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Je le remercie également de m’avoir accueilli au sein de son laboratoire et ainsi permis d’évoluer dans une structure qui, je le sais, offre des conditions de travail privilégiées. Merci pour sa simplicité, sa bonne humeur et son humour. Je tiens également à remercier de tout cœur Alexandra pour son aide et son soutien. Dans les moments difficiles, elle a toujours su trouver les mots pour me réconforter, merci pour sa gentillesse et son humanité. Merci également pour sa gestion du laboratoire et de l’équipe qui contribue de façon plus que déterminante à la qualité tant matérielle que morale de l’environnement de travail dans lequel j’ai eu la chance d’évoluer. Je souhaite également remercier chaleureusement Anthony Dixon à qui reviennent en bonne partie les grandes orientations de cette thèse. Merci pour les discussions que l’on a eu, pour tous les conseils qui m’ont permis de progresser dans mon travail ainsi que pour son implication dans la rédaction de mes manuscrits. Merci aux autres membres de mon comité de thèse, Marc Gibernau et Jérôme Orivel pour leur aide précieuse et leurs conseils qui m’ont permis d’avancer. Un très sincère merci à Vincent Fourcassié pour sa collaboration dans l’étude du comportement de recherche des larves de coccinelles. Merci pour son implication passée et à venir dans ce travail. Merci à Jorge Araujo, Jacques Pasteels, Anthony Dixon, Christophe Thébaud d’avoir accepté de faire partie du jury d’évaluation de cette thèse. Je remercie également Soeren Toft pour ses conseils et avis sur mon travail, pour sa gentillesse et sa disponibilité. Merci aux étudiants qui m’ont accompagné sur le terrain pour les échantillonnages : Eglantine, Clémence, Gwendolyne, Benoît. Merci à mes collègues de laboratoire, Xavier, Elsa et tous les autres. Merci à Jean-François pour son aide. Merci à mes amis thésards, ou anciens thésards maintenant, pour tous les bons moments passés ensemble, un grand merci à Emmanuelle pour son aide. Un merci plus particulier à ma famille : merci à mes parents pour leur soutien constant tout au long de ces années, merci à ma sœur, Laure, d’avoir toujours été et d’être encore à mes côtés, merci d’avoir relu et aidé à corriger mon manuscrit, merci pour ses conseils. Merci également à Laurent de m’avoir permis d’avoir enfin un frère. Sommaire Introduction générale 5 1 - La spécialisation écologique 6 1.1 - Apparition et évolution de la spécialisation 6 1.1.1 - Bases écologiques de l’évolution de la spécialisation 6 La théorie d’Optimal Foraging 6 Caractéristiques des ressources trophiques 7 Interactions interspécifiques 8 1.1.2 - La spécialisation, un trait écologiquement plastique ? 8 1.2 - Le processus de spécialisation 9 1.2.1 - Evolution des traits d’histoire de vie 10 1.2.2 - Evolution des traits morpho-physiologiques et comportementaux 11 1.2.3 - Les trade-offs, une réalité ? 12 2 - Objectifs de la thèse 14 2.1 - Modèle d’étude 14 2.2 - Dynamique ovarienne et utilisation des ressources chez les coccinelles 15 2.3 - Evolution des traits d’histoire de vie et spécialisation alimentaire chez les coccinelles 16 2.4 - Comportement de recherche des larves et degrés de spécialisation pour la ressource chez les coccinelles 16 2.5 - Importance de la qualité trophique des proies dans la détermination de la spécialisation alimentaire observée chez les coccinelles A. bipunctata et A. decempunctata 17 Chapitre 1 : Dynamique ovarienne et utilisation des ressources chez les coccinelles. (Ovarian Dynamics and resource use in Ladybirds, Ferrer et al., 19 submitted in Ecological Entomology) 3 Chapitre 2 : Evolution des traits d’histoire de vie et spécialisation alimentaire chez les coccinelles. (Life-histories evolution and feeding 43 specialisation in Ladybirds, in prep) Chapitre 3 : Comportement de recherche des larves et degrés de spécialisation pour la ressource chez les coccinelles. 63 Chapitre 4 : Importance de la qualité trophique des proies dans la détermination de la spécialisation alimentaire observée chez les coccinelles A. bipunctata et A. decempunctata 92 Discussion générale 112 1 – Apports de l’étude 113 1.1 - A. bipunctata et A. decempunctata, deux espèces sœurs montrant des degrés de spécialisation écologique différents 113 1.2 - Influence du degré de spécialisation sur les traits phénotypiques des individus 114 1.2.1 - Traits d’histoire de vie 115 1.2.2 - Traits comportementaux 116 1.3 - Rôle de la qualité intrinsèque des proies dans la détermination du régime alimentaire des prédateurs 2 - Conclusion et perspectives 117 118 2.1 - Intérêt d’une étude plus intégrative du phénomène de spécialisation chez les prédateurs 118 2.2 - Intérêt d’une étude plus poussée du caractère généraliste de certaines espèces de prédateurs 119 Références 122 4 Introduction générale Le concept de niche écologique d’une espèce s’est développé à partir de questions fondamentales de l’écologie : « Pourquoi existe-t-il tant d’espèces ? Comment peuvent-elles cohabiter ? ». Terme au départ assez vague, Hutchinson (Hutchinson, 1957) donne à la niche écologique d’une espèce une définition plus précise qui est encore utilisée et enseignée de nos jours en écologie: un hyper-volume à n dimensions dont les axes sont constitués par les variables ou les ressources environnementales (Begon et al., 2006; Hutchinson, 1957). La « taille » de cette niche est définie par plusieurs facteurs. Une première limite à la dimension des axes de l’hyper-volume résulte de l’expression du génotype des individus de l’espèce dans leur environnement. Cette expression définit une capacité potentielle d’utilisation des ressources et de tolérance aux conditions environnementales, on parle alors de « niche fondamentale ». La deuxième restriction des contours de la niche écologique découle des interactions entretenues avec les autres espèces présentes dans le milieu (prédation, compétition…), le deuxième hyper-volume ainsi défini, en général plus restreint que la niche fondamentale, est appelé « niche réalisée » (Begon et al., 2006; Hutchinson, 1957). Ce concept de niche écologique est crucial en écologie car il permet de replacer chaque espèce au sein de son écosystème en tenant compte de toutes les conditions biotiques et/ou abiotiques du milieu. Or selon le principe d’exclusion compétitive de Gauss, deux espèces ne peuvent pas cohabiter au sein d’un écosystème si leurs niches écologiques se superposent entièrement (Futuyma, 2001; Hutchinson, 1957). L’évolution tendrait donc à différencier les niches, soit en déplaçant les besoins écologiques des espèces (déplacement de caractères) soit en modifiant la largeur de leur niche selon un ou plusieurs axes, par exemple selon l’utilisation des ressources trophiques ou l’occupation de l’habitat. Lorsque cette évolution va dans le sens d’une réduction de la taille de la niche on parle de « spécialisation écologique » (Futuyma, 2001; Futuyma & Moreno, 1988). Ainsi, selon la taille de sa niche, chaque espèce peut être placée le long d’un continuum allant d’espèces qualifiées de « généralistes », avec une niche écologique large, à des espèces qualifiées de « spécialistes » ayant une niche écologique bien plus étroite (Fox & Morrow, 1981). 5 1 - La spécialisation écologique Comment la spécialisation écologique apparaît-elle et se maintient-elle parmi les espèces ? Quelles sont les conséquences de cette spécialisation sur les traits d’histoire de vie, les caractéristiques morpho-physiologiques ou comportementales des organismes ? Ces deux volets de questions ont fait l’objet d’un large éventail d’études depuis près d’un siècle et un grand nombre de modèles ont été envisagés mais ils restent encore largement débattus. Plusieurs éléments de réponses font cependant consensus. 1.1 - Apparition et évolution de la spécialisation En théorie, l’évolution tend à sélectionner les organismes qui présentent la meilleure fitness : la largeur de la niche d’une espèce devrait donc évoluer de façon à optimiser la valeur sélective de ses représentants, c’est à dire, dans le sens d’une optimisation de la survie et d’une optimisation du bilan énergétique entre acquisition et dépenses puisque le gain énergétique est déterminant pour la croissance et la reproduction des organismes. Dans cette logique, la spécialisation écologique devrait donc intervenir quand elle permet une augmentation de la fitness des organismes (Futuyma, 2001). 1.1.1 - Bases écologiques de l’évolution de la spécialisation La théorie d’Optimal Foraging La théorie d’Optimal Foraging a servi de base à l’élaboration de la plupart des modèles de spécialisation. Cette théorie permet de prédire, en fonction de la richesse énergétique, du temps de recherche et du temps de manipulation des ressources, l’évolution du régime alimentaire optimal d’un organisme, c’est-à-dire le comportement d’utilisation de ressources qui lui assure le meilleur gain énergétique par unité de temps (Charnov, 1976a, b; Pyke et al., 1977; Stephens & Krebs, 1986). Si on classe chaque item alimentaire en fonction de sa profitabilité (richesse énergétique / temps de manipulation), un animal devrait se spécialiser quand le contenu énergétique moyen des items qu’il consomme habituellement divisé par la somme du temps moyen de recherche et de manipulation de ces items est supérieur au contenu énergétique d’un nouvel item divisé 6 par le temps de manipulation de celui-ci (Ferry-Graham et al., 2002; Futuyma & Moreno, 1988; Sih & Christensen, 2001; Stephens & Krebs, 1986). Les types de ressource suivants ne seront utilisés que si le précédent se révèle trop rare et toujours dans un ordre décroissant de profitabilité (Futuyma & Moreno, 1988; Stephens & Krebs, 1986). En conséquence, les conditions identifiées dans la majorité des modèles comme favorables à une spécialisation portent principalement sur les caractéristiques des ressources trophiques disponibles (Futuyma & Moreno, 1988; Thompson, 1994). Caractéristiques des ressources trophiques Une ressource peut favoriser une spécialisation d’autant plus extrême chez ses consommateurs qu’elle est abondante, prévisible et régulière au cours du temps, qu’elle est peu ou pas mobile et que sa capture, sa consommation ou sa digestion requièrent des techniques d’affouragement ou des adaptations morphologiques et/ou physiologiques spécifiques (Begon et al., 2006; Futuyma & Moreno, 1988; Thompson, 1994). L’abondance et le caractère prévisible d’une ressource permettent, en effet, une stabilité dans le temps de sa profitabilité et du taux de rencontre, donc de sa position dans le classement des ressources disponibles. Les techniques ou adaptations particulières que cette ressource peut nécessiter renforcent l’étroitesse et la spécificité de l’interaction entre elle et son consommateur : la profitabilité d’un item de cette ressource n’est ainsi jamais aussi importante pour un consommateur ne possédant pas ces techniques ou adaptations que pour celui qui les possède. C’est en grande partie la raison pour laquelle, les études de spécialisation alimentaire ont, dans leur large majorité, pris pour modèle des herbivores, les plantes répondant bien à ces caractéristiques d’abondance et de prédictibilité. De plus, en raison des défenses chimiques que la plupart d’entre elles arborent, elles exigent souvent de leurs consommateurs des adaptations physiologiques particulières. En conséquence, les interactions trophiques entre insectes phytophages et plantes hôtes sont souvent extrêmement étroites et mènent parfois à des processus de coévolution entre clades d’insectes et de plantes (Thompson, 1994). 7 Interactions interspécifiques Parce qu’elles agissent, bien que de façon indirecte, sur le coût d’acquisition d’une ressource, la prédation ou la compétition interspécifique sont également de nature à promouvoir une spécialisation. En effet, les compétiteurs diminuent l’abondance et donc la profitabilité des ressources. Les prédateurs, quant à eux, augmentent le risque encouru pour l’acquisition de cette ressource et en réduisent donc également la profitabilité. Dans ces cas, en termes de gain énergétique, il apparaît alors avantageux pour l’espèce d’augmenter son efficacité d’exploitation en se spécialisant davantage sur cette ressource ou de déplacer ses préférences sur une autre ressource devenue plus profitable car libre de compétiteurs ou de prédateurs (Ferry-Graham et al., 2002; Futuyma & Moreno, 1988; Stephens & Krebs, 1986). 1.1.2 - La spécialisation, un trait écologiquement plastique ? La spécialisation d’une espèce est donc un phénomène lié à la fois aux conditions de ressources de son milieu mais également à la nature des interactions qui existent au sein de la communauté biologique. Toutefois, malgré ces connections interspécifiques au sein des communautés, la spécialisation était considérée comme une évolution irréversible pour une espèce, un état phylogénétiquement ultime. En effet, comparés aux généralistes qui gardent un large répertoire de caractéristiques, celui des spécialistes a souvent été réduit, concentré dans la seule optimisation des traits soutenant sa spécialisation. Les spécialistes apparaissaient ainsi moins plastiques et moins susceptibles de nouvelles évolutions. La spécialisation était donc plutôt considérée comme un trait apomorphique : les espèces spécialistes dérivaient d’ancêtres généralistes, et cette spécialisation constituait une impasse évolutive de laquelle ces espèces ne pouvaient plus s’échapper (Futuyma, 2001; Moran, 1988; Simpson, 1953). Mais, bien que plusieurs études aient confirmé que, chez certains taxons, les espèces spécialistes se trouvent aux extrémités des arbres phylogénétiques, bien d’autres ont prouvé que toutes les séquences possibles existaient au sein des lignées : généralistes-généralistes, généralistes-spécialistes, spécialistesgénéralistes ou encore spécialistes-spécialistes (Futuyma & Moreno, 1988; Nosil, 2002; Thompson, 1994). De plus, principalement parce que la niche écologique était un concept appliqué uniquement à l’échelle spécifique, la spécialisation était considérée comme une caractéristique de l’espèce 8 sur toute son aire de répartition. Mais, l’examen des interactions trophiques, notamment avec le modèle phytophage-plante, a montré que la spécialisation était en fait un état flexible chez les populations en réponse aux caractéristiques de leurs communautés particulières donc sur une zone géographique donnée (Fox & Morrow, 1981; Thompson, 1994). Ainsi, au travers de l’étude de l’évolution des interactions biologiques et des processus de coévolution des espèces, une vision beaucoup plus dynamique de la spécialisation s’est imposée : celle d’une opportunité écologique offerte à une espèce, non pas forcément sur l’intégralité de son aire de répartition, mais parfois seulement sur une zone géographique restreinte (Thompson, 1994). La spécialisation s’est peu à peu imposée comme un caractère écologiquement plastique, capable d’évolution et dont la simple considération à l’échelle spécifique ne suffit plus (Fox & Morrow, 1981; Thompson, 1994). Cette évolution de la vision du phénomène de spécialisation s’est alors accompagnée d’un développement des études des niches écologiques à un niveau populationnel et même individuel. Dès 1972, Roughgarden (Roughgarden, 1972) parlait de niche écologique d’une « population » et proposait de décomposer la largeur de cette niche écologique totale (TNW= « Total Niche Width ») en variance intra-individuelle (WIC= « Within Individual Component ») et inter-individuelle (BIC= « Between Individual Component »). Plus récemment, dans le même esprit, Bolnick (Bolnick et al., 2003) suggérait qu’une espèce généraliste pouvait être composée d’un ensemble d’individus spécialistes qui n’utilisent qu’une petite partie de la niche occupée par l’espèce plutôt que par des individus tous généralistes. La prise en compte du contexte local, et avec elles les approches au niveau des populations voire au niveau des individus dans les études d’écologie, sont ainsi apparues cruciales dans la compréhension des processus et des patrons de spécialisation. 1.2 - Le processus de spécialisation Comme nous l’avons vu, la spécialisation d’une espèce ou d’une population devrait concorder avec une augmentation de son efficacité d’exploitation de son environnement particulier : les spécialistes devraient être de meilleurs compétiteurs que les généralistes (Dethier, 1954; Ferry-Graham et al., 2002; Fox & Morrow, 1981; Futuyma, 2001; Slobodkin & Sanders, 1969). La spécialisation d’une espèce dans l’exploitation d’une ressource particulière s’accompagne donc le plus souvent chez ses représentants d’adaptations des traits 9 d’histoire de vie et des traits phénotypiques (morphologiques, physiologiques ou comportementaux). Mais ces adaptations n’apparaissent pas neutres en termes d’investissement énergétique pour l’organisme. C’est pourquoi, l’hypothèse d’un « coût d’adaptation » pour les espèces spécialistes est un élément fondamental dans la majorité des modèles de spécialisation (Futuyma & Moreno, 1988). Ce principe, souvent évoqué au travers de l’adage « a jack of all trades is master of none » (Futuyma & Moreno, 1988; Mac Arthur, 1972; Thompson, 1994) veut que la spécialisation, en augmentant la performance sur un spectre de ressources, s’accompagne d’une diminution de la performance dans l’exploitation de ressources externes à ce spectre. Ainsi, un spécialiste serait plus performant qu’un généraliste dans l’exploitation de ses ressources (Dethier, 1954; Fox & Morrow, 1981; Futuyma, 2001) mais le prix de cette spécialisation serait une perte de son efficacité dans l’exploitation d’autres ressources. Par contre, un généraliste, sans être, sur une seule d’entre elles, aussi efficace que ne le serait un spécialiste, est sensé avoir des performances sensiblement égales sur l’ensemble de ses ressources. Le coût de ces adaptations se traduirait alors par l’existence de trade-offs entre traits. 1.2.1 - Evolution des traits d’histoire de vie La spécialisation écologique induit donc une évolution des traits d’histoire de vie des organismes. Ces adaptations dans leurs traits d’histoire de vie permettent aux individus de mieux répondre en termes de valeur sélective aux pressions de sélection qu’ils subissent dans leur habitat, que ces pressions proviennent des ressources utilisées ou des interactions interspécifiques existant au sein de leur communauté (Begon et al., 2006; Futuyma, 2001; Reznick & Travis, 2001; Stearns, 1992). Un des exemples les plus souvent cités pour illustrer les effets des interactions interspécifiques est le cas des guppies étudiés par Reznick (Reznick, 1996; Reznick, 1997). En suivant pendant plusieurs années des populations de guppies spécialisées dans des habitats différents, Reznick a clairement démontré que le niveau de pression de prédation avait un impact important sur l’évolution des traits d’histoire de vie des individus. Il a en effet observé que, dans une rivière où les prédateurs attaquent fréquemment et préférentiellement les individus de grande taille et sexuellement matures, l’âge et la taille à la maturité sexuelle au sein de la population de guppies étaient plus bas et l’investissement dans la reproduction plus important que chez les individus d’une autre population vivant dans un environnement où la 10 pression de prédation était moindre (Reznick, 1996; Reznick, 1997). De plus, l’introduction de prédateurs dans les habitats à basse pression de prédation déclenchait, en quelques années, une réduction de l’âge de la maturité sexuelle des individus. A l’inverse, une population de guppies déplacée d’un habitat à forte pression de prédation vers un habitat à basse pression de prédation voyait en quelques générations, l’âge et la taille à maturité de ses représentants augmentés et leur effort d’investissement reproducteur diminué (Reznick, 1997). Les travaux illustrant l’effet de la spécialisation dans l’exploitation d’une ressource donnée sont nombreux et une grande partie concerne les insectes phytophages (Thompson, 1994). Ainsi, à titre d’exemple, Montague et al. (Montague et al., 1981) démontrent que l’évolution du nombre et de taille des œufs chez plusieurs espèces de drosophiles est déterminée par la nature des ressources supportant l’oviposition. 1.2.2 - Evolution des traits morpho-physiologiques et comportementaux Les pressions de sélection qui accompagnent la spécialisation modèlent également l’évolution des traits morphologiques, physiologiques et même comportementaux, particulièrement ceux qui sont impliqués dans l’acquisition des ressources énergétiques (Ferry-Graham et al., 2002). En effet, l’adaptation des caractéristiques morphologiques des organismes spécialisés leur permet d’être plus efficaces dans l’accès à leur ressource, par exemple en diminuant le temps de manipulation ou en augmentant leur succès d’acquisition de celle-ci. L’adaptation de la taille du bec des pinsons des Galápagos, aux types de graines consommées est un exemple fréquemment cité (Grant, 1999). Plus récemment, Ferry-Graham et al. (FerryGraham et al., 2002) ont démontré, en filmant des séquences de chasse d’un poisson, Epibulus insidiator (Pallas) (Labridae; Teleostei), que la morphologie particulière des mâchoires de ce prédateur lui permettait d’être plus précis dans la capture de ses proies que d’autres espèces de poissons apparentées. Ces adaptations morphologiques sont souvent corrélées avec des adaptations comportementales qui participent également à l’optimisation du gain énergétique en diminuant le temps de recherche ou en augmentant l’efficacité de la reconnaissance de la ressource et de la prise de décision de capture (Ferry-Graham et al., 2002). Bernays (Bernays, 1998, 2001) montre même que la spécialisation sur une ressource donnée peut s’accompagner d’une optimisation de l’efficacité des processus nerveux impliqués dans la détection et l’identification de la ressource ainsi que dans la vitesse de la prise de décision de capture. 11 Les adaptations physiologiques interviennent, elles, majoritairement au niveau métabolique en permettant une optimisation de la digestion et donc de la quantité d’énergie extraite de la ressource. Leur rôle est surtout déterminant dans les cas où la ressource est défendue chimiquement comme c’est souvent le cas chez les plantes. La spécialisation va donc favoriser l’évolution des traits phénotypiques des individus spécialisés vers des formes leur assurant une meilleure fitness dans leur environnement particulier. Mais ces adaptations ont un coût énergétique pour les organismes, c’est pourquoi l’hypothèse de l’existence de trade-offs entre différents traits est souvent émise. 1.2.3 - Les trade-offs, une réalité ? Les trade-offs sont définis comme des liens entre les traits phénotypiques qui contraignent l’évolution simultanée de deux ou plusieurs de ces traits (Stearns, 1992). Cette évolution simultanée résulte de la compétition pour l’allocation énergétique entre deux ou plusieurs fonctions au sein des individus (Futuyma, 2001; Stearns, 1992), les trade-offs sont donc sensés se manifester dans les cas où l’énergie disponible pour l’organisme est limitée (Stearns, 1992). Ainsi, la spécialisation sur une ressource, parce qu’elle favorise l’allocation d’énergie dévolue au développement des traits phénotypiques adaptés à l’exploitation de cette ressource, devrait influencer négativement l’évolution d’autres traits concurrents en termes de demande énergétique. C’est pourquoi, les trade-offs sont au centre à la fois des modèles mathématiques et des arguments concernant l’évolution de la spécialisation (Futuyma & Moreno, 1988; Thompson, 1994). Les trade-offs souvent examinés dans les études sont ceux pouvant exister entre les traits phénotypiques impliqués dans l’évolution des histoires de vie des organismes, par exemple entre leur investissement reproducteur et leur survie, entre leur investissement reproducteur et leur croissance ou bien encore entre le nombre et la taille de leurs descendants (pour revue : Stearns, 1992). Or, parmi tous ces travaux, c’est sans doute l’existence, chez les phytophages, de trade-offs dans la performance sur différentes plantes hôtes qui a été la plus discutée. En effet, comme nous l’avons déjà évoqué, l’élaboration de moyens de détoxifications des défenses chimiques des plantes représente pour les animaux un investissement énergétique important (Dethier, 1954; Janzen, 1978), la concurrence énergétique entre les traits phénotypiques responsables de la performance dans la consommation de différentes plantes est donc intense et représente, de fait, un terrain propice à l’apparition de trade-offs. 12 Mais tandis que certains auteurs réussissent à démontrer l’existence de tels trade-offs, plusieurs autres en soulignent l’absence apparente, nourrissant ainsi le débat (Futuyma, 2001; Futuyma et al., 1984; Futuyma & Moreno, 1988; Janz, 2002; Rausher, 1984; Stearns, 1992). Or, plusieurs explications peuvent être avancées pour cette carence de preuves de l’existence de trade-offs. Tout d’abord, en cas de trade-off, tous les traits phénotypiques ne sont pas forcément affectés. Ainsi, un trade-off ne pourra être mis en évidence que si les traits phénotypiques observés chez l’organisme sont justement ceux impliqués dans le coût de spécialisation. De plus, les traits phénotypiques participant à la performance des organismes sur un hôte donné peuvent être nombreux et donc le nombre de gènes ou de groupes de gènes, supports de ces expressions phénotypiques, qui subissent la sélection lors du processus de spécialisation de ces organismes, peut être également important. A cela s’ajoute que les corrélations existant entre ces gènes sont rarement simples : certains gènes favorisant la performance sur un hôte peuvent être sans effet sur la performance sur un second hôte, tandis que d’autres auront peut être sur elle un effet négatif. Les performances des organismes sur différents hôtes, expressions de leur génotype, seront donc le résultat de combinaisons et de croisements d’effets multiples. C’est probablement pourquoi pouvoir observer expérimentalement une corrélation négative directe entre performance sur une ressource et sur une autre est très rare. Il est bien plus probable que les trade-offs observés résultent de la difficulté, en terme de coût énergétique, à favoriser deux groupes de gènes à la fois plutôt que d’un réel impact négatif direct du développement d’un groupe de gènes par rapport à l’autre (Thompson, 1994). Ainsi, l’évolution de la spécialisation serait un processus combinatoire, différentes combinaisons de gènes favorisant différents degrés de spécialisation (Thompson, 1994). La complexité des processus génétiques impliqués dans l’évolution de la spécialisation conduirait à une diversité de génotypes correspondant à des valeurs de fitness variées sur différents hôtes. Cela pourrait expliquer l’existence plus fréquente, entre les individus ou les populations d’une même espèce ou entre des espèces phylogénétiquement proches, de « degrés de spécialisation » différents plutôt que de spécialisations de nature totalement différentes. 