Bull. Soc. math. France,
122, 1994, p. 255–284.
REMARQUES SUR LE REVˆ
ETEMENT UNIVERSEL
DES VARI´
ET´
ES K ¨
AHL´
ERIENNES COMPACTES
PAR
Fr´ed´eric CAMPANA (*)
R´
ESUM´
E.—SiXest une vari´et´ek¨ahl´erienne compacte, on ´etudie certaines
relations entre π1(X), la positivit´edeΩ
1
Xet les sous-vari´et´es analytiques compactes
en´eriques du revˆetement universel
Xde X, qui apparaissent dans un travail de M.
Gromov. On en d´eduit simplement certains r´esultats, soit connus (la simple connexit´e
des surfaces K3etlesvari´et´es rationnellement connexes), soit nouveaux (la finitude
de π1(X)siXest simple). Cette ´etude conduit naturellement `alaconstructiondune
application m´eromorphe connexe et propre σ:
X
Ydont les fibres g´en´eriques sont
les sous-vari´et´es analytiques compactes connexes maximales de
X. La conjecture de
Shafarevitch ´equivaut alors au fait que σest holomorphe et
YStein.
ABSTRACT.—ForXacompactK¨ahler manifold, we study relationships between
π1(X), the positivity of Ω1
Xand generic compact subvarieties of the universal cover
X
of X, first considered by M. Gromov. From this we deduce in a simple way results, either
well-known (K3 surfaces and rationnally connected manifolds are simply connected),
or new (π1(X) is finite if Xis simple). This study leads naturally to the construction
of a certain proper connected surjective meromorphic map σ:
X
Y, the generic
fibers of which are the maximal compact subvarieties of
X. Shafarevich’s conjecture
means that σis holomorphic with
YStein.
0. Introduction
La classification des vari´et´es k¨ahl´eriennes et projectives compactes
repose essentiellement sur les propri´et´es de positivit´edesonfibr´e cano-
nique KX. En principe, une vari´et´e est d’autant plus sp´eciale et simple, que
KXest peu positif. Nous nous proposons d’illustrer ce principe en utilisant
un r´esultat de M. Gromov qui relie la non-finitude du groupe fondamental
de Xet la positivit´eg´eom´etrique de 1
X.
(*) Texte re¸cu le 24 ecembre 1992, r´evis´e le 11 octobre 1993.
F. CAMPANA,D´epartement de Math´ematiques, Universit´e Nancy 1, BP 239, F 54506
Vandœuvre-les-Nancy CEDEX.
Classification AMS : 32J27, 32J25, 14E 20.
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Soci´et´emath´ematique de France
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Les remarques qui suivent ont ´et´emotiv´ees par le corollaire 3.2 de M.
Gromov (voir [G]) : si Xest une vari´et´ek¨ahl´erienne compacte telle que
χ(OX)=0et si le revˆetement universel
Xde X=
X/Γne contient pas
de sous-vari´et´e complexe compacte de dimension (strictement) positive,
alors Xest projective.
La d´emonstration repose sur le teor`eme de l’indice L2de M. Atiyah
(voir[A])etlath´eorie de Hodge L2pour produire une p-forme holo-
morphe uL
2sur
X.
La d´emonstration fournit en fait un r´esultat plus pr´ecis que celui
´enonc´e:
(*) Il existe un 1pnet un sous-faisceau coh´erent Fde p
X
tel que κ(X, det(F)) = n,o`uκ(X, .)esigne la dimension de
Kodaira-Iitaka.
On en d´eduit au paragraphe 1 une nouvelle d´emonstration de la simple
connexit´e des surfaces K3 et au paragraphe 2 la finitude du groupe
fondamental de certaines vari´et´es de dimension alg´ebrique z´ero qui jouent
un rˆole cl´e dans la structure des vari´et´es k¨ahl´eriennes compactes non-
projectives.
Par ailleurs, ce esultat conduit naturellement `al´etude :
1) des sous-vari´et´es analytiques compactes de
X,revˆetement universel
de X;
2) g´eom´etrique des faisceaux coh´erents Fp
Xsatisfaisant (*).
