Curiosity, le rover martien dernier cri et fruit
d'une coopération internationale, est LE super
scientifique. Il ne lui manque que la parole.
Arrivé à destination début août, il aura fallu
au robot 8 mois de voyage sidéral pour passer
de la planète bleue à la rouge.
Objectifs : déterminer si la vie a pu exister
sur Mars, caractériser son climat et sa géologie.
Voire préparer une mission humaine de notre
lointaine voisine.
Jusqu'à présent, tout se déroule comme prévu,
les données commencent à affluer et le robot
semble bien décidé à tenir ses promesses.
Première rencontre avec Super Rover,
qui a dÊores et déjà trouvé les preuves
de la présence passée dÊeau sur Mars.
Chercher
Regarder vers l’Espace
Remarquable, extraordinaire, génial,
sensationnel... Aucun superlatif n'est
suffisant pour décrire la prouesse
technologique de Curiosity, héros de la
mission MSL,
Mars Science Laboratory
.
Une fois encore, la réalité rattrape la
science-fiction.
Par Karol Barthelemy
Curiosity est le plus gros engin
jamais posé sur Mars, et de loin
le plus sophistiqué jamais envoyé
sur une autre planète.Avec dix instruments
scientifiques embarqués, il représente à
lui seul rien moins qu'un laboratoire de
200 personnes !
Une odyssée martienne
Durant une année martienne, soit deux
terrestres, Super Rover va sillonner le sol
de la planète rouge intelligemment, c'est-
à-dire en repérant à distance les cibles
physiques potentiellement intéressantes.
Au fur et à mesure de ses pérégrinations,
il va opérer à la manière d'un chirurgien
de haute précision pour analyser la
composition du sol et de l'atmosphère,
en profitant pour récolter toutes les
données météo. Notons que grâce à
sa source dÊénergie nucléaire (utilisant
du plutonium-238 comme source de
chaleur), le robot pourra fonctionner
longtemps, peut-être plus de dix ans.
26 / LATITUDE 5 / N°98 / OCTOBRE 2012
Chimiste, géologue... Curiosity est à lui seul un fantastique laboratoire roulant !
© NASA/JPL-CALTECH/MSSS
© NASA/JPL-CALTECH/MSSS
A la recherche des éléments de vie
LÊobjectif principal est non pas de détecter la vie, mais de rechercher
si les conditions régnant sur Mars dans un lointain passé, au cours
dÊune époque dite noachienne‰ (approximativement le premier
milliard dÊannées dÊexistence de Mars), ont pu être propices
à lÊapparition dÊune vie semblable à celle qui sÊest développée
sur Terre. Il sÊagit donc de savoir quelles étaient la température,
la pression et la composition de lÊatmosphère de lÊépoque, lÊactivité
volcanique, lÊétendue et la nature des surfaces aquatiques, si des
molécules organiques pouvant servir de matériaux à la vie étaient
présentes, etc. Curiosity cherchera notamment des traces de
méthane, un gaz souvent lié à la présence de la vie.
Car l'on sait déjà, grâce aux missions martiennes précédentes,
que la planète rouge a été humide et relativement chaude pendant
des centaines de millions dÊannées avant de devenir un désert
sec et glacial il y a environ trois milliards dÊannées. On connaît
les régions où se sont déposés des minéraux associés à la
présence dÊeau à lÊétat liquide et lÊon a identifié les zones les plus
propices à lÊapparition éventuelle dÊune vie martienne : le site
du cratère Gale nÊa pas été choisi par hasard pour l'atterrissage
de Curiosity. Selon les scientifiques, ce sol sédimentaire était
rempli d'eau il y a quatre milliards d'années.
© NASA/JPL CALTECH, 2011
Site d'atterrissage du rover. Curiosity s'attaque déjà aux pentes du Mont Sharp (ici à 20 km du robot) qui culmine à 5000 m au-dessus des plaines environnantes.
Lues de haut en bas, ses strates sédimentaires fourniront une chronologie de la jeunesse de la planète.
Super Rover
LATITUDE 5 / N°98 / OCTOBRE 2012 / 27
Intégration de Curiosity au centre JPL (Jet Propulsion Laboratory, Californie) de la Nasa.
28 / LATITUDE 5 / N°98 / OCTOBRE 2012
Météorologie martienne
Super Rover sera aussi la première station météo de longue durée
sur Mars, fournissant températures, flux ultraviolets, vents,
pressions atmosphériques⁄ La grande innovation tient dans
l'instrument qui mesure l'atmosphère martienne grâce à un
capteur installé à 1,70 m d'altitude. Grâce à lui, nous découvrons
déjà que la température y est plus froide pendant la journée
(-10°à -15°C contre 3°C en surface), et plus chaude pendant
la nuit (Curiosity a déjà enregistré de nuit une chute de la
température au sol jusqu'à -90°C).
