50e CONGRES DE L’A.M.U.B. Prise en charge ambulatoire du MRSA communautaire Dr. M. GERARD Services des Maladies Infectieuses C.H.U. Saint-Pierre Session INFECTIOLOGIE Modérateurs : Drs D.PIQUARD, P SEMAILLE, Y. VAN LAETHEM Samedi 10 septembre 2016 Conflits d’intérêt en rapport avec la présentation • Honoraires de conférence : – <néant> • Participation à un « Advisory Board » : – <néant> • Etudes cliniques sponsorisées en cours : – <néant> • Consultance : – <néant> • Voyages-Congrès : – <néant> Contenu • Un peu de microbiologie • Les types de MRSA en Belgique • Epidémiologie du « Community Associated MRSA » (CA-MRSA) • Tableau clinique du CA-MRSA • Traitement et prévention des infections à CA-MRSA 3 Staphylococcus aureus Commensal: flore endogène – Niche écologique: nez – Aussi: gorge, périnée, zone péri-anale, vagin Un des pathogènes humains le + important • Infections communautaires < > nosocomiales • Infection bénigne des tissus mous Infections sévères mettant le pronostic vital en jeu • Affection médiées par des toxines (SSSS, TSS,…) 4 Le Staphylocoque doré résistant à la meticilline Penicilline S. aureus Methicilline [1943] Penicillin-resistant [1940s] S. aureus [1961] Methicillineresistant [1960s] S. aureus (MRSA) 5 Mécanisme de la résistance à la meticilline (1) 6 Mécanisme de la résistance à la meticilline (2) 7 Mécanisme de la résistance à la meticilline (3) • Production d’une nouvelle protéine liant la pénicilline (PBP): PBP2a : faible affinité pour tous les lactames sauf ceftaroline (cephalo injectable) • PBP2a codée par gène mecA • Porté par une cassette chromosomique, élément génétique mobile (SCCmec pour Staphylococcal cassette chromosome mec) • Emergence des clone de MRSA < acquisition et insertion de l’élément SCCmec dans le chromosome de souches sensibles 8 La résistance à la meticilline confère à S.aureus une résistance croisée à toutes les betalactames (sauf la ceftaroline injectable). 9 Les différents types de MRSA MRSA HA-MRSA CA-MRSA Hospitalassociated Communityassociated LA-MRSA Livestockassociated 10 MRSA associé aux soins HA-MRSA Endémique dans les hôpitaux en Belgique depuis années 90 • Facteurs de risque: contacts avec hôpital ou Maison de Repos et de Soins, antibiothérapie, immunosuppression, dispositifs invasifs, plaies chroniques,……. • Touche surtout : patient âgé, présence de comorbidités • Type d’infection: bactériémies, pneumonies, infections urinaires • Résistance aux AB: Multi résistance aux AB, traitement avec AB réservés à l’usage hospitalier 11 MRSA Communautaire Début années 90 Dissémination début années 2000 CA-MRSA Premiers cas en Belgique 2003 • Facteurs de risque: décrit chez patients n’ayant eu aucun lien direct ou indirect avec les structures de soins • Touche surtout: sujets jeunes sans comorbidités; sports de contact, recrues militaires, prisons, crèches, toxicomanes IV, homosexuels, contacts proches de CAMRSA • Type d’infections: affections cutanées (abcès, furoncles, cellulite) • Résistance aux AB: R limitée aux betalactames 12 MRSA associé au bétail LA-MRSA • MRSA d’origine porcine transmis à l’homme; décrite pour la 1ère fois en France en 2000 chez éleveurs de porcs • ST398 (typage par Multilocus Sequence Typing - MLST) • Infections invasives et épidémies hospitalières rapportées mais invasivité moindre • Personnes à risque: personnes (et leurs proches) en contact avec porcs, veaux, .. – Vétérinaires – Éleveurs (Hollande 25-30% portage) – Personnel d’abattoir 13 Les différents types de MRSA Ces différents types de MRSA sont distincts • par leur composition génétique • la présence de facteurs de virulence • le tableau clinique • leur sensibilité aux antibiotiques non beta lactames 14 Epidémiologie du CA-MRSA • Prévalence variable d’une région du monde à l’autre – Problème sévère USA, Canada, Taiwan, Australie où les clones de CA-MRSA remplacent peu à peu les clones de HA- MRSA et se transmettent de manière nosocomiale à l’hôpital – Prévalence faible mais croissante en Europe, présence en Belgique • Souches différentes en fonction régions du monde – USA: souche USA 300 (ST8-IV) 60-80% des souches – Europe: souche ST80 (30% des souches 15 européennes), USA 300 Séquençage du génome US 300-0114, ST8 • Comparaison avec 6 autres souches de S.aureus • Nb gènes non retrouvés sur autres souches de S.aureus sont retrouvés sur chromosome et sur 