Concernant 1), au paragraphe 3, nous d´emontrons l’existence d’une
Γ-r´eduction γ:
X
Zpour toute vari´et´ek¨ahl´erienne compacte et
connexe :
Zparam´etrise (essentiellement) les sous-vari´et´es complexes com-
pactes et connexes maximales de
X. Cette
Γ-r´eduction est donc analogue
`alar´eduction de Stein dans la th´eorie des vari´et´es holomorphiquement
convexes et devrait ˆetre l’une des ´etapes dans la solution de la conjecture
de SHAFAVEVITCH [S], qui peut alors ˆetre reformul´ee comme suit :
Zest
modification propre d’un espace de Stein normal. Remarquons qu’il existe
des vari´et´es complexes compactes (non K¨ahl´eriennes) qui n’admettent pas
de telle
Γ-r´eduction (voir 3.11.2). La
Γ-r´eduction de Xfournit une Γ-
eduction γ:XZ=
Z/Γ par passage au quotient. C’est un nouvel
invariant bim´eromorphe de X,ainsiquegd(X):=dim(Z), que nous ap-
pellons la Γ-dimension de X.Nousd´eduisons du paragraphe 3 au para-
graphe 5 une nouvelle d´emonstration de la simple-connexiedesvari´et´es
rationnellement connexes, ainsi que certains r´esultats de M. NORI et R.
GURJAR ([N] et [R]).
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Concernant 2), au paragraphe 4, nous montrons que si χ(OX)=0,et
si gd(X)=n3,alorsXest de type g´en´eral, c’est-`a-dire que κ(X),sa
dimension de Kodaira, est ´egale `an.Lad´emonstration utilise l’existence
de mod`eles minimaux en dimension 3 et n’est donc pas g´en´eralisable sous
cette forme en dimension sup´erieure.
Les r´esultats de ce travail sont g´en´eralis´es dans [C5].
Note.—J.K
OLL `
AR vient de me transmettre son preprint [Kol] qui
traite entre autres choses ´egalement des questions abord´ees ici aux para-
graphes3,4.Ilobtientenparticulierl-r´eduction de X, qu’il baptise
morphisme de Shafavevitch,lorsqueXest alg´ebrique. Je voudrais le
remercier de m’avoir signal´e une erreur dans une version ant´erieure.
1. Surfaces K3
D´
EFINITION 1.1. — Une surface K3est une vari´et´e complexe compacte
et connexe Sde dimension 2telle que :
KS
=OSet q(S)=h1(S, OS)=0.
TH´
EOR`
EME 1.2. — Une surface K3est simplement connexe.
Remarque 1.3. — Ce r´esultat est bien connu. Il est habituellement
emontr´esoit`a l’aide de l’existence de m´etriques Ricci-plates, soit `a
l’aide d’un r´esultat interm´ediaire de la th´eorie des eformations : les
surfaces K3 sont toutes d´eformation d’une quartique de P3(C). On le
eduit ici directement de [G].
emonstration.—Nousavonsχ(OS)=1q+pg=2=0siSest
une surface K3. Soit r:SSun revˆetement de degr´ed1. Alors
KS
=OS.Donc2d=χ(OS)=1q+pg=2q2etd=1.
Il suffit donc d’´etablir que π1(S) est fini pour conclure.
Or, si π1(S) est infini, puisque χ(OS)=0,ilr´esulte de [G, §3], si Sest
ahl´erienne, que pour p= 1 ou 2, il existe un sous-faisceau Fde rang r
de Ωp
Stel que κ(S, detF) = 2. Or, ceci entraˆıne p= 1 et contredit le
lemme de Castelnuovo-De Franchis ([B-P-V, VII, prop. 4.2]).
Lorsque Sest k¨ahl´erienne, le r´esultat est donc ´etabli. Il faut proc´eder
autrement lorsque Sn’est pas suppos´ee k¨ahl´erienne ; on a d’ailleurs, plus
en´eralement :
TH´
EOR`
EME 1.4. — Soit Sune surface complexe compacte connexe telle
que Km
S
=OSpour un entier m>0.Siχ(OS)=0,alors π1(S)=1
ou Z2,et SestsoitunesurfaceK3, soit une surface d’Enriques.
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emonstration de 1.4
LEMME 1.5. — Si de plus KS
=OS,alors χ(OS)=2q>0.
emonstration. — Sinon, q3eth1,0(S)2. On peut donc trouver
deux formes holomorphes u1et u2de degr´e1(d-ferm´ees car dimC(S)=2).
Si u1u2=0,alorsSest un tore complexe, sinon KSserait effectif,
comme on le voit en consid´erant le diviseur de ramification de l’application
d’Albanese de S.Siu1u2= 0, il existe un morphisme ψ:SCsur
une courbe de genre g2 telle que ui=ψ(vi)(aveci=1,2) par le
lemme de Castelnuovo-De Franchis. Les fibres de ψsont elliptiques, et la
formule de Kodaira pour le calcul du fibr´e canonique montre que κ(S)1
([B-P-V, p. 161 et 162]). (Remarquons que cet argument est inutile si
l’on sait d´ej`aqueχ(OS)>0, par exemple si q= 0). Contradiction.
