La Rome antique Le Colisée est la preuve de l’ingéniosité des bâtisseurs antiques. forum du matin, dont l’accès était réservé aux piétons, se remplissait des cris des commerçants de toutes sortes, les entrepreneurs y concluaient leurs affaires, on y croisait également les avocats défendant leurs clients et les spéculateurs. Dans la matinée, le peuple de Rome effectuait ses démarches administratives, rejoignait les cortèges funèbres qui passaient par les places ou observait les riches couverts d’or dans les palanquins. Dans l’aprèsmidi, la place changeait de visage : le bourdonnement des conversations et des disputes s’éteignait complètement. Jusqu’au soir, le Forum se remplissait de promeneurs en quête de calme et de tranquillité, parmi lesquels il n’était pas rare de croiser des penseurs, des poètes, des écrivains et d’autres citoyens distingués de la ville. Au terme de la République, vers la fin du ier s. av. J.-C., le caractère multidimensionnel du Forum changea définitivement. La politique, le pouvoir 12 La Rome antique et les fonctions officielles prévalurent sur le quotidien ; par conséquent, le commerce disparut du Forum. Apparurent de nombreux temples et bâtiments administratifs. Mais il fut bientôt clair qu’à ce rythme de développement rapide, l’espace limité du Forum romain ne serait plus suffisant pour y mener la vie politico-administrative. Cela amena les Romains à construire, à proximité du centre d’origine, d’autres forums, qui commencèrent progressivement à remplir les fonctions de places principales. Le premier d’entre eux, construit entre 54 et 46 av. J.-C., fut dédié à Jules César. Dans les siècles qui suivirent, se formèrent les forums d’Auguste, de Vespasien (empereur qui fit construire le Colisée 20), de Nerva et de Trajan. Ils se situent tous entre le Forum romain sacré et le quartier turbulent de Suburra et constituent les forums impériaux ( 13). Contrairement à la dynamique de développement que connut le Forum romain, l’histoire du Palatin prit une tout autre direction. Cette colline centrale isolée fut considérée pendant des siècles comme un symbole sacré de Rome. C’est probablement pour cette raison que le Palatin ( 23) résista pendant des siècles à la vie publique profane, la plupart de ses bâtiments étant des temples. Ce n’est qu’au cours des derniers siècles de la République que l’on commença à y construire de grands manoirs pour les citoyens éminents de la ville, comme celui de Cicéron, orateur et homme politique romain. Pendant l’Empire, à partir du règne d’Auguste, le Palatin devint le siège des empereurs romains successifs, qui se concurrençaient pour apporter davantage de splendeur à leurs luxueux manoirs, appelés par la suite des palais, d’après le nom de la colline. Rome, petite colonie fondée par le légendaire Romulus en 753 av. J.-C., possédait, au moment de son déclin au IVe s., 29 larges avenues, 254 moulins, 11 forums, 1152 fontaines et 28 bibliothèques. Les ruines de la Rome antique valent le détour, particulièrement le matin, mais des sensations inoubliables sont garanties également au coucher du soleil. Certes, on ne sera jamais les seuls visiteurs ici : les ruines de cette ancienne capitale sont un site d’un grand intérêt touristique. En début de semaine, elles sont cependant un peu moins fréquentées. Les foules qui investissent le Forum romain ( 15) et le Palatin ( 23) sont un inconvénient mineur : en visitant le site, nous serons tellement pris 1 par sa magie et son histoire que rien ne pourra assombrir notre humeur. C’est une promenade qui mérite qu’on lui consacre une journée entière. Si l’on ne dispose pas d’autant de temps, il faut compter au moins six heures de visite. Au cours de l’exploration de tous les sites de la Rome antique, on peut profiter des services payants de guides autorisés par la mairie. De nombreux restaurants se trouvent à proximité. Les forums impériaux Les forums qui témoignent du développement de la Rome impériale sont situés le long de la via dei Fori Imperiali. Tracée par Mussolini, cette large avenue reliant la piazza Venezia au Colisée devait être « droite comme une lame d’épée ». Le souhait du dictateur fut entièrement réalisé. On s’en rendra compte si l’on commence la visite