Projet DOM Forum France Santé 2017 --- Mercredi 8 juin 2016 Simplifier l’accès aux soins des Français afin que chacun bénéficie de l’excellence médicale et thérapeutique au bon moment, au bon endroit. Rue Georges Zaïre Village de Rivière-Roche Rue Piétonne 97200 Fort de France TEL : 05 96 63 20 33 FAX : 05 96 71 93 03 [email protected] Les français ultra-marins rencontrent actuellement des difficultés de prise en charge notables liées à des soins ambulatoires inégalement accessibles et des déficiences de l’organisation de l’offre de soins et de son accompagnement (attractivité, compétence, efficience). Ces handicaps majeurs sont, sans doute, le reflet d’une réponse insuffisante de l’Etat aux problématiques des Outre-mer en matière de santé (rapport de la Cour des comptes de juin 2014). Des réponses adaptées et urgentes sont attendues par les populations concernées. Leur mise en œuvre nécessitera un engagement fort et synchrone du Ministère de la Santé et de celui de l’OutreMer. Constat : Nos territoires ultra-marins sont confrontés à une mutation démographique profonde intégrant à la fois un vieillissement accéléré de leurs populations, un changement générationnel dans les administrations et les entreprises lié à des départs massifs et rapides à la retraite de la génération d’après-guerre, auquel se rajoute les conséquences d’un changement institutionnel pour la Martinique et la Guyane (création de deux Collectivités territoriales). A ces éléments d’ordre démographique et institutionnel, vient se rajouter une composante socio-économique d’importance : en 2009, la crise sociale majeure qu’ont connu les 4 DFA, avec ses ramifications durables en termes de conflictualités sociales, a engendré une crise économique accélérée qui a touché tous les secteurs, en fragilisant davantage la situation des jeunes chômeurs, des femmes précaires et des personnes âgées isolées , avec pour conséquence un accroissement des inégalités sociales et économiques. Principe : Dans les DOM, en raison d’une mobilité importante, les problèmes spécifiques d’accès aux droits sociaux concernent principalement les délais d’instruction de demande d’ouverture de droits de santé ou de renouvellement. Ces délais, sont souvent trop longs, entrainent des ruptures de droit qui aggravent la fragilité des publics les plus précaires. Ils doivent donc être traités en priorité. 2/12 Leviers : o La circulaire du 27 septembre 2005 relative à l’AME prévoit une procédure d’instruction rapide dans le cas particulier des personnes qui, sans nécessiter immédiatement une hospitalisation, présentent une pathologie exigeant une prise en charge médicale et un traitement rapide sous peine d’aggravation. Cette circulaire pourrait être utilement actualisée pour les DOM afin d’inclure les femmes enceintes parmi les publics prioritaires de fait (à l’image des soins urgents). Ce type de circuit privilégié, expérimenté en Guyane avec la PMI, a donné pleinement satisfaction. Un principe d’instruction prioritaire pourrait également être envisagé, notamment pour les personnes les plus isolées géographiquement, avec la délivrance d’une attestation de demande de renouvellement. o S’appuyer sur la réforme « PUMa » (protection universelle maladie), entrée en vigueur au 1er janvier 2016, qui doit garantir désormais à toute personne qui travaille ou réside en France un droit à la prise en charge de ses frais de santé, de manière simple et continue tout au long de sa vie. L'objectif est de réduire au strict nécessaire les démarches administratives et diminuer le nombre de situations nécessitant de changer de caisse mais aussi de garantir davantage d'autonomie et de confidentialité à tous les assurés par rapport à la prise en charge de leurs frais de santé. Ainsi, les personnes qui travaillent n'ont plus à justifier d'une activité minimale. Quant aux personnes sans activité, la prise en charge de leurs frais de santé est ouverte au titre d'une résidence stable et régulière et ce, à titre personnel pour tous les majeurs. La réforme permet également aux assurés de rester dans leur régime d'assurance maladie (en dehors des régimes spéciaux), y compris en cas de perte d'activité ou de changement de situation personnelle sans démarche spécifique. La PUMa représente un progrès important pour les ressortissants ayant des parcours professionnels comportant de fréquentes ruptures ou changements d’activité. Il est urgent que ce dispositif fasse l’objet d’un déploiement prioritaire dans les départements d'Outre – Mer dès 2016, comme en métropole. C’est un facteur majeur de réduction des inégalités sociales criantes sous nos latitudes. 