Les Actes du - Institut Méditerranéen d`Océanologie

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La Garde
10 & 11 juin 2010
Organisé par
Parcs nationaux
de France
Avec le parrainage
de l’Union pour la
Méditerranée
Les Actes du
Colloque
Les parcs naturels et l’Union
pour la Méditerranée
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Jean-Jacques
Fresko
P
ari tenu. Merci Henri-Luc Thibault. Comme
aurait dit Henri Kissinger « la Méditerranée,
quel est son numéro de téléphone ? ». Il disait
cela à propos de l’Europe, mais c’est un peu ce que
vous réclamez pour la Méditerranée. Charles-François Boudouresque, vous présidez le conseil scientifique du Parc national de Port-Cros. On a beaucoup
parlé d’échanges entre les différents acteurs et les
Charles-François
Boudouresque
L
a Méditerranée est caractérisée par un déficit en
eau. Il y existe très peu de fleuves: le Rhône, le Pô,
le Nil qui ne se jette plus à la mer depuis le barrage
d’Assouan (et cela ne va pas s’arranger avec le futur barrage du Soudan, qui va priver probablement d’eau toute
la vallée du Nil).
Avec l’évaporation,
le niveau de la Méditerranée baisserait d’un mètre tous
les ans. Heureusement, l’Atlantique
se déverse dans la Méditerranée, ainsi que la mer Noire,
et y apporte l’eau.
Rédacteur en chef de Terre Sauvage
Animateur du colloque
différentes aires protégées. Quels types d’échanges,
vous, en tant que scientifique, entretenez-vous avec
vos homologues des autres espaces protégés? Estce que vous avez, en attendant d’avoir un numéro
de téléphone commun, une vision partagée, un
consensus sur le rôle assigné aux espaces protégés ?
Président du Conseil scientifique du
Parc national de Port-Cros
sorte aux mers tropicales et c’est une des raisons pour
laquelle, elle abrite des écosystèmes très originaux. C’est
donc un «hot spot» de diversité spécifique comme cela a
déjà été précisé. Selon les taxons, cela varie, mais il peut
y avoir, pour certains groupes (ce sera le cas des éponges
par
exemple)
jusqu’à une espèce
sur cinq du monde,
alors qu’elle ne représente même pas
un pour cent du
volume de l’océan
mondial.
« La Méditerranée est un hotspot
de diversité spécifique pour des
écosystèmes originaux »
La Méditerranée est-elle une annexe de l’Atlantique? On le croyait mais ce n’est pas le cas. La
Méditerranée est une mer caractérisée par un endémisme très fort. La mer d’Alboran constitue un
sas. Chaque fois que l’on travaille sur la génétique
de la Méditerranée, on s’aperçoit que les espèces
sont distinctes de leurs homologues atlantiques. On
a donc une diversité spécifique très élevée et un
taux d’endémisme qui, au fur et à mesure que les
connaissances progressent, apparaît comme de
plus en plus important.
Il y a en Méditerranée peu d’apport en sel nutritif. Je parle des nitrates, des phosphates qui sont nécessaires pour le réseau trophique, pour les écosystèmes. Le
Rhône, l’Ebre et le Pô sont pratiquement les seuls grands
fleuves qui se jettent aujourd’hui dans la Méditerranée.
Heureusement, il en arrive par l’Atlantique et la mer
Noire. Par son oligotrophie, autrement dit sa pauvreté
en sel nutritif, la Méditerranée ressemble en quelque
La Méditerranée est également un «hot
spot» pour des écosystèmes originaux, c’est-àdire des écosystèmes qui n’existent nulle part ailleurs
dans le monde. L’un d’entre eux, il en a été question,
c’est l’herbier de Posidonie. Je parlerai aussi des
autres, le coralligène et les grottes sous-marines.
Ce sont les trois écosystèmes emblématiques qui
jouent un rôle économique, à la fois du point de vue
touristique et /ou du point de vue des services rendus
L’écosystème à Posidonie est qualifié de miracle,
un peu comme le récif corallien. C’est-à-dire que c’est
une oasis de vie dans une mer extrêmement pauvre en
sel nutritif. Il s’agit de toute une technologie biologique,
de toute une batterie de mécanismes, que l’on a découverte au cours des vingt dernières années, qui explique
ce miracle de l’herbier de Posidonie. Comment une telle
production, comment une telle biomasse, comment
une telle richesse d’espèces est possible dans une mer
si pauvre? C’est exactement la même chose dont il est
question, mais avec une technologie complètement difSession plénière
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férente, concernant les écosystèmes coralliens. En plus
de cette production, c’est une frayère et une nurserie
pour les espèces d’intérêt commercial. L’herbier de Posidonie régule les flux de sédiments et protège les plages
à condition que les feuilles de Posidonie sur les plages
ne soient pas enlevées. C’est une source de matière organique d’exportation pour les écosystèmes profonds.
C’est une sorte de grenier à blé pour la Méditerranée et
un pôle de diversité spécifique. Une espèce sur cinq en
Méditerranée vit dans l’herbier de Posidonie, ce qui ne
représente même pas 1% de la surface de la Méditerranée. C’est également l’écosystème dit symbole. En effet,
c’est l’un des rares écosystèmes méditerranéens qui soit
présent du Nord au Sud, d’Est en Ouest et uniquement
en Méditerranée.
Un autre écosystème, l’écosystème coralligène est, lui aussi, un pôle
de diversité, et là aussi on peut dire qu’une espèce sur
de Posidonie, il a une valeur économique touristique.
Les grottes sous-marines, ce sont les
abysses, des zones profondes qui restent à notre
portée. Elles constituent un mini écosystème dans
lequel on peut plonger de 10 mètres à 50 mètres de
profondeur. Parmi les espèces emblématiques que
l’on peut observer, figure l’éponge carnivore qui a été
une découverte exceptionnelle, car pour les scientifiques, comme pour généralement les gens qui ont
des connaissances en biologie, les éponges sont
des filtreurs. On a du mal à imaginer des éponges
carnivores, c’est vraiment quelque chose de très original et de très caractéristique de ces grottes sousmarines. Il existe aussi de petites crevettes extrêmement abondantes, qui sont une des caractéristiques
et une des espèces-clé de cet écosystème des
grottes sous-marines méditerranéennes.
La Méditerranée au-delà des écosystèmes, ce sont également des paysages sousmarins exceptionnels et une grande différence
avec le domaine continental. Il s’agit de paysages
sous-marins qui n’ont pas été façonnés par l’homme
et que l’on peut parcourir bien au-delà des aires protégées. On pourrait parcourir des centaines de kilomètres en plongée, si techniquement c’était faisable,
tout en rencontrant des paysages qui ressemblent,
à ce qu’un plongeur aurait pu voir il y a 10 000 ans,
même si bien sûr il y a eu des impacts qui ne sont
tout de même pas négligeables. Contrairement au
domaine continental, le paysage sous-marin n’a pas
été façonné par l’homme, même s’il a été impacté
par lui.
L’herbier de Posidonie, l’écosystème symbole
cinq vit dans cet écosystème. C’est un écosystème très
beau et très recherché des plongeurs. Comme l’herbier
Jean-Jacques
Fresko
M
erci beaucoup Charles-François Boudouresque. Jean-Yves Perrot, vous êtes le président-directeur général de l’IFREMER, vous
allez nous expliquer quelles sont les thématiques sur
Rédacteur en chef de Terre Sauvage
Animateur du colloque
lesquelles votre Institut travaille en Méditerranée et
nous dire, pour nos amis qui ne sont pas français, un
mot sur l’IFREMER.
Session plénière
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