des forums à la piazza Venezia ( 33), près du monument à Victor-Emmanuel II (connu aussi sous le nom de l’Autel de la Patrie), à l’endroit d’où part la via dei Fori Imperiali. L’avenue qui s’étend devant nous, longue de 850 m et large de 30 m, coupe précisément en deux les forums impériaux, pour continuer tout droit vers le Colisée dont la silhouette se dessine au loin ( 20). Bien que bâtie en 1932, la rue suscite toujours beaucoup de controverses : pour construire sa chaussée, on a enterré d’innombrables sites remontant à la Rome antique, ce que confirment les découvertes continues de nouveaux fragments des forums – victimes des travaux de construction des années 30. Sur le côté gauche de la rue, nous rencontrerons d’abord le forum de Trajan – le plus grand et le plus impressionnant de tous. Il fut construit à l’époque de l’empereur Trajan au IIe s. C’est le dernier des forums impériaux. Il abritait une vaste place qui accueillait l’impressionnante basilique Ulpia à cinq nefs, soutenue par 96 colonnes, où se tenaient les réunions publiques. S’y trouvaient également deux bibliothèques (grecque et latine), de nom- Les forums monumentaux reflétaient la puissance des empereurs (ci-dessus : forum d’Auguste). breux temples ainsi que d’autres structures. Parmi les plus caractéristiques se trouve la colonne Trajan – préservée jusqu’à nos jours en parfait état – érigée en 113 en l’honneur de l’empereur, 13 La Rome antique Le forum de César Le Forum de César est le seul forum impérial situé sur le côté droit de la via dei Fori Imperiali. La première des nouvelles places construites par les Romains se trouve à proximité immédiate de l’ancien Forum romain ( 15). En réalisant ce projet, César sut anticiper les besoins d’une Rome en développement – l’ancien forum était déjà trop petit pour accueillir de nouveaux bâtiments. Un autre prétexte, tout aussi important pour la construction de la place, fut la victoire de Pharsale, remportée par César sur Pompée en 48 av. J.-C. Cette bataille s’avéra décisive dans la guerre civile. Jules César exprima sa reconnaissance de ce triomphe à Vénus Génitrix d’une manière originale, en lui dédiant un temple qui fut érigé sur le forum en 46 av. J.-C. À l’intérieur de l’édifice, à côté de la statue de la déesse Vénus, se trouve une impressionnante collection de sculptures et de peintures grecques, ainsi qu’une statue de Cléopâtre. Au centre de la place trône la statue en bronze de Jules César. Sur les deux côtés latéraux du forum, se trouvaient des boutiques, des ateliers et des studios, entourés de portiques. Devant chacun des forums impériaux, le long de la via dei Fori Imperiali, on peut admirer les statues des empereurs auxquels les places furent dédiées. dont les cendres furent placées dans la base de la colonne. Ce monument est composé d’un fût mesurant plus de 26 m, où monte en spirale une frise en marbre de 200 m, développée le long de la construction comme une pellicule photographique et représentant les victoires remportées par l’empereur au cours des guerres contre les Daces. Un autre objet intéressant distingue nettement le forum de Trajan des autres centres : ce sont les marchés de Trajan, sortes de halles commerciales. Dans ses locaux, le peuple de Rome se réunissait pour échanger des marchandises, se renseigner ou tout simplement rencontrer ses amis. 14 La Rome antique Le forum d’Auguste compte aussi parmi les mieux conservés des forums impériaux. Il est également situé sur le côté gauche de la via dei Fori Imperiali. Il fut construit après la bataille victorieuse de Philippes en 42 av. J.-C., sous le règne de l’empereur Auguste. En triomphant de Brutus et de Cassius, les assassins de Jules César, Auguste vengea la mort de son beau-père. L’empereur fit célébrer cette vendetta par la construction du temple de Mars Ultor (Mars Vengeur), en plein cœur de la place. L’édifice fut officiellement ouvert en l’an 2. Le forum d’Auguste fut limité à l’arrière par un haut mur, tandis que ses côtés se composaient de deux demi-cercles géants protégés par des portiques avec une double rangée de colonnes. Cette construction devait abriter le forum des risques d’incendie et le séparer du quartier turbulent de Suburra. Sur le même