Exposés
Pierre VELTZ
Chercheur et Président Directeur Général de
l’Établissement Public Paris-Saclay
Bonjour à tous. Merci, Ariella et Alain, pour ces mots
d’introduction. Je vais vous présenter quelques réflexions sur le
processus de métropolisation, sans entrer dans les problèmes
institutionnels, sur lesquels nous reviendrons sans doute
abondamment dans les discussions. Je tenterai pour ma part de
vous expliquer pourquoi la métropolisation constitue aujourd’hui,
selon moi – et je ne suis pas le seul à le penser –, un élément
moteur et central de la dynamique économique et sociale en
France.
On a toujours tendance à penser que l’espace, le territoire, est
un simple lieu où se projettent les dynamiques sociales et les
dynamiques économiques, portées par leurs logiques propres. En réalité – la comparaison avec
l’Allemagne sera de ce point de vue intéressante –, on observe que les trajectoires économiques et
sociales sont très fortement façonnées par la géographie et la façon dont les territoires sont
organisés, spatialement et institutionnellement. Tout le monde est conscient – à l’exception, peut-être,
des économistes – que l’économie dépend fortement de la culture, des institutions, mais on ne
mesure pas à quel point la géographie façonne les formes et les rythmes économiques.
Je ne prendrai qu’un exemple. La France a en ce moment le regard fixé sur l’Allemagne et sa réussite
industrielle. Or on ne peut dissocier cette réussite de la structure géographique du pays, en particulier
de l’Allemagne du Sud, où des industries familiales se sont installées dans de petites villes et de
petits bassins d’emploi. La macroéconomie nous apprend beaucoup de choses, mais peut-être pas
l’essentiel de ce qui fait le développement ; or l’essentiel est enraciné dans le concret, et les territoires
en constituent un élément majeur.
Pour évoquer les métropoles, je m’appuierai tout d’abord sur des éléments factuels, notamment des
cartes que j’emprunterai à Laurent Davezies et Hervé Le Bras, afin de montrer que la métropolisation
constitue un fait massif et majeur en France.
Dans un second temps, j’essaierai d’ouvrir quelques pistes de réflexion sur les raisons de cette
concentration métropolitaine, et je tâcherai de comprendre pourquoi certaines métropoles semblent
suivre des trajectoires plus dynamiques que d’autres.
Enfin, dans un dernier temps, je reviendrai sur un sujet d’une grande actualité : le lien entre les
métropoles et le reste du territoire. Une posture « ruraliste » oppose traditionnellement les métropoles
qui fonctionnent et les territoires ruraux abandonnés ; une autre, qui a connu un grand succès dans
les médias et auprès des dirigeants politiques ces dernières semaines, distingue deux France : celle
des métropoles, bien insérées dans la mondialisation, et tous les autres territoires, abandonnés plus
ou moins volontairement. Je vous dirai pourquoi cette thèse, selon moi, ne tient pas, et pourquoi elle
constitue même un positionnement dangereux.
On voit donc qu’au-delà de l’organisation des territoires, c’est le « vivre ensemble » de la société
française qui est en jeu dans ces questions.
5 / 28-