PROPRIETES DE LA SURFACE DES OTNs ET DES CENTAURES.  F. Merlin, M.A. Barucci, C. de Bergh et A.
Doressoundiram.
 Figure 2 : Spectres des Centaures obtenus au VLT (ESO)
sur lesquels sont superposés les modèles calculés.
Ces dernières années, une vingtaine d’objets ont été
observés par notre  équipe  au VLT (ESO), ce  qui  a
permis  d’améliorer  considérablement  nos  connais-
sances  sur  les  propriétés  de  surface  de  ces  corps
glacés.  Nous  avons  mis  en  évidence  la  variété  des
spectres des OTNs et des Centaures (figures 1 et 2).
Certains présentent des pentes positives importantes
dans  le  visible  (objets  rouges),  alors  que  d’autres
peuvent  présenter  des  pentes  légèrement  négatives
(objets  neutres  ou  légèrement  bleus).  Ces  observa-
tions ont mené à une classification de ces objets en
quatre groupes taxonomiques [4], des plus bleus aux
plus rouges. Les différentes pentes observées dans le
visible trahissent fort probablement la présence plus
ou moins importante de matières organiques (de type
tholins ou kérogènes) ou d’autres composés carbonés
(charbons).  Les  observations  ont  mis  en  évidence
également  des  bandes  d’absorption  dans  la  partie
visible pouvant être attribuées à la présence de miné-
raux hydratés [5]. Ces minéraux hydratés ont égale-
ment été détectés  dans les poussières  interplanétai-
res. Il reste cependant à savoir s’ils ont été produits
par chauffage récent, par altération aqueuse (comme
sur Terre) ou  alors  ont été créés  dans  la nébuleuse
solaire. Enfin, d’autres bandes d’absorption, majori-
tairement  dans  la  partie  du  proche  infrarouge,  ont
permis de détecter la présence de différentes glaces.
La glace d’eau a été découverte sur plusieurs objets
[6 et 7] et même sous l’état cristallin (2003 EL61 et
peut  être  Orcus  [8],).  Cela  laisse  à  supposer
l’existence de sources de chaleur permettant d’élever
la  température de la glace de 30-40K (température
environnante où devrait s’observer uniquement de la
glace  d’eau  amorphe)  à  110-130K,  nécessaire  à  la
création de la glace d’eau sous forme cristalline. Le
méthane a été détecté sur des objets de grand diamè-
tre (Sedna [9], 2003 UB313, 2005 FY9) comme on
en trouve sur Pluton. Du méthanol a été mis en évi-
dence à la surface de Pholus et 2002 VE95 [10] ce
qui montre la nature primitive de la chimie à la sur-
face  de  ces  objets.  Jusqu’à  présent,  le  manque
d’observations spectroscopiques répétées ne permet
de  noter  le  comportement  hétérogène  que  de  quel-
ques  cas,  dont  le  Centaure  Thereus [11] où la pré-
sence de glace à sa surface semble bien corrélée à sa
période de rotation, impliquant un coté révélant plus
facilement  la  glace  d’eau.  De  manière  générale,  la
surface des OTNs et des Centaures subit une altéra-
tion plus ou  moins importante,  produite à partir  du
rayonnement solaire ou  des particules énergétiques
du milieu interstellaire. Un processus de rajeunisse-
ment  (lié  à  la  déposition  en  surface  de  matériaux
provenant  de couches plus profondes) localisé à  la
surface des objets conduirait, temporairement, à une
surface hétérogène.
Modélisations: Nous avons entrepris une modé-
lisation  des  spectres  des  objets  en  utilisant  deux
modèles basés sur  la  théorie du transfert  de rayon-
nement pour le cas de surfaces solides (Hapke [12] et
Shkuratov [13]). Nous avons pris en compte à la fois
le  proche  infrarouge,  donnant  des  renseignements
quant à la nature des glaces de surface, et le visible
dont le profil donne une contrainte très importante.
La  connaissance  de  l’albédo  permet  également  de
contraindre les  modèles, déterminant la quantité de
lumière réfléchie par l’objet. Cette donnée essentielle
a été mesurée pour quelques objets (OTNs et Centau-
res) par SPITZER. Nous nous sommes intéressés en
particulier à ces objets afin d’affiner leur propriétés
de surface (e.g : taille des grains, concentration…) et
de confronter les modèles d’Hapke et de Shkuratov
entre  eux,  qu’ils  soient  de  type  géographique  ou
intime. Les mélanges géographiques correspondent à
une  surface  dont  les  composés  sont  spatiallement
séparés, contrairement  aux mélanges  intimes. Cette
étude montre que  la  proportion entre les  matériaux
sombres (matériaux organiques, carbone amorphe…)
et brillants (glaces…) dépend fortement des modèles.
La  comparaison  de  la  surface  d’un  objet  avec  un
autre  réclame  donc  l’utilisation  de  modèles  analo-
gues.
Discussion:    En prenant en compte l’ensemble
des  données  spectroscopiques  existantes  jusqu’à
présent,  dans  les  domaines  visible  et  proche  infra-
rouge,  on  peut  noter  quelques  tendances.  Dans  un
premier temps, aucune relation claire n’a été trouvée
entre la présence de glace en surface et les groupes
taxonomiques.  Aucune  relation  n’a  été  déterminée
non plus entre les éléments orbitaux des objets (ex-
centricité,  inclinaison,  périhélie)  et  la  présence  de
glace en surface. Par contre, la taille des objets sem-
ble jouer un rôle  important.  En effet, les plus  gros
OTNs semblent  présenter plus  de glace,  comme on
peut  le  voir  sur  la  figure  3.
Figure 3 : La figure montre la distribution des objets selon
leur  magnitude  apparente  au  cours  des  observations  en
fonction du périhélie et  en fonction aussi de la taille  des
objets  et  de  leur  état  de  surface.  Les  objets  indiqués  en
blanc représentent  les objets laissant  apparaître la trace
probable  de  glace contrairement aux  objets  indiqués  en
noir, enfin  les objets  indiqués en  hachuré correspondent
aux objets où la détection de glace demande confirmation.