Histoire:
La romanisation de la Gaule
Complément de connaissances
Afadec - Olivier Damourette – Droits de reproduction réservés 2
intérêt à valoriser son rival afin de rendre son triomphe plus éclatant encore. Son ouvrage
majeur sur le thème, La guerre des Gaules, loue ainsi les ardeurs défensives des Gaulois.
Tenter de comprendre le monde romain, c’est prendre conscience que l’expansion, au
nord, se fixe à la frontière écossaise, et au sud en Égypte ; d’est en ouest la sphère s’étend
au IIe siècle de notre ère de l’Espagne à la Syrie. La Gaule n’est donc qu’un aspect de la
domination romaine sur le monde, qui profite comme toutes les autres provinces des
conditions de paix garanties à partir du Ier siècle : la Pax romana. C’est dire que le
développement économique peut être une manifestation de la paix en même temps qu’une
cause de la romanisation.
L’armée contribue, en outre, à diffuser la culture romaine. Par ses conquêtes d’abord, c’est
évident, et l’ordre qui en découle. En ce sens, la force publique est un instrument de
stabilisation politique, qui contribue à garantir des conditions de prospérité. Mais l’armée est
en-soi un instrument d’intégration (en accueillant des soldats des provinces conquises) et de
diffusion culturelle (installation de retraités dans toutes les provinces de l’Empire). Il est donc
acquis que l’armée est le premier vecteur de la romanité, celui par lequel Rome est passé du
statut de cité à celui d’État puis d’Empire. Or, si l’armée explique les victoires, elle ne saurait
suffire à comprendre la réussite des paix qui leur succèdent.
B) La romanisation par l’intégration
La romanisation est un phénomène d’autant plus remarquable qu’elle s’impose sur un
territoire très hétérogène d’un point de vue culturel. Dans ce vaste ensemble, la figure de
l’empereur 2 domine, elle est un trait d’union qui concentre tous les pouvoirs. Puisqu’un culte
est dû à la figure impériale, la religion devient une manifestation de l’autorité politique. Ainsi
s’impose une confusion entre les pouvoirs, à laquelle sont contraints tous les peuple du
monde romain – ce qui ne prévient en rien du succès de croyances distinctes comme le
christianisme. L’évolution de la citoyenneté dans le monde romain traduit la souplesse des
institutions impériales.
Si l’empereur est une figure nécessaire, son absolutisme n’est pas conservateur. En effet,
la citoyenneté, à laquelle sont liées la liberté et la participation à la vie politique, est d’abord
fondée sur des critères ethniques : sous la République, la qualité est attribuée aux individus
issus de pères romains. Or, la définition évolue avec les frontières de l’Empire. C’est ainsi
qu’en 212 l’empereur Caracalla promulgue un édit qui accorde la citoyenneté romaine à tous
les hommes libres de l’Empire, quelle que soit leur province d’origine. Si des préoccupations
fiscales peuvent expliquer cette mesure, elle illustre un aspect majeur de la romanisation :
l’intégration citoyenne, sans préjugé ethnique ni culturel. Cette mesure peut s’apparenter à
une forme de « décolonisation », exemple unique dans l’histoire de l’humanité à une échelle
aussi vaste. L’idéal égalitaire est en même temps porteur de vertus politiques puisque
l’intégration efface les distinctions issues des conquêtes militaires ; elle préserve donc l’unité
et la paix. Notons, enfin, que Caracalla est le fils de Septime Sévère, c’est-à-dire du fondateur
2 Après avoir été une République, Rome devient un Empire à compter de l’année 27 avant notre ère.