3/12 Transferts vers la métropole Constat Les réalités géopolitiques (éloignement de la métropole, faiblesse de la coopération sanitaire caribéenne, etc) entrainent une inégalité de traitement pour les patients Domiens par rapport aux patients métropolitains. En cas d’urgence avérée, de moyens hospitaliers inexistants ou défaillants, des EVASAN, des transferts sanitaires ou des évacuations sanitaires entre les îles des archipels, entre les DOM et/ou entre les DOM et la métropole - sont programmés. Lorsqu’ils concernent des non-assurés sociaux, les frais ne sont pas pris en charge par l’assurance maladie, d’où un coût financier non compensé pour les établissements de santé. Ces derniers supportent des coûts souvent majorés par la prise en charge financière du retour du matériel médical nécessaire au transport initial. Certains transferts ne sont pas assurés faute de place réservée dans les avions de ligne : la santé « n’est pas prioritaire » pour les compagnies aériennes, en dépit d’un nombre de vols réguliers limité (notamment au départ de la Guyane). Cette « pénurie » de disponibilité entraîne souvent l’aggravation de l’état de santé de certains patients en raison d’une prise en charge tardive. Principe Les Domiens ont droit, en la matière, comme tous les autres français, à une égalité des chances. Leviers Il est impératif, dans le cadre de la continuité territoriale, de pouvoir garantir l’accès prioritaire des patients des Outre-Mer en situation d’urgence absolue, aux évacuations sanitaires aériennes. Il est nécessaire de créer une obligation de service public pour les compagnies aériennes dans le cadre de leurs cahiers des charges afin d’assurer la continuité territoriale. Cette disposition aura également pour but d’aider à mieux maîtriser le coût des transferts, et a organiser la mutualisation des coûts de transferts entre établissements hospitaliers sur les marchés des EVASAN et des transferts sanitaires. Ainsi les patients domiens pourront-ils bénéficier d’un service sanitaire identique à celui auquel ont droit les patients de métropole. 4/12 Inégalités géographiques L’éloignement des DOM vis-à-vis de la métropole engendre une adaptation inévitable de tous les instants pour garantir et améliorer la continuité des soins, leur accessibilité et un approvisionnement optimal en produits de santé. Constat Dans les DOM, l’Octroi de Mer (OM) est un dispositif de taxation particulier inscrit dans un cadre communautaire européen. Il est applicable à la fois aux biens importés et aux biens produits localement. Les recettes ainsi générées sont destinées aux collectivités locales. La fixation des taux relève de la compétence de chacune des Collectivités Territoriales ( en Guyane et en Martinique), des Conseils Régionaux (Guadeloupe, Réunion), ou du Conseil Départemental de Mayotte, qui ont la faculté de décider, dans certaines conditions, d’octroyer des exonérations totales ou partielles. Les délibérations des assemblées sont de deux formes : 1. Tarif général de l’Octroi de Mer fixé sur la base de l’article 27 de la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004, modifiée en dernier lieu par la loi du 29 juin 2015. A titre d’exemple, on peut citer la différence de taux d’octroi sur des produits comme le Plasma (9,5% en Guadeloupe et Martinique, contre 4% en Guyane, et 0 à La Réunion) ou les Vaccins humains (9,5% en Guadeloupe et Martinique ; 4% en Guyane). 2. Exonération totale ou partielle des produits importés et destinés à certaines catégories de personnes, physiques ou morales, publiques ou privées. Il s’agit notamment des personnes qui exercent en profession libérale, des établissements et des centres de santé, des établissements et services sociaux et médico-sociaux (article 6 de la loi du 2 juillet 2004 modifiée). 5/12 La faible concurrence commerciale, liée à l’exigüité du bassin de population, a pour conséquence, le renchérissement des coûts de certains produits comme l’oxygène médical -O2 (prix élevé, situation de monopole, budget important pour les professionnels et les établissements de santé), ou les produis sanguins labiles - PSL (disparité et surcoût de prix entre les différents DOM). Concernant le matériel lourd (matériel chirurgical, appareil de radiologie, etc.) Les professionnels de santé doivent souvent faire face à des frais importants liés au transport et à la fiscalité (Octroi de mer). On rajoutera que, en raison des conditions climatiques très particulières des DOM, la durée de vie des matériels est beaucoup plus courte ce qui engendre un taux de renouvellement plus élevé. Autre handicap à prendre en compte : en cas de panne, il est nécessaire d’acheminer, aux frais du professionnel (avion, hôtel, véhicule automobile, etc.), le réparateur. Vient se greffer sur la facture globale le coût d’une interruption moyenne de