Annexe 20 : Descriptif du programme de recherche en écologie du paysage Notions d’écologie du paysage Les paysages sont des systèmes écologiques hétérogènes dont la structure spatiale et la variabilité temporelle sont, dans nos régions, en grande partie dépendants des activités humaines (agriculture, mise en réserve, plantations,…). Nos paysages résultent d’une histoire longue qui a conduit à une fragmentation des habitats naturels ou semi-naturels. Dans ces habitats fragmentés de nombreuses espèces ne peuvent survivre sans échange avec les habitats voisins. Il peut s’agir d’échanges entre des milieux de nature différente lorsqu’un individu a besoin au cours de son cycle de vie de d’éléments variés pour accomplir différentes fonctions telles que la reproduction, la recherche de nourriture ou le repos, on parle alors de complémentation au niveau du paysage. Ce peuvent être aussi des échanges entre éléments de même nature lorsque les ressources d’une seule tache d’habitat ne sont pas suffisantes pour l’individu ou la population, on parle alors de supplémentation. Dans les deux cas la survie dépend de l’accessibilité des éléments du paysage, et donc de la connectivité du paysage. La connectivité du paysage se définit comme l’intensité des échanges entre deux éléments du paysage, elle dépend à la fois de l’écologie de chaque espèce et de l’organisation spatiale de la mosaïque paysagère. Elle prend en considération la distance entre les éléments, mais aussi les difficultés ou facilitations rencontrées au cours du mouvement. Les corridors sont des éléments linéaires dont le rôle est souvent de conduire les flux dans les paysages, cela a été montré pour de nombreuses espèces de vertébrés (petits mammifères ou oiseaux) et d’invertébrés (coléoptères carabiques, papillons,…). L’ensemble de la vallée de la haute Cisse forme un corridor hétérogène et fragmenté comme nous l’avons vu ci-dessus, et il est important d’estimer sa connectivité à plusieurs échelles afin d’évaluer les risques d’extinction des espèces ou groupes d’espèces patrimoniales qui en font la richesse. Programme de recherche Le programme proposé, sur une durée de quatre ans a pour objectif de comprendre le fonctionnement des populations et / ou des communautés au niveau du paysage de la haute vallée de la Cisse. Il s’agira dans un premier temps d’identifier en fonction des connaissances préalables de la diversité biologique de la réserve et des zones environnantes un certain nombre d’espèces indicatrices de ce fonctionnement. Elles devront répondre à plusieurs critères : ♦ être suffisamment mobiles pour pouvoir relier les taches d’habitat favorable dans l’état actuel de fragmentation des pelouses et des zones humides de fond de vallée. ♦ Etre spécifique de ces milieux de grand intérêt écologique ♦ Réagir à des échelles différentes pour pouvoir évaluer l’effet des différentes actions de gestion sur le devenir des systèmes écologiques (pâturage, plantation, restauration,….) ♦ Avoir des modalités de déplacement variés. L’objectif est de définir quelques espèces ou groupes d’espèces pour lesquels on pourrait évaluer l’effet de la fragmentation sur la survie, mesurer la connectivité du paysage et en inférer des mesures de gestion pour assurer la durabilité du système. Ces espèces seront des plantes, des invertébrés et/ou des vertébrés. Une première réflexion à partir des inventaires réalisés sur les sites fait ressortir quelques espèces d’invertébrés pour les pelouses calcaires : Ascalaphus (libelluloïdes) longicornis, et deux espèces d’orthoptères : Oedipoda caerulescens et Calliptamus italicus pour les zones humides des oiseaux (Rousserolle, Râle d’eau) ou des 180 odonates pourraient être sélectionnées. Un inventaire des petits mammifères est en cours et pourrait permettre d’identifier des espèces pertinentes pour ce programme de recherche. Une analyse détaillée des inventaires floristique pourra aussi aboutir à la sélection de quelques espèces intéressantes. Une fois les espèces sélectionnées il s’agira de déterminer les flux entre taches d’habitat favorables, soit par des mesures directes (capture-marquage-recapture), ou indirecte (variabilité génétique). La connaissance de ces flux en fonction de l’hétérogénéité du paysage permettra de modéliser les relations entre la structure du paysage, la qualité des habitats et la dynamique des populations cibles. A partir de ces modèles l’impact de scénarios de dynamique des paysages sur le maintien de la biodiversité pourra être testé. Les résultats obtenus dans ce programme de recherche seront utilisables pour définir des objectifs de gestion du territoire de la haute vallée de la Cisse. Ce programme se déroulera en quatre ans : Première année : analyse des données actuelles sur la diversité biologique de la réserve et des alentours, analyse bibliographique de l’écologie de quelques espèces présélectionnées à partir des inventaires, choix des espèces à étudier et tests de méthodes de mesure de flux. Deuxième année : analyse précise du paysage, évaluation de la qualité des habitats en fonction des modalités de gestion, mesures de connectivité à différentes échelles, quantification des flux Troisième année : poursuite des études de terrain pour la quantification des flux, tests des modèles Quatrième année : validation des modèles et tests de scénarios de gestion. Traduction opérationnelle du programme La traduction opérationnelle de ce programme de recherche est indispensable pour garantir à long terme un bon fonctionnement écologique de la vallée de la Cisse et ainsi renforcer l’efficacité des mesures de gestion proposées sur le site. Par ailleurs, ce travail qui serait confié à un cabinet spécialisé en aménagement et en génie écologique permettrait d’associer les acteurs locaux de manière à ce qu’il puisse se l’approprier et à en comprendre les enjeux. 181