Les nouvelles de l’Osmothèque n°64
Le Bigaradier
LE BIGARADIER
L’Oranger Bigaradier : une noble nature dédiée au parfum
La mythologie nous enseigne que Zeus offre des
fleurs d’oranger à Héra, sa future épouse. Et que le
fameux Jardin des Hespérides, également appelé le
Jardin des Pommes d’Or, fait probablement allusion à
l’oranger bigaradier.
Le bigaradier est une plante exceptionnelle qui ne laisse
indifférent ni la femme de lettres, ni le parfumeur.
Madame de Sévigné avoue en parlant de la fleur
d’oranger: « J’en suis folle, c’est le soulagement de tous
mes maux ». Francis Kurkdjian confesse : « Que ce soit
sous forme de Néroli ou d’absolue, la fleur d’oranger a
toujours enflammé l’imaginaire des parfumeurs ».
Depuis l’origine, le bigaradier est associé au bonheur, à
l’amour et au mariage. Sa fleur symbolise la pureté et la
générosité. Ses feuilles toujours vertes traduisent l’amour qui dure toute une vie, ses fleurs
blanches, la candeur de la fiancée, ses fruits, l’espoir d’une descendance.
L’oranger bigaradier (citrus aurantium amara) appartient, comme tous les arbres à agrumes, à
la famille des rutacées. Il ne peut être confondu avec l’oranger doux (citrus sinensis ou aurantium
dulcis), dont il diffère par un port plus vigoureux, une taille plus petite, un bois épineux et
rustique.
Le bigaradier est originaire, comme la plupart des arbres à agrumes, de la Chine méridionale. Sa
diffusion est assurée par les Arabes dès le 8ème siècle en Syrie et en Egypte. Les Croisés le
découvrent en Palestine et l’introduisent en France. Sa culture se répand en Sicile et en Espagne.
L’Eau de la Reine de Hongrie, à base de romarin, est offerte au roi de France Charles V (XIVème
siècle), enrichie de fleur d’oranger.
Dès le 16ème siècle, les fleurs du bigaradier sont traitées par
distillation à la vapeur d’eau. Marie de Médicis, mère de Louis XIII,
fascinée par son parfum souriant et opulent, met la fleur d’oranger
à la mode. Louis XIV confie plus tard à Mansart la construction de
l’Orangerie du Château de Versailles. Le bigaradier prend le nom
majestueux de Grand Bourbon. Les célèbres eaux fraîches Acqua di
Regina et Acqua Mirabilis, élaborées à Florence au couvent de Santa
Maria Novella, contiennent vraisemblablement de la fleur
d’oranger. Elles préfigurent les premières eaux de Cologne.
Le Bigaradier, l’eau de Cologne et l’Italie forment ainsi une trilogie de légende. C’est Anne-Marie
de la Trémoille, épouse du prince de Nérola qui, adepte inconditionnelle de la fleur d’oranger,
donne son nom définitif à l’essence de Néroli.