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Les Annélides
par Jon G. Houseman
Introduction
On retrouve des animaux ayant la forme de vers (vermiformes) et ne possédant pas de
pattes dans environ 14 embranchements d'invertébrés Protostomiens. Le mot ver
désigne donc un grand nombre d'animaux qui ne sont ni des Mollusques ni des
Arthropodes. Ces 14 embranchements dérivent tous d'un ancêtre commun
Plathelminthe, mais ont peu d'autres choses en commun.
Au cours de ce laboratoire, vous examinerez trois différentes architectures chez les
Annélides: un Polychète marin, un lombric et une sangsue. Le lombric (ver de terre)
servira à illustrer l'architecture générale des Annélides, et vous observerez les
principaux organes ainsi que les caractéristiques externes et internes des membres de
l'embranchement. Vous comparerez ensuite le lombric au Polychète qui est plus
primitif. Finalement, vous examinerez l'arrangement des muscles chez la sangsue et
tenterez de relier cet arrangement musculaire au mode de locomotion des trois
représentants de l'embranchement.
Le lombric est l'Annélide qui vous est le plus familier mais il n'est pas nécessairement
représentatif des formes variées chez les différentes espèces dans l'embranchement.
Les Annélides sont l’un des embranchements actuellement les plus diversifiés (le
7ième) et possèdent plusieurs adaptations importantes qui ont assuré leur succès. À
l’image des membres de l'embranchement des Arthropodes, le plus diversifié
actuellement, ils dérivent d'un ver plat. Leur caractéristique la plus évidente lorsque
l'on examine leur anatomie externe est leur segmentation (ou métamérisation). Un
examen attentif de l'anatomie interne révèle que les organes internes reflètent
également cette segmentation et sont souvent répétés dans chaque segment ou
métamère.
Quelques architectures d'Annélides
Certains des Annélides les plus primitifs vivent dans les sédiments marins où ils
s'enfouissent plus ou moins profondément. Certains vers sédentaires vivent dans des
tubes qui les protègent et utilisent leurs tentacules pour capturer leur nourriture à la
surface des sédiments alors que d'autres, plus spécialisés, se nourrissent en filtrant
l'eau qu'ils font circuler dans leur terrier. Certains Polychètes errants ont complètement
quitté leur terrier et peuvent nager en se servant de leur parapodes comme rames pour
augmenter l'efficacité des ondulations du corps comme mode de locomotion. Chez ces
vers errants, le côté droit et le côté gauche de chaque métamère sont cloisonnés et ce
cloisonnement augmente l'efficacité de la locomotion. Pourquoi?
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Les vers de terre illustrent bien les adaptations de l'architecture des Annélides à la vie
en milieu terrestre. Leur impact sur les sols est d'ailleurs aussi important que celui des
Polychètes sur les sédiments marins. Les lombrics permettent un enrichissement des
sols en accélérant le recyclage des éléments nutritifs en milieu terrestre. Il n'y a pas de
cloison entre le côté gauche et le côté droit du coelome chez ces vers qui se déplacent
en fouissant dans le substrat en ligne droite.
La sangsue est atypique des Annélides. Son coelome est réduit à une série de sinus qui
entourent les organes internes et le système circulatoire.
Clitellata
Lumbricus terrestris
Le spécimen classique du corps segmenté des Annélides est le lombric ou ver de terre
commun, Lumbricus terrestris. Le jour, cet animal reste enfoui dans un terrier, dont il
sort la nuit pour se nourrir de feuilles et d’autres débris végétaux. Même lorsqu’il se
nourrit, le lombric ne quitte jamais complètement son terrier, la queue restant ancrée
dans la terre pendant que le reste du corps s’étire à l’extérieur pour chercher de la
nourriture. Le lombric tient la nourriture dans la bouche et la ramène dans son terrier
en se rétrécissant par contraction. À toutes fins pratiques, on ne voit un lombric
complètement sorti de son terrier que lorsque ce dernier est inondé d’eau mal
oxygénée. Pourquoi une eau mal oxygénée force-t-elle le lombric à sortir de son
terrier? Rappelez-vous que le corps du lombric a évolué pour pouvoir creuser dans un
milieu terrestre, et que de nombreuses modifications du corps primitif des Annélides
sont propres à cette espèce.