Donc q=0,1ou2etχ(OS)=2,1ou0.
LEMME 1.6. — Soit Sune surface complexe compacte et connexe,g
une m´etrique hermitienne sur S,l’op´erateur de Hodge associ´e`aρ(g)
sur
S,le revˆetement universel de S,et op´erant sur E,(S).Siuest
une (0,2)-forme harmonique pour ¯
,alors (u)est une (2,0)-forme
harmonique holomorphe sur
S.
emonstration.—Ona(Ep,q )=E2p,2qet ¯
(u)=0.
COROLLAIRE 1.7. — Si,dans 1.6, on a de plus KS
=OS,et si π1(S)est
infini,alors il n’y a pas de (0,2)-forme harmonique L2non nulle usur
S.
emonstration.En effet (u) est, par trivialisation de KS, identifiable
`a une fonction holomorphe L2sur
S;doncu=u= 0, puisque
Sn’est
pas compacte.
Nous pouvons maintenant achever la d´emonstration de 1.4.
Supposons que π1(S) soit infini, o`u
Sest le revˆetement universel de S
et Γ = π1(S). Soit
h0,p la Γ-dimension de l’espace des formes Cde
type (0,p) harmoniques pour ∆¯
et L2sur
S.Leth´eor`eme de l’indice L2
(voir [A]) montre alors que
h0,2
h0,1+
h0,0=
h0,2
h0,1=χ(OS)>0,
ce qui est impossible, puisque
h0,2=0par1.7.Doncπ1(S)estfini,etsiS
est le revˆetement universel de S,χ(OS)2montrequeCard(π1(S)) 2.
On doit donc avoir q=0etSest soit une surface K3, soit une surface
d’Enriques (q=0,K2
S
=OS,KS
=OS).
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ERIENNES COMPACTES 259
2. Dimension alg´ebrique z´ero
CONVENTIONS 2.0. — On esigne par Xune vari´et´ek¨ahl´erienne com-
pacte et connexe ; par a(X) sa dimension alg´ebrique ; par n=dim
C(X)
sa dimension ; par q(X)=h1(OX)sonirr´egularit´e. On note ρ:
XX
le revˆetement universel de Xet r:XXun revˆetement ´etale de degr´e
fini dde X.
D´
EFINITION 2.1 (voir [F]). Xest dite simple si n2etsiXn’est pas
recouverte par ses sous-ensembles analytiques compacts et irr´eductibles Y
tels que 0 <dim(Y)<n.
EXEMPLES 2.2. — Le tore complexe  en´eral  de dimension n2est
simple ; la surface K3 en´erale  Sest simple. La d´eformation  en´erale 
de X0=S×S/ ¯σeclat´ee de S×Sle long de la diagonale et divis´epar¯σ,
rel`evement `aS×Sde l’involution de S×Squi ´echange les deux facteurs,
est simple (exemple dˆu`aA.F
UJIKI et ´etendu `a un nombre quelconque
de facteurs par A. BEAUVILLE). Remarquons que tous ces exemples sont
symplectiques, c’est-`a-dire poss`edent une 2-forme holomorphe de rang
maximum en chaque point.
Si Xest simple, a(X)=0etq(X)=0oun; dans ce dernier cas X
est bim´eromorphe `asavari´et´e d’Albanese [U, p. 159]. (Ceci provient de ce
qu’un tore complexe Test de dimension alg´ebrique strictement positive
s’il contient un diviseur effectif D,etdecequea(Z)>0siZTest
un sous-ensemble analytique compact qui engendre T. On prend alors
Z=Alb(X) ; donc Z=Alb(X)=T, et le diviseur Dde ramification de
Alb : XAlb(X)=Test vide.)
La structure des vari´et´es k¨ahl´eriennes compactes peut ˆetre syst´emati-
quement r´eduite `a celle des vari´et´es projectives et des vari´et´es simples `a
l’aide de fibrations bim´eromorphes canoniques (voir [C1, 3] et [F]).
EXEMPLE 2.3. — Si Xest de dimension 3, et non-projective, alors on a
l’un des cas suivants (`equivalence bim´eromorphe pr`es) :
1) a(X)=2etXest elliptique ;
2) a(X)=1etapr`es revˆetement fini, X=S×C,o`uCest une courbe
et Sune surface telle que a(S) = 0, c’est-`a-dire soit une surface K3, soit
un tore ;
3) a(X)=1etα:XC,lar´eduction alg´ebrique de Xapourfibre
en´erique P(AE), o`uEest une courbe elliptique et AEl’unique fibr´enon
scind´e0→O
EAE→O
E0surE;
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