l’activité de 8 jours. Cette réalité économique est un frein majeur à l’installation des spécialistes. Elle entraine une fragilisation de l’offre de soins avec une facturation plus importante pour le patient. Principes Les Domiens, en dépit de l’éloignement géographique, doivent pouvoir disposer de la même qualité des soins que celle dont bénéficient les patients métropolitains, sans être pénalisés par un surcout. Leviers o Renforcer le dialogue entre l’Etat et les Collectivités locales pour obtenir l’exemption totale ou partielle d’Octroi de mer pour les produits de santé pour les professionnels et les établissements de santé, privés ou publics, en tenant en compte de la loi du 20 juin 2015 modifiant l’octroi de mer et l’arrêté du 27 juillet 2015. o Appliquer un coefficient géographique pour les actes des professionnels pris en charge par l’assurance maladie afin que les surcoûts n’impactent pas les patients domiens. 6/12 o Créer les conditions d’une véritable concurrence entre les opérateurs de production d’oxygène. Cela passe par la mise en place d’une mission de service public concernant les fournisseurs d’oxygène, afin d’assurer l’approvisionnement permanent des produits à des tarifs abordables (notamment en cas de crise(s), en particulier pour les insuffisants respiratoires). o Travailler à l’homogénéisation des tarifs, mais également à la baisse des majorations de prix dans chacune des régions ultramarines à travers une évaluation du coût réel de certains produits de santé : O2 à usage médical, panel de médicaments, PSL. o Création d’un groupe de travail interministériel pour étudier les surcoûts des produits de santé et envisager la baisse des tarifs en concertation avec certains industriels (MASS, MOM, Economie et finances) 7/12 Soutenir la recherche et la médecine du futur pour faire de la santé un secteur économique envié. Constat Les enjeux de santé publique dans les régions ultramarines sont très sensibles. Ils sont liés en particulier à : - des phénomènes naturels (épidémies ZIKA, Chikungunya, catastrophes naturelles), - à des réalités géopolitiques, - à des difficultés de l’offre médico-sociale corrélées à une démographie déséquilibrée des professionnels de santé, à des questions d’organisation rationnelle de l’offre sanitaire (crise hospitalière et insuffisance de la PDSA). - Les maladies chroniques à forte prévalence, présentant des indicateurs au-dessus des moyennes des régions hexagonales, imposent la mise en place d’une politique de santé publique forte, affichant des priorités claires et mobilisant des moyens et des compétences au service d’actions coordonnées et efficientes de l’ensemble des acteurs nationaux et locaux. Les déficits hors normes des établissements hospitaliers domiens nécessitent une attention particulière et une vigilance accrue pour atténuer durablement les traces et les conséquences d’une quasi-faillite qui fragilise l’équilibre sanitaire. Aujourd’hui, hormis la démographie des infirmiers libéraux, des sages-femmes et des kinésithérapeutes libéraux, les ultramarins souffrent du cumul d’une démographie médicale insuffisante et d’une concentration inégale de professionnels de santé menaçant la sécurité sanitaire de nos régions. De nombreuses communes n’ont aucune offre médicale de ville. De nombreuses spécialités ne sont pas offertes ou très partiellement de façon durable et en toute sécurité (pneumologie, gastro-entérologie pédiatrie, anesthésie, urgentiste, ophtalmologie, psychiatrie, neurologie, etc.). 8/12 La Guyane bénéficie actuellement d’un dispositif dérogatoire lui permettant de recruter des médecins à diplômes non-européens. Il semble que ce dispositif ait abouti à un fort mécontentement de la population. La compétence des médecins recrutés sur ces critères n’étant pas, le plus souvent, vérifiable, la prise en charge de la population guyanaise a été jugée dans certains cas, comme de piètre qualité. Principe Assurer une qualité de soins dans les DOM identique à celle qui prévaut au niveau national. Garantir une compétence optimale des médecins exerçant dans les DOM par un recrutement de niveau équivalent à celui en vigueur en métropole. Leviers o Transformer les deux facultés de médecine des DOM en facultés de plein exercice. Aujourd’hui, seul le premier cycle est offert dans les DOM. La poursuite des études en cursus complet localement, sans l’obligation de l’expatriation pour les 4eme, 5eme, et 6eme années vers la métropole favorisera l’implantation et l’enracinement des étudiants dans les DOM. Il est souvent reconnu que les futurs médecins exerceront le plus souvent dans la région où ils ont été formés. Il est évident que le renforcement du cadre territorial de la formation ne pourra qu’augmenter le nombre de médecins dans les DOM. o Augmenter le numerus clausus dans les DOM et mettre fin ainsi le large contournement du numerus clausus par les possibilités offertes de formations hors de France (réservées à une certaine classe financière). o Favoriser l’attractivité dans les DOM par des mesures incitatives de nature financière basées sur les besoins réels des médecins exerçant dans nos territoires. 