Théorie de l’évolution Histoire des idées, concepts clés, exemples. UPMC – Préparation à l’Agrégation interne SVTU Septembre 2009 David Laloi ([email protected]) La conception du vivant jusqu’au XVIIIe siècle - La compréhension du monde naturel (vivant et minéral) se fait dans un cadre religieux (théologie naturelle). - Les objets biologiques (organes, organismes) montrent une telle complexité, une telle adéquation à leur fonction, qu’ils ne peuvent qu’être le résultat d’une création intentionnée. La métaphore utilisée de W. Paley (Natural Theology, 1802) explique bien cette conception du vivant : « Je me retrouve sur une plage déserte et y découvre une montre, j’observe ses rouages, ses mécanismes, sa complexité. Alors je ne peux admettre qu’elle soit le fruit du hasard, ce qui serait trop improbable. Elle ne peut qu’être le résultat du travail intentionné d’un artisan, d’une finalité. » 1 La conception du vivant jusqu’au XVIIIe siècle - La compréhension du monde naturel (vivant et minéral) se fait dans un cadre religieux (théologie naturelle). - Les objets biologiques (organes, organismes) montrent une telle complexité, une telle adéquation à leur fonction, qu’ils ne peuvent qu’être le résultat d’une création intentionnée. - Chaque espèce a été créée une fois et ne varie plus au cours de son histoire (fixisme). - Le concept d’espèce est alors basé sur la seule ressemblance entre les individus. Les espèces sont totalement disjointes les unes des autres. Au XVIIIe siècle : de nouvelles données - La Terre est beaucoup plus vieille que l’on ne le pensait. Estimé à ~ 6 000 ans sur la base des textes bibliques. Les travaux, notamment en géologie, suggèrent un âge beaucoup plus important, de quelques 100 000ers d’années (Buffon aurait abouti à un calcul de quelques millions d’années mais ne l’a pas publié). - Développement de la paléontologie des espèces apparaissent puis disparaissent. 2 Une vision différente du monde vivant – l’idée d’évolution J-B. Lamarck (1744-1829) Il est possible de faire coïncider des formes différant peu les unes des autres avec une échelle de temps. Des formes différant peu se succèdent, une forme donnée persiste un temps donné avant de disparaître, laissant place à une autre forme, proche de la précédente. Une vision différente du monde vivant – l’idée d’évolution Une idée très originale en son temps : - une forme se transforme en une autre au cours du temps. - Les formes qui se succèdent dans le temps dérivent les unes des autres, par filiation, en se complexifiant, grâce à de petites variations qui s’accumulent. 3 Les mécanismes d’évolution selon Lamarck - L’environnement (« les circonstances » selon les termes de Lamarck) peut modifier les habitudes des animaux, causant un usage accru ou diminué des organes. - Par le biais d’un usage accru, les organes se développent et deviennent plus complexe ; par le biais d’un usage diminué, les organes se réduisent. - Lorsque ces changements, survenus au cours de la vie, sont communs à deux individus qui se reproduisent ensemble, ils sont transmis à la descendance. Les mécanismes d’évolution selon Lamarck Lamarck donne de nombreux exemples pour étayer l’idée de changement par l’usage, importante dans sa théorie: défaut d’usage atrophie emploi fréquent développement - « Vivant sous terre, la taupe a perdu l’usage des yeux par défaut constant d’exercice. » - Giraffe de Lamarck 4 Les mécanismes d’évolution selon Lamarck En résumé, deux postulats majeurs : - Les changements de l’environnement sont la cause des variations des organes, par le biais d’un usage accru ou diminué de ceux-ci en réponse aux facteurs environnementaux (circonstances). - Les changements qui surviennent au cours de la vie d’un individu sont transmis à ses descendants (hérédité des caractères acquis). Les mécanismes d’évolution selon Lamarck Plusieurs problèmes majeurs, dont : - Les effets de l’environnement sur les variations au cours de la vie des individus ne correspondent pas à ceux nécessaires pour expliquer les changements du vivant. - Les conditions environnementales peuvent induire des modifications des individus au cours de leur vie, mais ces modifications ne sont pas transmises aux descendants ! En termes actuels, Lamarck a confondu phénotype et génotype. Les variations pouvant être induites par l’environnement (plasticité phénotypique) ne se transmettent pas (il n’y a pas d’hérédité des caractères acquis). 