la réaction des agriculteurs
Même lorsqu’ils n’en connaissent pas la cause première, les Maliens savent que le climat
est en train de changer et ils essaient de s’y adapter de diverses manières. L’éducation et
l’information sont essentielles pour que les agriculteurs puissent s’adapter ; ainsi,
les décideurs et les spécialistes travaillent à la divulgation des informations utiles
et des résultats de la recherche agronomique.
domaines de changement : Les informations météorologiques sont utilisées pour aider
les agriculteurs à planifier leurs activités et à répondre au changement climatique. Grâce
à une initiative nationale réussie, ils reçoivent des bulletins d’experts où figurent les
derniers renseignements sur le temps et l’hydrologie, ainsi que des informations sur les
problèmes agricoles du moment ou sur des questions sur le terrain. Cela fonctionne
comme un système d’alerte qui permet aux décideurs de mieux réagir devant une crise.
En outre, le plus important est que ce système aide les agriculteurs à savoir à quel
moment il convient de semer et de récolter, ce qui fait diminuer le nombre des récoltes
perdues et permet de mieux utiliser la terre. À son tour, le bon usage de la terre fait
diminuer la dégradation environnementale.
D’autre part, on encourage les agriculteurs à choisir des variétés agricoles qui
nécessitent moins d’eau et des produits dont le cycle de croissance est plus court, de
manière à s’adapter au raccourcissement de la période humide. Par exemple, de
nombreux paysans sont en train d’abandonner la culture du riz, qui requiert beaucoup
d’eau, au profit d’autres céréales plus résistantes à la sécheresse, telles que le millet, le
sorgho et le maïs. Une autre stratégie importante consiste à développer des variétés
végétales plus résistantes à la sécheresse et à la chaleur. Et là où l’érosion devient un
problème, on exhorte les agriculteurs à lutter contre elle, par exemple en construisant
des brise-vent autour de leurs champs pour éviter que la terre s’envole.
Il y a aussi des initiatives pour freiner « l’érosion génétique » des cultures traditionnelles
les mieux adaptées au climat actuel, telles les variétés traditionnelles de millet. Certains
agriculteurs se tournent vers l’agriculture biologique, y compris celle du coton ; en 2006,
un jury de citoyens ruraux de Sikasso a voté contre la culture de variétés transgéniques.
il faut nourrir les vaches : Le bétail, qu’il s’agisse de vaches, de moutons, de chèvres,
d’ânes ou de chevaux, joue un rôle très important dans l’économie de subsistance du
Mali. Or, la diminution de la pluviosité a fait diminuer le fourrage et les animaux ont
très peu à manger. A mesure que les plantes fourragères se dessèchent et disparaissent,
les éleveurs non nomades commencent à déplacer le bétail pour essayer de s’adapter
aux nouvelles conditions. De même, les agriculteurs mettent de côté les résidus de
récolte pour les utiliser comme fourrage et profitent de tout ce qu’ils trouvent pour
nourrir le bétail.
la pêche doit changer : Au moment des inondations annuelles d’août à novembre, le
delta intérieur du fleuve Niger se transforme en un énorme réseau de lacs qui, plus tard,
deviennent des lacs et des étangs indépendants. La pêche fluviale de poissons d’eau
douce est une source importante de revenus et d’aliments pour les Maliens. Or, le
changement climatique, l'irrigation et les barrages sur le fleuve ont réduit son débit de
près de 30 % au cours des dernières décennies, de sorte que les populations de poissons
ont beaucoup diminué.La surexploitation et les méthodes de pêche destructrices y ont
contribué également. Les Maliens essayent de s’y adapter en prenant des mesures pour
préserver le niveau de l’eau, en utilisant des filets et des méthodes de pêche plus
appropriés et en organisant des coopératives d’élevage de poissons. Le gouvernement
cherche à mieux réglementer la pêche ; en outre, il met au point des plans pour l’élevage
de poissons dans le delta, de manière à en relancer la production.
Teuguezié Malle, Président de l’Union
des Sociétés Coopératives de la commune
de M’Pèssoba, Cercle de Koutiala,
région de Sikasso.
les pour et les contre du coton : Le coton est
très important pour nous car c’est la seule
culture commerciale de la zone. C’est à cause
du coton que les paysans sont approvisionnés
en engrais chimiques, produits phytosanitaires
etc., que nous donne la Compagnie Malienne
pour le Développement des textiles (CMDT), la
société cotonnière du Mali. L’utilisation abusive
de ces produits a aussi un impact négatif sur
notre environnement. Nous sommes obligés
pourtant de les acheter et de les utiliser pour
avoir accès à des crédits auprès de la Banque
Nationale de développement agricole (BNDA)
et des autres institutions de micro finances.
le développement en danger : Les feux de
brousse et les brûlis des résidus de récolte ont
des conséquences négatives pour les sols. Le
déboisement et les eaux de ruissellement ont
aussi leur part dans cette situation. Tous ces
facteurs entraînent la diminution des arbres
et des herbes et rendent du coup l’élevage
difficile. Donc, non seulement l’agriculture est
devenue difficile à cause de la diminution de
la pluviométrie et de la dégradation
continuelle des terres et du couvert végétal,
mais l’élevage aussi se trouve compromis à
cause du manque de nourriture.
C’est dans ces conditions que nous tentons de
mener malgré toutes nos activités agricoles
qui, malheureusement, sont la seule source
de revenus à partir de laquelle tout le
développement est programmé. Mais la
pauvreté continue de s’aggraver et de priver
les citoyens de leurs droits fondamentaux.
les solutions : Les solutions que nous
pouvons explorer passent par une
diminution des superficies cultivées en coton
et par la plantation d’arbres. Nous devons
aussi diversifier nos sources de revenus en
entreprenant d’autres activités, telles que la
valorisation des produits locaux et la
promotion du commerce équitable. En outre,
nous devrions aller vers un abandon du
coton conventionnel pour le remplacer par le
coton biologique, qui ne nécessite pas
l’utilisation de produits chimiques et
phytosanitaires. Nous allons nous investir
dans la production de fumier organique pour
restaurer nos sols et garantir de meilleurs
rendements agricoles. Mais pour mettre en
oeuvre toutes ces solutions nous avons
besoin d’appuis extérieurs.
À gauche : Déchargement du coton, Mali © nic fox À droite : 2007, Pompe à eau fonctionnant à l’énergie éolienne, Mali © AMADIP
22 |changement climatique : les témoignages
mali
12°n, 8°w