13 2 - Objectifs de la thèse Comme nous l’avons signalé à plusieurs reprises, la majorité des études sur la spécialisation écologique s’est portée sur le modèle plantes-phytophages, ou de façon plus anecdotique sur le modèle hôtes-parasitoïdes, mais très rares sont les travaux portant sur le modèle proies-prédateurs. Pourtant, de plus en plus d’études montrent que les interactions au sein des systèmes phytophages-plantes et proies-prédateurs sont plus homologues qu’on ne pourrait le croire à priori (Albuquerque et al., 1997; Sadeghi & Gilbert, 1999; Thompson, 1994) et, parmi les prédateurs, certains sont déjà clairement spécialisés. C’est le cas des prédateurs exploitant une ressource à évolution rapide, nécessitant donc des adaptations particulières en termes de cycle de vie, de stratégies de reproduction et d’affouragement, comme par exemple les insectes aphidiphages : chrysopes, syrphes ou coccinelles. De plus, il est apparu clairement que le phénomène de spécialisation était un processus complexe, débouchant plus souvent sur l’existence d’une gradation dans l’intensité de la spécialisation des espèces phylogénétiquement proches que dans des patrons de spécialisation extrêmes (Futuyma & Moreno, 1988; Thompson, 1994). La dichotomie classique entre espèces généralistes et espèces spécialistes doit donc être dépassée en faveur d’un raisonnement en termes de hiérarchie de préférences. 2.1 - Modèle d’étude Devant ce double constat, nous avons donc choisi de porter nos efforts sur l’étude de deux espèces d’insectes prédateurs appartenant à la famille des coccinelles aphidiphages : Adalia bipunctata (L.) et A. decempunctata (L.). Nous avons choisi ces deux espèces car elles répondent bien aux remarques que nous avons formulées précédemment. En effet, ce sont deux espèces phylogénétiquement proches mais qui présentent, d’après la littérature, des degrés de spécialisation écologique différents (Hodek, 1993; Hodek & Honek, 1996; Honek, 1985; Mills, 1981). Ce couple d’espèces nous est donc apparu comme un bon modèle pour étudier l’influence de la spécialisation écologique chez des insectes prédateurs. Certes, à cause de leur proximité phylogénétique et du chevauchement qui semble exister entre leurs niches écologiques (Honek, 1985; Majerus, 1994), nous nous attendons à ce que les différences que nous pourrions observer entre ces deux espèces ne soient pas flagrantes. Mais, ces mêmes raisons nous semblent de nature à garantir une interprétation robuste de ces 14 éventuelles observations comme résultats des différences de degrés de spécialisation écologique existant entre ces deux espèces d’Adalia plutôt que comme conséquences d’une histoire phylogénétique divergente. 2.2 - Dynamique ovarienne et utilisation des ressources chez les coccinelles Dans cette première étape de notre travail, nous avons tout d’abord cherché à définir au mieux les niches écologiques des deux espèces. Notre attention s’est focalisée sur la dimension « habitat » de ces niches qui représentait un bon indicateur de la largeur de la gamme de ressources utilisées par les deux coccinelles. On observe, en effet, chez les coccinelles, comme chez d’autres insectes prédateurs, une corrélation positive entre la spécificité pour l’habitat et la diversité de proies utilisées (Hagen, 1987; Hodek, 1993). De plus, les pucerons, proies des deux espèces de coccinelles, montrent un haut degré de spécificité pour leur plante hôte. Nous avons donc choisi de caractériser la largeur de l’habitat par le nombre de plantes recensées comme abritant ces coccinelles. Pour cela, nous avons utilisé les informations fournies par deux bases de données (UK Ladybirds Survey (RoyaumeUni) et Coccinula (Belgique)) et effectué des campagnes d’échantillonnages sur notre zone d’étude (Midi-Pyrénées (France)). Puis, la différence de largeur du spectre de ressources des deux espèces étant confirmée, nous avons cherché à savoir si elle affectait leurs stratégies de gestion énergétique. En effet, les coccinelles sont des insectes synovigéniques dont la période de reproduction, sous nos latitudes, ne dure que quelques mois. De plus, les patches de ressources qu’elles exploitent sont éphémères. La recherche de patches convenables, c'est-à-dire de patches acceptables en termes de quantité et qualité de la nourriture disponible mais qui ne sont pas encore occupés par d’autres larves de coccinelles, est donc un défi pour les femelles. Ainsi, le succès reproducteur d’une femelle coccinelle est plus limité par le temps dont elle dispose pour trouver des patches favorables que par le nombre d’œufs qu’elle est capable de produire. En conséquence, la gestion des allocations d’énergie entre les activités somatiques, surtout la recherche de patches de ressources propices, et les activités de reproduction, principalement la production d’œufs, sont d’une importance stratégique majeure pour la valeur sélective des individus et donc la fitness de l’espèce. Or, chez les insectes, cette gestion se fait principalement au travers de deux mécanismes inverses : l’oogenèse et la résorption ovarienne, réunis par Papaj (Papaj, 2000) sous le terme de « dynamique ovarienne ». On 15 s’attend donc à ce que le degré de spécialisation des ces deux espèces ait modelé de façon optimale leur dynamique ovarienne. 2.3 - Evolution des traits d’histoire de vie et spécialisation alimentaire chez les coccinelles Comme nous l’avons vu, la spécialisation que ce soit dans un habitat ou sur une ressource alimentaire, entraîne le plus souvent une évolution des traits d’histoire de vie des espèces. Plusieurs travaux ont déjà confirmé que la spécialisation chez les coccinelles carnivores a influencé l’évolution de leurs traits d’histoire de vie (Dixon, 2000). Ainsi, des travaux récents montrent, par exemple, que les coccinelles aphidiphages et coccidiphages, en se spécialisant respectivement sur les pucerons et les cochenilles, ont vu leurs traits d’histoire de vie diverger à cause des distributions différentes de ces deux types de proies (Dixon, 2000; Soares et al., 2004). Or, pour d’autres insectes prédateurs aphidiphages, comme les chrysopes (Albuquerque et al., 1997) ou les syrphes (Gilbert, 1990), il a été montré que ces évolutions divergentes pouvaient également se produire entre espèces du même groupe en fonction des différents degrés de spécialisation pouvant exister au sein de ce groupe. Nous avons donc essayé de savoir si, et dans quelle mesure, leurs degrés de spécialisation avaient influencé l’évolution des traits d’histoire de vie des deux Adalia. 2.4 - Comportement de recherche des larves et degrés de spécialisation pour la ressource chez les coccinelles Lors de la spécialisation, l’optimisation de l’efficacité d’un organisme dans l’exploitation d’une ressource passe souvent par des adaptations comportementales permettant de diminuer le temps de recherche des items de cette ressource et/ou d’en augmenter l’efficacité de détection ou de capture. Chez les insectes holométaboles, les larves ayant une capacité de dispersion très limitée, l’accent a été mis sur l’étude des comportements d’oviposition des femelles (Jaenike, 1978; Janz, 2002; Thompson, 1994). Le choix d’oviposition de la femelle est, en effet, le facteur stratégique déterminant pour la survie et la croissance de ses descendants et donc également pour sa propre fitness. De nombreux patrons adaptatifs ont été mis en évidence dans ces comportements d’oviposition, souvent pour les 16 phytophages, dans le cadre de processus de coévolution avec leur plante hôte (Dixon, 2000; Janz, 2002; Thompson, 1994). Cependant, contrairement aux larves d’insectes herbivores ou parasitoïdes, les larves de coccinelles ont encore après leur éclosion à chasser et à capturer leurs proies et les caractéristiques adaptatives des comportements d’affouragement des larves ont déjà été largement étudiés (Banks, 1957; Carter & Dixon, 1984; Dixon, 1959, 2000; Ferran & Dixon, 1993; Murakami & Tsubaki, 1984; Nakamuta, 1982). C’est pourquoi, nous avons cherché ici à franchir une étape supplémentaire dans l’étude de ces comportements en regardant si, à une échelle plus fine, la différence de degré de spécialisation pour la ressource alimentaire existant entre nos deux espèces laissait également son empreinte dans les caractéristiques des comportements de recherche de leurs larves. 2.5 - Importance de la qualité nutritionnelle des proies dans la détermination de la spécialisation alimentaire observée chez les coccinelles A. bipunctata et A. decempunctata Les études sur la spécialisation alimentaire se sont intéressées principalement à des modèles phytophage-plante hôte, les plantes répondant bien aux critères écologiques favorable à l’apparition d’une spécialisation (Futuyma & Moreno, 1988; Thompson, 1994). Ces travaux se sont souvent concentrés sur l’importance de la qualité nutritionnelle de la ressource dans la détermination du degré de spécialisation alimentaire. En effet, les substances secondaires présentes chez les plantes exigent souvent des adaptations physiologiques spécifiques chez les organismes, notamment la fabrication d’enzymes de détoxification. La qualité nutritionnelle d’une plante est donc variable en fonction des organismes car en grande partie déterminée par l’apparition et l’évolution, chez ces organismes, des mécanismes de détoxification. Chez les carnivores, par contre, les études sur le rôle de la qualité intrinsèque des proies dans la détermination du spectre de ressources utilisées sont restées relativement rares. En effet, les tissus animaux sont considérés comme plus riches et plus homogènes dans leur constitution chimique ; ils sont donc sensés apporter une nourriture plus équilibrée en nutriments et leur profitabilité est sensées être plus constante entre les organismes car moins dépendante de l’existence d’adaptations physiologiques spécifiques (Begon et al., 2006; Bristow, 1988; Gilbert, 1990; Rana et al., 2002; Stephens & Krebs, 1986). 17 Ainsi, chez les insectes, ce sont majoritairement les études sur les hiérarchies de préférences des phytophages qui se sont développées. Le cas des insectes prédateurs n’est resté que très marginalement abordé, au travers principalement d’études des préférences alimentaires des insectes utilisés comme auxiliaires de lutte biologique tels que les syrphes, les chrysopes ou les coccinelles aphidiphages. Mais, dans la grande majorité de ces travaux, les auteurs se sont principalement attachés à classifier la profitabilité de différentes proies pour ces prédateurs, sans discuter le lien entre qualité intrinsèque des proies et degré de spécialisation alimentaire. C’est pourquoi, sans prétendre trancher indiscutablement cette question, nous n’avons toutefois pas voulu la laisser de côté dans notre étude. En effet, nos deux espèces présentent des niches écologiques de largeur différente : A. decempunctata présente une spécialisation pour l’habitat plus importante qu’A. bipunctata. Cette spécialisation pour l’habitat coïncide avec une spécialisation pour la ressource trophique. Nous avons donc cherché à savoir si les limites de cette spécialisation alimentaire chez nos deux espèces de coccinelles résultaient de la qualité nutritionnelle de leurs proies ou si elles correspondaient plutôt à une conséquence de la spécialisation pour l’habitat qui limiterait par exemple la gamme de proies rencontrées. 18 Chapitre 1 Dynamique ovarienne et utilisation des ressources chez les coccinelles 19 Résumé Les insectes synovigéniques doivent, au stade adulte, se nourrir pour assurer la maturation de leurs oocytes. Certains de ces insectes, comme les coccinelles aphidiphages, exploitent des ressources imprévisibles et éphémères. Dans ce cas, la gestion de l’allocation d’énergie entre la recherche de patches convenables et la reproduction est particulièrement cruciale pour le succès reproducteur des femelles. Or, cette gestion s’effectue chez les insectes au travers de deux mécanismes antagonistes, l’oogenèse et la résorption, qui constituent la « dynamique ovarienne » (Papaj, 2000). Dans ce contexte de ressource éphémère, la dynamique ovarienne des espèces généralistes devraient être plus rapide que celle des espèces spécialistes. Nous avons choisi de tester cette hypothèse sur deux espèces de coccinelles phylogénétiquement proches. Comme l’espèce généraliste exploite une gamme de proies étendue dans des habitats variés, elle devrait, en cas de pénurie, résorber rapidement ses oocytes, utiliser l’énergie ainsi récupérée pour partir à la recherche de proies et reprendre éventuellement l’oogenèse. Inféodée à une gamme restreinte de proies dans un seul type d’habitat, l’espèce spécialiste réagirait moins rapidement car elle aurait peu de chances de trouver ailleurs de meilleures conditions. Nos résultats indiquent que les deux espèces montrent la même réponse initiale au jeun. Après deux jours de jeun, elles déposent un seul œuf infertile qu’elles consomment rapidement. Après trois jours, les oocytes des derniers follicules de chaque ovariole ne mesurent plus, chez le généraliste, qu’environ 15% de la taille moyenne d’un oocyte non résorbé contre encore près de 32% de cette taille moyenne chez le spécialiste. Quand les femelles à jeun depuis trois jours sont à nouveau nourries, la taille des derniers oocytes augmente, en un jour, de plus de 65% chez le généraliste contre moins de 47% chez le spécialiste. Donc, comme attendu, la résorption ovarienne se produit plus vite et la reprise de l’oogenèse est plus intense chez l’espèce généraliste que chez l’espèce spécialiste. C’est la première fois, à notre connaissance que la vitesse et l’intensité de la dynamique ovarienne d’un insecte prédateur est liée, dans une étude, à son mode de vie. Mots clés: spécialisation, dynamique ovarienne, résorption ovarienne. 20 Abstract 1. Synovigenic insects need to feed on prey to mature successive batches of eggs. For those that exploit unpredictable and ephemeral resources, like aphidophagous ladybird, we hypothesize that when prey is scarce generalist species should allocate resources to soma and gonads differently from specialist species. 2. Here we test this assumption in two closely related ladybirds species, a generalist and a specialist. As generalists exploit a wide range of prey in various habitats the expectation is that they will show faster ovarian dynamics, i.e. she resorb oocytes and resume oogenesis more rapidly than specialist that exploit fewer species of prey in mainly one habitat. 3. Both species showed the same initial response to starvation. After two days, they laid single infertile eggs, which they immediately consumed, rather than the controls which laid clusters of fertile eggs they did not eat. 4. Over the period of three days of starvation the length of the oocytes in the last follicle of each ovariole decreased in size faster in the generalist than the specialist. 5. When the females that were starved for three days were fed again for one, the last oocytes increased in size achieving nearly 80% of the initial size in both species. 6. As predicted oocyte resorption and replenishment with resources occur faster in the generalist than in the specialist species. This is the first time, to our knowledge, that the speed and intensity of the ovarian dynamics of a predatory insect has been linked to its way of life. Key words: specialization, ovarian dynamics, oocyte resorption 21 Introduction Ladybird beetles that eat aphids are income breeders because they use current food intake to produce offspring (Stearns, 1992). In the terminology used for parasitoids, they are synovigenic (Heimpel & Rosenheim, 1998). This means that on emergence from pupae females do not have mature oocyte in their ovaries and need to feed for about a week to mature their first batch of eggs. Then, they will need to continue feeding in order to mature successive clutches of eggs (Dixon, 2000). When prey is abundant they are capable of laying a batch of eggs every day, the size of which is on average equal to half the total number of ovarioles in their gonads (Stewart et al., 1991a). Aphidophagous ladybirds feed on an unpredictable resource. Although aphids appear each year, their abundance fluctuates widely from one year to another (Dixon, 1998). In addition, the fluctuations in abundance of all the species of aphids the ladybirds may feed on are not necessarily synchronised. That is, the relative abundance of prey species varies between years both in terms of the species of prey and host plants (Majerus & Kearns, 1989). Aphids are also unpredictable within a year because their colonies are distributed among host plants, the phenology of which is determined by genetic factors modulated by local environmental conditions (Dixon, 1998). In addition, aphids are ephemeral prey because each colony only lasts for a short period of time, which is hardly longer than the time taken by ladybirds to develop from egg to adult (Dixon, 1998; Dixon, 2000). Under such circumstances, not all aphid colonies are suitable oviposition sites. Ladybird females will only maximize their fitness if they lay eggs at the beginning of the development of aphid colonies that are not being exploited by other larvae. Otherwise, the risk of cannibalism or intraguild predation may jeopardize their reproductive investment (Doumbia et al., 1998; Hemptinne et al., 1992; Kindlmann & Dixon, 1993). When they detect the presence of larvae, adults refrain from ovipositing, eat some aphids and leave in search of a more suitable patch (Frechette et al., 2004). Therefore, because of the nature of their prey, females need to balance their energy allocation between oocyte production and fuel for searching for suitable oviposition sites. As a consequence, they are probably more time than egg-limited and selection has favoured those beetles that minimize the risk of dying before realising their potential fecundity. Thus, the rate of patch discovery may increase if females are able to cease oogenesis and resorb oocytes 22 when they continuously encounter poor quality oviposition sites or no adequate sites at all, and quickly resume egg production when they encounter good conditions again. The action of these two antagonistic processes, i.e. oogenesis and resorption, corresponds to Papaj’s (2000) “ovarian dynamics”. The benefit is that resources can be diverted from the gonads to the soma to fuel searching for suitable patches of prey (Papaj, 2000). That is, as in parasitoids, reproduction in ladybird is probably determined by the energy required to produce a batch of oocytes, the time it takes them to mature and the time needed for foraging and laying eggs (Rosenheim et al., 2000). When suitable aphid colonies are abundant, reproduction is mainly limited by the rate of oocyte maturation and oviposition capacity of females, whereas if suitable colonies of aphids are rare, the costs of foraging relative to egg production become more important. Oocyte resorption occurs continuously and at a low level during ovarian maturation in insects (Bell & Bohm, 1975). There is an increase in resorption in old insects (Perez-Mendoza et al., 2004) and parasitized insects (Hopwood et al., 2001) or when environmental factors like social pressure(Bell & Bohm, 1975), seasonality (Hodek & Honek, 1996) and food supply (Osawa, 2005) become unfavourable. Most synovigenic insects resorb their oocytes when food is scarce (Papaj, 2000). Oosorption enables females to survive and search for other better patches of prey (Collier, 1995; Ohgushi, 1996; Ohgushi & Sawada, 1985). Thus, oosorption strongly influences the costs of reproduction and the speed of insect ovarian dynamics appears to be an adaptation to the characteristics of the resource (Osawa, 2005). Oosorption is expected to evolve under the following three conditions (Papaj, 2000). Firstly, the environment is predictable to the extent that after females respond to a positive stimulus and resume oogenesis, the good conditions associated with this cue must last until the eggs are laid. This is true of aphids: they are often abundant in spring and when ladybird beetles discover a suitable colony, it is likely to persist long enough for them to produce a batch of eggs. The lifespan of a colony is about 6 to 8 weeks and females need about 6 days to mature a batch of eggs (Kawauchi, 1981). Secondly, there is a trade-off between the costs and benefits of ovarian development and other traits contributing to fitness. Although not measured for ladybird beetles, it is likely that the ability to divert resources from the gonads to the soma is likely to increase searching time and the probability of encountering suitable colonies. Therefore, ladybirds may benefit from resorption. In addition, after resorbing their egg load, it is likely that females can fly faster and manoeuvre with greater agility to avoid 23 enemies. Thirdly, host stimuli are more useful indicators of the status of the environment than other stimuli. This is certainly the case in ladybirds. Honeydew produced by aphids arrest ladybirds in their search for oviposition sites (Evans & Dixon, 1986; Ide et al., 2007). Then, if the prey is of a good quality and abundant enough, they lay eggs providing they do not detect oviposition deterring pheromone (Dixon, 2000; Doumbia et al., 1998; Hemptinne et al., 1992). It is known that ladybirds resorb their mature oocytes when prey is scarce (Osawa, 2005) or at the onset of diapause (Hodek & Honek, 1996; Hodek et al., 1977). It is likely that the reserves in the gonads are mainly in the immature and mature oocytes. Resorption of immature oocytes is recorded but the fate of the more mature oocytes is unknown. The aim of this paper is to investigate egg resorption in ladybirds in more detail and determine whether the ovarian dynamics of specialist and generalist ladybird beetles differ. Generalist species are able to exploit many species of prey in a wide range of habitats (Majerus, 1994). Therefore, we hypothesize that it might be adaptive for them to resorb oocytes and leave a poor quality habitat and search for a better quality one. In contrast, specialists depend on a few species of prey living in a narrow range of specific habitats (Majerus, 1994). If these preferred habitats do not provide enough prey for reproduction then there is less likelihood of discovering better oviposition sites elsewhere and rapid egg resorption is less advantageous. As a consequence, generalist ladybirds are expected to show faster ovarian dynamics than specialist species. This study focuses on the speed of ovarian dynamics in a generalist and specialist species of ladybird beetles. To quantify ovarian dynamics we compared two aphidophagous ladybirds species belonging to the same genus: the two-spot ladybird, Adalia bipunctata (L.) and ten-spot ladybird, A. decempunctata (L). The first species is considered to be a generalist because it feeds on more than fifty species of aphids living on herbaceous plants, shrubs or trees (Hodek & Honek, 1996). The second species is mainly a tree or even an oak dwelling species (Honek, 1985; Majerus, 1994). The list of its preferred prey is much shorter than that of A. bipunctata and in the field it feeds only on about ten species of aphids (Hodek & Honek, 1996). The availability and the dynamics of the food resources available to these two species are likely to differ. The ten spot ladybird feeds on a few species of aphids living on trees, all of which show the same seasonal dynamics strongly linked to changes in the concentration of nitrogen in tree sap (Dixon, 2005; Dixon et al., 2005). In contrast, the two spot ladybird is able to exploit a wide range of prey living on herbaceous plants, shrubs and trees. The 24 probability of their encountering suitable concentrations of prey is possibly greater because when aphids become scarce in a particular habitat they are likely to be more abundant in other habitats and on other host plants, which differ in their phenology. Therefore, we predict that the two spot ladybird will have faster ovarian dynamics than the ten spot ladybird, both in terms of resorption and maturation of oocytes. In addition to testing the hypothesis that generalist species have more rapid ovarian dynamics than specialist species, we need to confirm that the habitats of the two and ten spot ladybirds differ. Material and methods The habitats of A. bipunctata and A. decempunctata Data on the habitats used by A. bipunctata and A. decempunctata was extracted from Belgian and British data banks and obtained from the results of a field study in Southern France. The Coccinula Workgroup (Belgium) has assembled a data bank that includes observations made by amateur entomologists from all over Belgium supervised by specialists. These records were first collected in 1998. In the U. K. the Ladybird Survey organised by the Biological Records Centre (CEH Monks Wood, UK) was set up in 2004. It also records observations made by amateurs from all over the country. As in Belgium specialists checked the identification of ladybirds. From these databases we extracted those records that include an indication of the number of individuals and the plant on which they were observed. There were more than 2000 entries for these ladybirds observed on 155 genera of plants in the Belgium database and 200 on 57 plant genera in the UK database. Samples of ladybirds were collected in the Midi-Pyrénées area (France) in spring 2007 at six sites in the vicinity of Toulouse. The sites included fields, natural meadows and woodland. Ladybirds were collected by beating tree branches over a beating tray or using a sweep net in herbaceous vegetation. Each site was visited four times from early April to the end of May and each visit lasted 3 hours. 25 For each type of data set, a habitat overlap index was calculated using Honek’s formula (Honek, 1985): α= Σ pia pja / [ (Σ pia2) (Σ pja2) ] ½ where pia and pja are the proportions of the ith and jth species in the ath sample, one sample corresponding to one host plant species. Ovarian dynamics Ladybird cultures The experiments were carried out on Adalia bipunctata collected close to Toulouse (France) and A. decempunctata collected in Ariège (France). The two populations were reared separately for more than 10 generations in the laboratory at 18°C and a photoperiod of 16L: 8D. The ladybirds were fed pea aphids (Acyrthosiphon pisum (Harris)) in 5 l ventilated plastic boxes containing two large pieces of corrugated filter paper. The pea aphids were reared at a photoperiod of 16L: 8D at 19°C on broad bean (Vicia faba L. var Aguadulce) growing in compost. Three times a week the ladybirds were transferred to new plastic boxes with clean filter paper and fed an excess of freshly collected pea aphids. Any eggs they had laid were removed. Aphid survival was improved by adding some shoots of broad bean to the boxes. The eggs were incubated in 175-cm3 plastic boxes and the hatchling larvae reared under the same conditions as the adults. Egg laying behaviour of females deprived of food for two days Fifty 15 to 20 day old females of both species were taken from the stock culture and paired with males. Each couple was isolated in a 5.5 cm diameter Petri dish and fed pea aphids in excess. Females that laid a batch of fertile eggs on three consecutive days were separated from the males and transferred to clean Petri dishes. Twenty-five of them were fed pea aphids in excess for the next three days. The others twenty-five were fed pea aphids in excess for 24 h and then starved for two days. During the second day of starvation, the number of eggs they laid was recorded and their behaviour observed continuously from 10 to 16 h. Preliminary 26 tests indicated that females are more likely to lay eggs during that period of the day (Bailleul Hemptinne & Magro; unpublished). Oocyte resorption For this experiment, well fed females that were 15 day old, were isolated in 9 cm Petri dishes and then subjected to one of four treatments that each lasted for three days: - the females were always fed pea aphids in excess; - the females received aphids in excess for the first two days and then starved on the third day; - the females received an ad libitum supply of aphids on the first day and then starved for two days; - the females were starved for three days; At the end of the third day the females were weighed on a microbalance (Sartorius Supermicro) to an accuracy of 0.1 g and as an index of overall body size their pronotum width was measured under a binocular microscope fitted with a micrometer (Evans, 2000). Then, these beetles were dissected under a binocular microscope and their ovaries isolated and stained with Brilliant Cresyl Blue. This staining revealed the ovariole and oocyte membranes. The lengths of the germarium, the last follicle and its oocyte in each ovariole, were measured. Definition of oosorption When oosorption occurs, the shape of the oocyte changes and becomes irregular and smaller than the follicle in which it is developing. That is, the oocyte membrane is no longer in contact with the inner membrane of the follicle. The appearance of a gap between the oocyte and follicular membranes is the first indication of resorption. Another is the reduction in the size of the oocytes (Picture 1). 