3 plasmides • Gènes de virulence – enterotoxine, Leukocidin de Panton Valentine, staphylokinase (activateur plasminogène), protéine inhibant le chemotactisme,.. • Gène ACME (Arginine catabolic mobile element): promeut survie de S.aureus à la surface de la peau humaine – Portage cutané fréquent facilitant la transmission peau à peau et sexuelle; Diep et al Lancet 2006;367:731 MRSA dans infections cutanées aigues aux USA Dans la plupart des grandes villes américaine, le MRSA est devenu le pathogène principal cultivé au départ d’infections des tissus mous dans les services d’urgences • 420 patients avec infection aigue purulente des tissus mous dans 11 départements d’urgence - mi 2004 – USA Moran et al NEJM 2006; 355;7:74 17 MRSA dans infections cutanées aigues aux USA (2) 320 (76%) S.aureus 59% des pts = MRSA Moran et al NEJM 2006; 355;7:74 18 CA MRSA en Belgique • Le CA-MRSA est identifié en Belgique depuis 2003 • Les souches USA 300 et ST80 représentent ¾ des souches envoyées en 2014 au centre national de référence • Clone ST80 produit aussi PVL, résistance à l’ac fusidique Prévalence du MRSA dans infections aigues des tissus mous à Bruxelles (n=159 cas) 20 • S. aureus isolés dans la moitié des échantillons collectés Entérobactéri es (n=9) Entérocoques (n=1) Actinomyces sp. (n=1) Streptocoque s (n=13) Autres staphylocoqu es (n=9) MSSA (n=75) MRSA (n=10) • Taux de résistance à la méticilline parmi les souches de S. aureus : 13% • Prévalence des MRSA associés aux infections cutanées dans la région Bruxelles-Capitale : 6% • Pourcentage élevé de S. aureus PVL+ : 36% – 60% des MRSA PVL+ – 33% des MSSA PVL+ 20 N.B. : Pas de croissance de pathogène pour 40 échantillons collectés CA-MRSA:tableau clinique (1) • >80% des cas, infection des tissus mous chez individus jeunes et en bonne santé – – – – Furoncle (svt multiples, épidémies) Abcès Cellulite suppurée Impétigo Mais aussi infections invasives (sévérité ++++) • Pneumonie nécrosante • Fasciite nécrosante • Myosite • Thrombophlébite septique avec embolie pulmonaire • Ostéomyélite • Bactériémie 21 Tableau clinique (2) • Infections récurrentes fréquentes Adultes : 15%1 Enfants: 12-28%2,3 VIH: jusqu’à 50%4 • Type et sévérité des infections varient Fonction de la région et des souches qui circulent Les plus sévères < clone USA 300 1Miller et al Clin Infect Dis 2007, 44(4):483–492 2Chen et al Pediatr Infect Dis J 2009, 28(3):244–246 3Lee et al Pediatr Infect Dis J 2004, 23(2):123–127. 4Graber et al J AIDS 2008; 49: 231 CA-MRSA: tableau clinique (3) • Fréquence de lésions au niveau des fesses et sites génito-périnéaux lorsque transmission associée à activité sexuelle (MSM, hétéro) • Pattern de colonisation avec CA-MRSA de HA-MRSA et MSSA1 – Fréquence de la colonisation en site non nasal (périnée) – Portage nasal moins fréquent • Recherche du portage CA-MRSA par frottis nasal seul= risque de sous estimation 1Yang et al Clin Microbiol Infect. 2010 ; 16: 425 23 Physiopatologie des infections à CA-MRSA HA-MRSA Colonisation (nasale > autres sites) Infection CA-MRSA Comportement et exposition Contact direct peau à peau Contact cutané avec objet contaminé Colonisation (autres sites>nasal) Infection Transmission directe peau à peau soit entre objet contaminé et peau sans colonisation préalable = mécanisme important dans pathogenèse des infections à CA-MRSA La famille, un réservoir potentiel ? • Fréquence d’infections survenant en cluster en particulier au sein des contacts familiaux • Fréquence du portage de CA-MRSA par les membres de la famille autour d’un cas clinique1,2 – 17% à 23% des contacts familiaux avec souche génétiquement concordante – MRSA retrouvé chez au moins 1 personne de la famille dans > 50% des cas • Animaux domestiques peuvent participer à la transmission croisée du MRSA au sein d’une famille 1Miller et al CID 2012; 54: 1523 2Rafee et al BMC Inf Dis 2012;12: 45 25 MRSA et environnement • Survie prolongée du S.aureus dans l’environnement • Contamination fréquente de l’environnement si cas clinique CA-MRSA – Draps de lits – Télécommande téléviseur – Interrupteur salle de bain – Serviette à mains salle de bain – Poignées de porte – Torchons de cuisine – Robinets …………………… • Présence de S.aureus dans environnement 2x risque d’infection récurrente chez cas index Knox et al JAMA Intern Med 2016 • Transmission documentée à travailleurs de