FORUM PAGE 2 vendredi 24 mars 2017 Le dilemme de l’intégration des migrants Trouver des relais après l’école. Pour une monnaie bien faite plutôt qu’une monnaie trop pleine (2) INITIATIVE POPULAIRE. Celle qui s’intitule Monnaie pleine et qui sera votée d’ici l’an prochain renvoie à des considérations d’une complexité anormalement élevée s’agissant de politique. Tour d’horizon (lire d’abord L’Agefi d’hier). MARGARITA SANCHEZ-MAZA** ROBERTO BAZZICHI* Le multiculturalisme constitue un des phénomènes urbains les plus marquants de ces dernières décennies. Auparavant recrutée dans l’industrie, l’immigration est aujourd’hui plus diversifiée, et souvent présente dans des secteurs parallèles, tels que les services à la personne. En outre, la voie de l’asile est fortement sollicitée dans le contexte international marqué par les situations de guerre ou de crise humanitaire que nous vivons. L’immigration d’aujourd’hui concerne de plus en plus de familles entières et les pays qui les reçoivent se sont engagés en faveur du droit à la scolarité obligatoire et gratuite quel que soit leur statut légal (Convention de l’ONU relative aux Droits de l’Enfant, ratifiée par la Suisse en 1997). De ce fait, de nombreuses familles ont leurs enfants à l’école tout en étant privées du droit de séjour en Suisse ou en attente d’un statut. L’école peut être appelée à scolariser et à «intégrer» des enfants venant de familles n’ayant pas véritablement la possibilité de s’intégrer, vu leur statut précaire ou l’absence de statut. Pour les villes et les cantons il s’agit donc de développer les outils nécessaires pour relayer les efforts déployés par les écoles et assurer que les enfants et les jeunes, en particulier les mineurs non accompagnés (MNA), puissent avoir accès aux mesures d’intégration. Or le placement des familles de requérants ou des MNA dans des communes qui ne possèdent pas les structures nécessaires ou qui ne sont pas «ciblées» par les politiques scolaires d’éducation prioritaire, porte le risque de laisser toute une série d’enfants et de jeunes en situation de marginalité. Les objectifs de ces politiques publiques, associant collectivités locales et établissements scolaires (par exemple aide à l’intégration dans la vie communale, accès aux activités sportives et culturelles, promotion de la santé), seraient pourtant de nature à soutenir une insertion sociale indispensable pour garantir le droit à l’éducation en même temps que la cohésion sociale. Il va de soi que l’effort des villes dans ce domaine doit être valorisé et complété par celui des autres niveaux étatiques. Le modèle des politiques publiques ciblant des territoires urbains défavorisés pourrait aussi être repensé dans ce contexte migratoire porteur d’imprévisibilité. En attendant, tout soutien institutionnel aux initiatives locales, souvent innovantes, émanant des écoles, du réseau associatif ou des œuvres d’entraide, pourra contribuer à réduire les décalages entre volonté politique de protection de l’enfance et empêchements concrets liés au cadre légal auxquels la Suisse se confronte aujourd’hui. * Professeure ordinaire Sciences de l’éducation Université de Genève La distinction artificielle entre monnaie-crédit (ou scripturale, ou encore électronique) et monnaie de banque centrale permet à la banque centrale d’imposer au banques commerciales, par le biais de mécanismes complexes et coûteux, le versement d’un taux d’intérêt sur les dépôts qui corresponde à peu de chose près aux taux directeurs qu’elle décide de fixer de manière discrétionnaire sous couvert de combattre l’inflation. Reprenons les divers éléments évoqués précédemment pour résumer: les banques commerciales sont autorisées à créer des dépôts (monnaie). Ces dépôts ne sont pas reconnus comme un moyen de paiement légal, bien qu’acceptés aussi bien par le secteur public que privé en guise de paiement. Ce paradoxe fait penser à la prostitution qui est tolérée mais non reconnue, ça devient croustillant. Les dépôts doivent donc rester au passif du bilan des banques commerciales. Autrement dit, ces dépôts, qui sont crées par les banques, doivent apparaître comme une dette pour la banque. Donc la banque crée le dépôt et doit ensuite «l’emprunter» au déposant. Difficile de faire mieux en termes de logique. Etant donné que l’argent bouge tout le temps, car il sert avant tout à régler des transactions commerciales, les banques sont obligées d’acheter/vendre ces dépôts tous les jours pour maintenir leurs bilans en l’équilibre. Ce marché des dépôts est aussi connu sous le nom de marché interbancaire, et les achats/ventes se font en temps normaux à des taux proches du taux directeur de la banque centrale. C’est bien là que réside toute l’asymétrie du système monétaire international: dans ce taux de banque centrale, ou coût d’opportunité comme nous l’avons