27 Ge Ge G Lo Lf Lo A Lf B Picture 1. A An ovariole from a well fed female of Adalia bipunctata (Ge: length of the germarium; Lf: length of the last follicle; Lo: length of the last oocyte) B Two ovarioles from a female Adalia bipunctata that was starved for two days (G: gap between the oocyte and follicular membranes = symptom of resorption). However, because of the experimental design it is possible that the decrease in size is not due to resorption but a starvation induced general histolysis of the ovaries. To determine whether this is the case the size of the germarium was measured as starvation is less likely to affect its size because it is made up of cells that do not accumulate resources to the same extent as the oocytes. Data analysis The effect of starvation on the body mass and width of the pronotum of both species of ladybird beetles was analysed using two way ANOVA, with species and starvation regime as fixed independent variables. The variation in size of the germarium recorded in the various starvation regimes was similarly analysed using a two way ANOVA. For each ladybird species, the linear regressions of the size of the last follicle and the size of the last oocyte on the duration of starvation were calculated. The coefficients of regression were compared using a Student t-test (Zar, 1999). Then, the affect of the duration of 28 starvation on the size of the last follicles was analysed with a two way ANOVA, with species and starvation time as fixed variables. To assess the effect of the resumption of feeding on the size of the last oocytes in the ovarioles, 15 day old females were isolated in 9 cm Petri dishes. They were deprived of food for two days and then fed pea aphids in excess on the third day. At the end of the third day each female was weighed on a microbalance (Sartorius supermicro) to an accuracy of 0.1 g and then dissected under a binocular microscope. Their ovaries were isolated and stained with Brilliant Cresyl Blue. The length of the last follicle and its oocyte in each ovariole was measured and compared to those of the females that had starved for three days. The comparison was done with two way ANOVA with species and starvation regime as independent fixed variables. Results The habitats of A. bipunctata and A. decempunctata In terms of host plants, A. bipunctata is recorded from 149 of the 155 genera of plants listed in the Belgium database. About 20% of these plants are trees, 18.8 % shrubs and 61.1 % herbaceous plants. In the U. K. database this species is recorded from 51 of 57 plant genera; 37.2 % of which are trees, 21.6 % shrubs and 41.2 % herbaceous plants. A. decempunctata is only recorded from 58 genera of plants in Belgium and 22 in Britain. In Belgium, 38% of these plants are trees, 31 % shrubs and 31 % herbaceous plants. The percentages recorded in the U. K. are: 50% for trees, 22.7 % for shrubs and 27.3 % for herbaceous plants (Table 1). In terms of the numbers the Belgium database includes records for 9,655 individuals. The tenspot ladybird is clearly recorded most frequently on trees (83.8%) and rarely on shrubs (9.6%) or herbaceous plants (6.6%). The two-spot is more ubiquitous with 53.1% recorded on trees, 17.5% on shrubs and 29.4% on herbaceous plants. The UK database and to a lesser extent the samples collected in the Midi-Pyrénées confirm these observations: in the U. K., 72.1% of the ten-spot ladybirds were recorded on trees and the remaining 27.9% on shrubs or herbaceous plants. In comparison, the two-spot ladybirds were more evenly spread between trees (32.2%), shrubs (21.4%) and herbs (46.4%) (Percentages of ladybirds on trees and other plants: Belgium: Chi² = 524.0, d.f. = 1, p < 0.001; U.K. : Chi² = 178.0, d.f. = 1, p < 0.001). That is, adults of A. bipunctata are recorded from a wider range of vegetation than A. decempunctata, which is predominantly recorded on trees. 29 The values of the niche overlap index for these two species in Belgium and the U. K. are similar, but is higher in the Midi-Pyrénées (Belgium = 0.19; U. K. = 0.14, Midi-Pyrénées = 0.35). The plants on which these two species are likely to co-occur are mainly trees: 21 tree genera of the 31 recorded were visited by both species in Belgium, and 9 of the 21 in the U. K.. In contrast, both species were only recorded on 14 genera of herbaceous plants out of 95 in Belgium and only 3 out of 24 in the U. K.. Table 1. The number of species of trees, shrubs and herbaceous plants that harboured only Adalia bipunctata (A2), A. decempunctata (A10) or both species; the number of ladybird beetles recorded on each type of plant and the value of the niche overlap index for Belgium, the U. K., Midi-Pyrénées (France) and Central Europe. only A2 Belgium UK Midi Pyrénées Central Europe * Trees 9 Shrubs 11 Herbs 77 Trees 10 Shrubs 7 Herbs 18 Trees 0 Shrubs 0 Herbs 0 Number of host plants only A2+A10 total A2 A10 30 1 21 (20.1%) 28 1 17 (18.8%) 91 4 14 (61.1%) 19 2 9 (37.2%) 11 1 4 (21.6%) 21 3 3 (41.2%) 5 2 5 (83.3%) 0 0 0 (0%) 1 0 1 (16.7%) Number of individuals total A10 22 (38%) 18 (31%) 18 (31%) 11 (50%) 5 (22.7%) 6 (27.3%) 7 (87.5%) 0 (0%) 1 (12.5%) A2 A10 4265 (53.1%) 1410 (17.5%) 2364 (29.4%) 451 (32.2%) 300 (21.4%) 650 (46.4%) 25 (29.1%) 0 (0%) 61 (70.9%) 1355 (83.8%) 155 (9.6%) 106 (6.6%) 240 (72.1%) 65 (19.5%) Overlap Index 0.19 0.14 28 (8.4%) 157 (98.1%) 0 (0%) 3 (1.9%) 0.35 1982 0.19 1983 0.28 * (Honek, 1985) Ovarian dynamics Egg laying behaviour of females deprived of food for two days Of the adults supplied with aphids ad libitum seven two spot and two ten spot ladybirds laid normal clutches of eggs, which they did not eat. The eggs were regularly arranged in rows and 30 touched each other. After laying the eggs the females did not interact with their eggs for the rest of the observation period (Table 2). The behaviour of the adults starved for two days differed. They mostly laid a single egg at a time and as soon as it was laid they quickly turned round and ate it. In both species some females repeated this behaviour two and, more rarely, three times. This was observed 13 and 15 times for A. bipunctata and A. decempunctata, respectively (Table 2; Fig. 1). Of three two -spot and ten ten-spot eggs collected before the females could eat them none hatched. Table 2. The number of eggs laid in clusters or singly, and in this case immediately, eaten by females A. bipunctata and A. decempunctata in the presence or absence of aphids A. bipunctata Clustered eggs Single eggs ² test A. decempunctata Clustered eggs Single eggs ² test Presence of aphids Absence of aphids n=7 n=8 58 5 0 13 50.51 (P < 0.001) n=2 n=9 25 0 0 15 40.00 (P < 0.001) 4 A. bipunctata A. decempunctata 3 2 1 0 1 2 3 Figure 1. The distribution of frequencies of the number of eggs laid singly and immediately eaten by A. bipunctata and A. decempunctata females deprived of food for two days. 31 Oocyte resorption Effect of starvation on body mass and width of pronotum At the beginning of the experiment the two ladybird species differed significantly in body mass (F = 56.5; 1, 74 df; p < 0.000) and size (F = 32.9, 1, 74 df; p < 0.000) with the individuals of A. bipunctata significantly larger and heavier than those of A. decempunctata (Table 3). In both species starvation resulted in a significant loss of mass (Interaction species*starvation: F = 2.4, 3, 74 df, p = 0.070, starvation: F = 14.2, 1, 74 df, p < 0.000) but unsurprisingly their body size was not affected (Interaction species*starvation: F = 1.1, 3, 74 df, p = 0.356, starvation: F = 1.2, 3, 74 df, p = 0.894) (Table 3). Table 3. The effect of increasing starvation periods, from 0 to 3days (0DS, 1DS, 2DS & 3DS), on the average (standard deviation) body mass and pronotum size of Adalia bipunctata and A. decempunctata females. Adalia bipunctata 0DS 1DS 2DS 3DS n 11 11 10 10 Body mass (mg) 17.32 (2.95) 14.52 (2.30) 13.55 (2.69) 11.85 (1.52) Adalia decempunctata Pronotum (mm) 2.35 (0.09) 2.38 (0.13) 2.34 (0.12) 2.34 (0.10) n 10 9 11 10 Body mass (mg) 12.71 (1.70) 10.63 (1.29) 10.30 (1.68) 10.52 (0.93) Pronotum (mm) 2.22 (0.09) 2.18 (0.08) 2.22 (0.11) 2.26 (0.08) Effect of starvation on the size of the germarium The size of the germarium was not affected by three days of starvation (F = 1.5, 3, 74 df, p = 0.217). Effect of starvation on the size of the last follicle and of the last oocyte In both ladybird species, the sizes of the last follicles and oocytes in each ovariole decreased with increase in the period starvation (A. bipunctata: slopeoocyte = -0.1991, t = -46.9, p<0.000, slopefollicle = -0.1008, t = -26.8, p<0.000; A. decempunctata: slopeoocyte = -0.1348, t =-28.7, p<0.000, slopefollicle = -0.0590, t = -13.1, p<0.000). The decrease in size of the last oocytes was significantly faster than the decrease in follicle size (Student t test for A. bipunctata: t = 17.4, p<0.000 and for A. decempunctata: t = -11.7, p<0.000). That is, when females are deprived of food they actively resorb their terminal oocytes, whereas the size of the follicles is only slightly affected (Fig 2). The interaction between starvation time and species is highly significant (F = 31.8; 3 & 2,959 d. f.; p < 0.000). For both species, an increase in the length of the starvation period results in a 32 decrease in the size of the last oocyte (F = 1053.5; 3 d. f.; p < 0.000). However, the decrease in size occurred faster in A. bipunctata than A. decempunctata (Fig. 2): after three days of starvation, the length of the last oocyte is only 15.31 % of its length at the beginning of the Lenght of oocyte (mm) experiment in the former species and 31.79 % in the later (Table 4). 0,8 0,8 0,7 0,7 0,6 0,6 0,5 0,5 0,4 0,4 0,3 0,3 0,2 0,2 0,1 0,1 follicle oocyte 0 0 0 1 2 0 3 1 2 3 Days of starvation Days of starvation Figure 2. The reduction in size of the last follicle and of the last oocyte in relation to starvation time in A. bipunctata (A2) and A. decempunctata (A10) (for each day of starvation: mean and SEM) Effect of resumption of feeding on the size of the terminal oocytes The two species of Adalia reacted differently to the resumption of feeding on the third day of the experiment as indicated by the significant interaction term of the ANOVA (F = 85.3; 1 & 1,484 d. f., p = 0.000). Both A. bipunctata and A. decempunctata that were fed on the third day had longer terminal oocytes (F = 1483.3; 1 & 1,484 d. f.; p = 0.000). However, this increase was much more pronounced in the former than the later species: in comparison to females that starved for three days, resumption of feeding provoked a 65.28 % increase in the length of the last oocyte in A. bipunctata and 46.42 % in A. decempunctata (Table 4). Table 4. The effect of the resumption of feeding on the average values of the oocyte length of 15 day old females of Adalia bipunctata and A. decempunctata that were either starved for three days (3DS) or starved for two days and then fed on the third day (1DR) A. bipunctata n 3DS 416 1DR 376 A. decempunctata Oocyte length mm % of 0DS size 0.10 (0.12) 15.31 % 0.55 (0.20) 80.59 % 33 n 321 375 Oocyte length mm % of 0DS size 0.18 (0.14) 31.79 % 0.45 (0.23) 78.21 % Discussion The results confirm that the two and ten-spot ladybirds are recorded in different habitats (Honek, 1982; Honek & Rejmanek, 1982; Majerus, 1994). A. bipunctata was recorded on a larger range of plants than A. decempunctata. The former occurred on herbaceous plants, shrubs and trees while the later is more selective and was recorded mainly on trees. The niche of these two species overlaps to some extent, as they are both recorded on trees. The values of the niche overlap in Belgium, the U. K. and Midi-Pyrénées (France) are similar to those recorded in Central Europe (Honek, 1985). The presence of adults is not the best indicator of where a species lays its eggs. However, it does indicate that the ten-spot ladybird is mainly associated with trees and is more of a habitat specialist than the two-spot. Species living in different habitats tend to consume different prey as field observations reveal a positive correlation between habitat specificity and the diversity of prey eaten by terrestrial insects predators (Hagen, 1987; Hodek, 1993). Therefore, as aphids, which are the prey eaten by both the Adalia studied, show a high degree of plant specificity (Dixon, 1998), one can reasonably assume that A. decempunctata encounter and eat a different set and probably fewer species of aphids than A. bipunctata. This assumption is supported by the fact that the list of recorded essential prey of A. decempunctata is much shorter than that of A. bipunctata (Hodek & Honek, 1996; Iperti, 1965; Mills, 1981). Their habitat specialization in Europe means that the two species of Adalia face different environmental constraints and more particularly have to cope with aphid species that differ in their temporal availability. The ten-spot ladybird depends on tree-dwelling aphids, the abundance of which is closely linked to the concentration of nitrogen in the sap of their host plants. Most of these aphids show two peaks in reproductive activity, one in spring and one in autumn (Strong et al., 1984). In foraging for aphids on trees, shrubs and herbaceous plants the two-spot ladybird is able to exploit not only a greater range of species of aphids, but because these peak in abundance on their host plants at different times, have more time in which to exploit the aphids. That is, although both species of ladybird are similarly limited by their thermal requirements and can only breed successfully in spring and early summer (Dixon et al., 2005), nevertheless the two spot ladybird has potentially more species of aphid and more time to exploit them than the ten spot ladybird. Therefore, both Adalia are adapted to specific habitats and such adaptations are known to lead to the diversification of life-histories (Begon et al., 2006; Futuyma, 2001; Reznick & Travis, 34 2001). For example, Montague et al. (1981) reported that reproductive allocation and effort in several Hawaiian Drosophila species are linked to the distribution and quality of breeding substrates. Reznick (1996) showed that, within the same species ( i.e. guppies), individuals subjected to high level of predation mature faster, reproduce more often and devote a greater part of their incoming resources to reproduction than conspecifics subjected to a lower level of predation. Thus, it is likely that habitat specialization affects the life-histories of the two Adalia species. All ladybird beetles are income breeders or synovigenic because they use current energetic income to produce offspring (Stearns, 1992) and at emergence the ovaries of adult females contain very few or no eggs and they need to eat in order to mature successive batches of eggs (Heimpel & Rosenheim, 1998). Gravid females, which enter an area where prey is scarce, are unlikely to be able to replenish their metabolic reserves. In such a situation it is advantageous for the females to be able to retrieve resources already allocated to the gonads for use in searching for areas where prey is abundant. Several species of synovigenic insects can resorb occytes or invest in oogenesis depending on food availability. This has been termed ovarian dynamics (Papaj, 2000). In this context we are particularly interested in the allocation of resources to the soma and gonads (Stearns, 1992; Van Noordwijk & Dejong, 1986). It is known that all aphidophagous ladybirds have proportionally similar sized gonads (Stewart et al., 1991b). Therefore, overall it appears that ladybirds invest a similar proportion of their resources in the development of gonads. Here we have focused on the day-to-day changes in resource allocation to the gonads that are related to the immediate availability of prey. The short period of starvation used in this study aimed to mimic the situation gravid females experience when they enter an area of their habitat where aphids are scarce. The expectation was that the habitat generalist, A. bipunctata would react more quickly to the lack of food and initiate egg resorption and also resume oocyte maturation more rapidly when they encounter a rich food supply than the habitat specialist, A. decempunctata. That is, A. bipunctata should show faster ovarian dynamics than A. decempunctata. This expectation rests on the greater probability of A. bipunctata finding areas in its habitat where aphids are abundant and over a longer period of time than A. decempunctata, whose breeding success is dependent on the spring peak in abundance of a few species of tree dwelling aphids. 35 The experimental results firstly indicate that females of both the Adalia species behave similarly when deprived of food for two days. Unlike the controls they laid mainly single eggs, and then immediately turned round and ate them. Santi & Maini (2007) report that A. bipunctata and H. axyridis both show similar behaviour when starved. Rather than regarding these eggs as “trophic eggs” it is more likely they were the first stage in the resorption process. The eggs in their gonads that are mature and already have a chorion are possibly difficult to resorb. Therefore, to lay them and immediately eat them is possibly the most efficient way of recycling their energy content. In this aspect of resorption both species are very similar. Secondly our results show that starvation has a similar effect on the body mass of both A. decempunctata and A. bipunctata. After one day of starvation females start to resorb the most advanced oocytes in their gonads. This is marked by the gap that appears between the follicular cells and oocytes, and at the end of the third day of starvation the average length of the terminal oocytes is 15% and 32% of the initial size in the generalist and specialist species, respectively. Expressed in terms of volume, rather than a linear measurement, the reduction in the size of the terminal oocyte is considerably more striking, with the generalist possibly resorbing approximately two thirds and the specialist one third of the volume of their oocytes. That is, the generalist resorbed nutrients from its gonads at twice the rate of the specialist. Although laboratory conditions are not directly comparable with those in the field, these results suggest that after a period of unsuccessful foraging resorption of energy from the oocytes in the generalist is more rapid and intensive, and that this energy is used as an additional source of fuel for searching for suitable oviposition sites. The ovarian dynamics of the specialist ten-spot ladybird is slower. In addition, if it is adaptive for a generalist to more quickly retrieve resource from its gonads, then it should also be advantageous for it to immediately restart maturing oocytes as soon as a good food source is located. Fast ovarian dynamics is adaptive for generalist species because in addition to being a method of quickly obtaining additional resources for foraging when prey is scarce (Papaj, 2000) it also enables them to quickly mature oocytes when they locate an abundance of prey. Once again the results match the expectation. The generalist A. bipunctata resumes oogenesis more quickly than A. decempunctata when fed ad libitum after two days of starvation, achieving nearly 80% of the initial oocyte size. A. bipunctata and A. decempunctata are two closely related sympatric species. They live in different habitats, show different degrees of dietary specialization and differences in 36 their ovarian dynamics. To our knowledge this is the first time that the degree of dietary specialization of predatory insects has been linked to differences in a life-history trait, in this case ovarian dynamics. 37 References Begon, M., Townsend, C.R., & Harper, J.H. (2006) Ecology. From Individuals to Ecosystems. 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Adalia bipunctata (L.) et A. decempunctata (L.) sont deux espèces d’insectes prédateurs phylogénétiquement proches mais montrant des degrés de spécificité pour leur habitat différents, A. decempunctata étant une espèce plus spécialisée qu’A. bipunctata. Afin de vérifier l’influence du degré de spécialisation de ces deux espèces sur l’évolution de leurs traits d’histoires de vie, notamment en termes d’investissement reproducteur, nous avons comparé différents traits phénotypiques des individus. Les résultats de nos expériences montrent qu’en effet, les femelles spécialistes ont un investissement reproducteur par descendant plus important que les femelles généralistes. Relativement au poids des femelles, les œufs d’A. decempunctata sont plus gros que ceux d’A. bipunctata. La relation entre le poids d’un œuf et le poids de la larve qui en émerge étant la même chez les deux espèces, cela signifie également que l’espèce spécialiste produit, relativement au poids des adultes, des larves plus lourdes que les généralistes. De plus, ces larves spécialistes montrent de meilleures capacités de survie à jeun que les larves généralistes. Bien que les femelles spécialistes investissent plus par descendant que les femelles généralistes, le nombre total de descendants qu’elles pourront produire au cours de leur vie sera inférieur. La théorie prédit, dans ce cas, une longévité plus importante de l’espèce spécialiste. Nos expériences confirment cette prédiction puisqu’on observe que les femelles A. decempunctata ont une durée de vie supérieure de 38% aux femelles A. bipunctata. L’ensemble de nos résultats démontre donc l’influence du degré de spécialisation sur l’évolution des traits d’histoire de vie de ces deux espèces d’insectes prédateurs. De plus, le poids des femelles de l’espèce spécialiste nourries en laboratoire avec une proie ne faisant pas partie de leur spectre alimentaire naturel n’est pas différent de celui des femelles sauvages. Cela semble suggérer que le facteur essentiel dirigeant cette évolution des traits de vie ne serait pas la qualité intrinsèque des proies mais plutôt les caractéristiques de l’habitat. Mots clés : spécialisation, traits d’histoire de vie, investissement reproducteur, survie 44 Abstract Adaptation to specific habitats is one of the driving forces of the evolution of life histories traits of organisms. For example, some studies have already demonstrated that females of specialist insect species should meet fewer opportunities to lay eggs during their life than females of generalist species. As a consequence, the former should invest more in each offspring than the later (Albuquerque et al., 1997; Gilbert, 1990; Montague et al., 1981). Adalia bipunctata (L.) and A. decempunctata (L.) are two closely related species of predaceous insects, which show different degrees of habitat specialisation as A. decempunctata is more specialised than A. bipunctata. So to highlight the impact of specialisation degree for their habitat on the evolution of the life histories traits of both species, more particularly on reproductive investment, we have studied several phenotypic traits of individuals. Our results highlight that specialist females invest more per individual offspring than generalist do. After controlling for difference in female body mass, A. decempunctata lays bigger eggs than A. bipunctata. As the relationship between egg mass and weight of emerging larva is identical for both species, specialist females give birth to heavier larvae than generalists do. Moreover, specialist larvae show greater abilities to survive under starvation than generalist larvae do. Although specialist females invest more in individual offspring than generalists, the total number of offspring they will produce during their life is lower. In such case, theory predicts a greater longevity for specialist females. Experiments confirm this prediction as A. decempunctata females survive 38% longer than A. bipunctata females. So, our results properly highlight the effect of specialisation on the evolution of life histories traits in these two predaceous insect species. Moreover, the body mass of laboratory reared A. decempunctata females fed with a prey external to the usual food range of the species does not differ from those of wild females. This suggests that the evolution of life histories traits is not entirely driven by prey suitability but also by habitat characteristics. Key words: specialisation, life histories traits, reproductive investment, survival 45 Introduction For many years, a great deal of efforts has been spent on understanding specialization in herbivores. This makes sense because plants vary in quality throughout the growing season (Van Emden, 1978) and the majority are highly chemically defended (Crawley, 1983; Harborne, 1977; Rosenthal & Janzen, 1979). In such context specialization makes sense because it enables to avoid the risk of tasting toxic food (Janz, 2002). Specialists exploit their host-plants more efficiently than generalists and should therefore be superior competitor (Fox & Morrow, 1981). In contrast, studies on diet breadth of carnivores are rarer, probably because animal tissues are seen as less challenging food than plant tissues. It is admitted that their quality is higher because they are rich in nitrogen, and more homogenous among prey species (Bristow, 1988; Stephens & Krebs, 1986). As a consequence, predators are expected to have relative broad diets (Begon et al., 2006). However, field observations do not match these expectations because some carnivores are clearly specialized (Hagen, 1987). Feeding specialization in predators will evolve through a reduction of the range of preys used by the individuals and the conditions determining the diet breadth in predators mainly depend of the characteristics of the resource. Theory predicts that specialization evolved when a particular food item is abundant (Thompson, 1994) and predictably available (Begon et al., 2006; Thompson, 1994). So, specialization