Dernier détail : lÊastromobile martienne aura peut-être à affronter
une super tempête, pour laquelle elle est parée. En effet, de façon
très aléatoire (en 2001et 2007 pour les dernières apparitions),
une gigantesque tempête se lève sur Mars, engloutissant la planète
d'une épaisse couche de poussière qui rend les températures quasi
stables de jour comme de nuit pendant plusieurs mois⁄ Si
ce scénario se déclenchait à nouveau, Super Rover serait alors
un enquêteur de premier ordre ! 4
4
Guider le rover et récupérer les données
Inédit, Super Rover restera en contact permanent avec la Terre.
Grâce aux satellites gravitant autour de Mars, ses données
parviennent sur Terre en 14 minutes seulement, soit quasiment
en temps réel.
Ses mouvements et déplacements sont pilotés à distance par une
équipe de la Nasa. Pour cela, les images capturées par Curiosity
permettent aux scientifiques de modéliser les environnements
terrain en 3D pour bien préparer les mouvements du robot
à raison de 40 mètres par jour.
High Tech
Pour équiper notre Super Rover de caméras à tête chercheuse
capables d'analyser à distance, de lasers, d'appareils photo ultra-
sensibles, de spectromètres, etc, des scientifiques de tous pays
ont uni leurs compétences. Deux des dix instruments scientifiques,
et pas des moindres, sont français, réalisés sous la maîtrise
d'ouvrage du CNES :
ChemCam (
CHEMistry CAMera
) pour photographier et
analyser les roches de surface. Remarquablement ingénieux,
ChemCam repère une roche potentiellement intéressante.
Un laser bombarde, jusqu'à 9 m de distance, la dite roche d'une
trentaine d'impulsion de cinq nanosecondes et d'un mégawatt
de puissance. La surface ainsi portée à 8000°C se vaporise en
un plasma dont ChemCam analyse le spectre lumineux pour
déterminer la composition précise de la roche.
SAM (
Sample Analysis at Mars
), véritable laboratoire d'analyse
chimique, doit déceler, extraire et analyser les composants
des échantillons prélevés par Curiosity. LÊobjectif est de détecter
une large gamme de composés organiques issus de l'atmosphère
et du sol, de gaz de constitution des minéraux. Il permet aussi
de rechercher les isotopes du carbone et des autres atomes ainsi
détectés, ainsi que des isotopes de gaz rares. Notons que les
échantillons de roche sont vaporisés puis transformés en gaz,
plus faciles à analyser qu'un solide.
Pour plus dÊinfos : www.cnes.fr
Un amarsissage périlleux
7 minutes de terreur‰ a-t-on pu lire dans la presse
internationale le 6 août, et pour cause : les 7 min de descente
de Curiosity avaient de quoi être fébriles quand on sait
que 60% des capsules qui ont tenté de se poser sur Mars
se sont crashées à cause de la faible densité de l'atmosphère.
Sans compter les 900 kg du rover et un périmètre de 237 m
pour se poser⁄ Tout s'est heureusement bien déroulé. Une
vidéo propose d'ailleurs une remarquable reconstitution de
la descente de Curiosity, comme si on y était !
http://www.dailymotion.com/video/xtng21_la-descente-
de-curiosity-sur-mars-en-haute-definition_tech
Moins de deux mois après son arrivée, Curiosity a découvert des graviers
typiques dÊune présence passée dÊeau vive. Plus que dÊajouter une preuve de
la présence dÊeau passée, la découverte de ce lit de rivière martienne prouve
surtout lÊexistence dÊun cycle de lÊeau complexe, important pour que la vie
puisse éclore et se développer.
Premier test de ChemCam. Les cercles montrent la roche désignée tandis
que le carré zoome sur la zone ciblée, et atteinte, par le laser.
© NASA/JPL-CALTECH/LANL/CNES/IRAP
© NASA/JPL-CALTECH/MSSS
LATITUDE 5 / N°98 / OCTOBRE 2012 / 29
Approuvé en 1992, le programme MetOp a pour objectif
de fournir des prévisions météorologiques à moyen terme
mais aussi d’aider à la réalisation d’études climatiques
et environnementales à long terme. Ce programme est le fruit
d’une coopération exemplaire établie entre l’ESA et EUMETSAT
depuis plus de trente ans. Grâce à cette coopération, l’Europe
dispose d’une flotte de satellites de météorologie qui contribue
à une connaissance maximale de la météo de notre planète. Tandis
que les satellites de la série Météosat scrutent la Terre depuis
un point fixe à presque 36 000 km d’altitude au-dessus du golfe
de Guinée, les satellites MetOp survolent l’ensemble du globe
à une altitude plus basse (817 km). Cette altitude leur permet
de fournir des données mondiales, avec une résolution fine
ne pouvant être obtenue que sur une orbite basse. Premier satellite
météorologique européen en orbite polaire, MetOp apporte une
contribution majeure à la prévision numérique du temps,
la surveillance du climat et de l'environnement.
Les satellites d’observation de la Terre jouent un rôle primordial
dans la compréhension de notre milieu à l’échelle du globe.