5 L’idée de Charles Darwin 1831-1836, tour du monde à bord du Beagle, qui le conduit notamment à visiter les île Galapagos. C.R. Darwin (1809-1882) Les « Pinsons » de Darwin, ensemble d’espèces proches. Chaque île possèce un ensemble d’espèces. Chaque espèce possède des caractéristiques propres, qui peuvent varier avec la localisation. Explication la plus simple : colonisation par une espèce ancestrale, puis transformation en s’adaptant aux conditions de chaque île. 6 L’idée de Charles Darwin A partir de ses nombreuses observations au cours du voyage sur le Beagle, Darwin propose une théorie : l’évolution par sélection naturelle. 1859 The origin of species by means of natural selection 1871 The descent of man and selection in relation to sex Les bases conceptuelles que pose Darwin, même si elles ont connu de très nombreux rafinements et compléments, restent parfaitement d’actualité. Mécanismes d’évolution selon Darwin – la sélection naturelle L’évolution par sélection naturelle, cinq postulats clés : - Il existe une variation parmi les individus d’une population. - Cette variation est, au moins en partie, héritable. - Différents ancêtres ont laissé des nombres différents de descendants. - Le nombre de descendants d’un individu dépend fortement de l’interaction entre les caractéristiques de l’individu et celles de son environnement. - Il nait plus d’individus qu’il ne peut en survivre, les individus en surnombre sont donc en compétition, les plus aptes ayant une meilleure chance de persister (survivre et se reproduire). 7 Transformisme évolution graduelle, qui est adaptative, mais les mécanismes sous-jacents sont erronés. Sélection naturelle l’ensemble des caractéristiques des organismes est suceptible d’évoluer par sélection naturelle. Le rôle de la compétition intraspécifique Un petit calcul simple, inspiré par l’économiste Malthus, et donné en exemple par Darwin : Espérance de vie = 100 ans Reproduction entre 30 et 90 ans, nombre de jeunes produits = 6 En 750 ans, la population devrait atteindre 19 Millions (!) d’individus. Or ce n’est pas le cas. « Aussi, comme il naît plus d’individus qu’il n’en peut vivre, il doit y avoir lutte pour l’existence (struggle for life), soit avec un autre individu de la même espèce, soit avec des individus d’espèces différents, soit avec les conditions physiques de la vie. » 8 La variation Polychromatisme Arrangements chromosomiques Formes cyanogéniques L’héritabilité Hérédité (détermination génétique) d’un caractère : - ce qui est génétiquement non variable (pas de polymorphisme) transmission obligatoire, non héritable (descendants = parents) - ce qui est génétiquement variable (au moins un polymorphisme allélique) héritable (similitude parents-enfants) Des traits à détermination non génétique peuvent aussi être héritables. La sélection naturelle peut agir. Darwin n’a pas connaissance du support de la variabilité, de son mode de transmission, etc. Les travaux de Mendel n’auront de retentissement qu’au début du XXème siècle. Mais le concept darwinien est exact, ce que le développement de la génétique démontrera ultérieurement. 9 L’aptitude à survivre et se reproduire « pouvons nous douter que les individus possédant un avantage quelconque, quelque léger qu’il soit d’ailleurs, aient la meilleure chance de survivre et de se reproduire ? » Sous un environnement donné, certains individus survivent et se reproduisent mieux que d’autres. Composantes de ce qu’en termes actuels, on appelle valeur sélective, ou fitness : survie reproduction valeur sélective = fitness (= valeur adaptative = capacité biologique) Capacité d’un individu (phénotype) à produire des descendants mâtures (viables et reproducteurs), relativement aux autres individus de la même population et au même moment. = probabilité de survie à l’âge x (cumulative) = fécondité (nombre de descendants) à l’âge x x max = espérance de vie Production totale de descendants (ou de copies de gènes) de l’individu, mais la valeur sélective est une fréquence relative comparaison entre individus de la même population. 