Les ombellifères : belles et fières - Bio

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B O TA N I Q U E
GOETHÉENNE
Les ombellifères :
belles et fières
Par leur haute taille, leurs feuilles amples, leurs larges tiges et leurs
ombelles blanches (ou jaunes) qui s'ouvrent pour la plupart en été,
les ombellifères sont essentiellement des plantes d'été qui jouent et
manifestent les multiples jeux entre l'eau, l'air et la lumière. Partez
à la découverte de cette famille aux fleurs «à la puissance deux» et
aux multiples «gestes» étonnants.
Ombelle de carotte sauvage : on remarquera la plus grande taille des pétales des fleurs périphériques ainsi que la forme générale pentagonale de l’ombelle
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BIODYNAMIS
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n été, à
partir de
juin, on
voit dans les prés,
les lisières de forêt
et dans les marais
de grandes plantes
dont les tiges épaisses et
ramifiées s'achèvent par de larges
plateaux réunissant une multitude de
petites fleurs blanches ou jaunes, parfois
verdâtres : ce sont des ombellifères (cette
famille a été récemment renommée apiacées d'après le nom du céleri, Apium),
fleurs d'été essentiellement avides de
lumière.
En bordure de champ, sur un terrain sec
et éclairé, on trouvera la carotte sauvage
aux feuilles finement découpées et aux
ombelles formant une très belle dentelle.
Dans le sud de la France, on pourra aussi
trouver les longues tiges aux feuilles
tendres du fenouil. Puis, en lisière des
bois, dans les chemins creux, dans tous
les endroits plus ou moins ombragés, on
trouvera de nombreuses ombellifères
d'apparence assez semblable : ce sont les
différents cerfeuils et anthrisques et torilis extrêmement difficiles à déterminer
avec précision. Dans les prés gras fortement fumés on découvrira les épaisses
ombelles de la berce spondyle butinées
par une multitude d'insectes. Puis dans
les prés humides et les
La berce spondyle
marais, c'est l'angéDessin La Hulotte
lique sylvestre
aux ombelles
beige rosé
qui
déploie ses
tiges et ses
feuilles charnues teintées de
rouge. Dans la
E
rivière, on peut
aussi découvrir la
berle, sorte de
persil aquatique dont
l'appartenance à la
famille des
ombellifères
est reconnaissable à
la forme des feuilles
divisées.
En passant en revue quelquesunes de ces plantes, pour
essayer de se former une image
commune, on découvrira certains caractères spécifiques de
la famille. Ce sont toutes des
plantes formant des tiges
épaisses, charnues souvent cannelées et parfois creuses,
emplies d'air. Les feuilles toujours amples et très souvent
découpées s'étendent dans l'espace en sortant d'une gaine
à la base du pétiole.
La morphologie
des feuilles
est un bon
indicateur
des
conditions
du
milieu : en simplifiant, on peut dire
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que plus les feuilles sont finement divisées, plus le milieu est sec et lumineux ; à
l'inverse plus les feuilles sont pleines,
plus le milieu est frais, le sol riche et
l'ambiance humide et/ou ombragée.
Ainsi on comprendra facilement que la
carotte est un légume de sol plutôt pauvre
et de pleine lumière alors que le céleri
préfère les sols plus riches. Le persil veut
un terrain assez frais, pas trop lumineux
alors que le fenouil cherche la chaleur et
la lumière du sud.
Au sommet de ces tiges, atteignant chez
certaines espèces plus d'un mètre de hauteur, s'étalent les ombelles parfois plates,
parfois bombées, formées d'ombellules
regroupant elles-mêmes une multitude de
petites fleurs à cinq pétales.
L'observation détaillée de certaines
ombelles permet de faire une découverte
très intéressante : les fleurs extérieures de
l’ombelle ont souvent leurs pétales extérieurs plus larges que les pétales orientés
vers le centre. Comment comprendre
cela ? Une organisation générale (un
champ de forces pourrait-on dire) ordonne
toutes les fleurs de l'ombelle, nous donnant l'impression d'avoir à faire à une
unité : c'est une fleur à la puissance deux.
Nous avons là un bel exemple montrant
que, dans le monde vivant, le tout est
supérieur à la somme de parties. En effet
une telle fleur séparée de l'ensemble perd
tout sens.
En repassant plus tard en été aux mêmes
endroits, on verra les tiges sèches beiges
des ombellifères portant à leur sommet
les ombelles couvertes de fruits secs se
séparant à maturité en deux akènes dotés
d'ailes plus ou moins larges. On ne trouve
aucun fruit charnu ni capsule, aucun processus d'enveloppement des graines chez
les ombellifères.
L'objet de cet article est de vous inciter à
observer cette famille de plantes bien
connue au jardin pour en découvrir les
forces particulières qui ont donné naissance à ces formes et approcher le " geste
essentiel " de la famille. Tentons une
brève esquisse à
partir de ces
premières
observations
que vous pourrez compléter à
loisir au cours
de l'été.
Sous terre les
ombellifères
forment des
racines
épaisses, souvent pivotantes
(carotte,
céleri…) quelquefois des rhiLa carotte sauvage sur le bord du champ
zomes (aégo-
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pode podagraire, adventice des jardins
très vitale). Les tiges massives s'élèvent
haut vers le ciel telles des colonnes et les
feuilles s'étalent amplement dans l'espace, laissant souvent l'air et la lumière
les pénétrer. La découpe des feuilles souvent très finement ciselées est très régulière, géométrique. Un ordre strict, rigoureux vient structurer cette exubérance
végétative venant du sol. Parfois la rencontre entre la force végétative (formant
la matière des feuilles) et la force structurante provenant du pôle floral est tellement brutale qu'il se forme des substances
toxiques (ciguë, œnanthe, etc.) avec des
odeurs fades ou nauséabondes. Par contre,
quand le processus floral domine et structure toute la plante, on trouve des espèces
formant des graines riches en huiles
essentielles (anis, cumin, carvi, fenouil,
etc.). L'influence florale favorisant la formation des substances affirmant l'identité
de la plante comme les pigments, les
huiles essentielles, peut même descendre
de la fleur dans les feuilles qu'elle aromatise (feuilles d'aneth, de fenouil, etc.) ou
même dans la racine qu'elle colore
(carotte) ou parfume (présence d'huiles
essentielles dans la racine de l'angélique
sylvestre). Le geste général est alors une
organisation, une structuration des processus végétatifs
se déroulant
essentiellement
dans les
liquides qui
sont
maîtrisés. Ce
geste
permet de
Feuilles d’angélique sylvestre
comprendre
que
ces
plantes
sont
tout à
fait favorables
pour
remettre de
l'ordre dans
les processus
métaboliques
exagérés, comme
c'est le
Feuilles de cerfeuil des prés.
cas avec
Anthriscus sylvestris
les problèmes digestifs tels que ballonnements,
digestion difficile, etc. C'est en particulier
le cas pour le fenouil qui est présenté
plus en détail ci-dessous.
JEAN-MICHEL FLORIN
Feuilles de berce.
Heracleum sphondylium
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