should be more frequent in productive environment while generalist species would be dominant in poorer or unpredictable environments (Begon et al., 2006). It also predicts that competition promotes specialization because the cost of resource acquisition can be so expensive that it becomes advantageous in terms of energy intake to feed on a less profitable but competitor free resource (Futuyma & Moreno, 1988; Stephens & Krebs, 1986). The greater efficiency in the exploitation of a particular resource requires from the animals particular foraging, morphological or physiological abilities (Thompson, 1994) and consequently leads to an evolution of its life histories traits (Begon et al., 2006; Futuyma, 2001; Montague et al., 1981; Reznick & Travis, 2001). For example, Hawaiian Drosophila species specialized in the exploitation of frequent but poor resource tended to experience a high level of competition between hatchlings. As a consequence, clutches are constituted of few big eggs that give birth to larger and more competitive larvae. Reversely, species using 46 unpredictable but nutrient-rich breeding sites where the competition between larvae is lower, lay many small eggs (Montague et al., 1981). Among the few examples of predator specialization, some become dependent on preys with an unusual body size among the range of preys normally exploited by closely related species, other on preys living in specific habitats or having a specific distribution pattern. Lacewings provide an example of specialization on large prey. In a clade of generalist feeders one species specialized on larger prey, which is not the case of one of its sister species. This adaptation drove an evolution of the life histories traits of the specialist towards the production of large eggs and large larvae. The production of large offspring is traded off against a decrease in fecundity and in the developmental rate of larvae. As a final consequence adults of the specialist species are bigger than those of the generalist (Albuquerque et al., 1997). In the same way, aphidophagous and coccidophagous ladybirds beetles in specializing respectively on aphids and coccids have seen an evolution of life history traits probably in response to the distribution pattern of their preys (Dixon, 2000; Soares et al., 2004). Ladybird beetles offer also examples for predators that are specialized to particular habitats. Indeed among predaceous ladybirds species many are known to be restricted to a specific habitat (Hodek, 1993; Hodek & Honek, 1996; Majerus, 1994) such as Myzia oblongoguttata (L.) on conifers, or Adalia decempunctata (L.) mainly specialized on tree aphids (Majerus, 1994). And this specialization has been shown reflected in specific morphological, physiological or ethological adaptations as for example a better adhesion ability of arboreal species larvae (Hodek & Honek, 1996). So, alike herbivores (Montague et al., 1981; Thompson, 1994), predators have also to face constraints for exploiting their particular resource that will bear on the evolution of their life histories (Albuquerque et al., 1997; Dixon, 2000; Soares et al., 2004). To explore this evolution, comparing two closely related species allows to control for the influence of phylogeny on the evolution of traits (Albuquerque et al., 1997; Evans, 1982; Futuyma, 2001; Gilbert, 1990; Tauber & Tauber, 1987). The two-spot ladybird, Adalia bipunctata (L.), and the ten-spot ladybird, A. decempunctata, are good candidates firstly because of their relatedness (Magro et al., in press), secondly, it is rather well known that their habitat and feeding regimes show signs of specialization. A. bipunctata lives in trees, shrubs and on herbaceous plants where it feeds on at least fifty aphid 47 species. A. decempunctata is restricted to trees and is even seen as dwelling mainly on oaks; its diet is known to include about ten aphid species (Hodek & Honek, 1996; Honek, 1982, 1985; Honek & Rejmanek, 1982; Iperti, 1965; Majerus, 1994; Mills, 1981). In addition, a recent study demonstrates that this specialization has impacted the speed and intensity of their ovarian dynamics (Ferrer et al., submitted). Gilbert (Gilbert, 1990) made three main predictions in relation to phylogeny, competition and evolution of life history traits of organisms under specialization. Firstly, as many authors, he considers that specialization into clades is a derived, apomorphic trait. However, in spite of a backing from several case studies (Futuyma & Moreno, 1988), his views are not unanimously shared. Thompson (Thompson, 1994) pleads for a more dynamic view claiming that specialization is not systematically derived from generalization and does not constitute an evolutionary dead end. There is not enough accurate information on the phylogeny of the Adalia genus to contribute to this discussion. The second prediction is that specialization is a mean of escaping competition. The question of competition for resource is complex in ladybirds. Males are smaller than females and do not eat much (Dixon, 2000). As female ladybirds mainly use aphid colonies for oviposition competition for food is expected to occur principally among larvae. Ladybirds larvae mark plants on which they walk with a smear produced by a gland of the apex of their abdomen (Laubertie et al., 2006; Magro et al., 2007). These marks are recognized by females, which refrain from ovipositing, eat some aphids and leave the colony in search of a more suitable patch (Frechette et al., 2004). By this mechanism ladybird females avoid the consequences of competition. The two species we work on are sensitive to their own tracks and to each other (Magro et al., 2007). So, avoidance should likely be the rules between both species and competition between larvae should be restricted. The last of Gilbert’s prediction on evolution of life history traits is at the core of this paper. Gilbert (Gilbert, 1990) assumes that specialists would encounter suitable patches for oviposition generally at a lower rate than generalists. Consequently, specialist females will have fewer opportunities to lay eggs during their life time than generalist females. This could have favoured a higher allocation of nutriments to individual eggs so that specialists lay larger eggs than generalists. This prediction has been confirmed by his studies on hoverflies 48 (Gilbert, 1990) and the observations on fruit flies (Montague et al., 1981) and lacewings (Albuquerque et al., 1997). Therefore, as the two Adalia species are closely related but clearly show a different degree of specialization, this study aims at examining several of their life history traits, such as eggs size, eggs number, body size and survival abilities of both adults and larvae, in order to test the third Gilbert’s prediction. Material and method Comparison of adults from the stock culture and from the wild Ladybirds of both species used in these experiments of survival and reproduction come from two different origins. Stock culture Adalia bipunctata (L.) were collected from the campus of ENFA (France) and A. decempunctata (L.) collected on several sites in the area of Toulouse (France). The two populations were reared separately in the laboratory at 20°C and under a photoperiod of 16L:8D. The adults were fed pea aphids (Acyrthosiphon pisum (Harris)) in excess in 5 l ventilated plastic boxes containing a piece of corrugated filter paper. The pea aphids were reared at a photoperiod of 16L: 8D at 19°C on broad bean (Vicia faba L.) growing in compost. Three times a week the ladybirds were transferred to a new plastic box with clean filter paper and an excess of freshly collected pea aphids and any eggs they had laid recovered. The eggs were incubated in 175-cm3 plastic boxes under the same photoperiod condition as the adults. Hatchling larvae were reared under the same conditions as the adults. At the moment of the experiment, both ladybird populations were reared in laboratory for 6 generations. 49 Wild individuals Wild adults were collected in the field by shaking branches over a beating tray and by sweeping herbaceous vegetation during the spring 2007 and 2008 on several sites in the area of Toulouse (France). These individuals were weighted just after their capture and their sex determined by examining the shape of their 6th abdominal sternite under a binocular stereomicroscope (Hodek, 1973). Body mass of individuals caught in the field and from stock culture were compared to assess the influence of laboratory rearing conditions. Body mass of wild and laboratory adults were compared for female and male toward a two way ANOVA with species and origin as fixed independent variables. The tests were performed on R version 2.6.1 (R Development Core Team 2007). Reproductive investment Twenty females of both species, between 10 to15 day old, were weighted, isolated in 9 cm Petri dishes and fed ad libitum pea aphids during ten days. The number of clutches and the number of eggs produced by each female were recorded every day. Five eggs per day per female were weighted. At the end of the experiment, the females were dissected and their ovarioles counted. The relative egg mass (REM) was calculated as follows: REM = egg mass/female mass The relative reproductive biomass (RRB) was then calculated as follows: RRB = REM*ovariole number. Student t-tests performed with R version 2.6.1 (R Development Core Team 2007) were used to compare the female body mass, the number of ovarioles, the number of produced eggs, the eggs mass, the clutch number, the number of eggs per clutch, the number of produced eggs per ovaries, REM and RRB. 50 Eggs mass, body mass, body size and survival abilities of freshly emerged larvae Eggs and body mass of freshly emerged larvae Clutches from several females of both species were randomly selected and incubated in 5 cm Petri dishes at a photoperiod of 16L : 8 D and at 20°C. Several eggs of the clutches were isolated and weighted following the same method as previously explained. As soon as those eggs hatched, that is when the body of the larvae was completely out of the chorion, they were picked up with a fine paintbrush and weighted with an accuracy of 0.1 µg on a microbalance (Sartorius Supermicro). For each species, a linear regression is applied to larvae weight in function of eggs weight then Student t-test were performed to determine if regression lines of both species have different slopes or elevations (Zar, 1999). Eggs mass and survival ability of freshly emerged larvae Ten and two-spots females were isolated in 9 cm Petri dishes until they lay eggs. Then, several eggs were weighted, isolated and incubated as previously explained. Petri dishes were regularly checked and so the hatching time of the eggs was recorded with an accuracy of half an hour. Then, the newly emerged larvae were kept in their dish without food until death. The Petri dishes were checked every hour so that the moment at which the larva died was recorded with an accuracy of an hour. The survival ability of the larvae was analysed firstly with a Wilcoxon test and secondly with an ANCOVA, with egg mass as covariate and species as fixed independent variables. Survival of females Freshly emerged adults from both species stock cultures were isolated, their emergence day exactly recorded. During five days they were fed pea aphids ad libitum until their integument hardened. At the end of this period of time it was possible to determine their sex by examining the shape of their 6th abdominal sternite under a binocular stereomicroscope (Hodek, 1973). Then, adults were sorted out to form couples (1 male+1 female) born on the 51 same day. The couples were kept in 9 cm Petri dishes and fed pea aphids ad libitum until death. Petri dishes were checked daily in order to record the death of the females with an accuracy of 1day. These pairs were transferred three times a week to clean Petri dishes. Sometime the individuals of a couple did not die at the same time. The survivors continued to be reared in their Petri dishes until a new partner of the same age became available. A new couple was then formed and reared exactly as previously. Therefore the females were always reared in couple to control the effect of sexual activity on ageing. Data were analysed with the program JMP version 6.0 (SAS Institute): a survival plot was computed and a Log Rank test was performed. Results Comparison of adults from the stock culture and from the wild The ten-spot ladybird is lighter than the two-spot (Figure 1; females: df: 1, 255, F = 243.0, p < 0.000, males df: 1, 107, F = 222.6, p < 0.000). Within a species, wild females are not significantly heavier than those reared in the laboratory (Figure 1, df: 1, 255, F = 1.4, p = 0.231). That is, the rearing conditions of the laboratory are as good as those in the field. Wild males of both species are significantly lighter than laboratory males (Figure 1, df: 1, 107, F = 28.5, p < 0.000). ns ns *** *** *** 5 6 8 10 10 15 12 20 14 *** *** *** A A10.lab A2.lab A10.wild n=43 n=40 n=103 B A2.wild n=73 A10.lab A2.lab n=20 n=20 A10.wild n=51 A2.wild n=20 Figure 1: The comparison of the body mass of females (A) and males (B) A. bipunctata (A2) and A. decempunctata (A10) from the laboratory stock cultures (lab) or collected in nature (wild) 52 Reproductive investment A. bipunctata and A. decempunctata lay on average two clutches per day. But the former has significantly more ovarioles than the later and, as a consequence, lays more eggs per day (Table 1). When differences in female body mass of the two species are controlled for (REM), it turns out that female of A. decempunctata produces bigger eggs per unit body mass than A. bipunctata. The relative reproductive investment, reflected by RRB, of A. decempunctata is also significantly bigger (Table 1). Table 1: For female A. decempunctata and A. bipunctata: body mass (mg), number of ovarioles, number of clutches per day and number of eggs per day. For eggs: mean mass (mg), REM and RRB. Females A2 A10 ttests Body mass (mg) 17.47 11.02 t = 9.5 p < 0.000 Number of ovarioles 49.3 45.0 t = 5.2 p < 0.000 Eggs Number of clutches per day 2.4 2.2 t = 1.0 p = 0.327 Number of eggs per day 24.0 18.7 t = 2.6 p < 0.000 Mass (mg) REM RRB 0.12 0.11 t = 3.1 p = 0.004 0.007 0.010 t = -7.7 p < 0.000 0.35 0.46 t = -4.9 p < 0.000 Eggs mass, body mass, body size and survival abilities of freshly emerged larvae Eggs and body mass of freshly emerged larvae For the two-spot ladybirds, larval body mass is closely correlated to eggs mass: Larval mass = 0.92 * eggs mass – 0.009 (n = 45, R² = 0.93). The slope is significantly different from 0 (t=25.1, p < 0.000) and intercept is not (t = -1.7, p = 0.099). A strong correlation between egg mass and larval mass is also found in the ten spot ladybirds: Larval mass = 0.92 * eggs mass – 0.004 (n = 30, R² = 0.98). The slope is also statistically significant (t = 35.5, p < 0.000) and not the elevation (t = -1.5, p = 0.145). Student’s t test applied to the coefficients of the two regressions indicates that both slopes are statistically identical for both species (t = 0.2, p > 0.500) but elevations do not (t = -3.6, p < 0.001). 53 Eggs mass and survival ability of freshly emerged larvae A simple analysis on the survival time shows that in absolute terms the two-spot larvae survive longer without food than the ten-spot (mean A2 = 51.24 h (n = 33); mean A10 = 48.05 h (n = 59); W = 1235.0, p = 0.033). The ANCOVA of the survival time with egg mass as covariate and species as fixed independent variable shows that egg mass is crucial in determining the length of the survival period of new born larvae deprived from food (df: 1, 88, F = 26.8, p < 0.000). The ten-spot larvae survive significantly longer relatively to their egg mass than the two-spots (Figure 2). The slopes of the two regression lines are identical (interaction egg mass/species non significant: df: 1, 88, F = 2.1, p = 0.148) but the elevation of the ten spot regression line is significantly higher than that of the two spot (df: 1, 88, F = 6.8, p = 0.011) (Figure 2). 80 70 Survival (h) 60 50 A10 40 A2 30 20 10 0 0,08 0,1 0,12 0,14 0,16 0,18 Eggs weight (mg) Figure 2: The survival time without food (in days) of just hatching larvae of A. bipunctata (A2) and A. decempunctata (A10) in function of egg weight (in mg). 54 Survival The ten-spot females survive significantly longer than the two-spot (mean A2 = 59 days, mean A10 = 81 days) (Figure 3). The comparison of the survival curves with the Log-rank test confirms that two-spot females die significantly earlier than ten-spots (Chi² = 6.3, p = 0.012) (Figure 3). 100 A2 90 A10 Survival (%) 80 70 60 50 40 30 20 10 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 10 0 11 0 12 0 13 0 14 0 15 0 16 0 17 0 18 0 0 Days Figure 3: The survival curves of a cohort of 36 A. decempunctata (A10) and 31 A. bipunctata (A2) Discussion The evolution of life history traits has been developed in the framework of optimization (Begon et al., 2006) establishing that the observed combinations of traits are those conferring the highest fitness (Stearns, 2000). These life history traits act directly on reproduction and survival (Stearns, 1992) and are bound together by trade-offs, a linkage between traits that constraints the simultaneous evolution of two or more of them (Stearns, 1992). Along evolution, organisms have evolved many different ways of combining these traits to optimize fitness (Stearns, 1992). Moreover, as organisms live in heterogeneous environments, evolution tends to produce an optimal phenotype for the range of habitats exploited by those organisms (Kawecki & Stearns, 1993). That is why the adaptation of 55 organisms to specific habitats leads to the diversification of life-history (Begon et al., 2006; Futuyma, 2001; Reznick & Travis, 2001). Specialization on particular resources or habitats therefore strongly impacts evolution of life history traits. But, while this influence of feeding specialization on life history traits has already been widely explored in herbivorous insects (for review see: Thompson, 1994), studies concerning predaceous insects stay scarcer. However, Gilbert (1990) made three assumptions about specialization in predators. He stated that specialization is an evolutionary dead end and a mean of escaping competition. Specialists have also less opportunities of encountering reproductive sites and as a consequence allocate more resource to individual offspring than generalist. We tested this prediction with two ladybird species, a specialist, A. decempunctata, and a generalist, A. bipunctata. Some kinds of evolution of life history already happened in ladybirds. Among coleoptera, aphidophagous ladybirds are already considered as specialized. Because they exploit aphids, that are suboptimal prey for generalist arthropods such as several species of spiders, harvestmen, carabid and staphylinid beetles, cockroaches or ants (Toft, 2005). Adaptation to these prey has selected for fast growth (Hemptinne & Dixon, 1997) and shaped their reproductive behaviour (Dixon, 2000). Our results show that evolution of traits under specialization also happens at the species level. The specialist species, the ten-spot ladybird, is lighter than the two-spot ladybird and our experiments highlight that they lay on average fewer eggs per day. Moreover in terms of reproductive output during the entire life, the former is less fecund than the later, laying on average 700 eggs (Dixon, 2000) against 1100 eggs for two-spot (Dixon, 2000; Saâdaoui, 1996). However, relative to female body mass, ten spot eggs are heavier than those of the two-spot. That is, the former invests more in each individual offspring than the generalist confirming the third of Gilbert’s prediction (1990). This result is reinforced by the fact that ten-spot eggs are better provisioned in lipids, free carbohydrates and proteins than two-spot eggs (Sloggett & Lorenz, 2008), indicating that the former is well equipped to live in habitats with fewer opportunities of encountering prey and suitable oviposition sites than the generalist . Thus, as the specialist ten spot exploit less aphid species than the generalist (Hodek, 1993; Hodek & Honek, 1996; Honek, 1982, 1985; Honek & Rejmanek, 1982; Iperti, 1965; Majerus, 56 1994; Mills, 1981), it probably has less opportunities to oviposit along the season what drives its life history traits towards the production of fewer but bigger and better provisioned eggs. Nevertheless, A. decempunctata, even if it invests more in each eggs, lays finally less eggs per day and less eggs on its entire life, than A. bipunctata, and, in such case, theory predicts that it should lives longer as a greater longevity would increases the likelihood of finding suitable oviposition sites (Stearns & Hoekstra, 2000). It has already been demonstrated that the intensity of sexual activity negatively impact longevity: virgin females live longer than mated females (Dixon, 2000) and ladybirds whose reproduction has been discontinued by poor environmental conditions also tend to live longer (Ruzicka et al., 1981). Our results confirm this trend as A decempunctata has a life span 38 % longer than A. bipunctata. Our results also demonstrate that larval body mass is strongly correlated to eggs mass at birth: larval body mass represents 92% of egg mass for both species. By increasing the energy allocated to their eggs, ten-spot females produced bigger larvae than did similar-sized two-spot females. Moreover, when deprived from food these new born ten-spot larvae survived better than do two-spot larvae of the same weight. That is, the larvae of the specialist ladybird have more time to find their first prey, which may be useful if these preys are less clumped than those of the generalist. Although, A. decempunctata and A. bipunctata show a certain niche overlap the former is more specialized than the latter because it lives on trees, mainly oak. Our experiments have shown that this specialisation has led an adaptation of the life histories traits of the specialist species to its particular resources. Moreover, the fact that wild and laboratory reared individuals are as big tends to indicate that predators are habitat specialist. The intrinsic quality of their prey is unlikely to be a critical factor driving the evolution of their life history traits contrary to habitat characteristics. That is, they differ from herbivores, which are frequently food specialist because the quality of their food is more variable than animal tissues. 57 References Albuquerque, G.S., Tauber, M.J., & Tauber, C.A. (1997) Life-history adaptations and reproductive costs associated with specialization in predacious insects. Journal of Animal Ecology, 66, 307-317. 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Prentice Hall. 62 Chapitre 3 Comportement de recherche des larves et degrés de spécialisation pour la ressource chez les coccinelles 63 Résumé D’après la théorie d’Optimal Foraging, les organismes devraient exploiter les ressources qui leur procurent le meilleur bilan énergétique entre leur coût d’acquisition et leur apport énergétique. La spécialisation s’accompagne donc le plus souvent, chez les organismes, d’adaptations des traits morpho-physiologiques et comportementaux leur permettant d’optimiser ce bilan, ces adaptations étant d’autant plus importantes que les contraintes imposées par la ressource exploitée sont fortes. Dans le cas des coccinelles aphidiphages, leur spécialisation dans l’exploitation de colonies de pucerons, dont l’apparition est peu prévisible et la durée de vie très courte, a fortement influencé, comme pour d’autres insectes holométaboles, le comportement d’oviposition des femelles mais également l’évolution du comportement d’affouragement de leurs larves. Nous avons donc cherché à explorer de façon plus fine les comportements des larves de deux espèces de coccinelles aphidiphages, A. bipunctata (L.) et A. decempunctata (L.), phylogénétiquement proches mais exploitant une gamme de proies de largeur différente, afin de déterminer si leur différence de degré de spécialisation pour la ressource alimentaire avait entrainé une évolution différente des caractéristiques comportementales de leurs larves. La première étape de notre travail a consisté à vérifier sur le terrain que les caractéristiques des ressources exploitées par les deux espèces de coccinelles, notamment en termes de distribution spatiale, différaient réellement. La seconde, effectuée en laboratoire, concernait l’observation des caractéristiques comportementales d’affouragement des larves. Les échantillonnages effectués sur le terrain ont confirmé que, la coccinelle dont le spectre de ressource était le plus restreint, A. decempunctata, exploitait majoritairement des proies montrant une distribution peu agrégée tandis que la coccinelle plus généraliste, A. bipunctata, pouvait exploiter un éventail de proies dont les distributions étaient plus variées. Nos premiers résultats en laboratoire tendent à confirmer que cette différence de type de distribution des proies exploitées a entrainé une évolution différente dans le comportement des larves. En effet, à leur naissance, les larves d’A. decempunctata se montrent actives plus rapidement et sont plus mobiles que les larves d’A. bipunctata. Toutefois, les expériences menées sur les comportements de recherche des larves de quatrième stade n’ont, elles, pas fourni suffisamment d’informations pour trancher sur d’éventuelles différences entre espèces en lien avec la nature de la ressource exploitée. Des expériences complémentaires sont donc prévues. Mots clés : spécialisation, distribution des proies, activité, comportement de recherche 64 Introduction Chez les êtres vivants, l’efficacité dans l’acquisition des ressources est un enjeu majeur pour assurer au mieux sa valeur sélective. La théorie d’Optimal Foraging prédit qu’un organisme doit maximiser son gain énergétique en trouvant le meilleur compromis possible entre le coût d’acquisition d’une ressource et le gain énergétique qu’elle procure (Begon et al., 2006; Charnov, 1976a, b; Price, 1997; Pyke et al., 1977). C’est pourquoi, la spécialisation d’une espèce sur une ressource donnée va s’accompagner d’adaptations physiologiques, morphologiques et/ou comportementales spécifiques à l’exploitation de cette ressource (Futuyma, 2001; Futuyma & Moreno, 1988; Thompson, 1994). Ces adaptations vont être d’autant plus poussées que les contraintes imposées par l’organisation et la disponibilité de la ressource seront importantes. C’est le cas notamment chez les organismes exploitant une ressource à évolution rapide : l’apparition des patches de ressources et leur maintien dans le temps sont fortement imprévisibles et la recherche d’un patch convenable devient un véritable défi. Chez de nombreuses espèces d’insectes holométaboles exploitant une telle ressource, il a été démontré que ce défi était principalement relevé par les femelles (Janz, 2002). En effet, les larves ayant une capacité de dispersion limitée, c’est l’aptitude de la femelle à chercher et à sélectionner des patches convenables pour l’oviposition qui va être déterminante en termes de fitness (Kindlmann & Dixon, 1993). En conséquence, exploiter une ressource à évolution rapide a principalement influencé le comportement de ponte des femelles en augmentant l’efficacité et la qualité de leur prise de décision dans le choix du patch d’oviposition. Ce phénomène d’optimisation du choix spatiotemporel de ponte par la femelle induit par le caractère éphémère de la ressource exploitée a été bien décrit chez les insectes herbivores, souvent d’ailleurs dans le cadre d’une relation de coévolution avec leur plante hôte (Janz, 2002; Thompson, 1994), chez les parasitoïdes (Godfray, 1994) ou encore chez des insectes prédateurs exploitant une ressource fugace comme les coccinelles aphidiphages. Chez ces dernières, la femelle est en effet capable de détecter une « fenêtre de ponte » correspondant à la phase de croissance d’une colonie de pucerons pendant laquelle cette dernière offre des conditions adéquates au développement des larves en termes de quantité de proies et de compétition. Cette fenêtre s’ouvre avec une densité minimale de pucerons évaluée par la femelle coccinelle au travers d’un taux de 65 rencontre avec les proies (Dixon, 2000) et se ferme avec la détection par cette dernière de traces déposées par les larves sur le support végétal lorsqu’elles se déplacent. Ces traces prouvent que le patch est déjà occupé par des compétiteurs (Dixon, 2000; Doumbia et al., 1998; Frechette et al., 2004; Hemptinne et al., 1992). En étant ainsi capable de pondre pendant cette période propice de la vie d’une colonie de pucerons la femelle s’assure que les chances de survie de sa descendance sont optimales (Dixon, 2000; Frechette et al., 2004). Mais contrairement aux herbivores dont la ressource est immobile ou aux parasitoïdes qui vivent directement dans leurs hôtes, les larves d’insectes prédateurs ont encore, après leur éclosion, à chasser et à capturer les proies auprès desquelles elles ont été pondues. De plus, la vitesse de développement, le poids et la fécondité au stade adulte sont souvent positivement corrélés à la quantité de nourriture dont dispose la larve (Dixon, 2000; Kawauchi, 1979). Par voie de conséquence, l’efficacité avec laquelle les larves seront capables de se procurer des proies sera déterminante en termes de valeur sélective des individus adultes. Il est donc logique que, pour ces insectes prédateurs, exploiter une ressource si contraignante ait également favorisé, au stade larvaire, le maintien et la propagation des caractéristiques physiologiques et comportementales les mieux adaptées possibles à une exploitation optimale de leur ressource. Ainsi on observe, chez les coccinelles, que les larves montrent, tout au long de leur développement, un phototactisme positif et un géotactisme négatif (Banks, 1957; Dixon, 2000) et, comme plusieurs autres insectes prédateurs, elles suivent préférentiellement les nervures des végétaux lorsqu’elles se déplacent (Carter et al., 1984; Dixon, 1959, 1970; Dixon & Russell, 1972; Evans, 1976; Ferran & Dixon, 1993; Wratten, 1973). Ces comportements sont stratégiquement adaptés dans le sens où ils leur assurent le plus souvent de se retrouver à proximité de leurs proies (Dixon, 1959; Ferran & Dixon, 1993), les pucerons s’installant préférentiellement à l’apex des végétaux, sur les nervures principales des jeunes feuilles (Banks, 1957). De plus, dès l’éclosion les jeunes larves sont très actives : elles ne restent sur le chorion vide des œufs qu’environ 12 à 24h (Banks, 1957; Dixon, 1959) puis se dispersent et, même à jeun, sont mobiles pendant un peu plus de la moitié du temps qu’il leur reste à vivre (Banks, 1957). A une échelle plus fine ensuite, de nombreux auteurs ont observé que les larves affichent deux modes de recherche différents (Banks, 1957; Carter & Dixon, 1982; Dixon, 66 1959; Ferran & Dixon, 1993; Ferran et al., 1994; Murakami & Tsubaki, 1984; Nakamuta, 1985). Lorsqu’elle cherche à l’intérieur d’un agrégat de pucerons, donc d’une proie à l’autre, la larve a un comportement qualifié de « recherche locale » ou « intensive ». Ce mode de déplacement est caractérisé par une trajectoire très sinueuse, donc une vitesse angulaire importante et des arrêts fréquents, qui sont très souvent accompagnés de mouvements de balancement latéral de l’avant du corps permettant à la larve d’augmenter considérablement la surface explorée (Banks, 1957). Il est ainsi propice à la détection de proies se trouvant à proximité quasi immédiate de celle précédemment consommée (Banks, 1957). En revanche, lorsqu’elle n’a pas rencontré de proies depuis un certain temps, la larve adopte un comportement de recherche qualifié de « recherche extensive » (Carter & Dixon, 1982, 1984a; Nakamuta, 1982): sa trajectoire est moins sinueuse, sa vitesse linéaire plus importante, ses arrêts moins fréquents, plus longs et les comportements de balancement sont plus rares. La distance parcourue et la surface explorée sont ainsi plus importantes qu’en recherche locale. Ce mode de déplacement correspond à une recherche entre agrégats au sein d’un patch. Les larves de coccinelle ayant une mauvaise acuité visuelle (Banks, 1957), leur recherche de proie est principalement pilotée par des signaux chimiques, tels que le miellat secrété par les pucerons (Carter & Dixon, 1984b; Dixon, 2000; Ide et al., 2007; Nakamuta, 1984, 1985) mais seul le contact et surtout la consommation d’une proie déclenche le passage d’un mode de recherche extensif à un mode de recherche locale (Dixon, 2000; Nakamuta, 1984, 1985). Ainsi, le comportement de recherche des larves avec cette alternance dans les types de déplacement est clairement adapté à la prédation d’une ressource agrégée telles que les pucerons (Murakami & Tsubaki, 1984). Cependant, au sein même des coccinelles aphidiphages, plusieurs degrés de spécificité quant à la ressource existent, allant d’espèces très généralistes, exploitant un large éventail d’espèces de pucerons différentes sur un grand nombre de plantes hôtes, à des espèces très spécialisées, restreintes parfois à un seul type de plante hôte accueillant un nombre très limité d’espèces de pucerons (Hodek, 1973; Majerus, 1994). Or, à cette échelle de spécialisation plus fine au sein du groupe, certaines études suggèrent un pas évolutif supplémentaire avec l’apparition d’adaptations encore plus spécifiques des comportements de recherche d’espèces de coccinelles spécialisées dans l’exploitation de pucerons à la distribution particulière. Par exemple, Berthiaume et al. (2007) ont montré qu’Anatis mali (Say), prédatrice de pucerons des conifères, était plus efficace dans son affouragement et affichait un 67 comportement spécifique à la prédation du puceron Mindarus abietinus Koch sur les sapins Abies balsamea L. : les adultes A. mali utilisent leur tête pour écarter les aiguilles des bourgeons prêts à éclore, ce que ne fait pas Harmonia axyridis (Pallas), espèce plus généraliste, lorsqu’elle chasse sur les mêmes arbres. Et ce degré d’adaptation comportementale supplémentaire se manifesterait également, selon les auteurs, au stade larvaire, les larves d’A. mali étant plus actives dans la recherche et l’attaque de leurs proies que celles d’H. axyridis (Berthiaume et al., 2007) ce qui leur conférerait un avantage dans l’exploitation de ce puceron présent à faible densité sur sa plante hôte. Par ailleurs, l’existence d’un tel lien entre degré de spécialisation et comportement de recherche de la larve avait déjà été décrite chez des insectes phytophages. Gotthard et al. (2005) en étudiant les comportements d’affouragement de larves issues de deux populations différentes d’Oreina elongata Suffrian (Chrysomelidae), l’une exploitant deux plantes hôtes et l’autre spécialisée sur une seule des ces deux plantes, ont montré que les larves de la population à deux plantes hôtes avaient un comportement de recherche de nourriture plus actif, quittant plus souvent leur plante, que les celles de la population spécialisée sur une seule des plantes (Gotthard et al., 2005). Nous avons donc choisi d’explorer le lien pouvant exister entre le degré de spécialisation et le comportement de recherche des larves en étudiant deux espèces de coccinelles aphidiphages: la coccinelle à deux points, Adalia bipunctata (L.) et la coccinelle à dix points, A. decempunctata (L). En effet, ces deux espèces sont phylogénétiquement proches mais montrent des degrés de spécialisation différents. De plus, de précédents travaux nous ont déjà montré l’existence chez elles d’un lien entre leur degré de spécialisation et à la fois leur dynamique ovarienne (Ferrer et al., submitted) et leurs traits d’histoire de vie. A. bipunctata, généraliste, exploite plus d’une cinquantaine d’espèces de pucerons différentes dans des habitats et sur des plantes hôtes variés : herbes, arbustes et arbres (Honek, 1982, 1985; Honek & Rejmanek, 1982; Majerus, 1994; Hodek & Honek, 1996; Iperti, 1965; Mills, 1981). A. decempunctata est spécialisée dans les habitats forestiers, particulièrement sur les chênes, et son spectre de proies ne concerne qu’une dizaine d’espèces de pucerons (Hodek & Honek, 1996; Honek, 1985; Iperti, 1965; Majerus, 1994; Mills, 1981). Les femelles de l’espèce A. bipunctata vont donc chasser dans des habitats variés et pondre sur une large gamme de plantes hôtes, a contrario, les femelles d’A. decempunctata pondront principalement sur des colonies de pucerons localisées sur les feuilles d’arbre. La gamme potentielle de ressources exploitées par les larves des deux espèces va donc être différente. 68 Celle des larves d’A. decempunctata sera plus restreinte et probablement moins hétérogène que celle des larves de l’espèce généraliste, A. bipunctata. Notre étude comporte trois étapes: 1) vérifier sur le terrain si les pucerons de plantes herbacées généralement exploités par l’espèce généraliste et ceux des arbres exploitées par l’espèce généraliste et la spécialiste ont des distributions différentes. 2) examiner de possibles différences dans l’activité des larves néonates des deux espèces de coccinelles 3) explorer les comportements de chasse des larves de quatrième stade des deux espèces afin - de distinguer la présence éventuelle de différences dans les caractéristiques des déplacements (vitesse linéaire, vitesse angulaire, durée du comportement de recherche local) en lien avec le type de ressource exploitée par l’espèce - de déterminer si, comme suggéré par certains auteurs (Ferran et al., 1994), les larves de l’espèce généraliste présentent une plus grande variabilité interindividuelle dans leurs comportements qui leur permettrait d’être plus compétitives dans l’exploitation d’un panel de ressources à distribution hétérogène et variable à court terme, parfois même d’un patch à l’autre. Matériel et méthodes Distributions observées des pucerons sur les plantes hôtes Sur les arbres Des échantillonnages ont été effectués en Midi-Pyrénées (France) aux printemps 2006 et 2007. Plusieurs sites ont été choisis à proximité de Toulouse car ils offraient à la fois des champs, des prés et des bois. Les coccinelles étaient délogées de leur habitat par battage sur les branches d’arbres et tombaient dans un parapluie japonais. Quant au moins une coccinelle était capturée sur un arbre, dix feuilles de cet arbre étaient prélevées au hasard, le nombre de pucerons présents sur chaque feuille compté et une dizaine d’individus prélevés et conservés dans l’alcool pour identification ultérieure. Puis le contour de chaque feuille d’arbre était dessiné sur une feuille de papier. Les feuilles de papier étaient ensuite scannées et la surface précise des feuilles d’arbres calculée à l’aide du 69 logiciel Optimas (version 6.5) pour obtenir une indication sur la densité moyenne de pucerons dans l’arbre. Dans la végétation herbacée Dans la végétation herbacée, les collectes étaient effectuées à l’aide d’un filet de fauchage et à vue. Quand au moins une coccinelle était repérée à vue sur une plante, la colonie de puceron présente sur cette plante était localisée et sa densité estimée. Pour ce faire, étant donné que les pucerons sur les plantes herbacées étaient répartis en manchons sur les tiges, pour chaque colonie, la longueur du manchon et le diamètre de la section de tige étaient relevés. Puis vingt pucerons étaient prélevés au hasard et leur surface calculée pour obtenir une évaluation de la densité de pucerons présents. Ces pucerons étaient ensuite conservés dans l’alcool pour identification. Etant donné la rareté des captures de coccinelles sur plantes ces années là, il fut décidé d’enregistrer en supplément et de la même façon que décrite précédemment, les colonies de pucerons présentes sur d’autres plantes herbacées, même si aucune coccinelle n’y était trouvée au cours de notre campagne, à la condition qu’une des deux espèces de coccinelles au moins ait déjà était signalée sur cette plante dans les bases de données d’échantillonnage disponibles (Base Coccinula en Belgique et Ladybirds Survey au Royaume Uni, Ferrer et al., submitted). Identification des pucerons Les pucerons furent préparés selon la méthode décrite par Hille Ris Lambers (Blackman & Eastop, 1984) puis montés entre lame et lamelle. L’identification fut faite à l’aide de la clé d’identification de Heie (Heie, 1980). Activité des larves nouvellement écloses Des femelles de l’espèce A. bipunctata et de l’espèce A. decempunctata ont été isolées dans des boîtes plastiques propres garnies d’un morceau de papier filtre plié en accordéon sur lequel elles pouvaient pondre. Les pontes étaient ensuite récoltées et mises à incuber dans une enceinte climatisée réglée à 20°C avec une photopériode de 16h de lumière pour 8 h 70 d’obscurité. Puis, les œufs âgés d’un jour étaient délicatement prélevés, un à un, et isolés dans des boîtes de Petri de 5 cm de diamètre que l’on replaçait dans l’enceinte climatisée. Les boîtes de Petri étaient vérifiées toutes les demi-heures à l’approche de l’éclosion, ce qui permettait d’enregistrer la sortie de l’œuf avec une précision d’une demi-heure. Une fois éclose, la larve ne subissait aucune manipulation et restait sans nourriture. Les boîtes étaient contrôlées toutes les heures jusqu’au décès de la larve. Lors du contrôle des boîtes et quant les larves étaient encore en vie, l’activité et le comportement étaient enregistrés de la manière suivante : la larve reste sur le chorion, la larve demeure immobile dans la boîte ou la larve marche dans la boîte. L’activité des larves des deux espèces est comparée à l’aide de tests de Chi carré. Le premier test, portant sur la rapidité de dispersion après éclosion, compare, entre les deux espèces, le nombre de larves observées sur leur chorion et le nombre de larves l’ayant quitté (larves immobiles dans la boîte ou marchant) 5 heures après leur éclosion. Le second, relatif à la mobilité des larves, compare entre les deux espèces les nombres de larves immobiles dans la boîte et de larves qui marchent, à la 25ème heure de vie qui correspond approximativement à la moitié de l’espérance de vie des larves à jeun. Comportement de recherche des larves de 4ème stade Conditions d’élevage Des œufs de femelles d’A. bipunctata et d’A. decempunctata, élevées en laboratoire, ont été isolés et mis à incuber dans des boîtes plastique de 175-cm3 en enceinte climatisée avec une photopériode de 16h de lumière et 8h d’obscurité et à une température de 20°C. Les larves une fois écloses étaient élevées dans le même type de boîte, dans les mêmes conditions de lumière et de température, à raison de 10 à 15 individus par boîte. Elles étaient nourries ad libitum tout au long de leur développement avec du puceron du pois (Acyrthosiphon pisum Harris), élevé sur des fèves (Vicia faba L.). Quand les larves atteignaient le troisième stade, elles étaient placées individuellement dans des boîtes de Petri de 5cm de diamètre avec du puceron du pois à volonté. Les boîtes étaient alors contrôlées régulièrement et le moment de la mue enregistré avec une précision d’une heure. Pendant les 20 premières heures suivant sa mue, la larve de quatrième stade était toujours nourrie à volonté. A la fin de la 20ème heure, elle était transférée dans une nouvelle boîte de Petri propre sans nourriture et y restait pendant 71 6h. Ce protocole permettait d’harmoniser au maximum l’état des individus, avec des larves au même stade de développement et avec une faim standardisée. Les larves subissaient alors l’expérience de comportement puis étaient pesées et mesurées sous une loupe binoculaire munie d’un micromètre. Suivi des déplacements L’arène L’arène dans laquelle se déplaçaient les larves était constituée d’un couvercle de boîte de Petri de 9 cm de diamètre posé sur une plaque rectangulaire de plexiglas, éclairée par en dessous à l’aide d’une lampe froide. La larve pouvait ainsi marcher à plat sur le plexiglas mais aussi grimper sur le couvercle de la boîte de Petri et y marcher à l’envers. Ceci permettait de se rapprocher davantage de la situation naturelle des larves qui explorent le plus souvent le dessous des feuilles de végétaux pour trouver les pucerons. Un caméscope était fixé à 30 cm à la verticale au dessus de l’arène pour enregistrer les déplacements des larves. La plaque de plexiglas ainsi que le couvercle sur lesquels se déplaçaient les larves étaient nettoyés à l’alcool entre chaque expérience afin d’effacer les traces déposées par les larves lors de leur déplacement. Expérience Au départ, la larve était introduite délicatement dans l’arène à l’aide d’un pinceau fin. Trente secondes après son introduction l’enregistrement démarrait pour 1 min 30 s (« trajet avant puceron »). Les larves étant alors à jeun depuis 6h, le comportement observé devait correspondre à une phase de recherche extensive. Puis, un petit puceron était présenté à la larve à l’aide d’une épingle jusqu’à ce qu’elle s’en saisisse et le consomme. Quand elle avait terminé de manger, l’enregistrement redémarrait pendant 1 minute (« trajet post puceron »). La consommation de ce puceron devait déclencher chez la larve un comportement de recherche locale (Dixon, 2000; Nakamuta, 1984, 1985). On s’attendait alors à ce que le second enregistrement comporte la phase de recherche intensive ainsi que la transition entre les deux comportements avec le retour à un comportement extensif, la durée du comportement de recherche local ayant été évaluée par Banks (1957) à 15s pour des larves de quatrième stade d’Adalia bipunctata. 72 Analyse des trajets Les films ont été analysés, dans un premier temps, à l’aide du logiciel Ethovision® (Noldus), qui est un système de suivi vidéo pour l’enregistrement automatique et l’analyse des activités, des mouvements et des interactions sociales chez les animaux. Lors de l’enregistrement des trajets par le logiciel, le taux d’acquisition était d’un point toutes les 0.08 secondes. Les caractéristiques des déplacements examinées grâce à Ethovision étaient la vitesse linéaire moyenne, la vitesse linéaire maximum et la vitesse angulaire absolue. La vitesse linéaire moyenne exprimée en cm/s correspondait au rapport entre la longueur totale du trajet et sa durée. Elle comprenait donc les arrêts. La vitesse linéaire maximale correspondait à la distance maximale couverte par l’animal entre deux points successifs de son trajet. La vitesse angulaire absolue correspondait au rapport entre la somme des angles de changement de direction (exprimé en valeur absolue) existant entre les segments unitaires du trajet définis par les points successifs et la durée totale du trajet. Pour le calcul de ces paramètres, on a choisi de considérer un point toutes les 0.32 secondes. De plus, pour essayer de déterminer le moment où la transition entre comportement intensif et extensif intervient au cours du second enregistrement, celui-ci fut découpé en pas de 10s lors de son analyse. Les arrêts, leur durée et leur nature (statique ou avec mouvement de balayage latéral de l’avant du corps), étant également des informations capitales dans l’interprétation des déplacements des larves de coccinelles, un second programme fut utilisé pour l’analyse du trajet « post puceron ». Ce second programme indiquait, sur le déroulement de la minute de trajet, les phases de mouvement, les phases d’arrêts et leurs durées respectives. Afin de distinguer les phases d’arrêts et les phases de mouvement, en tenant compte de l’imprécision dans la détection du centre de gravité de l’animal et du bruit inhérent au programme de poursuite automatique, ce programme utilisait, conformément à la méthode préconisée par Collins et al. (Collins et al., 1995), deux types de filtres. Un premier filtre prenait en compte la distance parcourue entre deux points successifs pour séparer les phases d’arrêt des phases de mouvement: si cette distance était inférieure ou égale à 0,5mm, alors on considérait que la larve était dans une phase d’arrêt ; si elle était supérieure on considérait qu’elle était en phase de mouvement. Un deuxième filtre prenait en compte la durée des phases : si la durée de la phase détectée était inférieure ou égale à 0,96 sec alors on considérait 73 que la larve n’avait pas quitté la phase dans laquelle elle était auparavant. Ce filtre permettait donc d’éliminer les arrêts ou les mouvements de très courte durée. La nature de chaque arrêt détecté par ce second programme (statique ou avec mouvements de balancement) était ensuite caractérisée à l’œil par visionnage des vidéos. Comportement extensif avant la consommation du puceron: Le poids des larves est comparé entre les deux espèces par un test t de Student et leur taille par un test de Wilcoxon. Les vitesses linéaires moyennes, les vitesses linéaires maximum et les vitesses angulaires sont comparées entre les deux espèces à l’aide de deux ancova l’une ayant comme covariable le poids de la larve et la seconde, sa taille. Effet de la consommation du puceron et transition entre comportement intensif et extensif Pour chaque type de vitesse, vitesse linéaire et vitesse angulaire, les valeurs des vitesses enregistrées avant la consommation du puceron et aux différents pas de temps après la consommation du puceron sont comparées à l’aide d’une anova à mesures répétées (le facteur individu étant le facteur répété) et à deux facteurs, le facteur espèces et le facteur temps. Pour déterminer quels pas de temps diffèrent, des tests post-hoc sont réalisés. Des tests de Fisher sont réalisés aux différents pas de temps pour comparer entre les deux espèces les variances existant dans les valeurs des vitesses linéaires et des vitesses angulaires. La distribution temporelle des arrêts au cours de la minute « post-puceron » ainsi que la proportion d’arrêts statiques et d’arrêts avec balayage sont comparés entre les deux espèces à l’aide d’un test de Chi carré. Les durées moyennes par individus des arrêts sont comparées, également entre les deux espèces, à l’aide d’un test t de Student, puis, la durée moyenne par individu des arrêts statiques et avec balayage sont comparés séparément entre les deux espèces à l’aide d’un test de Wilcoxon. 74 Résultats Distributions observées des pucerons sur les plantes hôtes Sur les arbres Les pucerons furent assez rares en 2006 et 2007 et, par conséquent, les coccinelles également. Ainsi, en 2006, des coccinelles ne furent capturées que sur deux espèces différentes d’arbres : le charme commun (Carpinus betulus L.) et le tilleul à petites feuilles (Tiliae cordata Mill.). En 2007, les échantillonnages furent fructueux sur huit espèces d’arbres différentes : sur les même espèces de charme et de tilleul qu’en 2006 mais également sur un noisetier commun (Corylus avellana L.), un érable plane (Acer platanoides L.), un érable sycomore (Acer pseudoplatanus L.) et un érable champêtre (Acer campestre L.) ainsi que sur un chêne pédonculé (Quercus petraea Liebl.) et deux chênes verts (Quercus ilex L.). En 2006, les charmes (C. betulus) et les tilleuls (T. cordata) échantillonnés étaient chacun infestés par une seule espèce de pucerons, respectivement, Myzocallis carpini (Koch) pour le charme et Eucallipterus tiliae (L.) pour le tilleul. En 2007, sept espèces de pucerons différentes furent identifiées sur les cinq genres d’arbres échantillonnés. Les charmes et le tilleul étaient infestés, comme en 2006, respectivement par M. carpini et E. tiliae. Le noisetier (C. avellana) était infesté par Myzocallis coryli (Goeze). Sur l’érable plane (A. platanoides) et l’érable sycomore (A. pseudoplatanus), on trouvait un puceron du genre Periphyllus sp. (van der Hoeven) tandis que sur l’érable champêtre (A. campestre) il s’agissait d’une espèce du genre Drepanosiphum sp. (Koch). Sur le chêne pédonculé (Q. petraea) était présente une espèce du genre Tuberculatus sp.(Mordvilko) tandis que sur les chênes verts (Q. ilex) on trouvait une espèce du genre Myzocallis sp.(Passerini). On observe que, dans les colonies de pucerons sur les arbres, les individus sont peu agrégés, la densité moyenne étant de 0.13 puceron au cm² (Tableau 1). Une feuille d’arbre infesté abrite ainsi en moyenne 3.7 pucerons (Tableau 1). En général, toutes les feuilles d’un arbre ne sont pas infestées mais seulement environ 70%; celles qui le sont n’accueillent que quelques pucerons positionnés près ou sur les nervures des feuilles et lorsque plusieurs individus sont regroupés, il s’agit le plus souvent d’une femelle fondatrice et de ses premiers descendants (observation personnelle). 75 Tableau 1: Densité moyenne de pucerons sur les arbres (pucerons/cm²) avec n = nombre d’arbres échantillonnés, S = surface moyenne d’une feuille en cm², Np/fe = nombre moyen de pucerons par feuille. 2006 Arbres Quercus ilex Quercus petreae Acer campestre Acer plata+pseudo Tilia cordata Carpinus betulus Corylus avellana n 2 4 - S 85.7 20.3 - 2007 Np/ fe 1.5 1.2 Densité 0.03 0.06 - n 2 1 1 2 1 3 1 S 5.9 18.6 25.1 56.9 46.1 15.1 28.3 Np / fe 1.3 1.7 0.8 6.3 13.3 1.7 5.3 Densité 0.22 0.09 0.03 0.12 0.29 0.10 0.19 Dans la végétation herbacée En 2006, aucun représentant des deux espèces de coccinelles étudiées ne fut capturé sur plante herbacée et en 2007, seulement quelques individus de l’espèce A. bipunctata le furent sur des orties (Urtica dioica L.) infestées par Aphis urticata (L.). Des colonies supplémentaires de pucerons furent alors relevées sur 5 autres espèces de plantes différentes (cf tableau 2) : Brachycaudus populi (del Guercio) sur Silene dioica L., Hypermyzus lactucae (L.) sur Sonchus arvensis L., Aphis fabae (Scopoli) sur Rumex acetosa L. et sur Galium aparine L., Brachycaudus cardui (L.) sur Dipsacus sp L., ces espèces étant répertoriées comme plantes hôtes possibles dans les bases de données d’échantillonnage de coccinelles précédemment citées. Dans le cas des herbacées, les colonies de pucerons étaient très denses, les individus se touchant les uns les autres le plus souvent. La situation était donc inverse à celle des arbres où les patches étaient étendus mais la ressource très dispersée. Il s’agissait ici de patches de quelques cm² (25.9 cm² en moyenne) (Tableau 2) mais avec une quantité de pucerons regroupés extrêmement importante (en moyenne 780 individus par patch) (Tableau 2). Tableau 2: Estimation du nombre moyen de pucerons dans un patch sur plantes herbacées avec N patches= nombre de patches échantillonnés, S puceron= surface moyenne d’un puceron, S patch= surface moyenne d’un patch. Plante herbacées N patches S puceron (mm²) S patch (mm²) Nombre pucerons / patch Urtica dioica Silene Sonchus Rumex Dipsacus Galium aparine 1 1 1 3 4 13 0.80 1.02 1.40 1.79 1.51 1.69 1000.31 188.50 753.98 869.17 6075 3767.50 76 627.63 184.63 537.82 486.93 2959.45 2226.40 Activité des larves nouvellement écloses Les relevés d’activités montrent que les larves d’A. decempunctata quittent plus tôt et plus fréquemment leur chorion que les larves d’A. bipunctata. En effet, presque la moitié des observations effectuées sur les larves d’A. decempunctata au cours des 8 première heures concernent des larves ayant quitté leur chorion contre environ seulement 10% des observations concernant A. bipunctata (Graphique 1A). Ainsi, 5 heures après leur éclosion, sur 45 larves d’A. decempunctata observées seulement 26 sont encore sur leur chorion tandis que sur 28 larves d’A. bipunctata observées, 25 le sont encore (Chi² = 8.14, p = 0.004). Le nombre d’enregistrements de larves se tenant sur leur chorion diminue ensuite pour les deux espèces. Mais, passé la 40ème heure, tandis que toutes les larves d’A. decempunctata ont définitivement quitté leur chorion, quelques larves d’A. bipunctata ne l’ont toujours pas fait (Graphique 1A). De plus, les larves d’A. decempunctata se montrent, globalement, plus actives que celle d’A. bipunctata. En effet, de la 9ème à la 40ème heure, parmi les larves ayant quitté leur chorion, le pourcentage d’observations d’A. decempunctata en train de marcher est supérieur à celui d’A. bipunctata (Graphique 1B). Les deux espèces atteignent leur maximum d’activité entre la 25ème et la 32ème heure, ce qui correspond à la moitié de leur espérance de vie à jeun, mais tandis qu’à ce maximum près de 83% des larves d’A. decempunctata sont actives, seulement 61% de celles d’A. bipunctata sont enregistrées en mouvement (Graphique 1B). Si l’on considère les larves observées à leur 25ème heure de vie, sur 49 larves d’A. decempunctata, 34 sont en train de marcher tandis que parmi les 31 larves d’A. bipunctata observées, seulement 12 se déplacent (Chi² = 7.31, p = 0.007). 