10 L’influence de l’environnement Etude expérimentale de l’adaptation aux conditions environnementales Autre mesure de la valeur sélective (fitness), par les outils de la dynamique des populations taux de croissance. = natalité (birth) = mortalité (death) = taux d’accroissement intrinsèque par unité de temps, ou taux de croissance intrinsèque de la population Il n’est pas possible de mesurer un taux d’accroissement pour un génotype seul, cette mesure est néanmoins très utile dans des approches expérimentales populationnelles. Exemple: adaptation thermique chez E. coli lignée à 32°C lignée à 37°C lignée ancestrale à 37°C lignée à 42°C lignée à 32 / 42°C 2000 générations taux de croissance relative en compétition avec la lignée ancestrale 11 - La vitesse d’adaptation est plus faible dans l’environnement ancestral (37°C) que dans n’importe quel nouvel environnement. - Dans les nouveaux environnements, l’adaptation est plus rapide à haute température qu’à basse température ou à température fluctuante. L’organisme interagit environnement abiotique congénères espèce Les composantes biotiques (relations intra-spécifiques et inter-spécifiques) sont deux éléments majeurs de l’environnement des organismes. 12 Interactions intra-spécifiques - Reproduction - Coopération (non évoquée dans cet exposé) Comment les individus peuvent-ils augmenter leur succès reproducteur ? - Augmentation du nombre de descendants. - Augmentation de la qualité des descendants. Mais… - gamètes gros / avec des réserves, relativement peu nombreux. - gamètes petits / peu de réserves, très nombreux. 13 Comment les individus peuvent-ils augmenter leur succès reproducteur ? - Augmentation du nombre de descendants. - Augmentation de la qualité des descendants. Très grand nombre relatif de gamètes le % de gamètes arrivant à fertilisation est faible. Petit nombre relatif de gamètes le % de gamètes arrivant à fertilisation est élevé. et ne sont pas égaux face aux deux possibilités d’augmentation du succès reproducteur. ont un large potentiel d’augmentation du nombre de descendants en maximisant l’utilisation du nombre de gamètes Les traits qui augmentent le nombre de descendants (via le succès de fertilisation) devraient être les plus facilement favorisés par la sélection. ont un moindre potentiel d’augmentation du nombre de descendants Les traits qui augmentent la qualité des descendants devraient être les plus facilement favorisés par la sélection. 14 De nombreux caractères ne semblent pas pouvoir s’expliquer par la sélection naturelle Exemple typique : plumage dimorphique, les mâles présentant des traits « exagérés », des oiseaux. autre pression de sélection. L’idée de Darwin... sélection sexuelle Sélection résultant des différences de succès reproducteur liées à la compétition pour l’obtention d’un partenaire. Certains caractères ne dépendent pas d’une « lutte pour la vie » mais d’une « lutte pour l’accès à la reproduction ». Darwin indique deux catégories de processus : Les mâles sont en compétition pour l’accès aux femelles : sélection intra-sexuelle. Les femelles choisissent : sélection inter-sexuelle. Sélection sexuelle : sélection pour tout trait qui favorise un individu via soit la compétition intra-sexuelle soit la sélection inter-sexuelle. 15 Cela correspond aux prédictions découlant de l’anisogamie : - Le nombre de gamètes est limitant, - fortement contraintes par la capacité à accéder aux ressources, théorie la valeur sélective (exactement, sa composante reproduction) des femelles peut être maximisée même avec peu d’accouplements. - Le nombre de gamètes n’est pas limitant, - limités par la capacité à accéder aux femelles, théorie la valeur sélective (exactement, sa composante reproduction) des mâles augmente avec le nombre de partenaires. Divers traits sont susceptibles d’évoluter par sélection sexuelle, en particulier les « ornements des mâles » Hirondelle rustique femelle mâle 16 Manipulation expérimentale (les facteurs confondants potentiels n’influencent pas le résultat) des rectrices externes ou « filets ». Les femelles préfèrent s’acoupler avec les mâles ayant les plus longs filets. A. Møller et al. (ref. multiples) Les hirondelles ne sont pas seules…. Euplectes progne préférence des femelles pour les mâles arborant des caractères exagérés (ornementations) 17 Pourquoi les femelles préfèrent-elles les mâles ornementés ? Des bénéfices apportés par les mâles sont corrélés à l’expression des caractères ornementaux. - Soins paternels. La descendance bénéficie de ressources (au sens large) apportées par le mâle. - Absence (ou faible charge) de pathogènes. Pas de transmission de maladie ou de parasite. - Qualité génétique. La descendance hérite de bonnes qualités génétiques du mâle. Les ornements des mâles sont un type de caractère dont l’évolution est typiquement influencée par la sélection sexuelle. Ce ne sont pas les seuls. Interactions inter-spécifiques Rôle clé des relations inter-spécifiques Van Valen (1973) : « La plus importante composante de l’environnement pour une espèce est représentée par les autres espèces de l’écosystème avec lesquelles elle interagit. » Les espèces évoluent en réponse aux changements évolutifs des autres espèces avec lesquelles elles interagissent. Théorie de la Reine Rouge (Red Queen hypothesis) 18 La théorie de la Reine Rouge s’applique particulièrement aux relations hôtes-parasites. Trypanosoma brucei Interactions inter-spécifiques Quand deux (ou plusieurs) espèces interagissent de manière étroite (spécifique) et durable : chacune évolue en réponse aux changements de l’autre. Processus de co-évolution. Interactions antagonistes spécifiques et durables : - hôtes / pathogènes. - proies / prédateurs. - plantes / herbivores. Interactions mutualistes spécifiques et durables : - plantes / pollinisateurs. - plantes / disperseurs de graines. - fourmis champignonnistes / champignon / bactérie. Etc. 19 Etude expérimentale de la co-évolution hôte-parasite Potamopyrgus antipodarum Microphallus (adulte sortant d'un kyste) Dans une population de P. antipodarum du lac Poerua, les génotypes clonaux (se reproduisant de manière asexuée) les plus communs sont plus parasités que les génotypes clonaux rares. Hypothèses : -Les génotypes communs sont de meilleurs compétiteurs, mais ils résistent moins aux parasites (compromis entre deux caractéristiques). - Les parasites sont mieux adaptés aux génotypes communs. Etude expérimentale de la co-évolution hôte-parasite 20 Etude expérimentale de la co-évolution hôte-parasite Poerua snails. 12, 19, 22, 63 : common clones. Les parasites infectent plus les hôtes sympatriques. Les hôtes communs (clones communs) sont plus infectés, mais seulement dans le cas d’hôtes et parasites sympatriques. Il y a adaptation locale des parasites à leurs hôtes. Cette adaptation locale est le résultat attendu quand les deux espèces, hôte et parasite, ont co-évolué. Etude expérimentale de la co-évolution hôte-parasite Parasite et hôte évoluent. 6-months periods of asexual reprod. Entre autres résultats, la rupture de la co-évolution entraîne une diminution de l’adaptation de l’hôte au parasite. Quand il y a une interaction forte entre deux espèces, tout changement de l’une entraîne un changement de l’autre (Reine Rouge). 21 Evolution Les processus fondamentaux s’expliquent le plus facilement à l’échelle de l’individu (e.g. notion de valeur sélective). Les influences sont à toutes les échelles du vivant : Gènes Organes / Caractéristiques des individus Individus Populations Espèces Communautés Ecosystèmes La théorie génétique de l’évolution (ou néo-synthèse) 22 La théorie génétique de l’évolution (ou néo-synthèse) Les connaissances actuelles Nature / apparition / transmission / maintien de la variabilité. Les sources de variation - Mutations ponctuelles. - Modifications chromosomiques. - Transposition (éléments transposables, fragments d’ADN mobiles). - Duplication. 23 Les connaissances actuelles Nature / apparition / transmission / maintien de la variabilité. La transmission des variations - Hérédité cellulaire. - Hérédité vs Héritabilité. La transmission « non génétique », notamment par apprentissage. Empreinte - Empreinte de l’hôte (exemples : veuves parasites d’Estrilidés, insectes parasitoïdes tels que Ichneumonides). - Empreinte de la localité (exemple : saumon). - Empreinte de la nourriture (exemples : rongeurs, ruminants). - Empreinte sexuelle (exemple : Diamant madarin). 24 Le rôle de l’empreinte dans la sélection naturelle Les connaissances actuelles Nature / apparition / transmission / maintien de la variabilité. Le maintien / la fixation des variations - Action de la sélection. - Dérive. - Migration. 