vu plus haut, qui bien qu’inexistant est néanmoins imposé par les banques centrales aux banques commerciales, donc à l’ensemble de l’économie. Ce coût n’est autre qu’une sorte de rente financière sur l’économie réelle, qui bénéficie directement aux grands déposants au dépend de l’Etat, des ménages, des PME et PMI qui ont besoin de crédit pour se développer. Illogique et injustifié, ce faux coût d’opportunité rend le système hautement instable et destiné à collapser avec la régularité d’une montre à peu près tous les 80 ans par l’effet de l’intérêt composé. En fait, les taux de banque centrale auraient dû être mis à 0% depuis le jour où l’étalon or a été abandonné. Et le système des réserves fractionnaires mis au placard. C’est le non-sens de la logique circulaire du paiement d’un taux d’intérêt créancier sur les dépôts qui est à l’origine des cycles réguliers de surproduction et de surendettement s’agissant des Etats/ménages/PME et PMI. Avec un autre revers de médaille: la concentration des richesses sur un pourcentage très réduit de privés et d’entreprises. Le problème ne vient donc pas des banques commerciales, qui font pour la plupart leur travail correctement, mais de l’architecture même d’un système asymétrique. A noter que l’inflation ne serait pas plus il est plus facile de comprendre pourquoi l’Initiative Monnaie Pleine est une tentative de figer la répartition actuelle des richesses. En résumé, voilà comment les choses fonctionneraient si l’initiative Monnaie Pleine était acceptée et appliquée: il existe une seule mine d’or légale, la banque centrale. L’or (la monnaie) extraite de cette mine appartient intégralement au prince (l’Etat), qui ne doit pas payer d’intérêts. Pourquoi? Première asymétrie et non-sens économique. Nous partageons bien sûr l’idée de taux nuls en ce qui concerne la dette LE PROBLÈME NE VIENT DONC PAS DES BANQUES COMMERCIALES, QUI FONT POUR LA PLUPART LEUR TRAVAIL CORRECTEMENT, MAIS DE L’ARCHITECTURE MÊME D’UN SYSTÈME ASYMÉTRIQUE.. élevée dans un système libre de monnaie-crédit, mises à part certaines situations exceptionnelles (perte de confiance dans les gouvernements/banques centrales, guerres et révolutions et/ou hausse subite et incontrôlée d’une matière première essentielle au cycle de production). Le remboursement progressif des crédits émis aurait un effet déflationniste suffisant à long terme pour balancer la création de crédit. L’inflation-déflation, n’est qu’une mesure de la variation (delta) de la distribution/concentration de la richesse-revenu et de l’ augmentation/diminution de la démographie. C’est pour cela qu’il est impossible de faire repartir le couple inflation/croissance sans redistribution préalable. Aujourd’hui comme en 1930. Avec environ 8% de la population mondiale qui détient 83.50% des richesses, et sans nouveaux entrants dans le jeu parce que la plupart des Etats sont aujourd’hui industrialisés, la seule solution aux problèmes actuels est une crise que les économistes pourront facilement baptiser «la mère de toutes les crises». Soyons clairs: étant donné un ratio de dettes / PIB d’environ 350% dans à peu près tous les Etats développés, et une démographie défavorable, la prochaine récession - ou celle d’après - aura bien plus les allures d’une dépression. Voyons maintenant les choses du côté des solutions: pour sortir de cet enlisement, il est nécessaire de procéder à une forme de redistribution que le secteur privé n’est pas en mesure de réaliser par lui-même à ce stade. D’où toute une série d’initiatives telles que Monnaie Pleine, QE pour les peuples, Debt Deflation et bien d’autres. Et maintenant que la problématique de la monnaie et des intérêts a été élucidée, publique, parce que l’Etat représente par définition le risque de crédit 0%. De la même manière, le secteur privé ne devrait-il pas pouvoir être financé à son risque de crédit uniquement, et sans coût d’opportunité? Le PrinceEtat distribue son or à ses sujets mais, comme il est bon et juste, il ne le distribue pas de manière arbitraire aux ducs, marquis, comtes et autres vicomtes. Il utilise au contraire un modèle macroéconomique issu des meilleures têtes bien pleines, modèle qui va lui indiquer la voie pour un développement harmonieux et durable de l’économie. Deuxième non-sens économique: un modèle ne peut que refléter le passé, alors qu’un processus économique libre crée le futur jour après jour, inlassablement. En régime de monnaie pleine, les banques commerciales, grandes responsables du chaos actuel, seraient bannies de la possibilité de créer de l’argent-crédit. Or, nous avons bien vu que les banques n’étaient pas les vraies bénéficiaires du système de monnaie-marchandise. Ce sont les grands déposants. Lä aussi, l’initiative Monnaie Pleine choisit délibérément d’identifier les banques comme les plus grands bénéficiaires du système. Que les banques centrales et certaines banques globales dites d’investissement, sans les nommer, soit l’instrument de choix des élites ne fait aucun doute. Que le système bancaire dans son ensemble soit la cause des maux économiques actuels est absolument faux et trompeur. C’est probablement le point le plus grave et obscur de l’initiative. Seul l’or (monnaie) existant pourra être prêté, et comme il s’agira bien de «prêter» dans cette architecture, voilà que le coût d’opportunité devient sacro-saint et rentre même tout droit dans la Constitution. Dernier point: s’agira-t--il d’une monnaie écologique? Effectivement si notre bon prince décide que, pour le bien de la planète, nous le peuple devrons vivre à l’avenir au froid l’hiver, manger une seule fois par jour, mourir plus jeunes pour éviter trop de retraites, etc. Nous aurons nous-mêmes voté une architecture monétaire qui va permettre tout cela sans aucun effort. Pour conclure, un système de monnaie-marchandise réduit tout à une valeur marchande. Les relations humaines, la santé, l’éducation, les ressources naturelles, la vie même devient une marchandise. C’est un système intrinsèquement violent, car il suppose que tout le monde est égal mais certains sont plus égaux que les autres. De plus, comme le système est asymétrique, il conduit régulièrement à des guerres et/ou des révolutions pour permettre une remise à plat de l’excès de dettes cumulées au bout d’un cycle économique long. L’emballement du total des dettes n’est pas le résultat d’un manque de régulation, comme certains voudraient le faire croire, mais du coût d’opportunité et de la puissance des intérêts composés. C’est donc une caractéristique endémique à tout système de monnaie-marchandise, y compris fatalement de celui proposé par nos amis de la Monnaie Pleine. Un système de monnaie-crédit, comme son nom l’indique, trouve ses fondements et sa prospérité dans la confiance de l’autre, des institutions, de la société civile. Il est porteur de paix, de volonté de vivre ensemble et de partage des valeurs communes. Chacun à un degré différent, mais également important, participe à l’édifice de la maison commune qu’est notre société. Progrès, équité et travail n’y sont pas fatalement dépendants de la consommation finale. Des récessions ou une croissance nulle ne mettraient pas en danger le bien-être des populations et la stabilité économique, car il n’y aurait plus une rente à extraire de l’économie réelle à la faveur d’une minorité fortunée. En économie comme en politique, c’est l’architecture d’un système qui en détermine son degré de liberté et de démocratie, non pas les intentions des gouvernants. Terminons donc avec le plus que jamais d’actualité Michel Eyquem de Montaigne: «Mieux vaut une tête bien faite qu’une tête bien pleine.» A quand une initiative pour une Monnaie Bien Faite? * Economiste, Genève PRÉVOYANCE: le Parlement esquive ses responsabilités MARAÎCHERS: lègère baisse TARMED: la tarification à l’acte conservée de la consommation de légumes Le Parlement s’est prononcé d’extrême justesse pour la réforme de la prévoyance vieillesse 2020. Sera soumis au verdict des urnes un projet qui rate très largement l’objectif originel de la réforme: assurer durablement la solidité financière de l’AVS. Il est peu probable que l’économie soutiendra une réforme qui prévoit d’augmenter de 70 francs la rente AVS des nouveaux rentiers sans introduire simultanément le frein aux dépenses de l’AVS. Avec cette option bancale, le Parlement a complètement laissé de côté le but initial du Conseil fédéral, qui était de garantir durablement la sécurité financière de l’AVS. – (Union partronale suisse) 2016 a été une année difficile pour les maraîchers en raison des caprices de la météo. Si les Suisses consomment volontiers des légumes, surtout des carottes et des tomates, la consommation totale de légumes a néanmoins légèrement baissé pour la première fois depuis des années; une évolution regrettable estime l’Union maraîchère suisse. Si on considère uniquement les légumes produits en Suisse, on retrouve de nouveau les carottes à la première place, devant les tomates rondes en grappe, les oignons, la laitue iceberg et les concombres.– (Union maraîchère suisse) Le Conseil fédéral a décidé hier d’intervenir au niveau du tarif médical ambulatoire Tarmed dans le cadre de sa compétence subsidiaire. Cette intervention a pour but de réduire les coûts des prestations ambulatoires fournies au cabinet médical et dans les services ambulatoires des hôpitaux. Les partenaires tarifaires santésuisse et l’Union tarifaire fmCh doutent que ce tarif à l’acte encore très détaillé permette une baisse notable des coûts. Avec des forfaits ambulatoires, le Conseil fédéral aurait pu proposer une solution beaucoup plus porteuse pour l’avenir. – (Santésuisse)