Les chantiers de l’histoire 9
encore la partie, en créant le Canada par exemple(1), – et aussi, bien
sûr, de contrôler la population indienne. Quoiqu’une partie importante
de l’économie se fondât à l’époque sur l’esclavage, ces pères fondateurs
ont reconnu que la traite des Noirs ne pouvait pas continuer.
Cependant, même ceux qui étaient disposés à abolir l’esclavage et à
libérer les Noirs pensaient que ceux-ci ne possédaient pas les capaci-
tés nécessaires pour devenir citoyens d’une république. Cela signifiait
de fait l’élimination du continent africain comme source d’immigra-
tion, et ce jusqu’à une époque très récente. Il y eut donc des velléités
de retour en Afrique, et pas simplement à l’initiative des Noirs.
Certains furent poussés par les Blancs, comme cette colonie d’esclaves
libérés qu’une société philanthropique américaine installa dans ce qui
deviendra plus tard le Libéria.
Pendant cette première période, le conflit était réel entre les
Américains et les Européens – en particulier l’Empire britannique –,
parce que le pouvoir impérial voulait garder les “bons” pour lui et
déverser ses “déchets” aux colonies. Les
Américains ont résisté à ce flux en prove-
nance de l’Europe. C’est la raison pour
laquelle les Britanniques ont dû inventer
l’Australie : pour remplacer les États-Unis,
en tant que pays où l’on pouvait envoyer
des forçats. Après l’indépendance des
États-Unis, le problème s’est résolu de lui-
même par l’essor démographique très
important de la nouvelle République.
Tocqueville est venu aux États-Unis en
1830 pour observer la nouvelle démocratie
américaine. Il n’a pas parlé de l’immigra-
tion parce qu’il y en avait en fait très peu.
Ce n’est que par la suite qu’un essor de
l’immigration eut lieu. Dans les années
1830, après un demi-siècle de vie améri-
caine, la population blanche constituait une entité homogène, un
peuple anglo-américain, et l’immigration était considérée comme un
événement du passé. Puis, pendant les deux décennies qui ont suivi la
visite de Tocqueville, il y eut des arrivées par vagues.Cela ne s’est pas
fait de manière continue, mais avec des hauts et des bas.
Une immigration en dents de scie
Entre 1820 et 1840, le pourcentage d’immigrés dans la population était
au-dessous de 5 %.Ce qui était vraiment très bas. L’immigration n’avait
pas de poids dans la vie américaine. À partir de 1840, il y eut un énorme
pic, puis un arrêt encore une fois, en 1860, à nouveau un pic, puis une
1)- Ndlr. Voir, par exemple,
Jacques Portes, Le Canada
et le Québec au XXesiècle,
A. Colin, Paris, 1994 ;
Dirk Hoerder, Creating
societies immigrant lives
in Canada, McGill-Queen’s
University Press,
Montréal (Québec), 1999.
Deuxième épisode : 1835-1855
• Europe du Nord : révolution industrielle,
révolution démographique
• La république menacée par les suppôts du pape.
• Les camps se forment
• Comment verrouiller les portes ?
• Vers une nation d’immigrants.
Troisième épisode : 1860-1900
• Le chemin de fer transcontinental se construit
sur la patate à l’Est, sur le riz à l’Ouest.
• Dilemme californien : le Chinois est utile,
mais on ne veut pas de lui.
• Nationalisation, exclusion, régularisation.
• Découverte du Mexique