Ils permettent de disposer de prévisions météorologiques cruciales
pour de nombreuses activités : aviation, navigation, pêche,
construction et même sports et loisirs. Ces prévisions, essentielles
pour la sauvegarde des vies humaines et la protection des biens,
profitent également aux secteurs de l’économie européenne
sensibles aux conditions météorologiques, notamment l’énergie,
Le 17 septembre dernier, MetOp-B, le deuxième satellite météorologique européen sur orbite polaire, était lancé par Soyuz
depuis le Cosmodrome de Baïkonour (Kazakhstan). Au terme de trois jours de tests réussis, l’ESA a confié ce satellite
à EUMETSAT, opérateur privé en charge de l’exploitation du système au bénéfice de ses utilisateurs.
les transports, la construction, l’agriculture et le tourisme.
«Le lancement de ce deuxième satellite MetOp intervient environ
deux mois et demi après celui de MSG-3, ce qui illustre parfaitement
la vitalité des programmes de satellites météorologiques européens
développés dans le cadre de la coopération entre l’ESA et
EUMETSAT. Chaque jour, ces services démontrent que les
investissements réalisés dans les infrastructures spatiales ont
des retombées positives pour l’économie et la société.»
a déclaré
Jean-Jacques Dordain, Directeur Général de l’ESA.
Mot de l’ESA
© ESA/EUMETSAT
2esatellite météo européen
sur orbite polaire
Dernier regard sur MetOp-B avant sa mise sous coiffe
en vue de son lancement.
© ESA
30 / LATITUDE 5 / N°98 / OCTOBRE 2012
la seconde génération des satellites MetOP : MetOp-SG. D’une
durée de vie de 21 ans, ce nouveau système comportera six satellites
dont le premier pourrait être lancé en 2020. 4
4
Mot de l’ESA
ESA hands over control of Metop-B
Three days after its successful launch atop a Russian Soyuz
launcher from Baikonur (Kazakhstan), MetOp-B was handed
over to Eumetsat for operations. All of Metop-BÊs systems
were checked to ensure that its solar array was deployed and
oriented towards the Sun. This orientation will provide crucial
power to run the satellite and its eleven scientific instruments.
MetOp will ensure the continuity of the weather and
atmospheric monitoring service provided by its predecessor
Metop-A, which has been circling the globe from pole to pole,
14 times a day, since 2006. The Metop satellites are Europe's
first operational meteorological satellites in polar orbit. Unlike
the Meteosat satellites, which are watching about half of our
planet from a fixed vantage point almost 36 000 km above
the Gulf of Guinea, Metops work at lower altitude and fly over
the whole globe to provide additional data on the atmosphere.
Flying at an altitude of 817 km, each Metop satellite carries
the same sophisticated suite of instruments providing fine-scale
global data, which can only be gathered in the low Earth orbit,
such as vertical profiles of atmospheric temperature and
moisture, wind speed and direction at the ocean surface,
and some atmospheric trace gases. They deliver data for
numerical weather prediction - the basis of modern weather
forecasting - and climate and environmental monitoring.
The three Metop satellites, launched sequentially, will provide
continuous data until 2020.
Conçus sous la maîtrise d’œuvre d’EADS Astrium, les satellites
MetOp emportent tous le même ensemble d’instruments
sophistiqués, garantissant ainsi un service opérationnel continu
jusqu’en 2020. En accomplissant le tour de la planète 14 fois par
jour, Metop fournit des données précises telles que les profils
verticaux de la température et de l’humidité atmosphériques,
la vitesse et la direction des vents à la surface des océans et les
concentrations de certains gaz à l'état de traces. Lancé en octobre
2006, le premier satellite Metop-A fournit des données
opérationnelles depuis le 15 mai 2007. Ses observations ont
considérablement amélioré les prévisions météorologiques jusqu’à
dix jours d’échéance. Le second, MetOp-B assurera la continuité
des services de surveillance météorologique et atmosphérique
fournis par son prédécesseur dont la durée de vie théorique
est désormais dépassée. Les équipements de pointe et les capacités
de diffusion de MetOp lui permettront de détecter et de signaler
l’émergence de phénomènes météorologiques qui ne peuvent pas
être observés en orbite géostationnaire. Le satellite donnera ainsi
la possibilité de diffuser des alertes de manière beaucoup plus
précoce. Chaque point de la surface de la Terre est couvert tous
les cinq jours et permet de constituer un panorama global en deux
jours. Le dernier de la série, MetOp-C, devrait lui être lancé en fin
d’année 2017.
Soucieux de garantir la continuité opérationnelle du système spatial
européen de météorologie et la qualité des données transmises,
l’ESA prépare déjà l’avenir. Dès 2013, les premiers satellites
Sentinelle destinés à la surveillance de notre environnement et
du climat, seront lancés dans le cadre de l’initiative de Surveillance
mondiale pour l’environnement et la sécurité (GMES) conduite
en partenariat avec la Commission européenne. Par ailleurs,
Astrium conduit déjà, pour le compte de l’ESA, l’étude sur
Le 17 septembre, Metop-B est lancé par Soyuz depuis le cosmodrome de Baïkonour (Kazakhstan).
© EUMETSAT
1 / 10 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !