioration de la compétitivité européenne dans une économie globale :
« être compétitif c’est s’ouvrir sur le monde ».
Le commerce international est l’acteur clé de cette stratégie. De plus l’UE est le premier
exportateur de marchandises et de services. Elle se classe aussi comme le premier investisseur
étranger. La dimension extérieure de la compétitivité est donc inévitable: « l’UE ne peut
ignorer le rôle de l’ouverture des marchés dans sa stratégie de croissance et de création
d’emplois 172».
L’UE a tiré partie de gains de productivité croissant par une plus grande concurrence, d’une
meilleure spécialisation fondée sur les avantages comparatifs, d’une sélection des innovations
par la loi du marché, d’un apport de nouvelles technologies par les importations et
investissements étrangers et enfin en profitant des économies d’échelle, en particulier dans le
secteur de l’industrie.
C’est pour cela que l’Union européenne veille à l’application des lois du commerce
international, car elle en tire une plus grande compétitivité.
Pour la Commission, le renforcement des règles de concurrence n’est que bénéfice pour les
consommateurs :" L’approfondissement de la libéralisation du commerce interne réalisée
dans le cadre du marché unique et le nouvel agenda de Lisbonne, les fameuses priorités de la
stratégie pour la croissance et l’emploi créeront un corpus commun de règles pour plus de
400 millions de personnes et encourageront les flux d’outre-mer à pénétrer nos marchés.
172
Site EUROPA « politique commerciale », www.europa.eu.
96
Il s’agit de s’en réjouir, pas de s’en attrister : c’est ainsi que la compétitivité européenne
sera renforcée 173».
Dans le cadre des accords de l’OMC et dans une perspective d’optimisation de la stratégie de
Lisbonne, l’Union européenne va s’attacher à supprimer les barrières tarifaires et non
tarifaires au sein de l’OMC, ainsi qu’à faire converger les différentes réglementations
commerciales que ce soit dans le secteur de l’industrie comme celui des services.
De même l’Union européenne va entreprendre un meilleur respect et une meilleure défense
des droits de propriété intellectuelle à l’échelon international.
Enfin, il est à noter que face à l’échec partiel du round de Doha et pour contourner les
barrières tarifaires, les Etats membres de l’OMC préfèrent passer des accords bilatéraux avec
leurs partenaires économiques et l’Union européenne n’est pas en reste.
En effet, nous assistons actuellement à une « baisse de régime » du modèle multilatéral des
échanges prôné par l’OMC face au morcellement du commerce international en zone
d’intégration commerciale (UE, ALENA, ASEAN, MERCOSUR…).
Ces nouvelles zones économiques permettent un approfondissement des liens commerciaux
intra –zones, de bénéficier d’accords commerciaux bilatéraux plus avantageux en terme
d’avantage comparatif.
En réalité face à une mondialisation de plus en plus concurrentielle, ces zones d’échanges
régionales souhaitent mieux réguler les effets de la mondialisation.
L’Union européenne au travers de son corpus juridique a permis de préparer les Etats
membres à la mondialisation en mettant en place une politique libérale dans des pays qui
étaient de tradition social démocrate : « la déréglementation importante au niveau
communautaire est considérée comme un outil de la mutation vers la globalisation174 ».
Elle a donc mis en place un corpus juridique cohérent et qui tend à dénationaliser le droit.
Comme le souligne Laurence Ravillon « la stratégie de Lisbonne confirme ce point c'est-àdire la convergence mondialisation/européanisation 175».
173
Site EUROPA « politique commerciale », www.europa.eu.
L. RAVILLON « l’examen de la stratégie de Lisbonne et des conséquences pour les opérateurs privés dans
le contexte de la mondialisation », in quel avenir pour l’Union Européenne ? la stratégie de Lisbonne définie par
le Conseil européen en 2000 , Bruylant, 2004, p 82
175
L. RAVILLON « l’examen de la stratégie de Lisbonne et des conséquences pour les opérateurs privés dans
le contexte de la mondialisation », in quel avenir pour l’Union Européenne ? la stratégie de Lisbonne définie par
174
97
La Commission justifie cette vision dans l’une de ses communications 176 , « l’Union doit
veiller à ce que la libéralisation des marchés s’effectue dans un cadre réglementaire élargi
visant à disséminer les bénéfices potentiels de la mondialisation » en particulier dans le cadre
des négociations avec l’OMC.
Dans un premier temps donc, l’Union européenne était la courroie de transmission de la
mondialisation.
Dans un second temps on peut avancer que le droit mis en place dans une structure régionale
telle que l’Union européenne a permis dans une certaine mesure d’atténuer les effets de la
mondialisation : par la création de l’Euro pour faire concurrence au « leadership » du dollar,
apparition de concepts dans le droit communautaire qui ne sont pas véritablement pris en
compte dans le milieu économique tels que la protection de l’environnement, du maintien de
la politique sociale, en finalité à la prise en compte dans le corpus juridique de valeur non
marchande.
De même, sa politique de fonds structurels s’inscrit dans une volonté de prévoir les effets de
l’ouverture des commerces.
L’Union européenne dispose donc d’une certaine marge de manœuvre vis-à-vis de l’OMC
dans le cadre de l’application de la stratégie de Lisbonne parce que cette stratégie tient compte
des règles de commerce international de l’OMC et qu’il en est de même pour les matières
qu’elle défend.
La relance par les aides d’Etat peut être donc compatible avec le principe de concurrence
loyale prôné dans les accords. Les aides d’Etat sont légales au niveau communautaire si elles
ne créent pas de distorsion de concurrence entre les Etats membres, au niveau des accords
GATT/OMC, la politique des aides d’Etat ne doit pas devenir des mesures de dumping
contraires aux accords de l’OMC.
Cette stratégie essaie tant par le biais de sa nouvelle méthode de coordination que par le levier
des aides d’Etat de remettre au centre des décisions politiques comme économiques l’Etat.
le Conseil européen en 2000 , Bruylant, 2004, p 84
COM (2003) 5 final/2. SEC (2003) 25 in L. RAVILLON « l’examen de la stratégie de Lisbonne et des
conséquences pour les opérateurs privés dans le contexte de la mondialisation », in quel avenir pour l’Union
Européenne ? la stratégie de Lisbonne définie par le Conseil européen en 2000 , Bruylant, 2004, p 84
176
98
Cependant celle-ci devra s’atteler à réduire la bureaucratie afin d’être plus réceptive au besoin
des entreprises et ainsi les orienter vers des objectifs de la stratégie de Lisbonne, mais aussi
dans les moyens de sa mise en œuvre à respecter les règles du commerce international en
particulier dans le secteur stratégique qu’est le secteur industriel.
2) La Volonté de créer un embryon de politique industrielle commune au sein de
l’Union européenne.
Dans le cadre de la stratégie de Lisbonne, l’Union européenne a besoin d’une industrie
concurrentielle, dynamique, afin de maintenir et accroître sa prospérité, tout en répondant à
ses ambitions sociales, environnementales et internationales.
En effet, il s’avère plus que nécessaire de restructurer le tissu productif européen vers des
activités à forte valeur ajoutée.
La nouvelle stratégie de Lisbonne souhaite dans le cadre de ses objectifs mettre fin à
l’ancienne politique des aides d’Etat qui prévalait dans ce secteur à savoir des aides pour le
sauvetage des entreprises en difficulté.
En fait sous l’apparence d’une politique industrielle, ces aides visaient principalement à
limiter le coût social et économique d’une restructuration sociale, ou d’une délocalisation de
l’entreprise.
Désormais elle souhaite orienter ses aides vers des pans de l’industrie à forte valeur ajoutée, et
aussi dans la recherche et développement. La Commission souhaite passer d’une politique
défensive à une politique offensive en matière d’industrie.
On peut définir la politique industrielle comme « intervention de l’Etat dans l’économie
dépassant le principe en vertu duquel la décision publique collective n’est justifiée qu’à la
condition qu’apparaisse une défaillance de marché pour en assurer l’élimination177 ».
La politique industrielle de la Commission n’est véritablement apparue qu’avec l’article 3 du
traité de Maastricht qui stipule que « l’action de la Communauté comporte le renforcement de
la compétitivité de l’industrie communautaire ».
177
D.GERARDIN, N.PETIT, « la politique industrielle sous les tirs croisées de la mondialisation et du droit
communautaire de la concurrence », (working paper), Institut d’Etudes Juridiques Européennes, Université de
Liège, 2005, www.ieje.net.
99
La politique industrielle qui peut être considérée comme horizontale : elle est à la croisée des
politiques de concurrence, des politiques de l’énergie, des transports de la recherche et
développement, de l’innovation.
Cependant ce sont des politiques d’accompagnement des politiques nationales, et par
conséquent, la Commission n’a qu’un champ de compétences limité.
La politique industrielle est l’une des politiques qui profitent le plus des aides. En effet, étant
donné que cette politique est un vecteur d’accompagnement des actions nationales, il
semblerait que les aides soient l’instrument le plus efficace s’il ne crée pas une distorsion de
concurrence.
Les aides communautaires peuvent revêtir les formes suivantes : « le financement du capitalrisque, le financement des systèmes de garanties en provenance du Fonds européen
d’investissement, les prêts de la banque européenne d’investissement 178», mais aussi les aides
à la restructuration.
Seulement l’Union européenne doit faire face à de nombreuses difficultés dans le secteur
industriel : un tissu industriel vieillissant, la concurrence des nations émergentes PECO
compris, une politique de la concurrence qui peine à relancer la production et des aides d’Etat
interdites quand ces dernières faussent la concurrence. L’industrie est probablement le secteur
où les contradictions de la politique de la Commission sont les plus criantes.
La politique industrielle figure désormais au cœur des préoccupations de la Commission et ce
par l’intermédiaire de la stratégie de Lisbonne. Par le biais de la nouvelle politique des aides
d’Etat, la Commission tient à relancer ce secteur par le développement des aides à
l’innovation, au capital –risque ainsi qu’à la recherche et développement, et par conséquent
soutenir les Etats dans un souci « d’une saine concurrence ».
Par le biais de la stratégie de Lisbonne, la Commission souhaite recentrer le secteur industriel
sur des compartiments innovants grâce aux aides d’Etat qui paraissent être l’instrument le
mieux approprié.
178
A. BUZELAY, « la politique industrielle européenne : quelle signification ? », revue du marché commun et
de l’Union européenne, n°496, Janvier 2006, p11-12.
100
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION
I.
4
LES OBJECTIFS ANNONCES DE LA STRATEGIE DE LISBONNE : VERS
UNE REMISE EN CAUSE DE L’ANCIENNE POLITIQUE DES AIDES D’ETAT.
14
A. LA STRATEGIE DE LISBONNE : UN BILAN A MI- PARCOURS.
14
1. LA STRATEGIE DE LISBONNE : UN BILAN A MI PARCOURS
15
a) Historique de la stratégie de Lisbonne
b) Le bilan à mi-parcours de la stratégie de Lisbonne
15
23
2) LA CARENCE MAJEURE DE LA STRATEGIE DE LISBONNE : L’ABSENCE D’INSTRUMENTS
EFFICACES POUR ATTEINDRE SES OBJECTIFS.
27
a) L’échec de la stratégie de Lisbonne : l’échec de la MOC et un éparpillement des objectifs.
27
b) La nouvelle stratégie de Lisbonne : les aides d’Etat vues comme un nouvel instrument pour
atteindre les objectifs.
33
B. UNE NECESSAIRE REMISE EN CAUSE DES AIDES D’ETAT A L’AUNE DE LA STRATEGIE DE
LISBONNE
37
1) L’EVOLUTION DE LA NOTION D’AIDES D’ETAT
37
a) L’évolution de la notion
b) Vers une prise en considération de l’effet économique dans la définition des aides
37
45
101
2) UNE MODIFICATION DE LA POLITIQUE DES AIDES D’ETAT A L’AUNE DE LA STRATEGIE DE
LISBONNE.
a) Une nouvelle politique des aides d’Etat adaptée à la stratégie de Lisbonne
b) Un changement de philosophie de la Commission dans sa perception de l’intervention
économique des Etats membres.
II.
52
52
58
DEUX POLITIQUES DESORMAIS LIEES PAR UN OBJECTIF COMMUN :
RELANCER L’ECONOMIE DE L’UNION EUROPEENNE.
63
A. LA CONCENTRATION DE LA POLITIQUE DES AIDES D’ETAT SUR LES OBJECTIFS DE LA
STRATEGIE DE LISBONNE.
63
1) LE NOUVEAU PLAN D’ACTION DES AIDES D’ETAT.
64
a) Le plan d’action des aides d’Etat
b) Un plan qui n’est pas sans conséquence pour les aides d’Etat.
64
75
B. DANS LE CADRE DE LA MONDIALISATION DES ECHANGES, QUELLE EST LA MARGE DE
MANŒUVRE DE L’UNION EUROPEENNE ?
90
1) L’UNION EUROPEENNE ET LES ACCORDS GATT/OMC
90
2) LA VOLONTE DE CREER UN EMBRYON DE POLITIQUE INDUSTRIELLE COMMUNE AU SEIN DE
L’UNION EUROPEENNE.
99
BIBLIOGRAPHIE
103
102
BIBLIOGRAPHIE
OUVRAGRES :
BARTHE, M-A, « économie de l’Union européenne », economica, 3ème édition, 2006.
BEGG, FISHER, DANNBUSH, « macroéconomie », Dunod, 2002.
BLANCHARD, O, PISANI-FERRY, J, WYPLOSZ, C, « l’Europe déclassée ? », Flammarion,
2005.
COMMUNIER, J-M., « le droit communautaire des aides d’Etat », collection systèmes droit,
LGDJ, 2000.
DEBARGE, O ; LAURENT, P-Y ; RABEY, O ; « quel avenir pour l’Union européenne ? la
stratégie de Lisbonne définie par le Conseil Européen », Bruylant, 2004.
DUBOUIS, L, BLUMANN, C, « droit matériel de l’Union européenne », 2ème édition,
Montchrestien, 2001.
KEPPENNE, J-P, « guide des aides d’Etat en droit communautaire », Bryulant, 1999
LICKOVA, M, « la communauté européenne et le système GATT/OMC », Pedone
« perspective internationale n°25 », 2005,
SMITS, C., DONY, M. « Aides d’Etat », Bryulant, 2005
SOURCES COMMUNAUTAIRES:
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traité et de l’article 5 de la directive 87/723/CE de la Commission aux entreprises publiques
dans l’industrie manufacturière », JO, n°C 307, 13 novembre 1993.
COMMISSION EUROPEENNE, « XXVIème rapport sur la politique de concurrence 1996 »,
office des publications officielles des communautés européennes, 1997.
103
COMMISSION, « encadrement communautaire des aides d’Etat pour la protection de
l’environnement », 2001/C37/03, 2001.
COMMISSION EUROPEENNE, « mieux légiférer 2003 », com (2003) 770 final, 12
décembre 2003.
COMMISSION EUROPEENNE: « ligne directrice intégrée pour la croissance et l’emploi
(2005-2008) », 2005/601/CE, 12 avril 2005.
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Site de l’Union européenne : www.europa.eu
Site du Parlement européen : www.europarl.eu.int
Site de l’OMC : www.wto.org
Site du Sénat : www.senat.fr
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