On peut attraper des lombrics vivants la nuit ou en acheter chez un fournisseur
d’appâts pour la pêche. La plupart des entreprises de fournitures biologiques vendent
des lombrics conservés. Des lombrics qui ont été anesthésiés par immersion pendant
10 à 20 minutes dans de l’éthanol à 20 % conviennent particulièrement bien à
l’observation de l’anatomie interne. Lorsque vous étudiez l’anatomie interne d’un
spécimen conservé, couvrez-le d’eau; dans le cas d’un ver anesthésié, couvrez-le
d’une solution 0,15 M de NaCl.
Anatomie externe
Pour observer l’anatomie externe du lombric (Figure 1), il est préférable d’utiliser un
spécimen conservé. La plus grande partie du corps est cylindrique, et la face ventrale
légèrement aplatie est plus pâle que la face dorsale de l’animal. Tous les Annélides ont
sur chaque segment véritable deux paires de soies, à raison d’une paire de chaque côté
du corps. Si vous passez délicatement le doigt sur la face ventrale plus claire de
l’animal, vous pourrez sentir les soies. Il se peut que vous deviez essayer à différents
endroits le long du corps de l’animal, parce que dans certaines régions, les soies se
sont rétractées. Assurez-vous de localiser les deux paires de soies d’un segment. Après
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avoir trouvé une partie du corps où les soies sont sorties, mettez le ver sous le
microscope à dissection et examinez-les de plus près. Comment les soies sont-elles
orientées et regroupées? D’après vous, comment cela est-il lié à leur rôle dans la
locomotion? Comment la disposition des soies est-elle liée à l’autapomorphie qui
définit les Annélides?
Les Annélides sont connus pour leur structure métamérique, mais tout ce qui
ressemble à un segment n’en est pas toujours réellement un. Ce qui ressemble au
premier segment du corps n’est pas un véritable segment. C’est le prostomium, qui
est à peine davantage qu’une lèvre surplombante située devant la bouche, elle-même
située sur la face ventrale du péristomium. À l’extrémité postérieure de l’animal,
l’anus est entouré du pygidium, qui n’est pas non plus un véritable segment. Ce qui
est ou n’est pas un véritable segment est lié à la morphologie de la larve trochophore.
La larve trochophore possède ces trois régions (prostomium, péristomium et
pygidium), mais on ne s’entend pas sur le fait de savoir si la deuxième de ces régions
est un segment. Les zoologistes s’entendent pour dire que lorsque des segments
s’ajoutent, ils apparaissent entre les régions moyenne et postérieure de la larve
trochophore, et tous s’entendent sur le fait que le prostomium et le pygidium, qui sont
les parties les plus antérieure et postérieure de la larve, ne sont pas de véritables
segments. Par contre, certains zoologistes croient que le péristomium, qui constitue la
région moyenne de la larve trochophore, est le premier véritable segment, alors que
d’autres sont d’avis que ce n’est pas un segment. Nous pouvons laisser ce débat à
d’autres, mais faites attention lorsque vous comptez les segments. Les numéros de
segment indiqués dans ce guide sont fondés sur l’hypothèse selon laquelle le
péristomium n’est pas un véritable segment. Si vous croyez que c’en est un, ajoutez 1
aux numéros de segment qui servent de repères.
Figure 1 Caractéristiques externes de la partie antérieure d’un lombric
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Examinez la face dorsale de l’animal. Les segments nos 32 à 37 sont modifiés pour
former le clitellum, qui joue deux rôles importants dans la reproduction : il forme la
gaine muqueuse qui favorise l’accouplement (Figure 2) et il produit le cocon qui
protège les œufs fécondés une fois qu’ils sont pondus.