77 Pourcentages 90 90 80 80 70 70 60 60 50 50 40 40 30 30 20 20 10 10 A2 0 0 A A10 1-8 9-16 17-24 25-32 33-40 41-48 49-56 57-64 B 1-8 9-16 17-24 25-32 33-40 41-48 49-56 57-64 Heures Heures Graphique 1: (A) Pourcentage d’observations de larves d’Adalia decempunctata (A10) et d’Adalia bipunctata (A2) sur leur chorion par tranche de 8h. (B) Pourcentage d’observations de larves d’Adalia decempunctata (A10) et d’Adalia bipunctata (A2) marchant, parmi celles qui ont quitté leur chorion par tranche de 8h. Comportement de recherche des larves de 4ème stade Comportement extensif avant la consommation du puceron: Les larves d’A. decempunctata sont plus légères (t = 2.67, df = 20, p = 0.018) et plus petites (W = 101, p = 0.008) que celles d’A. bipunctata (tableau 3). Cependant, les Ancova réalisées nous indiquent que le poids et la taille n’ont qu’une influence anecdotique sur la valeur des vitesses. Le poids n’influence pas significativement la vitesse linéaire moyenne (dl : 1, 19, F = 3.99, p = 0.060) mais il influence la vitesse linéaire maximum (dl : 1, 19, F = 4.65, p = 0.044), tandis que la taille a un effet significatif sur la vitesse linéaire moyenne (dl : 1, 19, F = 4.50, p = 0.050). Toutefois, les interactions entre le poids et l’espèce et entre la taille et l’espèce ne sont jamais significatives : le poids et la taille, quant ils ont un effet, influencent les vitesses de la même façon chez les deux espèces. Les vitesses de déplacements des larves en comportement extensif ne diffèrent pas significativement entre les deux espèces qu’elle que soit la covariable considérée dans l’analyse (Ancova avec le poids comme covariable : vitesse linéaire moyenne dl : 1, 19, F = 0.08, p = 0.776 ; vitesse linéaire maximum dl : 1, 19, F = 2.02, p = 0.171 ; dl : 1, 19, F = 0.32, p = 0.578 ; Ancova avec la taille comme covariable : vitesse linéaire moyenne dl : 1, 19, F = 0.085, p = 0.774 ; vitesse linéaire maximum dl : 1, 19, F = 1.71, p = 0.207 ; dl : 1, 19, F = 0.34, p = 0.564 ). 78 Les variances observées au sein des deux espèces pour les vitesses linéaires moyennes ne sont pas non plus statistiquement différentes (dl : 10,10, F = 2.12, p = 0.252). En revanche, les variances des vitesses angulaires sont significativement différentes (dl : 10,10, F = 0.16, p= 0.008) avec une plus grande variabilité des valeurs de ce paramètre au sein des individus de l’espèce A. decempunctata. De même, au niveau de la vitesse linéaire maximum, les variances observées sont différentes (dl : 10, 10, F = 6.38, p= 0.007), la plus grande variabilité se rencontrant cette fois chez A. bipunctata. Tableau 3 : Moyennes et écarts types du poids, de la taille, et des valeurs de vitesse linéaire, vitesse angulaire et vitesse maximale en comportement de recherche extensif des larves de quatrième stade d’Adalia decempunctata (n=11) et d’Adalia bipunctata (n=11). Paramètres A2 A10 Poids (mg) Taille (mm) Vitesse linéaire (cm/s) Vitesse angulaire (degree/s) Vitesse maximale (cm/s) 5.74 ± 1.35 3.38 ± 0.33 0.80 ± 0.29 39.84 ± 12.16 1.81 ± 0.69 4.54 ± 0.63 3.04 ± 0.20 0.77 ± 0.20 45.44 ± 30.00 1.51 ± 0.27 Effet de la consommation du puceron et transition entre comportement intensif et extensif L’enregistrement du trajet d’une des larves de l’espèce A. bipunctata n’a pas pu être exploité sur l’intégralité de la minute « post-puceron », les données relatives à cet individu ont donc été retirées du jeu de données dans les analyses et les graphiques qui suivent. Les résultats de l’anova à mesures répétées réalisée sur la vitesse linéaire nous indiquent que cette dernière ne diffère pas significativement entre les deux espèces (dl : 1, 132, F = 3.02, p = 0.085) mais elle varie au cours du temps (dl : 6, 132, F = 5.85, p < 0.000) et ce de façon similaire chez les deux espèces (effet interaction pas de temps * espèce : dl = 6, 132, F = 0.10, p = 0.996). Les tests post-hoc nous montrent que c’est la vitesse en comportement extensif qui est significativement différente des vitesses enregistrées après consommation du puceron qui elles, par contre, sont statistiquement identiques sur l’intégralité de la minute du trajet (Graphique 2). Un constat identique peut être réalisé concernant la vitesse angulaire. On n’observe pas d’effet de l’espèce sur les valeurs de vitesses angulaires (dl : 1, 132, F = 2.62, p = 0.108), par contre, on observe une variation significative selon les pas de temps (dl : 6, 132, F = 417, p = 79 0.001). Cette variation se produit de façon similaire chez les deux espèces (dl : 6, 132, F = 0.24, p = 0.962). Ici encore, c’est la vitesse enregistrée en comportement de recherche extensif qui diffère des autres, significativement identiques (Graphique 3). 1 0,9 0,8 0,7 a a 0,6 b 0,5 0,4 b 0,3 b b b b b b b 10-20 20-30 b b A10 b A2 0,2 0,1 0 extensif 0-10 30-40 40-50 50-60 puceron Graphique 2 : Evolution de la vitesse linéaire (cm/s) avant et après la consommation d’un puceron pour les deux espèces A.bipunctata (A2, n = 10) et A. decempunctata (A10, n = 11). Les différences significatives entre les vitesses (tests post-hoc) sont indiquées par différentes lettres. 160 140 120 100 80 60 d d d d d d d d d d A10 A2 d d c 40 c 20 0 extensif 0-10 10-20 20-30 30-40 40-50 50-60 puceron Graphique 3 : Evolution de la vitesse angulaire (degrés/s) avant et après la consommation d’un puceron pour les deux espèces A.bipunctata (A2, n = 10) et A. decempunctata (A10, n = 11). Les différences significatives entre les vitesses (tests post-hoc) sont indiquées par différentes lettres. Les comparaisons de variance entre espèces pour chaque pas de temps ne nous indiquent pas l’existence d’une plus grande variabilité chez les larves d’A2 que se soit en termes de vitesse linéaire ou de vitesse angulaire (Tableau 4). 80 Tableau 4 : Résultats des tests de Fisher (valeur de F et valeur de p) comparant entre les deux espèces de coccinelles pour chaque pas de temps l’homogénéité des variances des vitesses linéaires et des vitesses angulaires. Pas de temps (s) 0-10 10-20 20-30 30-40 40-50 50-60 F 1.06 0.76 0.31 1.22 0.84 2.54 p 0.916 0.691 0.088 0.758 0.802 0.161 F 1.97 0.84 1.07 2.27 0.66 0.46 p 0.305 0.804 0.910 0.218 0.540 0.253 après consommation du puceron Vitesse linéaire Vitesse angulaire Concernant les arrêts réalisés par les larves au cours de la minute suivant la consommation du puceron, le nombre total d’arrêts marqués par les larves d’A. decempunctata dans le premier pas de 10 secondes suivant immédiatement la consommation du puceron est au moins le double du nombre d’arrêts enregistrés dans les suivants, avec une proportion d’arrêts avec mouvements de balayage de l’avant du corps très importante. Toutefois ce patron ne se retrouve pas aussi clairement chez les larves d’A.bipunctata (graphiques 4), le nombre d’arrêts dans les 10 premières secondes n’étant par exemple pas plus élevé que celui entre la 30ème et la 40ème seconde (graphiques 4). Malgré ces différences observées, la distribution temporelle des arrêts, tous types confondus, au cours de la minute n’est en fait pas significativement différente entre les deux espèces (dl = 5, Chi² = 4.71, p = 0.453). De plus, les deux espèces ont des proportions d’arrêts avec balayage et d’arrêts statiques sur l’intégralité de la minute d’enregistrement comparables (dl = 1, Chi² = 1.42, p = 0.233). A10 Nombre de stops A2 14 14 12 12 10 10 8 8 statique 6 6 balancement 4 4 2 2 0 0 0-10 10-20 20-30 30-40 40-50 50-60 0-10 Pas de temps 10-20 20-30 30-40 40-50 50-60 Pas de temps Graphique 4 : Nombre et nature des arrêts (statique ou avec balancement latéral de l’avant du corps) aux différents pas de temps après la consommation du puceron pour A. decempunctata (A10) et A. bipunctata (A2). 81 La distribution cumulée des durées des arrêts (Graphique 5) montre que les larves d’A. bipunctata ont tendance à marquer des arrêts plus courts que celles d’A. decempunctata, et en effet, chez les individus ayant réalisé des arrêts au cours de la minute d’enregistrement, la durée moyenne de ces arrêts est de 5.44 secondes pour A. decempunctata et de 3.80 secondes pour A. bipunctata. Mais cette différence n’est cependant pas statistiquement significative (t = -1.01, df = 17, p = 0.324). Si l’on considère les deux types d’arrêts séparément, le constat est identique. La durée moyenne par individu des arrêts statiques est de 9.22 secondes chez A. decempunctata et de 5.06 secondes chez A. bipunctata mais la différence n’est pas significative (W = 23.5, p = 0.643). De même la durée moyenne par individu des arrêts avec balayage est de 3.68 secondes chez A. decempunctata et de 2.33 secondes chez A. bipunctata, mais il n’y a pas de différence statistiquement significative (W = 10, p = 0.075). 100 % cumulé 90 80 A10 70 A2 60 50 40 30 20 10 0 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 22 24 Durée des arrêts (s) Graphique 5 : Pourcentage cumulé du nombre d’arrêts en fonction de leur durée pour A. decempunctata (A10) et A. bipunctata (A2). 82 Discussion Selon Bell (1991), un patch est une aire où la probabilité de rencontrer une ressource est importante, entourée d’aires où cette probabilité est nulle ou proche de zéro. Cette définition purement spatiale, sans dimension temporelle, parait bien adaptée aux cas des larves de coccinelles qui ont une mobilité restreinte. Or, de ce point de vue, la distribution des proies au sein des patches diffèrent fortement entre la végétation herbacée et les arbres. En effet, le patch en végétation herbacée sera constitué le plus souvent d’une seule colonie de pucerons sur une plante, plus rarement de deux ou trois puisque les plantes sauvages d’une même espèce sont relativement espacées. Or, chez les plantes herbacées infestées que nous avons examinées lors de notre étude, nous nous sommes toujours trouvés face à des colonies de puceron très compactes, avec sur quelques cm², plusieurs centaines d’individus agrégés. La ressource à l’échelle d’une larve au sein d’un tel patch est donc regroupée en peu de foyers de haute densité. A contrario, sur les arbres, les pucerons sont plus espacés sur les feuilles, les densités enregistrées au cm² sont plus faibles que sur les plantes herbacées : d’après les valeurs moyennes que nous avons relevées, pour rencontrer autant de pucerons sur un arbre que sur une tige de plante herbacée, une coccinelle devrait visiter près de 211 feuilles. Toutefois, les feuilles étant en général proches les unes des autres et reliées en continu par les pétioles et branches, le patch à l’échelle de la larve peut être constitué du feuillage de plusieurs branches, voire de l’arbre en totalité. La quantité de proies disponibles dans le patch peut alors être identique ou même plus importante que sur une plante herbacée mais les proies y ont une distribution peu regroupée avec de multiples foyers de faibles densités. Les modes de distributions de la ressource au sein des deux types de patches diffèrent donc fortement. Ainsi, Adalia decempunctata étant inféodée aux habitats forestiers, la gamme de type de distribution de pucerons sur laquelle elle est susceptible de pondre apparaît plus homogène que celle d’A. bipunctata. Cette dernière exploitant et pondant sur des pucerons de plantes herbacées et d’arbres, ses larves seront confrontées à une plus grande variété de distributions, d’une agrégation très forte sur les herbes à une distribution plus dispersée sur les arbres. Notre première hypothèse sur les distributions différentes de la ressource exploitée par les larves des deux espèces semble donc confirmée par nos observations de terrain et ces différences nous paraissent bien de nature à induire, chez elles, des adaptations comportementales différentes. 83 Le patron d’activité des larves venant juste d’éclore tend à confirmer notre seconde hypothèse sur l’existence de différences dans l’activité des jeunes larves des deux espèces. En effet, nos résultats montrent que les larves d’A. decempunctata entament plus vite une phase de recherche de nourriture que celles d’A. bipunctata puisqu’elles se dispersent plus rapidement. Elles se montrent également plus actives au cours de leur vie : elles sont plus souvent enregistrées en train de marcher que les larves d’A. bipunctata. On peut donc légitimement s’attendre à ce que la distance couverte par une jeune larve d’A. decempunctata lorsqu’elle cherche de la nourriture soit supérieure à celle couverte par une larve d’A. bipunctata. De plus, les travaux menés précédemment (Chapitre 2) ont montré que les larves nouvellement écloses d’A. decempunctata, pour une même quantité de réserve énergétique, ont une autonomie à jeun plus importante que celles d’A. bipunctata. Ces qualités des larves d’A. decempunctata, à savoir une meilleure résistance au jeûne combinée à une activité de recherche plus intense cadrent donc bien avec une adaptation à la distribution, en général peu agrégée, des pucerons des arbres. L’interprétation des expériences réalisées sur les comportements de recherche des larves de quatrième stade s’avère, en revanche, plus complexe. Tout d’abord, en comportement de recherche extensif, on ne distingue pas de différence significative entre les deux espèces dans les paramètres de déplacement étudiés. Seule la variabilité interindividuelle de la vitesse angulaire diverge, mais cette différence ne se manifeste pas dans la direction attendue puisque c’est A. decempunctata, l’espèce exploitant la ressource la plus homogène en termes de distribution de proies, qui montre la plus grande variabilité entre les individus suivis. Ensuite, au niveau du comportement de recherche suivant la consommation d’une proie, on distingue clairement, d’après nos résultats, le passage à un comportement de recherche intensif chez les deux espèces juste après avoir fini de manger la proie. Cependant, le retour à un comportement de recherche extensif ne semble intervenir chez aucune des deux espèces dans le courant de la minute analysée. Nous ne sommes donc pas en mesure d’infirmer ou de valider notre troisième hypothèse de travail sur une transition entre recherche locale et extensive qui interviendrait plus rapidement chez l’espèce spécialiste des arbres A. decempunctata que chez A. bipunctata. La raison, à notre avis la plus probable, qui peut être avancée pour expliquer ce phénomène est que le temps du trajet « post-puceron » étudié s’est avéré trop court. En effet, l’âge de la larve (Dixon, 1959), le type de stimulus utilisé (Nakamuta, 1985) ainsi que le 84 temps de jeûne précédent l’expérience (Carter & Dixon, 1982) peuvent influencer la durée de leur comportement de recherche intensif. Or, pour des larves de quatrième stade consommant un puceron, comme dans notre expérience, certaines durées du comportement intensif enregistrées ont bien été inférieures à une minute: par exemple 15 secondes chez Adalia bipunctata L. par Banks (1957), environ 10 secondes pour des larves de l’espèce Coccinella septempunctata L. à jeun depuis 5 heures et d’environ 23 secondes pour d’autres à jeun depuis 25 heures (Carter & Dixon, 1982). Mais d’autres auteurs ont fait état de durées beaucoup plus importantes comme Murakami & Tsubaki (1984) qui relèvent une durée de 95 secondes pour des larves de C. septempunctata à jeun depuis 24 heures, Hunter (Hunter, 1978) qui enregistre 3 minutes pour l’espèce Hippodamia convergens De Geer ou encore Ferran et al. (1994) pour qui les larves de quatrième stade de Semiadalia undecimpunctata Schn. mettent 6 minutes à revenir à un comportement extensif. Il apparaît donc plausible que la durée d’enregistrement d’une minute ait été trop courte pour étudier la transition entre les comportements de recherche locale et extensive. L’acquisition de ressources est un enjeu majeur dans la vie de la majorité des organismes et, depuis Mac Arthur & Pianka (Mac Arthur & Pianka, 1966) le raisonnement général est que plus la nourriture (ou l’énergie) est acquise efficacement, meilleure est la fitness de l’organisme (Price, 1997). Dans cet esprit, la sélection naturelle favoriserait les individus qui acquièrent leur nourriture de façon optimale, c’est-à-dire selon la théorie d’Optimal Foraging, en adoptant le meilleur compromis entre coût d’acquisition et bénéfices de la ressource (Stephens & Krebs, 1986). Or, dans ce processus d’acquisition de ressource, la recherche des patches est une étape cruciale et donc, atteindre ce compromis, nécessite une optimisation des comportements de recherche adoptés par les organismes (Begon et al., 2006). C’est pourquoi, la spécialisation sur une ressource s’accompagne également le plus souvent chez les organismes d’adaptations spécifiques des comportements de recherche visant à augmenter encore leur efficacité dans l’exploitation de cette ressource. Ces comportements de recherche chez les insectes prédateurs spécialisés que sont les coccinelles aphidiphages sont relativement bien étudiés (Dixon, 2000; Ferran & Dixon, 1993). Les études ont montré que le comportement d’affouragement des adultes est proche de celui prédit par la théorie d’Optimal Foraging (Dixon, 2000). De même, celui des larves est assez bien prédit par un modèle basé sur la théorie d'Optimal Foraging (Dixon, 2000; Ferran & Dixon, 1993) et la nature adaptative de leur comportement de recherche à la distribution 85 agrégée des proies sur lesquelles ils sont spécialisés a également été clairement démontrée (Murakami & Tsubaki, 1984). Toutefois, notre étude a permis de montrer que même au sein de leur groupe de proies, les pucerons, des modes de distributions différents existent. Or, plusieurs auteurs ont déjà mis en lumière, chez les stades adulte et larvaire de certaines espèces d’insectes très spécialisées, l’existence d’aptitudes et de comportements particuliers dans l’exploitation de la ressource, que ce soit chez des phytophages (Gotthard et al., 2005), ou encore au sein même des coccinelles aphidiphages avec des espèces comme Aphidecta obliterata (L.) spécialisée sur un puceron de l’épicéa (Timms et al., 2008) et Anatis mali (Say) spécialisée sur un puceron des sapins (Berthiaume et al., 2007). Des espèces plus généralistes, comme Adalia bipunctata, ou à la fois généralistes et exotiques, comme Harmonia axyridis (Pallas), ne possèdent pas ces comportements particuliers (Berthiaume et al., 2007; Timms et al., 2008). Il est donc clair qu’une spécialisation très forte de certaines espèces, même appartenant à des groupes déjà spécialisés, entraîne des adaptations supplémentaires des comportements de recherche. Ici, nous comparons deux espèces phylogénétiquement proches d’insectes prédateurs déjà spécialistes, dont les habitats se chevauchent (Ferrer et al., submitted) mais qui montrent des degrés différents dans cette spécialisation. Ce faisant, nous souhaitons franchir un pas supplémentaire en montrant que des adaptations comportementales spécifiques existent même à un degré de spécialisation plus nuancé que dans les études citées précédemment. Or, nos résultats concernant les différences dans l’autonomie et l’activité de recherche des larves nouvellement écloses plaident déjà en ce sens. C’est pourquoi il apparaîtrait intéressant de persévérer dans cette étude en renouvelant les expériences sur les larves de quatrième stade avec un suivi plus long des comportements après consommation de la proie et éventuellement un effectif plus étoffé. Il reste toutefois également nécessaire de signaler le pouvoir de prédiction limité de telles études avec des résultats obtenus sur surface plane et en boîte de Petri, quant aux réponses comportementales des coccinelles en milieu naturel. De nombreux travaux ont en effet montré que la structure de la plante restait d’une importance capitale dans la détermination des comportements d’affouragement de ces animaux (Banks, 1957; Carter et al., 1984; Dixon, 1959, 2000; Vohland, 1996), des expériences complémentaires sur plantes seraient donc également pertinentes. 86 Références Banks, C.J. (1957) The behaviour of individual coccinellid larvae on plants. British Journal of Animal Behaviour, 5, 12-24. Begon, M., Townsend, C.R., & Harper, J.H. (2006) Ecology. From Individuals to Ecosystems. Fourth Edition. Blackwell Publishing. Berthiaume, R., Hebert, C., & Cloutier, C. 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Nous avons donc cherché à mieux comprendre la nature de la spécialisation alimentaire observée chez deux espèces de coccinelles aphidiphages dont les caractéristiques écologiques nous sont bien connues : A. bipunctata et A. decempunctata. Si la qualité nutritionnelle des proies joue un rôle déterminant dans la définition du spectre de ressources qu’elles exploitent dans la nature, A. decempunctata, espèce spécialisée, devrait se montrer plus performante lorsqu’elle consomme une proie de sa gamme naturelle qu’A. bipunctata, espèce plus généraliste. Elle devrait également réaliser de meilleures performances sur ses proies spécialisées que sur des proies externes à sa gamme. A. bipunctata devrait, elle, montrer des performances comparables sur toute la largeur de son spectre de proies. Or, même si les performances similaires de l’espèce généraliste sur les différentes proies sont confirmées par nos résultats, les prédictions concernant A. decempunctata, l’espèce spécialiste, elles, ne le sont pas. En effet, ses larves ne se montrent pas plus performantes en termes de taux de croissance sur un des pucerons de prédilection de l’espèce que les larves d’A. bipunctata. De plus, les femelles ont de meilleures performances de pontes sur des pucerons de plantes herbacées externes à leur spectre naturel que sur le puceron qu’elles consomment habituellement dans la nature et le degré de maturation de leurs oocytes après deux semaines de consommation de ces pucerons extérieurs à leur régime alimentaire naturel mais inclus dans celui de l’espèce généraliste, est aussi avancé que celui des femelles A. bipunctata. Ainsi, bien que le nombre d’espèces de proies testées ne soit pas exhaustif, nos résultats tendent à prouver que la spécialisation alimentaire observée chez A. decempunctata résulterait plus d’une spécialisation pour l’habitat, qui limiterait la gamme de proies rencontrées et donc consommées, que de l’influence de la qualité nutritionnelle des proies. Mots clés : spécialisation alimentaire, qualité de la proie, taux de croissance, ponte 93 Introduction La spécialisation écologique est, le plus souvent, définie comme une réduction de l’amplitude de la niche écologique d’une espèce, d’une population ou d’un organisme (Futuyma, 2001; Futuyma & Moreno, 1988). Cette spécialisation est supposée intervenir quand elle assure au spécialiste une exploitation plus efficace de son environnement (Fox & Morrow, 1981) et donc une meilleure fitness (Ferry-Graham et al., 2002). Or, comme le gain énergétique est un des déterminants essentiels de la fitness d’un organisme, la majorité des études sur le phénomène de spécialisation chez les animaux s’est concentrée sur la spécialisation alimentaire (Ferry-Graham et al., 2002; Sih & Christensen, 2001). En effet, d’après « l’Optimal Diet Theory », les organismes doivent préférer consommer les ressources, les proies, qui leur procurent le plus d’énergie par unité de temps (Ferry-Graham et al., 2002; Futuyma, 2001; Sih & Christensen, 2001). Or, par sa spécialisation sur une ressource trophique particulière, un organisme augmente son efficacité dans l’exploitation de cette ressource, au travers le plus souvent d’adaptations comportementales (Bernays, 2001; Ferry-Graham et al., 2002; Futuyma, 2001; Futuyma & Moreno, 1988), morphologiques ou physiologiques (Futuyma & Moreno, 1988; Tauber & Tauber, 1987) et optimise ainsi le gain énergétique qu’elle lui procure. L’importance de la qualité nutritionnelle de la ressource dans ces phénomènes de spécialisation alimentaire a fait l’objet d’un grand nombre d’études chez les herbivores, à cause principalement de la fréquence et de l’intensité des défenses chimiques des plantes (Crawley, 1983; Freeland & Janzen, 1974; Harborne, 1977; Rosenthal & Janzen, 1979). En effet, en raison de ces systèmes de défense, la spécialisation alimentaire s’accompagne souvent chez les herbivores d’adaptations physiologiques particulières agissant sur l’efficacité de digestion, d’assimilation, et donc modifiant le degré de profitabilité nutritionnelle de la plante consommée (Feeny, 1975). En revanche, l’influence de la qualité intrinsèque des proies dans la spécialisation alimentaire des carnivores a été beaucoup moins explorée, les tissus animaux étant supposés d’une composition plus homogène et moins défendus chimiquement (Begon et al., 2006; Bristow, 1988; Stephens & Krebs, 1986). Ce constat est particulièrement vrai chez les insectes. En effet, les hiérarchies de préférences des phytophages pour les plantes hôtes, et de fait, leur degré de spécialisation alimentaire, ont été largement étudiés (Futuyma & Peterson, 1985; Jaenike, 1990; Thompson, 94 1994) ainsi que l’existence d’adaptations physiologiques sous-tendant cette spécialisation. Ces études ont d’ailleurs été, le plus souvent, réalisées dans le cadre de travaux sur la coévolution entre défenses chimiques des plantes et capacités de détoxification des phytophages ainsi que sur les phénomènes de spéciation pouvant découler de cette « course à l’armement » (Bernays & Chapman, 1978; Dethier, 1954; Ehrlich & Raven, 1964; Feeny, 1975; Futuyma & Moreno, 1988; Futuyma & Peterson, 1985; Thompson, 1994). En revanche, les études sur la spécialisation alimentaire des insectes prédateurs et sur la qualité nutritionnelle de leurs proies, sont beaucoup moins fréquentes (Albuquerque et al., 1997; Bristow, 1988; Tauber & Tauber, 1987). Seule une catégorie d’insectes prédateurs