9/12 S’appuyer sur les nouvelles technologies et la santé numérique, favoriser les idées neuves. Nous sommes à l'aube d'une révolution en lien direct avec la révolution digitale. L’ensemble du secteur de la santé dans les DOM ne peut rester en marge de ces nouvelles technologies. Constat Il existe une réelle opportunité à saisir dans l’introduction de l'innovation numérique dans la prise en charge des patients, concernant, en particulier, les pathologies chroniques qui ont un fort impact sur la santé publique en raison d’une prévalence beaucoup plus élevée dans les DOM que dans l’hexagone. Collaboration, coopération, communication, expertise des données, indicateurs, e-santé, nous sommes dans l'ère du Web 2.0 et des solutions informatiques pour porter cette révolution. Mais les défis sont immenses. Ils concernent en particulier la génération par les systèmes d’information concernés d’un nombre sans cesse croissant d’informations à rechercher, d’un nombre toujours plus importants de données à saisir, une surabondance qui conduit parfois à des problèmes critiques ingérables. Comment donc générer des bases de connaissances fiables à partir de la collecte de données ? C’est toute la difficulté de l’organisation du recueil de ces données. Dans le domaine de la santé, il est illusoire de faire de la captation d’informations en dehors d’une structuration réfléchie du formulaire de recueil de ces données. On considère les informations utiles et pertinentes dans le dossier médical pour servir une orientation diagnostique, une proposition de soins ou une coordination entre des professionnels de santé, mais il peut épouser d’autres finalités comme la recherche ou des essais cliniques, des études statistiques ou épidémiologiques ou l’analyse médico-économique. Principes La télémédecine est particulièrement indiquée dans les DOM où l’offre professionnelle est incomplète et permettra ainsi un meilleur accès à l’expertise recherchée. 10/12 C’est la révolution des Big Data en santé qui se met en place en interfaçant et en créant, à partir de la collecte des données, de nouvelles opportunités avec : - Les données cliniques (dossier médical électronique, banques d’images) propriété des fournisseurs. Les données de bien-être et comportements des patients (retour d’expérience du patient, achats, ETP,…) propriété des patients et des actionnaires hors de la filière de soins, etc. - Les données de R&D pharmaceutiques (essais cliniques,…) propriété des compagnies pharmaceutiques, sociétés savantes, etc. - Les données de coût et d’activité (nombre d’actes, estimation des coûts, etc.) propriété des fournisseurs et des caisses d’assurances. La coordination de l’offre de soins, valorisée grâce à la mise en place de ces bases de connaissances, permettra, en sus de la qualité, d’offrir : - Aux patients : de l’accessibilité et de la proximité. - Aux professionnels et établissements de santé : de l’efficience et un décloisonnement. - Aux acteurs institutionnels et financeurs publiques : de l’efficience renforcée. Leviers : o Une messagerie sécurisée cryptée facilitant ainsi les échanges entre les professionnels de santé. o Un Système d’Information (SI) à la disposition des professionnels de santé, sous leur contrôle et non-imposé, qui autorise une circulation de l’information et une interopérabilité entre les différents acteurs de santé. o Un logiciel métier qui autorise l’utilisation de données structurées, qui facilite les échanges entre tous les professionnels de santé, et qui répond aux obligations d’aide à la prescription, au codage des actes, (suivi du patient, agenda centralisé, alertes, rappels [vaccins, prévention, etc.], permanence des soins). 11/12 o L’utilisation des objets connectés (Medical devices), évalués et réglementés (AMM), pour améliorer la santé et le bien-être du patient, faciliter son adhésion et l’inciter à suivre les recommandations proposées et recueillir ses appréciations. o Un dossier centralisé, véritable maillage autour du patient, pour faciliter son parcours de soins préalablement tracé entre les modèles ambulatoires et hospitaliers, en proposant des indicateurs et des alertes pour guider le patient. o Un nouvel écosystème de santé, territorial, responsable et efficient, dont les bénéfices pourront être redistribués entre les différents acteurs. 12/12