Le grand Cothurne et l’Escarpin,
Fut, par un glorieux Destin,
Receu dans notre Academie…
Entrant dedans ce corps illustre…
Il harangua bien tout à fait,
Si que la docte Compagnie
Admira son ardent Genie
Et tinst, certes, à grand honneur,
Comme aussi même à bon-heur,
De l’avoir dans ses hauts mystères
Pour l’un des braves confrères.6
La même année, Boyer revint à la pièce à machines. Les Amours de Jupiter et de Sémélé
remportèrent un grand succès dans une période où le public était avide de
représentations d’ordre spectaculaire. Il dédia la pièce à Louis XIV qui assista à l’une
des représentations au Théâtre du Marais. Christian Delmas souligne le succès de
Boyer dans cette nouvelle voie :
Boyer qui avait modestement tâté du genre à l’époque des balbutiements, est ainsi l’auteur
original d’une remarquable tragédie des Amours de Jupiter et de Sémélé, reprise en 1666-1667,
et 1667-1668, puis d’une Feste de Vénus en 1669.7
Cependant, vers le début des années 1670, Boyer dut faire face à l’hostilité de certains
de ses rivaux et à la montée de la critique. Soulignons qu’en 1667, Jean Racine
triomphait avec Andromaque et d’après Lancaster, la disgrâce de Boyer correspondait à
l’ascension de Racine. Boileau dans son Art poétique n’hésita pas à qualifier Boyer de
«froid écrivain [qui] ne sait rien qu’ennuyer ». Il usa alors de sa verve pour éliminer le
concurrent potentiel de son protégé, Racine :
On peut avec honneur remplir les seconds rangs ;
Mais, dans l’art dangereux de rimer et d’écrire,
Il n’est pas de degrés du médiocre au pire.
Qui dit froid écrivain dit détestable auteur :
Boyer est à Pinchêne égal pour le lecteur.8
Les attaques de Furetière furent aussi très virulentes notamment après son exclusion
de l’Académie Française en 1686. Furetière accabla Boyer de critiques acerbes et
moqueuses dans son Recueil de Factums contre l’Académie Française :
6 Robinet, Lettres en vers à Madame, datée du 19 septembre 1666, [in] Les Continuateurs de Loret, II, p. 307-308.
7 Delmas Christian, Recueil de tragédies à machines sous Louis XIV, Toulouse, Centre de recherches « Idées, thèmes et
formes 1580-1660 », 1985, Présentation du recueil.
8 Boileau, Art poétique, chant IV, 1674 ; Paris, Hachette, 1959. Notons que ces quelques vers n’ont pas été écrits
du vivant de Claude Boyer. Ils constituent un ajout tardif de l’auteur et ont contribué à entacher la renommée
de Boyer à l’égard de la postérité.