Pour observer les orifices externes de l’appareil reproducteur, vous devrez peut-être
laisser sécher l’agent de conservation de votre spécimen. Les orifices des oviductes
sont situés sur le segment no 14, près de la ligne médioventrale. Les deux pores
génitaux mâles, aux bords très proéminents et situés sur le segment no 15, sont
beaucoup plus faciles à voir. Cherchez les sillons sexuels, qui s’étendent vers l’arrière
jusqu’au bord antérieur du clitellum. Pendant que les vers qui s’accouplent sont
entourés de la gaine muqueuse sécrétée par le clitellum (Figure 2), les spermatozoïdes
d’un ver se déplacent le long des sillons sexuels jusqu’aux orifices des réceptacles
séminaux situés entre les segments nos 9 et 10 ainsi que 10 et 11 de l’autre ver. Ces
orifices peuvent être difficiles à voir parce qu’ils sont situés entre des segments.
Si vous avez un lombric vivant, mettez-le sur un plateau recouvert de terre et observez
comment il se déplace. Vous pouvez aussi observer les vers vivants sur le plateau de
démonstration. Quand vous avez pris votre spécimen au début de la séance, avez-
vous remarqué comment il a réagi lorsque vous avez voulu le sortir du
contenant? La forme de l’extrémité postérieure de votre ver a-t-elle changé? Ce
changement de forme est-il lié à la manière dont le ver s’ancrerait dans le terrier
où il vit? Vous auriez dû observer un réflexe de fuite par lequel l’animal est rentré
dans son terrier. Quel est le lien entre ce réflexe et ce que vous venez d’observer?
Plus tard au cours de la séance, vous allez voir sur les lames de coupes transversales
les axones géants spécialisés responsables de la coordination de ce réflexe.
Anatomie interne
Utilisez autant que possible un lombric vivant anesthésié pour vos observations de
l’anatomie interne (Figure 3 et Figure 4). Cette préparation présente un certain nombre
d’avantages par rapport à un spécimen conservé. En particulier, des structures
Figure 2 Alignement de deux lombrics qui s’accouplent
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délicates telles que les métanéphridies, le sperme et les oviductes sont plus faciles à
voir à cause des différences de couleur. Les agents de conservation ont tendance à
donner à tous les tissus internes du lombric la même couleur brune plutôt fade.
L’organisation de l’appareil circulatoire est également plus facile à voir dans un
spécimen vivant, parce que l’hémoglobine conserve sa couleur rouge caractéristique
au lieu du brun foncé que l’on trouve dans les spécimens conservés.
Anesthésiez votre ver en le mettant dans de l’éthanol à 20 % pendant 10 à 20 minutes
ou jusqu’à ce qu’il cesse de se débattre. Même si l’animal est anesthésié dans de
l’éthanol à 20 %, les mouvements de l’appareil circulatoire et de l’appareil digestif
sont encore visibles lorsque vous ouvrez l’animal. Une démonstration courante à
l’époque de la prohibition et dans les réunions de mouvements antialcooliques
consistait à montrer les effets de l’alcool diabolique en plongeant un lombric dans un
verre d’eau et dans un verre de boisson fortement alcoolisée. Le ver se débat et
meurt dans l’alcool mais pas dans l’eau. Pourquoi? Pourquoi l’éthanol dilué agit-
il comme anesthésique?
Pour observer votre ver au microscope à dissection, placez votre spécimen anesthésié,
la face dorsale vers le haut, contre un côté du plateau à dissection. En épinglant votre
spécimen, vous allez déclencher le réflexe de fuite, et vous ne voulez pas que l’animal
se libère. Pour vous en assurer, mettez des épingles de chaque côté dans le
prostomium et à trois ou quatre endroits à travers les côtés du ver derrière le clitellum.
Mettez une autre épingle dans un segment postérieur.
Avant d’inciser le ver, rappelez-vous que les organes internes situés derrière le
clitellum se répètent dans chaque segment, et que ces segments n’ont aucune structure
en propre. C’est donc derrière le clitellum que vous pouvez mettre à l’épreuve vos
talents de chirurgien. Faites l’incision à l’aide d’une paire de ciseaux fins plutôt que
d’un scalpel. Si vous utilisez un scalpel, veillez à ce qu’il soit bien affûté. Mettez la
pointe du scalpel dans l’incision et coupez en soulevant. Si vous utilisez des ciseaux
fins, soulevez la paroi du corps tout en coupant. Cette manière de faire minimisera les
Figure 3 Principales caractéristiques internes d’un lombric
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