côté de la rue, on construisit également le forum de Vespasien avec le temple de la Paix en son centre, et le forum de Nerva, dont le côté est accueille le temple de Minerve, déesse romaine de la sagesse, de la science, des arts, de l’artisanat et de la littérature. Cet endroit, en raison de son emplacement entre le forum d’Auguste et le forum de Vespasien, fut également appelé « Forum du passage ». Malheureusement, il ne reste aujourd’hui que quelques vestiges de ces deux centres. Forums impériaux (Fori Imperiali) Via IV Novembre 94 (+39) 06 06 08 accès au forum avec un ticket disponible dans le musée des Forums impériaux et des marchés de Trajan (Museo dei Fori Imperiali – Mercati di Traiano, Via IV Novembre 94, mar.-dim. 9h-19h) 11 € (9 €), le ticket comprend la visite du musée des Forums impériaux et des marchés de Trajan H, 44, 60, 84, 119, 170 (P.za Venezia) ; 85, 87, 175, 186, 271, 571, 810 (Fori Imperiali) parkings aux alentours de la piazza Venezia ( 33) restaurant Ulpia, Foro Traiano 2 ; restaurant Massenzio, Largo Corrado Ricci 2 Le pittoresque Forum romain est le vestige de la gloire d’antan de l’Empire. 2 Le Forum romain En se promenant dans la rue principale du Forum – la via Sacra – il est difficile de croire qu’en 44 av. J.-C. elle vit passer le cortège funèbre de Jules César. C’est ici que Cicéron prononça ses fameux discours, y compris les Philippiques mordantes. Pendant de longs siècles, la vie quotidienne de la Ville éternelle et de ses habitants se concentra le long de la via Sacra. On continua à ériger des temples et des bâtiments publics des deux côtés de la rue. La via Sacra fut témoin de manifestations, de processions religieuses, d'exécutions et des funérailles. Avant la construction du Colisée ( 20), c’est là que se tenaient les spectacles populaires. Les manifestations parmi les plus spectaculaires furent les combats de gladiateurs organisés en 65 av. J.-C. par Jules César, auxquels participèrent 640 combattants. C’est ici que César célébra ses nombreuses victoires de l’an 45 av. J.-C., en organisant une fête pour 22 000 convives qui dura plusieurs jours. En commençant la visite du Forum romain à l’entrée principale, à droite, on passe à côté de la basilique Émilie érigée au IIe s. av. J.-C. L’édifice servit de vaste halle au marché. En face, on trouve les vestiges du temple de Faustine, qui fut construit au IIe s. ap. J.-C. par l’empereur Antonin en hommage à Faustine, sa défunte épouse. Ensuite, juste en face de nous, se dresse le temple de César, érigé dans les années 31-29 av. J.-C. par l’empereur Octave Auguste, à l’endroit où fut brûlé le corps de Gaius Julius. L’édifice remplaça la colonne d’honneur et l’autel édifiés par le Sénat de Rome immédiatement après l’assassinat de César. En continuant dans la cour, vers la colline du Palatin qui la domine, on ren15 La Rome antique La Rome antique Les vestales Les prêtresses appelées vestales veillaient à entretenir le feu sacré dans la maison de Vesta. Elles joignaient cet ordre spécifique en tant que novices entre 6 et 10 ans, pour y rester pendant près de trois décennies. Les vestales étaient choisies par la plus grande autorité religieuse de Rome, le Grand Prêtre, qui les désignait parmi 20 candidates qui lui étaient présentées. Les prêtresses furent initialement choisies parmi des vierges provenant de familles patriciennes – ce n’est que plus tard que l’on commença à accepter aussi les filles plébéiennes. Les vestales Parmi les édifices du Forum, la basilique de Maxence se distingue par sa forme. contre les ruines du temple de Vesta et la maison des vestales qui lui est adjacente. Ce temple, nommé en l’honneur de la patronne de la famille et de l’État, fut l’un des premiers édifices religieux bâtis à Rome. À l’intérieur, on veillait assidûment à entretenir le feu éternel sacré, symbole de la continuité de la vie de la cité. Les prêtresses-vierges spécialement choisies, appelées vestales, s’assuraient que le feu ne s’éteigne jamais. Le temple de Vesta avait la forme d’une cabane, comme les plus anciennes maisons des Romains – en lieu et place du toit, un trou énorme laissait sortir la fumée. Au cours des dix siècles de l’existence du temple, il fut détruit au moins six