Revue Méd. Vét., 2009, 160, 2, 108-114
112 BENCHARIF (D.) ET COLLABORATEURS
une supplémentation inadaptée, pertes de calcium lors du
développement osseux fœtal, alcalose respiratoire lors de
dystocie, insuffisance rénale aiguë, pancréatite aiguë, syn-
drome de Cushing, malabsorption [11, 36, 41].
Les chiennes de petites ou moyennes races ayant des por-
tées importantes semblent plus souvent touchées.
Chez la chatte, l’éclampsie se manifeste en pre-partum :
3 à 17 jours avant le part.
Cette pathologie est très rare. En ce qui concerne l’étiopa-
thogénie, la qualité de l’aliment ne semble pas incriminée:
dans la littérature, les félidés étaient tous soumis à une ali-
mentation industrielle (donc équilibrée) [5, 11]. Cependant,
il est possible que la qualité de la prise alimentaire joue un
rôle: baisse de la prise alimentaire lors de maladie intercur-
rente et prédisposition à l’éclampsie [11].
Tableau clinique
Juste après la mise bas, la chienne présente d’abord des
tremblements, du ptyalisme, puis tombe sur le sol soumise à
des contractions cloniques puis toniques. Durant toute la
durée de la crise, la conscience de l’animal n’est pas altérée
[8, 36, 41].
Peu de données sont disponibles concernant l’éclampsie de
la chatte. Les signes cliniques suivants sont décrits: hyper-
esthésie, hyperexcitabilité, paralysie flasque (absence de crises
épileptiformes), hypothermie, trémulations, pouvant être
associées à de la déshydratation, de la faiblesse, une pâleur
des muqueuses, une tachycardie, et une dyspnée [5, 11].
La calcémie chute à 70 mg/L (au lieu de 100-120 mg/L)
[36, 41]. Cependant, 10 % des chiennes présentant une éclampsie
ont une calcémie dans les normes [36].
L’hypoglycémie est une complication potentielle de l’éclampsie.
Les signes cliniques sont très proches. Une mesure de la gly-
cémie s’avère donc indispensable [41].
Traitement et prophylaxie
Le traitement consiste en l’administration de gluconate de
calcium 10 %: 0,5 à 1 mL/kg par voie sous-cutanée (ou voie
intraveineuse, si son accès est possible). Attention: l’admi-
nistration de calcium doit se faire lentement; une ausculta-
tion cardiaque et un suivi de la température rectale doivent
être réalisés tout au long de l’administration parentérale, et
poursuivis durant les 30 à 45 minutes suivantes [8, 11, 36,
41]. En cas de survenue d’une bradycardie ou d’arythmies, il
est conseillé de ralentir le débit, voire de stopper l’adminis-
tration.
Un relais per os doit ensuite être réalisé par l’administration
de carbonate de calcium (100 à 150 mg/kg/j, pendant 1 mois)
dans la ration [8, 11, 36, 41]. Cette supplémentation ne doit
pas être mise en place à titre préventif: en effet, l’excès d’ap-
port de calcium entraîne une diminution de son absorption
intestinale et une inhibition de la sécrétion de la parathormone,
favorisant l’apparition d’une hypocalcémie.
Une vitaminothérapie (à base de vitamine D) peut être
prescrite, mais elle ne semble pas nécessaire chez les carni-
vores domestiques [11, 36, 40, 41].
Parfois, afin d’éviter les récidives, il convient de séparer la
portée de la mère durant les vingt-quatre premières heures,
mais il faudra assurer leur allaitement artificiel, toutes les
deux ou trois heures pendant 24 heures, ce qui est très
contraignant et rarement mis en œuvre. Si les signes d’hypo-
calcémie réapparaissent lors de la reprise de l’allaitement, les
chiots sont définitivement séparés de la mère et nourris au
biberon; la mère doit alors être tarie [36, 41].
Par ailleurs, les récidives lors des portées suivantes sont
fréquentes chez les chiennes ayant déjà manifesté une crise
d’éclampsie. Il convient donc de s’assurer de l’équilibre de
la ration alimentaire, et, si nécessaire, de les retirer de la
reproduction.
GESTATION ET DIABÈTE
Effets du diabète sucré sur la lice et les chiots
Une chienne diabétique en anœstrus peut avoir un métabo-
lisme stabilisé par une insulinothérapie. Durant le metœstrus,
l’élévation de la progestérone agit comme un antagoniste de
l’insuline. On peut donc observer, sur cet animal diabétique
”stabilisé”, de grandes fluctuations de la glycémie (pouvant
être à l’origine d’un diabète acido-cétosique). Une élévation
des doses d’insuline administrées est alors nécessaire.
Par ailleurs, la gestation peut induire une insulino-résistance
majeure et une diminution de la capture du glucose par les
tissus périphériques. L’insulinorésistance s’expliquerait par
l’imprégnation progestéronique des tissus mammaires, à l’o-
rigine d’une augmentation de la sécrétion de GH (elle-même
à l’origine d’une acromégalie) [6, 14, 21, 33, 35].
Chez la femme, le diabète gestationnel est statistiquement
responsable d’un raccourcissement de la durée de gestation
(35,9 +/- 4,8 semaines), de pourcentages d’accouchement
assisté et de pertes fœtales augmentés, ainsi que d’une inci-
dence des malformations congénitales augmentée [30].
Chez la chienne gestante, le diabète sucré peut se compliquer
d’avortements (par atteinte de la vascularisation placentaire)
[14, 21], ou de la naissance de chiots présentant un retard de
croissance ou un excès de volume responsable de dystocie
[29, 37, 41].
Le retard de croissance fœtal s’explique par l’hyperglycémie
chronique de la lice qui peut engendrer des modifications
vasculaires au niveau placentaire [14].
En ce qui concerne l’augmentation de la taille (macrosomie)
chez les chiots nés d’une mère diabétique, elle s’explique par
un excès de sécrétion fœtale d’insuline, certainement due à
l’hyperglycémie maternelle [14, 24, 29, 41]. Le pronostic de
survie est réservé pour ces chiots [33]. En effet, ces chiots
sont alors prédisposés à des crises d’hypoglycémie dans les
jours à semaines post-partum (apport sanguin maternel riche
en glucose supprimé mais insulinémie du chiot trop élevée)
[14].