santé avec des infections cliniques – Japon: 3 travailleurs dans département de dermato autour d’un patient index, nécessité drainage et traitement IV1 – USA, consult VIH , 2 travailleur (HCW et 1 secrétaire accueil); contamination importante de l’environnement2 1Mine et al J dermatol 2011 Dec;38(12):1167-71 2Johnston Infect Control Hosp Epidemiol 2006;27:1133-1136 Traitement (1) • Incision/drainage • Antibiotiques si – – – – – – – – Pronostic globalement bon Lésion sévère Sites multiples Progression rapide avec présence de cellulite Zones difficiles à drainer (visage, main, organes génitaux) Signes systémiques d‘infection Comorbidités associées, immunosuppression Phlébite septique associée Absence de réponse à l’incision et au drainage seul 28 Traitement (2) • USA • 1200 pts, abcès incisés et drainés • Cotrimoxazole forte 2x2 co /j > placebo – taux de guérison – nécessité de recourir à drainage chirurgical ultérieur – récidive avec infection dans autre site – infections secondaires chez membres de la famille Talan et al N Engl J Med 2016; 374: 823 Traitement (2) – AB: lactame encore acceptable empiriquement actuellement en Belgique (<10-15% de MRSA dans infections des tissus mous) – Penser au CA-MRSA si absence de réponse, facteurs de risque, voyage USA, Australie – Alternatives en ambulatoire • Clindamycine 3 x 300-450mg • Doxycycline 2 x 100mg • Cotrimoxazole 2x 1 à 2 co Forte 30 Prévention des infections récurrentes • Message éducationnel concernant l’hygiène personnelle et les soins de plaie – Plaie suppurante couverte par un pansement propre et sec – Bonne hygiène personnelle avec bains réguliers et hygiène des mains (eau/savon ou solution hydro)alcoolique en particulier après les soins de plaie ou après contact avec un item ayant eu un contact direct avec la plaie – Eviter de réutiliser ou partager des objets (rasoir, serviettes, draps) ayant eu un contact avec la plaie infectée 31 Prévention des infections récurrentes • Hygiène de l’environnement: à considérer chez les patients avec des infections récurrentes • Focaliser les efforts de nettoyage sur surfaces qui entrent fréquemment en contact avec la peau nue ou mains du patient chaque jour (plan de travail, poignée de porte, baignoire, siège WC, serviette bains,….) 32 Décolonisation (1) Quand ? à considérer si • Infections récurrentes • Transmission parmi les membres de la famille (ou d’autres contacts proches) Comment ? • Mupirocine nasale 2X/J pdt 5-10j • Douche avec savon chlorhexidine ou Isobétadine • Antibiotique : Rifampicine + Cotrimoxazole/ Doxycycline si échec mesures ci-dessus 33 Décolonisation • Qui : patient lorsque infection active est traitée, considérer décolonisation des contacts asymptomatiques à domicile • Screening: pas recommandé en routine si au moins une des infections précédente a été documentée comme due au MRSA • Les cultures de surveillance après une décolonisation ne sont pas recommandée en routine en l’absence d’infection active 34 Impact de la décolonisation ? • 183 enfants avec infection des tissus mous à MRSA et portage + (nez ou axillaire ou inguinale) • Décolonisation cas vs décolonisation cas et membres de la famille • Bactroban nasal + toilette chlorhexidine 4% Fritz et al Clin Inf Dis 2012:54 % cumulatif d’infections récurrentes après décolonisation Chez l’enfant Dans la famille Fritz et al Clin Inf Dis 2012:54 Conclusions • Emergence du CA-MRSA en Belgique comme cause d’infection des tissus mous, parfois infection profonde (pneumonie nécrosante) • Souche ST80, USA300: caractéristiques fitness, virulence • Dissémination intrafamiliale (colonisation et infection), risque transmission aux travailleurs de santé • Physiopathologie autres S. aureus • Contrôle passe par décolonisation mais aussi hygiène personnelle et de l’environnement Affection à déclaration obligatoire à l’inspecteur d’hygiène 38 Leucocidine de Panton Valentine • Exotoxine • Provoque formation de pores dans membranes des cellules infectées (neutrophiles) • Lésions nécrotiques dans infections mucocutanées, pneumonies nécrosante 39 40 41 Le MRSA est reconnu comme pathogène nosocomial aux USA depuis le début des années 80 ; en Belgique depuis le début des années 90 42 Distribution des CA-MRSA en Belgique 43 Denis et al. J Antimicrob Chemother. 2005 Dec;56(6):1103-6 Naesens et al. J Med Microbiol. 2009 Sep;58(Pt 9):1247-51 43