fois, principalement par des incendies. L’édifice fut cependant soigneusement reconstruit par les dirigeants successifs de l’Empire, pour que Rome ne perde pas la protection et le pouvoir de sa sainte patronne. En plein cœur du temple, à côté du feu sacré, on gardait de nombreux objets qui témoignaient de la puissance et de la pérennité de la ville. La maison des vestales se trouvait juste à côté du temple de Vesta. Sa forme carrée caractéristique fut par la suite imitée par les constructeurs des monastères médiévaux. Le complexe 16 vivait entièrement en autarcie – il comprenait un moulin, une boulangerie, des bains et trois réservoirs d’eau. La cour de la maison accueillait un beau portique (colonnade couverte) de deux niveaux et son intérieur abritait des statues de vestales (certaines d’entre elles peuvent encore être admirées de nos jours). Le rez-de-chaussée de la cour fut entouré de colonnes en marbre de couleur vert clair. En revanche, les colonnes du premier étage luisaient d’une teinte de corail. Sur les longs côtés de la cour se trouvaient les chambres et les locaux de service occupés par les prêtresses. Si l’on continue vers le Capitole, on passe par le Forum romain. À gauche de celui-ci se dresse la basilique Julia, construite au ier s., qui servit de tribunal. Juste derrière l’édifice, on trouve les vestiges du temple de Saturne, considéré comme l’un des plus anciens sanctuaires de la Rome antique. Il fut érigé à la fin de la période royale et pendant les premières années de la République. À l’intérieur se trouvait la statue antique de Saturne, en bois. Du temple, seules huit colonnes massives subsistent. La chambre située dans le soubassement du bâtiment abritait le trésor bien gardé de l’Empire romain. Au pied de la colline du Capitole, à la manière d’un garde-frontière de l’ancien forum, trône le temple de la Concorde, érigé en 367 av. J.-C. Le bâtiment fut le symbole de la paix qui s’installa après de longues années de lutte entre les patriciens et les plébéiens romains. D’après les écritures portant sur cette période, le temple fut pendant longtemps le lieu de dépôt de dons précieux. Il devint un musée où sont exposées des peintures et des sculptures d’artistes célèbres. En traversant le Forum romain du côté de la piazza Venezia ( 33) vers le Colisée, nous passons devant l’arc de Septime Sévère construit au IIIe s. ap. J.-C., qui est l’un des plus imposants de la Rome antique. Juste derrière lui, on trouve les rostres (tribune publique) et la légendaire stèle Lapis Niger (pierre noire en latin) qui, selon la tradition romaine, fut placée à l’endroit où Romulus fut assasiné (ou « pris au ciel », pour citer une autre légende). En face de la pierre, de l’autre côté de la via Sacra, on trouve les ruines de la Curie, qui servit de salle de réunion pour devenir par la suite le siège du Sénat. Nous arrivons à la Regia, résidence des rois de Rome, située juste derrière le temple de César et, passé la basilique Maxence, nous nous dirigeons vers le Forum romain couronné par l’arc de Titus, érigé en 81 ap. J.-C. pour célébrer les victoires jouissaient d’une position très privilégiée dans la Rome antique. Une prêtresse de la déesse Vesta bénéficiait d’une grande estime – tout consul devait lui céder le pas. En outre, son autorité était telle qu’elle pouvait gracier les condamnés. L’État payait aux vestales des salaires très élevés, qu’elles pouvaient réserver aux plaisirs de leur choix. Toutefois, elles devaient se plier à de nombreuses règles, y compris des vœux de chasteté très stricts. Toute atteinte à la chasteté, ou bien l’extinction du feu, était punie d’une peine de mort extrêmement cruelle. Dans les deux cas, la prêtresse était enterrée vivante avec un morceau de pain et une bougie. à Jérusalem. L’empereur – fondateur de la basilique – se noya dans le Tibre en 312 ap. J.-C., en s’enfuyant après avoir perdu la bataille pour le pouvoir contre Constantin. Constantin, appelé plus tard le Grand, acheva la construction de l’édifice. L’une des huit colonnes de 20 m de haut, qui soutenaient la voûte de la nef principale de cet impressionnant édifice, fut déplacée en 1613, à la demande du Un petit temple dédié au fondateur de Rome, Romulus. 17