fait exception : les auxiliaires de lutte biologique tels que les syrphes, les chrysopes ou les coccinelles aphidiphages. En effet, en raison principalement de leur potentiel en lutte biologique, un champ un peu plus large d’étude sur le régime alimentaire de ces prédateurs s’est ouvert (Gilbert et al., 1994; Hodek, 1993; Hodek & Honek, 1996; Kalushkov, 1998; Tauber & Tauber, 1987). Or, ces études ont révélé que, à l’instar des plantes pour les phytophages, toutes les proies n’étaient pas de même qualité pour les prédateurs. L’intérêt pour la spécificité alimentaire des coccinelles, par exemple, s’est développé dès le milieu du 20ème siècle (Dixon, 2000) et a mis en lumière que toutes les espèces de pucerons n’avaient pas la même qualité alimentaire pour les différentes espèces de coccinelles. Trois grand types de proies ont ainsi pu être définis: les proies dites « essentielles », qui permettent à l’insecte prédateur de soutenir son développement larvaire et sa reproduction au stade adulte, les proies dites « alternatives » qui lui apporte assez d’énergie pour survivre mais pas pour se développer ou se reproduire et les proies « toxiques » (Dixon, 2000; Evans et al., 1999; Hodek & Honek, 1996). A quelle catégorie appartient telle ou telle espèce de puceron dépend de l’espèce de coccinelle considérée. En effet, certaines espèces de pucerons de bonne qualité pour une coccinelle peuvent s’avérer de mauvaise qualité ou toxique pour une autre et inversement (Dixon, 2000). Cependant, une grande majorité de ces études sur la spécificité alimentaire des coccinelles est caractérisée par une vision très statique de l’alimentation et étudie la qualité alimentaire des proies hors du contexte écologique des espèces. En effet, la plupart de ces travaux reposent sur l’élevage, en laboratoire, de cohortes d’individus, nourries chacune sur différentes espèces de pucerons, parfois même sur des 95 espèces de pucerons n’occupant pas le même habitat naturel que la coccinelle étudiée. Les performances de croissance et de reproduction réalisées par ces individus servent alors d’indicateurs de la qualité de la proie consommée. En conséquence, ces études servent principalement à cataloguer les proies essentielles, alternatives ou toxiques mais le lien entre la qualité alimentaire de ces proies et le degré de spécialisation observé chez l’espèce de coccinelle étudiée est rarement discuté. Pourtant, la liste des proies essentielles établie, dans ce type de travaux, pour une coccinelle ne concorde que très rarement avec les observations du spectre de proies qu’elle consomme réellement dans la nature, qui est souvent bien plus restreint (Hodek, 1973; Kalushkov, 1998; Majerus, 1994). Donc, ce lien entre qualité des proies pour une espèce de coccinelle et degré de spécificité qu’elle montre pour sa ressource alimentaire n’est pas univoque. C’est pourquoi, nous avons choisi ici une approche plus dynamique dans l’étude de la spécialisation alimentaire de ces insectes prédateurs en étudiant deux espèces de coccinelles aphidiphages dont les caractéristiques écologiques, notamment en termes de spécialisation, nous sont bien connues. En comparant les deux espèces, Adalia decempunctata (L.) et Adalia bipunctata (L.), qui sont phylogénétiquement proches mais qui montrent des degrés de spécialisation écologique différents, nous espérons mieux comprendre l’impact de la qualité intrinsèque des proies dans le degré de spécificité pour la ressource de ces deux coccinelles. En effet, grâce à la littérature (Hodek, 1993; Honek, 1985; Honek & Rejmanek, 1982; Iperti, 1965; Majerus, 1994) et à de précédents travaux (chapitre 1), le spectre naturel de proies des deux espèces mais également leur habitat et les plantes hôtes occupées, donc leurs degrés de spécialisation écologique, sont maintenant bien décrits. A. bipunctata est une espèce plus généraliste avec une largeur de niche plus importante, un spectre de proies plus étendu qu’A. decempunctata qui est spécialisée dans l’exploitation d’habitats arborés et possède une gamme naturelle de proies restreinte à quelques pucerons des arbres. Nous avons également étudié l’influence de leur degré de spécialisation écologique sur leur dynamique ovarienne (Chapitre 1), leurs traits d’histoire de vie (Chapitre 2) et même le comportement d’affouragement de leurs larves (Chapitre 3) et noté l’existence d’adaptations en lien avec leur degré de spécificité pour leur ressource. Toutes ces informations nous permettront donc d’avoir une vision plus large de la spécialisation écologique observée et de donner une dimension supplémentaire à l’interprétation d’expériences menées sur la qualité alimentaire de différentes espèces de pucerons pour ces deux coccinelles. 96 En cas de spécialisation, les prédictions généralement formulées sont que l’organisme spécialisé devrait se montrer comportementalement ou métaboliquement plus efficace dans l’exploitation de sa ressource qu’un organisme généraliste (Dethier, 1954; Ferry-Graham et al., 2002; Fox & Morrow, 1981; Futuyma, 2001; Slobodkin & Sanders, 1969). Le prix de cette spécialisation serait alors une perte de son efficacité dans l’exploitation d’autres ressources (Futuyma & Moreno, 1988; Mac Arthur, 1972; Thompson, 1994). En revanche, un généraliste est sensé avoir des performances sensiblement égales sur l’ensemble de ses ressources. Ainsi, dans les cas de spécialisation alimentaire, si la qualité nutritionnelle de la ressource joue un rôle prépondérant dans la détermination du degré de spécialisation des organismes, on peut donc s’attendre à ce que ces prédictions se traduisent : - par de meilleures performances de croissance et de reproduction du spécialiste quand il consomme sa ou ses ressources alimentaires spécifiques que celles réalisées par un généraliste sur ces mêmes ressources - par un impact négatif de la consommation d’une ressource externe à son spectre naturel sur les performances d’un spécialiste - par des performances similaires du généraliste lors de la consommation de ses différentes ressources. Ces prédictions ont souvent été vérifiées pour les phytophages, la toxicité des plantes garantissant à la qualité nutritionnelle de la ressource un rôle primordial dans la spécialisation alimentaire (Jaenike, 1990). Malgré la rareté des études, ces prédictions ont également été confirmées chez quelques insectes prédateurs et l’existence de trade-offs dans les performances de spécialistes sur différentes ressources également mise en évidence chez les chrysopes (Albuquerque et al., 1997), les syrphes (Sadeghi & Gilbert, 1999) ou encore les coccinelles aphidiphages. Par exemple, Rana et al. (Rana et al., 2002) en spécialisant deux populations d’A. bipunctata sur deux espèces de pucerons différentes ont montré qu’après plusieurs générations les performances sur le puceron consommé augmentaient et que cette augmentation s’accompagnait d’une baisse des performances sur le second. Nous avons donc choisi de tester ces prédictions chez A. decempunctata et A. bipunctata en examinant les performances en terme de taux de croissance des deux espèces sur deux pucerons, l’un, Eucallipterus tiliae (L.), appartenant au spectre de proies naturel des 97 deux coccinelles, et l’autre, Acyrthosiphon pisum (L.), n’étant une proie habituelle que de l’espèce généraliste. Nous avons également examiné les performances en termes de ponte de femelles sauvages sur le puceron qu’elles consommaient dans la nature et sur deux autres pucerons, proies usuelles de l’espèce généraliste mais extérieures à la gamme de proies naturelles de l’espèce spécialiste. Les résultats de ces expériences, à la lumière des informations que nous possédons déjà sur le degré de spécialisation écologique des deux espèces, devraient nous permettre de mieux comprendre la nature de cette spécialisation, notamment l’importance de la qualité intrinsèque des proies dans la détermination du spectre de proies utilisé par les deux espèces. Matériel et méthodes Larves Taux de croissance des larves sur deux espèces différentes de pucerons Des pontes de femelles d’A. decempunctata et d’A. bipunctata élevées en laboratoire ont été choisies au hasard, isolées et mises à incuber en enceinte climatisée sous une photopériode de 16 J : 8 N et à une température de 20°C. Dès l’éclosion, les jeunes larves étaient délicatement prélevées du chorion de l’œuf à l’aide d’un pinceau fin et pesées sur une balance électronique avec une précision au dix millième de milligramme (Sartorius Supermicro ®). Ces larves étaient ensuite élevées individuellement dans des boîtes de Petri de 5cm de diamètre. Elles étaient nourries à volonté tout au long de leur développement avec une seule espèce de pucerons. Chaque jour, les boîtes étaient contrôlées, nettoyées et des pucerons frais ajoutés. A la fin de leur développement, juste avant leur entrée en pupe, les larves étaient à nouveau pesées. Le temps écoulé entre les deux pesées correspondant au temps de développement larvaire de la naissance au stade pupe, était enregistré avec une précision d’une heure. L’expérience était réalisée avec deux espèces de pucerons différentes : le puceron vert du pois Acyrthosiphon pisum (Harris) et le puceron du tilleul Eucallipterus tiliae (L.). A. pisum était élevé en laboratoire sur des fèves (Vicia faba L.) à 20°C sous une photopériode de 16 J : 8 N et récolté 3 fois par semaine. E. tiliae était collecté chaque jour sur un tilleul sauvage (Tiliae cordata Mill.). Le taux de croissance pour chaque larve est ensuite calculé à l’aide de la formule : 98 T = poids / t avec poids = poids à l’entrée en pupe – poids à l’éclosion et t le temps écoulé entre l’éclosion et l’entrée en pupe. Des tests paramétriques de Student ou des tests non paramétriques de Wilcoxon sont réalisés à l’aide du logiciel statistique R pour comparer le temps de développement, l’augmentation de poids et le taux de croissance, au sein de chaque espèce de coccinelles entre les deux espèces de pucerons consommées, puis entre les deux espèces de coccinelles quand elles consomment la même espèce de puceron. Adultes Impact de l’espèce de pucerons consommée sur la reproduction Femelles suivies Les femelles d’A. decempunctata et d’A. bipunctata de l’expérience ont été collectées dans la nature durant l’été 2008 sur un bouquet de trois chênes verts (Quercus ilex L.) à Pourvourville (France) infestés par une seule espèce de pucerons (Myzocallis sp.) et sur un groupe de trois érables (Acer platanoides L.) sur le campus de l’ENFAT (Toulouse, France) ; ces érables étant également infestés par une même espèce de pucerons (Periphyllus sp.). Une fois capturées, les femelles étaient immédiatement isolées et rapportées au laboratoire. Chaque femelle y était alors pesée et placée individuellement dans une boîte de Petri propre munie d’un morceau de papier filtre plié en accordéon. Alimentation Tout au long de l’expérience, quelle que soit l’espèce de puceron avec laquelle les individus étaient nourris, les opérations suivantes étaient réalisées chaque jour : - la boîte de Petri et le papier filtre étaient changés - des pucerons frais ajoutés en quantité suffisante pour que la femelle se nourrisse à volonté - en cas de ponte, les œufs déposés par la femelle étaient retirés de la boîte et comptés. Expérience 1 : Durant les quatre premiers jours suivant leur capture, les femelles étaient nourries avec le puceron présent sur l’arbre où elles avaient été capturées. Puis, durant les quatre jours suivants elles étaient nourries avec du puceron des céréales, Rhopalosiphon padi (L.). Les femelles capturées sur chêne étaient ensuite relâchées et celles capturées sur l’érable enchaînaient avec l’expérience 2 (Figure 1). 99 Expérience 2 : Pour cette expérience, la moitié des femelles A. bipunctata et l’ensemble des femelles A. decempunctata capturées sur érables étaient nourries pendant deux jours supplémentaires sur pucerons des céréales, puis pendant les 8 jours suivants sur du puceron du pois, Acyrthosiphon pisum. A la fin de cette période, toutes les femelles étaient disséquées et leur état ovarien examiné (Figure 1). Expérience 2 Expérience 1 Femelles du chêne Femelles de l’érable Effectif A2 n= 18 A10 n= 32 n= 12 A2 n= 13 A10 n= 25 n= 17 Puceron du chêne Puceron de l’érable Puceron des céréales Puceron du pois Dissection Figure 1: Représentation schématique du protocole expérimental des expériences 1 et 2. Un carré représente une durée d’un jour et la hauteur des carrés correspond à la portion de l’effectif utilisé. Récolte des pucerons Les pucerons du chêne et de l’érable étaient collectés chaque jour d’expérience sur les arbres où les captures de femelles avaient eu lieu. Le puceron des céréales comme celui du pois étaient élevés en laboratoire, R. padi sur des plants de blé (Triticum aestivum L.) et A. pisum sur des fèves (V. faba), les plantes étant cultivées en laboratoire à une température de 20°C sous une photopériode de 16 J : 8 N. Etat ovarien Les femelles étaient disséquées sous une loupe binoculaire et leur ovarioles colorées à l’aide de Bleu de Crésyl Brillant, un colorant vital qui permet de bien visualiser les contours des ovarioles et les oocytes contenus à l’intérieur (Ferrer et al., submitted). Pour chaque femelle, le dernier follicule de chaque ovariole était attentivement observé et classé, en fonction de la taille de l’oocyte qu’il contenait, dans l’une des 5 catégories suivantes: 100 - l’oocyte remplit l’ensemble du follicule (les membranes de l’oocyte et du follicule sont accolées sur toute leur surface) - l’oocyte n’occupe que 3/4 du volume du follicule - l’oocyte n’occupe que la moitié du follicule - l’oocyte n’occupe seulement qu’1/4 du follicule - l’oocyte occupe moins du quart du follicule L’état ovarien des femelles était donc déterminé par le nombre d’ovarioles dans chaque catégorie. Analyses statistiques Les poids des femelles capturées dans la nature sont comparés aux poids des femelles de laboratoire élevées dans les conditions optimales d’alimentation à l’aide d’une anova dont le facteur indépendant est l’origine des femelles (capture sur chêne, sur érable ou élevage en laboratoire). Cette comparaison permet de s’assurer du bon état physiologique des individus capturés dans la nature. Expérience 1 : Pour chaque espèce de coccinelle, l’évolution au cours des jours d’expérimentation du nombre d’œufs pondus par les femelles est analysée à l’aide d’anova à mesures répétées avec le jour d’expérimentation comme facteur indépendant et le facteur femelle comme facteur répété. Pour chaque femelle, la variance du nombre d’œufs pondus pendant les quatre jours de consommation du puceron d’origine ainsi que la variance du nombre d’œufs pondus pendant les quatre jours de consommation du puceron des céréales sont calculées. Ces variances sont ensuite comparées à l’aide d’une anova à mesures répétées avec l’espèce de coccinelles et l’espèce de puceron consommée comme facteurs indépendants et le facteur femelle comme facteur répété. Expérience 2 : Pour chaque individu, la moyenne du nombre d’œufs pondus pendant les deux jours supplémentaires de consommation du puceron des céréales ainsi que la moyenne du nombre d’œufs pondus pendant les deux derniers jours de l’expérience, soit les 7ème et 8ème jours de consommation de puceron du pois, sont calculées. Ces moyennes sont comparées au sein de chaque espèce à l’aide d’un test t de Student pour données appariées. 101 L’état ovarien des femelles des deux espèces est comparé à l’aide d’un test de chi carré. Tous les tests statistiques sont réalisés à l’aide du logiciel R version 2.6.1 (R Development Core Team 2007). Résultats Taux de croissance des larves sur deux espèces différentes de pucerons L’espèce généraliste, A. bipunctata, réalise des taux de croissance peu différents sur les deux espèces de pucerons (W= 81.00, p = 0.051) : son développement est significativement plus rapide sur le puceron du tilleul (W = 276.50, p < 0.000) mais son gain de poids légèrement moindre bien que la différence ne soit statistiquement pas significative (t = 1.18, df = 36, p = 0.244) (Tableau 1). A contrario, l’espèce spécialiste, A. decempunctata réalise des performances de croissances significativement meilleures sur le puceron du tilleul (t = -7.52, df = 85, p < 0.000) : sa vitesse de développement est à la fois plus rapide (W = 900.00, p < 0.000) et son gain de poids plus important (t = -2.99, df = 85, p= 0.004) (Tableau 1). On note également que, sur le puceron du pois, les larves d’A. decempunctata se montrent moins performantes que celles d’A. bipunctata (W = 1782.00, p < 0.000) essentiellement en terme de gain de poids (t = 12.61, df = 101, p < 0.000). Leur temps de développement est également significativement plus court que celui des larves d’A. bipunctata (W = 1456.50, p = 0.003). Sur le puceron du tilleul, en revanche, les taux de croissance sont similaires entre les deux espèces (t = 0.51, df = 20, p = 0.617) car bien que son gain de poids soit un peu moindre (t = 3.59, df = 20, p = 0.002), le développement d’A. decempunctata est bien plus rapide (W = 120.00, p < 0.000) (Tableau 1). Tableau 1: Paramètres de croissance des larves des deux espèces de coccinelles sur A. pisum and E. tiliae Espèce de pucerons Acyrthosiphon pisum Eucallipterus tiliae Espèce de larves A2 A10 A2 A10 n 28 76 10 12 Poids L1 (mg) 0.1060 0.1113 0.1161 0.1090 Poids L4 (mg) 14.8251 10.1062 14.0120 11.5331 102 Gain de poids (mg) 14.8 10.0 13.9 11.4 t (hours) 321.4 298.2 263.4 222.6 Taux de croissance 0.047 0.034 0.053 0.051 Impact de l’espèce de pucerons consommée sur la reproduction Il n’y a pas de différence significative de poids entre les femelles d’une même espèce quelle que soit leur origine : capture sur chêne, sur érable ou élevage en laboratoire (pour A. bipunctata : dl : 2, 80, F= 0.34, p= 0.710; pour A. decempunctata : dl : 2, 91, F= 2.24, p= 0.113) (Tableau 2). Tableau 2 : Poids des femelles A. bipunctata (A2) et A. decempunctata (A10) élevées en laboratoire ou capturées dans la nature sur chêne ou sur érable. A2 laboratoire chêne érable n 40 18 25 A10 Poids moyen (mg) 17.2727 16.5729 17.1023 n 43 32 19 Poids moyen (mg) 11.8241 12.6835 12.5474 Expérience 1 : Chez les femelles d’A. bipunctata, on n’observe pas d’évolution du nombre d’œufs pondus au cours des 8 jours d’expérience (dl : 1, 300, F= 1.26, p= 0.262), l’espèce de pucerons consommée n’influence donc pas le nombre d’œufs pondus par les femelles (Figure 2). Chez A. decempunctata, en revanche, on note une augmentation significative au cours des jours d’expérience du nombre d’œufs pondus (dl : 1, 342, F= 14.52, p < 0.001) (Figure 2). En termes de variabilité observée dans le nombre d’œufs pondus en fonction du régime alimentaire (puceron d’origine ou puceron des céréales), on remarque qu’il y a bien une différence de variance entre les deux espèces (dl : 1, 90, F = 4.02, p = 0.048), A. bipunctata présente une variance plus importante qu’A. decempuncata (variance A2 = 167.81, variance A10 = 117.27) mais le puceron consommé n’a pas d’effet sur les variances observées dans le nombre d’œufs pondus par les femelles (dl : 1, 90, F = 0.31, p = 0.580). Expérience 2 : Les performances de ponte du groupe de femelles A. bipunctata capturées sur l’érable et conservées pour cette deuxième expérience ne sont pas affectées par le changement de régime alimentaire, le nombre d’œufs moyens pondus par les femelles au cours des deux derniers jours de consommation de puceron du pois, jours 17 et 18, n’est pas statistiquement différents du nombre moyen d’œufs qu’elles pondaient à la fin de la période de consommation du puceron de céréales, jours 9 et 10, (dl = 12, t = -1.31, p = 0.214) (Figure3). 103 En revanche, les femelles A. decempunctata réalisent de moins bonnes performances en terme de nombre d’œufs pondus à la fin de la période de consommation de puceron du pois que lorsqu’elles consommaient du puceron des céréales (dl = 16, t = 3.08, p= 0.007) (Figure3). 30 Nombre d'oeufs 25 20 A2 A10 15 10 5 Pucerons d’origine Pucerons des céréales 0 1 2 3 4 5 6 7 8 Jours Figure 2: Evolution du nombre d’œufs pondus par les femelles A. bipunctata (A2) et A. decempunctata (A10) capturées dans la nature en fonction de l’espèce de pucerons consommée (pour chaque point : moyenne et erreur standard) 30 Nombre d'oeufs 25 20 A2 15 A10 10 5 Pucerons des céréales Puceron des pois 0 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 Jours Figure 3: Nombre d’œufs pondus par des femelles d’A.bipunctata (A2) et d’A. decempunctata (A10) capturées sur érable au cours des 2 derniers jours de consommation de pucerons des céréales et durant les 8 jours de consommation de pucerons du pois (pour chaque point : moyenne et erreur standard). 104 A la fin de la période d’expérimentation, après 14 jours de consommation de pucerons d’espèces herbacées (6 jours de pucerons des céréales et 8 jours de pucerons du pois), donc des pucerons n’appartenant pas au spectre de proies naturelles d’A. decempunctata, les femelles des deux espèces de coccinelles présentent un état ovarien identique avec un stade de maturation des oocytes au sein des follicules similaires (dl = 4, Chi² = 3.95, p = 0.413) (Figure 4). 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 A10 plein 3/4 1/2 1/4 vide A2 plein 3/4 1/2 1/4 vide Figure 4 : Nombre d’ovarioles en pourcent dans chacune des cinq catégories décrites précédemment pour les femelles A. decempunctata (A10) et les femelles A. bipunctata (A2) Discussion La spécialisation alimentaire est un champ qui a été largement exploré chez les insectes phytophages et ce, principalement, car les mécanismes de défenses chimiques des plantes semblent être une force motrice de spécialisation (Bristow, 1988; Rosenthal & Janzen, 1979). L’importance de la qualité alimentaire des plantes hôtes dans la détermination du spectre de ressources utilisé a également souvent été discutée. Les études réalisées chez les insectes prédateurs sont plus rares mais tendent en général à faire des parallèles avec le cas des herbivores qui semble plus similaire qu’on pourrait le supposer à première vue (Bristow, 1988; Rana et al., 2002; Sadeghi & Gilbert, 1999; Tauber & Tauber, 1987). Les prédictions généralement formulées dans les cas de spécialisation alimentaire sont qu’un organisme spécialisé devrait être plus performant qu’un généraliste quand il consomme sa ressource spécifique mais, en revanche, moins performant lors de la consommation d’une ressource externe à son régime alimentaire spécialisé. Un consommateur généraliste devrait, 105 lui, montrer des performances comparables sur la largeur de la gamme de ses ressources alimentaires essentielles. Cependant, dans le cas de nos deux espèces de coccinelles, les résultats ne semblent pas vraiment concorder avec ces prédictions. Tout d’abord, les prédictions relatives à une meilleure performance de l’espèce spécialiste, par rapport à l’espèce généraliste, sur ses proies spécifiques ne semblent pas confirmées. En effet, les larves d’A. decempunctata n’ont pas vraiment de meilleures performances, en terme de taux de croissance, quand elles consomment E. tiliae, un puceron appartenant à leur spectre naturel de proies, que les larves de l’espèce généraliste. Ensuite, l’espèce spécialiste ne semble pas moins performante sur les proies externes à sa gamme habituelle. En termes de taux d’oviposition, on constate que les femelles de l’espèce spécialiste pondent davantage quand elles consomment le puceron de céréales, qui ne fait pas partie de leurs proies naturelles, que quand elles consomment leurs proies habituelles, le puceron présent sur le chêne ou celui présent sur l’érable. On observe également que ces femelles spécialistes, après 14 jours de consommation de pucerons des herbacées (pucerons du pois et des céréales), donc de proies incluses dans le spectre alimentaire de l’espèce généraliste mais pas dans le leur, présentent un degré de maturation de leurs oocytes similaires à celui des femelles généralistes. Ainsi, seul le moins bon taux de croissance des larves d’A. decempunctata réalisé sur le puceron des pois par rapport à celui réalisé sur le puceron du tilleul soutient la prédiction d’une moins bonne performance du spécialiste sur une proie extérieure à son régime alimentaire spécialisé que sur une proie spécifique. En revanche, les résultats concernant l’espèce généraliste A. bipunctata semblent cohérents avec les prédictions de performances comparables d’un généraliste sur différentes proies de son spectre alimentaire. En effet, les larves montrent des taux de croissance sensiblement comparables sur le puceron du tilleul et sur celui du pois. Les femelles réalisent également des performances similaires sur le puceron sur lequel elles ont été capturées, sur le puceron des céréales et sur le puceron du pois. De plus, le nombre d’œufs pondus ne semble pas plus variable quand elles consomment leur puceron d’origine que quand elles consomment du puceron des céréales mais, en revanche, elles montrent une plus grande variabilité en terme de ponte que l’espèce spécialiste. En conséquence, ces résultats plaident bien dans le sens de performances similaires du généraliste sur les différentes ressources mais, en revanche, l’espèce spécialiste ne semble pas 106 plus performante quand elle consomme ses proies particulières que quand elle se nourrit de proies extérieures à son régime alimentaire usuel. Elle ne parait pas non plus faire de meilleures performances que l’espèce généraliste quand elle consomme ses proies naturelles. Ainsi, la qualité alimentaire des proies que nous avons testées, ne semble pas, à notre avis, pouvoir expliquer les préférences alimentaires observées pour A. decempunctata dans la nature. En effet, elle n’est presque jamais signalée sur le pois ou le blé bien que la consommation de pucerons du pois ou de puceron des céréales lui semble aussi profitable que la consommation de pucerons d’arbres sur lesquelles elle est régulièrement retrouvée lors d’échantillonnages. La qualité des proies ne semble donc pas avoir un rôle primordial dans la détermination du degré de spécialisation alimentaire observé chez cette espèce. Nos travaux antérieurs sur ces deux espèces de coccinelles nous ont montré sans aucun doute qu’A. decempunctata présentait une spécialisation écologique plus importante qu’A. bipunctata, avec une niche plus réduite et une gamme de proies plus restreinte (Ferrer et al., submitted). De plus, cette spécialisation pour la ressource a influencé à la fois la dynamique ovarienne des femelles, les traits d’histoire de vie de l’espèce et les comportements d’affouragement des larves qui paraissent adaptés à la nature particulière de la ressource exploitée. En conséquence, nos résultats, même si le nombre de proies testées reste restreint, semblent nous permettre d’avancer d’un pas supplémentaire dans l’exploration de cette spécialisation écologique. Ils suggèrent, en effet, que les limites de la niche écologique d’A. decempunctata, particulièrement la largeur de son spectre de proies, donc son degré de spécialisation alimentaire, et les adaptations qui en découlent, sont plus probablement définies et maintenues par une spécialisation pour l’habitat qui limite la gamme de proies rencontrées que par la qualité intrinsèque des proies. 107 Références Albuquerque, G.S., Tauber, M.J., & Tauber, C.A. 