illégaux, de la pollution du fleuve avec l’orpaillage, de l’installation de laboratoires clandestins pour
fabriquer de la drogue…
En septembre 2014, quatre syndicalistes indigènes Ashaninka qui défendaient la forêt amazonienne
contre les coupes illégales de bois ont été assassinés, leur corps jeté dans le fleuve. Ils avaient
témoigné, photos à l’appui, des changements qu’ils observaient dans la forêt, des saccages, de la
pollution des eaux, de la mort des animaux…et avaient donné les noms des personnes qui les
menaçaient de mort. Le Gouvernement péruvien avait accepté d’agir mais trop tard. Sa politique est
paradoxale en matière de protection de l’environnement : d’un côté, il signe avec la Norvège un
contrat de 192 millions de dollars pour réduire d’ici 2021 la déforestation, de l’autre, il offre des
concessions pour augmenter l’agriculture intensive, les mines, l’abattage du bois, le forage pétrolier
en Amazonie à la frontière entre le Pérou et l’Equateur. D’un côté, il reconnaît légalement le droit
des populations ancestrales à vivre sur le territoire comme ce fut le cas en 2003 avec la communauté
de Saweto, celle dont était issue les quatre syndicalistes Ashaninka, et de l’autre, il laisse sans
protection les défenseurs qui sont en première ligne dans la forêt amazonienne pour la protection de
la nature. Ceux-ci, qui sont présents dans la CoP, comme organisations non gouvernementales avec
l’appellation « peuples indigènes » témoignent du fait que dans de nombreux pays, ils sont
considérés par les gouvernements comme des « sous-hommes » alors même que leur combat à une
portée universelle. En effet, ce ne sont pas seulement des arbres ancestraux qui sont abattus, ce sont
des puits de carbone dont l’humanité entière profite.
Selon un rapport de la Banque mondiale, 80% des exportations de bois péruvien sont d’origine
illégale. Le Pérou semble particulièrement s’illustrer en la matière puisque le Programme des Nations
Unies pour l’Environnement estime que le commerce illégal mondial du bois représente 10 à 30% du
commerce du bois. Un commerce illégal qui génère des profits substantiels : un tronc d’essence de
de mahogany peut valoir selon l’Agence internationale de l’environnement 11 000$ sur le marché
parallèle.
L’abattage illégal génère une violence extrême dans la forêt amazonienne, notamment au Pérou qui
dispose pourtant depuis 1975 d’une loi qui confère aux populations indigènes la propriété pleine et
entière de leurs terres. Ainsi, un rapport de l’ONG Global Witness classe le Pérou au 4ème rang des
pays les plus violents pour les protecteurs de l’environnement, derrière le Brésil, le Honduras et les
Philippines. Depuis 2002, 57 activistes écologistes y ont été assassinés et l’on constate une
amplification et une accélération du phénomène depuis 2010.
Dans tous les pays d’Amérique du Sud ou d’Amérique Centrale, les témoignages sont les mêmes. Au
« Cumbre de los pueblos », plusieurs intervenants (syndicalistes, scientifiques, habitants,
agriculteurs…) sont venus témoigner de la même criminalisation des mouvements sociaux, des
mêmes catastrophes : pollution des eaux, maladies, disparition de la biodiversité. Les réponses des
pouvoirs politiques ne semblent ni à la hauteur des attentes des populations en termes de protection
des droits de l’Homme, ni à la hauteur des enjeux pour lutter contre la catastrophe climatique.
Défricheurs du social n° 69 2