25 De l’évolution des espèces à la spéciation Dès son introduction à L’origine des espèces, Darwin indique que le processus évolutifs, mécanismes d’adaptation à l’environnement, sont aussi responsables de changements à l’origine de nouvelles espèces : « Je suis pleinement convaincu que les espèces ne sont pas immuables ; je suis convaincu que les espèces qui appartiennent à ce que nous appelons le même genre descendent directement de quelque autre espèce ordinairement éteinte. » Spéciation par divergence : « Nous voyons […] l’action de ce que l’on peut appeler le principe de la divergence, en vertu de ce principe, des différences à peine appréciables d’abord, augmentent continuellement, et les races tendent à s’écarter chaque jour davantage les unes des autres et de la souche commune. » Evolution Les processus fondamentaux s’expliquent le plus facilement à l’échelle de l’individu (e.g. notion de valeur sélective). Les influences sont à toutes les échelles du vivant : Gènes Organes / Caractéristiques des individus Individus Populations Espèces Communautés Ecosystèmes 26 La spéciation par isolement géographique = allopatrique La spéciation se produit dans des aires disjointes, par suite de l'isolement géographique des populations. C’est le processus que Darwin décrit en détails en expliquant comment les pinsons des Galapagos ont pu évoluer. Principe général de la spéciation allopatrique Population d’origine. Apparition d’une barrière extrinsèque (isolement géographique). Si la barrière extrinsèque perdure suffisamment longtemps, les populations formées divergent (évoluent indépendamment l’une de l’autre). Si les populations se retrouvent en contact : (1) Elles ont divergé, des barrières intrinsèques se sont installées, elles sont alors isolées. (2) Elles n’ont pas suffisamment divergé, elles se mélangent. 27 Mécanismes d’isolement reproductif, barrières intrinsèque : Facteurs biologiques des individus, qui préviennent ou entravent l’intercroisement entre populations. (S’il y a des inter-croisements, la descendance est non viable ou non fertile). Mécanismes pré-zygotiques, qui empêchent les croisements interspécifiques - Isolement temporel. - Isolement écologique. - Isolement éthologique. - Isolement mécanique, morphologique. - Incompatibilité gamétique. Mécanismes post-zygotiques, qui réduisent le succès des croisements interspécifiques - Motalité zygotique. - Inviabilité ou stérilité hybride. - Inviabilité écologique. La spéciation par isolement géographique = allopatrique Plusieurs facteurs sont impliqués dans ce processus. 28 La spéciation par isolement géographique = allopatrique 1. Opportunité écologique. Les espèces colonisent de nouvelles localités très fréquemment, mais sans diverger de leur état. Les divergences sont plus probables là où existent localement des niches écologiques inoccupées. Pinsons des Galapagos : Quand l’espèce ancestrale a colonisé l’archipel, il n’y avait pas de Mammifères ni Reptiles prédateurs, et il y avait peu d’oiseaux compétiteurs. Si les niches qu’occupent ailleurs le passereaux ou les pics avaient été occupées, il est très vraisemblable que les pinsons n’auraient pas divergé comme ils l’ont fait. La spéciation par isolement géographique = allopatrique 2. Isolement géographique. Une barrière géographique (au sens large, ce peut être la distance, un milieu insulaire, la topographie d’une chaîne de montagne) doit s’opposer au flux de gènes. Pinsons des Galapagos : L’archipel est isolé des zones d’origine de l’espèce ancestrale. Chaque île est relativement isolée des autres îles, favorisant la divergence en plusieurs espèces. Sur l’île de Cocos (800 km au nord-est des Galapagos se trouve une 14ème espèce de « pinson de Darwin » qui, comme aux Galapagos a rencontré des opportunités écologiques, mais il n’y a pas eu divergence au sein de la population contigüe de l’île. 29 La spéciation par isolement géographique = allopatrique 3. Accumulation de différences génétiques. Adaptation aux conditions locales (sélection naturelle) + Dérive génétique Effet du hasard sur l’échantillonnage des gamètes : l’échantillonnage participant à la génération n+1 ne représente pas exactement la fréquence des allèles à la génération n. Modifie les fréquences allèliques. En absence d’autre processus, conduit à terme à la fixation ou à l’élimination d’allèles. D’autant plus vite que la population est de taille limitée. + Effet fondateur Si une nouvelle population est formée par un très petit nombre d’individus, les fréquences alléliques diffèrent dès la formation, cette nouvelle population ne représentant qu’un échantillon de la population d’origine. La spéciation par isolement géographique = allopatrique 3. Accumulation de différences génétiques. Adaptation + Dérive + Effet fondateur Pinsons des Galapagos : Il est difficile de préciser le rôle des différents processus, mais il y a des évidence de sélection sur la taille du bec. 30 La spéciation par isolement géographique = allopatrique 4. Isolement reproductif. Il y a spéciation si l’accumulation de changements crée une barrière reproductive. Si tel est le cas, quand des populations isolées se retrouvent en contact, elles ne se croisent pas. Pinsons des Galapagos : Deux espèces arboricoles de taille moyenne, Camarhynchus pauper de l’île Floreana, C. psittacula de toutes les îles centrales y compris Floreana, se trouvent en sympatrie sur Floreana où elles coexistent sans se croiser. La spéciation par isolement géographique = allopatrique 5. Compétition interspécifique et divergence après remise en contact. Même après spéciation complète, deux groupes peuvent être écologiquement très proches. Cela crée une très forte compétition inter-spécifique, qui peut avoir deux conséquences: - disparition locale d’une espèce, - évolution divergente des caratéristique des deux groupes. Pinsons des Galapagos : 31 La spéciation par isolement géographique = allopatrique 5. Compétition interspécifique et divergence après remise en contact. Pinsons des Galapagos : Des changements évolutifs rapides observés pour la première fois dans la nature! 32 La spéciation par isolement géographique = allopatrique 6. Renforcement. Dans la zone de sympatrie, si les hybrides ont une moins bonne valeur sélective que les individus issus de croisements homospécifiques, la sélection favorise tout mécanisme réduisant la probabilité de s’accoupler avec la ‘mauvaise’ espèce. Augmentation de l’isolement pré-zygotique. D’autres mécanismes de spéciation La spéciation parapatrique La spéciation se produit dans des aires adjacentes mais sans recouvrement, l'espèce descendante se trouvant en contact immédiat ou non avec son ancêtre dès son apparition. Le plus souvent, se produit quand une petite population, en marge de l’aire de répartition d’une espèce, diverge de la population principale. Processus très similaires à la spéciation allopatrique, dont elle n’est presqu’une variante. 33 La spéciation sympatrique La spéciation se produit au sein d'une population ou dans une aire commune, l'espèce descendante se trouvant en contact immédiat avec son ancêtre dès son apparition. Processus par lequel la probabilité d’accouplement entre deux individus est déterminée par leurs génotypes seulement. La spéciation sympatrique Remaniement chromosomique majeur Le cas de la polyploïdie. La duplication du nombre de chromosome (exemple 2N 4N) cause une interruption du flux de gènes entre les individus de la population parentale et les individus polyploïdes : il y a spéciation immédiate. Mode de spéciation peut-être courant chez les végétaux. Exemples : Chrysanthemum sp., blé, Spartina. 34 La spéciation sympatrique Sélection disruptive Les génotypes hétérozygotes (ou hétérospécifiques) sont moins bien adaptés que les génotypes homozygotes (ou homospécifiques) sélection de tout mécanisme favorisant l’homogamie, conduisant à une restriction du flux de gènes. Exemple : Fucus. Des hybrides sont produits mais, moins bien adaptés que leurs espèces parentes aux diverses conditions du milieu, ils ne subsistent pas. haut de l’estran bas de l’estran Théorie de l’évolution - Explique la variabilité des traits (morpho-anatomiques, physiologiques, comportementaux, etc.) à l’échelle des individus. - Explique les traits des espèces, leur adaptation à leur environnement, les interactions avec leur habitat et avec les autres espèces. - Explique les phénomènes de spéciation, origine de la biodiversité. « Nothing make sense except in the light of evolution » (T. Dobzhansky) 35 Quelques références utiles : Brondex F (2003) Evolution. Synthèse des faits et théories. Ed. Dunod, Paris. Danchin E, Giraldeau LA, Cézilly F (2005) Ecologie comportementale. Ed. Dunod, Paris. Dawkins (1976) Le gène égoïste. Ed. Armand Colin (traduction 1990) ou éd. Odile Jacob (traduction 2003). Dawkins (1995) Qu’est-ce que l’évolution? Le fleuve de la vie. Ed. Hachette (traduction 2005). Gouyon PH (1997) Les avatars du gène. Ed. Belin, Paris. Solignac M, Périquet G, Anxolabéhère D, Petit C (1995) Génétique et évolution. Ed. Hermann, Paris. 36