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De même, le degré de spécialisation des espèces vis-à-vis de leurs ressources affecte leurs distributions géographiques ainsi que leurs capacités à coexister et donc, de façon plus large, détermine en grande partie la richesse et la nature des patrons de biodiversité que l’on observe au sein des écosystèmes (Futuyma, 2001). Or, le sujet de l’évolution de l’amplitude des niches écologiques a principalement été abordé aux travers d’études sur la spécialisation alimentaire des insectes phytophages (Futuyma, 2001). Ces travaux ont permis de démontrer que les espèces spécialistes et généralistes se distribuent sur un continuum de patrons d’utilisation de ressources et que le degré de spécialisation pour la ressource observé correspond davantage à un attribut flexible d’une population en réponse aux conditions particulières rencontrées au sein de sa communauté qu’à un attribut de l’espèce sur toute son aire de répartition (Fox & Morrow, 1981). En revanche, on connait peu de choses sur le phénomène de spécialisation écologique et sur l’évolution du régime alimentaire des insectes prédateurs. En conséquence, on ignore dans quelle mesure les enseignements tirés de l’étude des phytophages s’appliquent au cas des prédateurs. Pourtant, il apparaît clairement que des degrés de spécialisation différents existent au sein des espèces d’insectes prédateurs, et quelques études démontrent que les interactions entretenues par les prédateurs avec leur ressources sont plus similaires qu’on ne pourrait le croire à priori à celles existant entre les phytophages et leur plantes hôtes (Albuquerque et al., 1997; Sadeghi & Gilbert, 1999; Thompson, 1994). Nous avons donc choisi d’explorer le phénomène de spécialisation écologique chez les insectes prédateurs en étudiant deux espèces de coccinelles aphidiphages appartenant au même genre, Adalia bipunctata et A. decempunctata, pour mieux connaître à la fois l’influence du degré de spécialisation des espèces sur l’évolution de leurs traits phénotypiques et la nature de cette spécialisation. Pour ce faire, nous avons tout d’abord cherché à définir au 112 mieux les niches écologiques des deux espèces et leurs degrés de spécialisation. Nous avons ensuite examiné l’influence de leurs degrés de spécificité pour leurs ressources sur leurs traits d’histoire de vie et les traits comportementaux de leurs larves. Dans un dernier temps enfin, nous avons essayé d’explorer plus avant la nature de leur spécialisation alimentaire en examinant le rôle de la qualité des proies dans la détermination du spectre alimentaire. 1 – Apports de l’étude 1.1 - A. bipunctata et A. decempunctata, deux espèces sœurs montrant des degrés de spécialisation écologique différents A. bipunctata est une des espèces de coccinelles aphidiphages endémique d’Europe dont l’écologie a été la plus décrite. A l’opposé, A. decempunctata, également endémique d’Europe, a été beaucoup moins étudiée. Notre étude a permis à la fois de confirmer les informations bibliographiques existant sur la niche écologique occupée par A. bipunctata et de renforcer celles concernant la niche écologique d’A. decempunctata (Chapitre 1). En effet, les habitats d’A. bipunctata et d’A. decempunctata n’avaient été décrits que de façon très locale en Europe Centrale (Honek, 1985), en Grande Bretagne (Majerus & Kearns, 1989; Mills, 1981) et dans les Alpes françaises (Iperti, 1965). L’utilisation des bases de données du Ladybirds Survey (UK) et du groupe Coccinula (Belgique), nous ont permis de caractériser ces habitats à une échelle géographique plus large, les informations de ces bases étant récoltées en plusieurs localités réparties sur tout le territoire respectivement du Royaume Uni et de la Belgique (Chapitre 1). Nous avons ainsi pu confirmer avec certitude la différence de degré de spécialisation écologique de ces deux espèces. En effet, A. bipunctata peut être considérée comme une coccinelle aphidiphage relativement généraliste car elle est recensée sur un grand nombre d’espèces d’arbres, d’arbustes et de plantes herbacées sur lesquels elle consomme une large gamme d’espèces de pucerons différentes tandis qu’A. decempunctata apparaît plus spécialisée étant donné qu’elle n’occupe principalement que des habitats arborés et consomme un nombre restreint d’espèces de pucerons inféodés aux arbres. Notre travail a également permis de confirmer l’existence d’un chevauchement de niches pour ces deux espèces, la valeur de ce recouvrement étant similaire au Royaume Uni et en Belgique, et également conforme à celle précédemment calculée par Honek (Honek, 1985) 113 en Europe Centrale. De plus, les relevés des bases de données ainsi que nos propres échantillonnages indiquent que ce chevauchement se produit majoritairement, en terme de plantes hôtes, au niveau des arbres et peut être à la fois spatial et temporel, les deux espèces étant parfois enregistrées ensemble sur la même plante hôte et exploitant la même colonie de pucerons. Toutefois, malgré cette co-occurrence occasionnelle, leur différence de degré de spécialisation pour leur ressource fait que ces deux espèces de coccinelles exploitent, au cours de l’année, des ressources dont les caractéristiques diffèrent à la fois dans le temps et dans l’espace. A. decempunctata, en se spécialisant sur un petit nombre de pucerons des arbres dont les populations ont des dynamiques saisonnières similaires, ne dispose de sa ressource que sur une période relativement courte de l’année. A contrario, A. bipunctata, en exploitant une large gamme d’espèce de pucerons sur des plantes hôtes à la phénologie plus variée, dispose de patches de ressources plus nombreux et dont l’apparition est plus étalée au cours du temps (Chapitre 1). Le type de distribution des proies au sein des patches est également un point de divergence entre les deux espèces (Chapitre 3). A. bipunctata fourrage et pond dans des habitats très divers. Ainsi, d’un patch à l’autre, le mode de répartition de ses proies peut être très variable, allant d’une agrégation très importante au sein de colonies de pucerons de plantes herbacées à une distribution plus dispersée au sein de colonies de pucerons sur des feuilles d’arbres. A. decempunctata n’exploitant en grande majorité que ce dernier type de colonies, la distribution spatiale de ses proies est plus homogène d’un patch à l’autre. Ces deux espèces montrent donc des degrés de spécialisation écologique et de spécialisation alimentaire différents exploitant ainsi des ressources dont les caractéristiques diffèrent. 1.2 - Influence du degré de spécialisation sur les traits phénotypiques des individus L’évolution tend à sélectionner les traits phénotypiques qui confèrent la meilleure fitness aux organismes dans un environnement donné (Stearns, 2000). La spécialisation d’une espèce dans l’exploitation d’une ressource particulière influence donc l’évolution des traits phénotypiques de ses représentants, et ce d’autant plus fortement que les pressions de sélection subies sont importantes comme c’est le cas pour des organismes exploitant des ressources éphémères. 114 Notre hypothèse était donc que l’exploitation par ces deux espèces sœurs de ressources aux caractéristiques différentes avait influencé de façon divergente l’évolution de leurs traits phénotypiques. 1.2.1 - Traits d’histoire de vie On sait que, chez les insectes exploitant une ressource à évolution rapide, les stratégies de reproduction adoptées par les femelles sont d’une importance capitale pour leur succès reproducteur et donc pour la fitness de l’espèce. On s’attendait donc à ce que les pressions de sélection aient plus particulièrement pesé, chez nos deux espèces de coccinelles, sur l’évolution des traits d’histoire de vie relatifs à la fonction de reproduction. Nos résultats ont confirmé ces attentes. En effet, nous avons pu constater que le degré de spécialisation de ces deux espèces a modelé leurs stratégies de reproduction à la fois en termes de gestion énergétique et en termes d’investissement reproducteur. Tout d’abord, nos expériences sur la dynamique ovarienne ont démontré que les deux espèces étaient capables de résorber leurs oocytes en cas de pénurie alimentaire puis de reprendre l’oogénèse lorsqu’elles retrouvent des proies en nombre suffisant. Ce phénomène de résorption ovarienne avait déjà été décrit chez plusieurs insectes exploitant des ressources à évolution rapide (Papaj, 2000) et même chez une coccinelle prédatrice Harminia axyridis (Pallas) (Osawa, 2005). Mais nous avons pu, au travers de notre étude, démontrer à une échelle plus fine que la gestion des allocations d’énergie entre soma et organes reproducteurs différait entre l’espèce généraliste et l’espèce spécialiste. L’espèce généraliste montre, en effet, une dynamique ovarienne plus rapide et plus efficace que l’espèce spécialiste en cas de pénurie alimentaire à court terme (quelques jours) qui est adaptée à la distribution temporelle plus fragmentée de ses patches de ressources (Chapitre1). Ensuite, nous avons pu montrer que l’espèce spécialiste, en réponse à son plus faible taux d’opportunités de ponte fournissait un effort reproductif par descendant plus important que l’espèce généraliste. Les femelles spécialistes produisent, relativement à leur poids, des œufs plus lourds que l’espèce généraliste. Cet investissement plus important en termes de poids s’accompagnerait également chez A. decempunctata, selon certains auteurs, d’un meilleur approvisionnement des œufs en lipides et en protéines (Sloggett & Lorenz, 2008). Quoiqu’il en soit, cet investissement énergétique plus important de l’espèce spécialiste dans ses œufs permet à ses larves, relativement au poids des œufs dont elles sont issues, de survivre plus longtemps sans nourriture que les larves de l’espèce généraliste (Chapitre2). Cette 115 meilleure autonomie à jeun des larves cadre bien avec l’exploitation de proies spatialement plus dispersées. Les femelles A. decempunctata présentent également, comme on pouvait s’y attendre en réponse à leur plus faible taux d’opportunités de pontes, une longévité plus importante que les femelles A. bipunctata (Chapitre 2). Nos résultats prouvent donc que le degré de spécificité que montrent ces deux espèces pour leur ressource a bien laissé son empreinte sur leurs traits d’histoire de vie. 1.2.2 - Traits comportementaux A l’instar d’autres insectes holométaboles, le choix d’oviposition par les femelles d’insectes prédateurs est crucial pour fournir aux larves les conditions optimales à leur survie et à leur développement, en termes d’abondance et de qualité de la ressource alimentaire, d’intensité de la compétition pour cette ressource ainsi qu’en termes de pression de prédation sur le patch. Chez les coccinelles, la capacité de la femelle à évaluer la qualité du patch est d’autant plus déterminante qu’il a été démontré que les larves n’effectuaient pas de choix quant à leurs proies mais, au contraire, mangeaient indistinctement les pucerons qu’elles pouvaient capturer même si leur consommation avait un impact négatif sur leur fitness (Ferrer et al., 2008). Cependant, une fois le patch de ressource choisi par la mère, les larves d’insectes prédateurs doivent encore chasser et capturer les proies disponibles sur le patch. De fait, leur efficacité de chasse et de capture est également un facteur déterminant pour leur gain énergétique au cours du stade larvaire, donc pour la rapidité et la qualité de leur croissance, et, par voie de conséquence, pour leur succès reproducteur au stade adulte (Dixon, 2000). Ainsi, on s’attendait à ce que le degré de spécialisation sur la ressource ait également influencé les traits comportementaux des larves. Nos résultats ont pu, en partie, confirmer cette hypothèse. Les expériences ont, en effet, démontré que les larves nouvellement écloses de l’espèce spécialiste se montrent actives dans leur recherche de proies plus tôt après leur éclosion que l’espèce généraliste et conservent également plus longtemps une activité de recherche que les larves de l’espèce généraliste (Chapitre 3). Ce comportement répond stratégiquement bien au faible taux d’agrégation des proies exploitées par l’espèce spécialiste car il permet probablement une augmentation de la surface explorée par une larve et donc une augmentation de la probabilité de rencontre avec une proie. 116 Les traits comportementaux des larves, au moins au plus jeune stade, semblent donc également affectés par le degré de spécialisation des deux espèces. Des expériences complémentaires sur les comportements de recherche d’autres stades, notamment le quatrième stade, le plus vorace, devraient permettre d’approfondir davantage les éventuelles différences entre les traits comportementaux des deux espèces. Nous avons ainsi pu faire, au travers de notre étude, le constat du degré de spécialisation écologique de ces deux espèces et montrer l’influence de cette spécialisation sur certains traits phénotypiques des individus, i. e. traits d’histoire de vie et traits comportementaux. Nous avons également pu constater, au cours de notre travail, que cette spécialisation écologique s’accompagnait chez ces insectes prédateurs d’une spécialisation alimentaire : l’espèce généraliste consomme un large panel de proies tandis que l’espèce spécialiste exploite un petit nombre de pucerons inféodés aux arbres. 1.3 - Rôle de la qualité intrinsèque des proies dans la détermination du régime alimentaire des prédateurs Tandis que le rôle de la qualité alimentaire des plantes dans la détermination des limites du spectre de ressources trophiques des insectes phytophages a été largement étudié, on s’est souvent contenté pour les insectes carnivores de décrire la gamme de proies profitables à différentes espèces sans réellement discuter du lien avec le degré de spécificité qu’ils montrent dans la nature pour leur ressource alimentaire. Les facteurs pouvant être à l’origine du dessin des contours du régime alimentaire de ces deux coccinelles et particulièrement de celui, plus réduit, de l’espèce spécialiste, nous étaient donc peu connus. Pourtant, quelques indices, recueillis au cours de nos expériences, telles que les bonnes performances de croissance et de ponte des individus de l’espèce spécialiste sur des proies externes à leur spectre naturel (Chapitre 2), nous laissaient à penser que la qualité nutritionnelle des proies n’était peut être pas le facteur déterminant. En effet, les femelles de l’espèce spécialiste A. decempunctata que nous avions élevées en laboratoire sur A. pisum, puceron du pois, se sont révélées de poids comparables aux femelles sauvages que nous avions capturées sur leurs proies naturelles (Chapitre 2). Or, chez les coccinelles, le poids des adultes est un bon indicateur de la qualité de l’alimentation au stade larvaire et au stade adulte 117 (Dixon, 2000; Kalushkov, 1998). Ainsi, consommer une proie externe à leur spectre alimentaire ne semblait pas affecter négativement les femelles A. decempunctata. Nous avons donc cherché à mieux comprendre quelle pouvait être l’importance de la qualité intrinsèque des proies sur la détermination du spectre alimentaire. Dans le cas où la qualité intrinsèque des proies est le facteur déterminant dans la définition de ce spectre, les prédictions généralement formulées sont que l’espèce spécialiste devrait réaliser de moins bonnes performances sur des proies externes à ce spectre que sur ses proies spécialisées, mais qu’en revanche, en consommant ces dernières, elle devrait être plus performante que l’espèce généraliste. Or, au regard de nos résultats, il s’avère que les femelles spécialistes réalisent de meilleures performances de ponte sur des pucerons de plantes herbacées, qu’elles ne consomment pas habituellement, que sur leurs pucerons spécifiques. De plus, leur état ovarien après deux semaines de consommation quotidienne de pucerons externes à leur régime alimentaire est aussi bon que celui des femelles généralistes. Les résultats concernant les taux de croissance des larves confirment également que l’espèce spécialiste ne se montre pas plus performante que l’espèce généraliste lors de la consommation d’un de ses pucerons spécifiques. L’ensemble de ces informations laissent donc à penser que, dans notre cas, les limites de la gamme de proies exploitées dans la nature par l’espèce spécialiste correspondraient plus à une conséquence d’une spécialisation pour l’habitat qu’au résultat de la qualité intrinsèque des proies. 2 - Conclusion et perspectives 2.1 - Intérêt d’une étude plus intégrative du phénomène de spécialisation chez les prédateurs Notre travail démontre donc que le degré de spécialisation alimentaire observé chez les coccinelles prédatrices, et par extension probablement chez d’autres insectes prédateurs, ne peut pas trouver son explication dans la seule observation, en laboratoire, de la qualité intrinsèque de leurs proies. En effet, la profitabilité d’une proie pour une coccinelle n’est pas déterminée uniquement par sa qualité nutritionnelle mais également par son abondance et par la difficulté de capture des individus à cause de leur distribution (Berthiaume et al., 2007), de leur mobilité, de leurs 118 mécanismes de défenses (Rana et al., 2002) ou des caractéristiques physiques de leur plante hôte (poils, cires…) (Eigenbrode, 2004; Eigenbrode et al., 1998; White & Eigenbrode, 2000). De plus, même si plusieurs proies peuvent être profitables, d’autres facteurs interviennent dans la détermination du régime alimentaire des prédateurs. L’habitat, par exemple, détermine les proies qui sont régulièrement rencontrées (Dixon, 2000; Hodek, 1973; Kalushkov, 1998; Majerus, 1994), et éventuellement les ennemis naturels présents tels que les fourmis (Dixon, 2000; Majerus et al., 2007). En conséquence, il peut restreindre la gamme de proies consommées. Il apparaît donc essentiel d’étudier le degré de spécificité que montrent les insectes prédateurs pour leurs proies dans une démarche plus intégrative qui prend en compte l’ensemble du contexte écologique des espèces et des interactions qu’elles entretiennent au sein de leur communauté plutôt qu’au travers d’études exclusives en laboratoire des réponses de prédation des individus face à différentes proies. Pour ce faire, l’approche que nous avons choisie, combinant expérimentation en laboratoire et études sur le terrain, même si elle s’avère complexe d’un point de vue logistique, nous semble bien adaptée si l’on souhaite mieux comprendre le phénomène de spécialisation chez les insectes prédateurs et donc mieux appréhender leur place et leur rôle dans les communautés écologiques. 2.2 - Intérêt d’une étude plus poussée du caractère généraliste de certaines espèces de prédateurs Une meilleure compréhension de la place et du rôle des prédateurs dans la structure et la dynamique des communautés passe également par une meilleure connaissance de la nature et de l’origine des degrés de spécificité les plus faibles pour la ressource. En effet, même dans les cas où la spécificité de l’espèce prédatrice pour ses proies est faible, c’est le cas des espèces polyphages, qualifiées de généralistes, la réalité que recouvre ce caractère généraliste peut être très variée selon les espèces considérées. Leur capacité à utiliser une large gamme de ressources peut être maintenue par plusieurs types de structures génétiques au sein de l’espèce. McPeek (1996), par exemple, distingue trois types principaux d’espèces généralistes. Le premier type correspond à des espèces polymorphiques dans lesquelles des génotypes spécialisés sur différentes conditions environnementales coexistent. On rejoint ici le concept formulé par Rougharden (1972) puis par Bolnick (2003) d’une espèce généraliste qui serait un assemblage de populations ou d’individus en pratique spécialistes. 119 Le second type est constitué d’espèces dont la plasticité phénotypique permet à chaque génotype d’exprimer le phénotype adapté aux conditions environnementales auxquelles il doit faire face. De telles espèces ont donc des individus potentiellement capables de se montrer, dans un environnement donné, aussi performants que des individus issus d’espèces spécialistes. Le dernier type comprend les espèces qualifiées de « Jack-of-all-trades », à savoir des espèces dont la distribution phénotypique est intermédiaire aux phénotypes optimaux dans les conditions environnementales présentes. Les individus appartenant à ce dernier type d’espèces généralistes seront donc, en général, moins performants dans un environnement donné que les espèces spécialistes présentes. Le caractère généraliste d’une espèce n’est donc pas univoque et ces différentes situations ne peuvent pas être considérées comme écologiquement équivalentes. La nature du caractère généraliste d’une espèce prédatrice va en effet influencer ses capacités à coexister et à établir des interactions avec les autres espèces de sa communauté, ainsi que les caractéristiques de ces interactions. Les propriétés réelles de la niche écologique d’une espèce prédatrice généraliste vont donc avoir un impact déterminant sur la définition et la dynamique des systèmes proies-prédateurs dans lesquels elle est impliquée, et par extension sur l’établissement et le fonctionnement des chaines trophiques au sein des écosystèmes. L’étude de la largeur du spectre de proies des espèces prédatrices polyphages ne suffit donc pas à appréhender de manière efficace leur place et leur rôle dans la structure globale et la stabilité des communautés écologiques. La prise en compte des supports et mécanismes génétiques en action à l’échelle des populations semble également d’une importance cruciale. Mieux comprendre l’origine et de la nature des degrés de spécialisation écologique des espèces d’insectes prédateurs, des plus spécialisées aux plus généralistes, présente donc un intérêt évolutif et écologique majeur. Une étude, au niveau des populations, des degrés de spécificité affichés pour la ressource alimentaire et des structures génétiques sous-tendant ces préférences alimentaires parait également potentiellement riche d’enseignements. La connaissance et la compréhension des bases génétiques, de l’évolution et du fonctionnement de l’association prédateur-proie est essentielle parce qu’elle permet de mieux 120 comprendre le fonctionnement du prédateur dans son écosystème, sa place et son rôle dans les chaines trophiques, dans la structure des communautés et les équilibres écologiques. Une connaissance plus intime des modalités définissant la spécificité d’un insecte prédateur pour sa proie, et donc la force et la stabilité de l’interaction qui les lie, pourrait également permettre d’améliorer l’efficacité de son utilisation comme auxiliaire de lutte biologique. 121 Références Albuquerque, G.S., Tauber, M.J., & Tauber, C.A. 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Here, we choose to explore ecological specialisation in predatory insects by comparing two closely related aphidophagous species: Adalia bipunctata and A. decempunctata. In doing so, we try to better understand the nature of this specialisation and the impact of specialisation degree of species on the evolution of their phenotypic traits. First, our work shed light on the ecological niches of both species and confirms that one species is more specialised. Then, we highlighted that specialisation has probably driven the evolution of life history and behavioural traits. Our experiments proved that the generalist species has a faster ovarian dynamic than the specialist. Moreover, specialist females invest more per offspring than generalist females. After controlling for differences in female body mass, this additional energetic investment in each egg of A. decempunctata results in bigger larvae. These larvae are also active sooner after hatching, and stay active and survive longer under starvation. These differences between the two species are probably linked to the characteristics of their resources in terms of patch availability across the season and prey distribution. So, as already demonstrated for phytophagous insects, ecological specialisation has driven the evolution of phenotypic traits. But, in this particular case of predatory insects, our results seem also to indicate that suitability of prey does not play a major role in the determination of diet width. The trophic specialisation observed for A. decempunctata appears more as a consequence of habitat specialisation, which reduce the number of preys that the species could meet. Our works contribute to a better understanding of ecological specialisation in predatory insects, its mechanisms and consequences. It also demonstrated the interest of studying further the diet width of predatory insects through an approach which takes into account the whole ecological context of species and an exploration of population genetic structures which supports the species degrees of specificity for trophic resources. Keys words: specialisation, predatory insects, aphidophagous ladybirds, ovarian dynamics, reproductive investment, foraging behaviour, prey suitability. Spécialisation écologique chez les insectes prédateurs Aurélie FERRER Thèse soutenue le 20 juillet 2009 à Toulouse Directeur de thèse : Jean-Louis HEMPTINNE Spécialité : Ecologie La spécialisation écologique correspond à la réduction de l’amplitude de la niche occupée par une espèce. Ce phénomène a été largement étudié chez les insectes phytophages mais peu de travaux se sont intéressés au cas des insectes prédateurs. Nous avons donc choisi d’explorer le phénomène de spécialisation écologique chez les insectes prédateurs en étudiant deux espèces de coccinelles aphidiphages appartenant au même genre : Adalia bipunctata et A. decempunctata. Notre travail a tout d’abord permis de mieux définir les niches écologiques occupées par les deux espèces et de confirmer qu’elles présentent des degrés de spécialisation différents. Nous avons ensuite montré, qu’à l’instar de ce qui a pu être observé chez les insectes phytophages, cette différence de degré de spécialisation pour leur ressource avait influencé l’évolution de leurs traits d’histoire de vie (dynamique ovarienne, investissement reproducteur des femelles, capacité de survie des larves…) et de certains traits comportementaux (activité des larves…). Cependant, dans le cas de ces insectes prédateurs, nos résultats semblent indiquer que la qualité intrinsèque des proies ne jouerait pas un rôle aussi déterminant dans la définition de la largeur du régime alimentaire des espèces que ce qui a pu être observé chez les phytophages. La spécialisation alimentaire notée chez A. decempunctata résulterait alors plus d’une spécialisation pour l’habitat qui limite la gamme de proies rencontrées. Notre étude contribue donc à mieux comprendre le phénomène de spécialisation écologique chez les insectes prédateurs, ses mécanismes et ses conséquences. Elle révèle également l’intérêt d’approfondir l’étude du régime alimentaire des insectes prédateurs au travers d’une approche écologiquement plus intégratrice et d’une exploration, au niveau des populations, des structures génétiques supportant les degrés de spécificité pour la ressource alimentaire. Mots clés : spécialisation, insectes prédateurs, coccinelles aphidiphages, dynamique ovarienne, investissement reproducteur, comportement de recherche, qualité proies Evolution et Diversité Biologique, UMR 5174, Université Paul Sabatier, Ecole Nationale de Formation Agronomique de Toulouse, B.P. 22687, F- 31326 CASTANET TOLOSAN Cedex.