TESTS DE SENSIBILITE UTILES AU TRAITEMENT ANTIBIOTIQUE AMHIS W.*, BENSLIMANE A**, TIOUIT D.*, NAIM M.* Le rôle du laboratoire est fondamental dans le choix d'une thérapeutique antibiotique. La condition sine qua non étant l'isolement et l'identification de la bactérie incriminée dans l'infection. Le laboratoire de bactériologie dispose de nombreux tests de sensibilité des bactéries vis-à-vis des molécules d'antibiotiques, en particulier celles inscrites dans la nomenclature nationale. Ces tests permettent de détecter des résistances bactériennes et d'aider ainsi le médecin praticien dans sa prescription. Leur réalisation dépend, bien entendu, de données cliniques et épidémiologiques. • Recherche de la résistance à l'oxacilline (ou méthicilinorésistance) des Staphylocoques aureus et Staphylocoques coagulase négative si pathogènes). Notre exposé se limitera à l'antibiogramme, test le plus souvent demandé par le praticien de ville et le plus couramment effectué par les laboratoires de microbiologie. (Pour en savoir plus sur les autres techniques voir les références à la fin de l'exposé) TESTS DE SENSIBILITE La sensibilité d'une bactérie est mesurée par la concentration minimale inhibitrice (CMI) de l'antibiotique considéré. C'est la méthode de référence préconisée par l'OMS [1-2-3]. Cette CMI est la plus petite quantité d'antibiotique (ATB) capable d'inhiber une croissance visible à l'œil nu. La CMI d'un germe donné peut être mesurée par différents procédés de laboratoire : Selon les circonstances, sont effectués les tests suivants : • Antibiogramme ou test de diffusion de disque en gélose, • Dosage de la concentration minima inhibitrice (pour les bactéries isolées d'hémoculture, de liquides biologiques ou de suppurations profondes), • Recherche de la Bêta lactamase : enzyme produite par certaines bactéries : Hæmophilus, Neisseria., • Recherche de la résistance des entérocoques à la vancomycine, CMI en milieu liquide Principe (Figure 1) Figure 1 : Croissance bactérienne en présence de concentrations croissantes d’un antibiotique 0 0,25 0,5 1 2 CMI * S. microbiologie, HCA ** Labo. de biologie, CNMS) Médecine du Maghreb 2001 n°91 4 8 16 32 µg/ml TESTS DE SENSIBILITE… 23 On repartit dans une série de tubes à hémolyse un volume constant de bouillon nutritif, qu'on ensemence avec un inoculum fixe de bactéries, environ 106 /MI. Puis on ajoute à ces tubes des quantités croissantes de l'antibiotique à étudier (0,25-0,5-1-2-4-8-16-32 µg/ml). Un tube témoin est laissé sans antibiotique. Après une nuit d'incubation à 37°C, les tubes sont soigneusement examinés. Interprétation Le tube témoin sans antibiotique est uniformément trouble. Le premier tube de la série demeuré limpide indique précisément la CMI. CMI en milieu solide Principe (Figure 2) Figure 2 : Concentrations minimales inhibitrices (Ampicilline) CMI : A __________ B __________ A __________ B __________ A __________ B A __________ B __________ C __________ C __________ C __________ C __________ 0,25 µg 0,5 µg 1 µg CMI = 1 µg 2 µg 35 µg CMI = 2 µg A-B-C : Souches bactériennes différentes Pour la souche B la concentration minimale inhibitrice de l’Ampicilline est de 1 µg Pour la souche C la concentration minimale inhibitrice de l’Ampicilline est de 2 µg On répartit aux mêmes doses croissantes d'antibiotiques dans des tubes de gélose en fusion et ramené à 40°C environ. Puis chaque tube, avec sa propre dose d'antibiotique, est coulé dans une boîte de pétri où la gélose va se solidifier. Il est alors possible d'ensemencer sur cette série de boîtes plusieurs souches microbiennes différentes sous la forme de stries parallèles. Interprétation La CMI sera donnée par la première des concentrations d'antibiotique qui supprime sur la gelose toute culture apparente La CMI est comparée aux concentrations critiques qui permettent de classer la souche, pour l'espèce bactérienne étudiée et l'ATB testé, dans la catégorie clinique : sensible, résistante ou intermédiaire. Ces concentrations critiques résultent des nombreuses études pharmacologiques, statistiques et cliniques. Elles reflètent pour chaque antibiotique, les concentrations sanguines obtenues in vivo par administration d'une dose utilisable en thérapeutique Exemples : Streptococcus A : CMI critiques de l'Ampicilline ; 0,01-0,4 µg/ml. La comparaison de la CMI de l'ATB à ces concentrations critiques permet donc de classer la bactérie testée, dans la catégorie : - Sensible : La CMI est plus petite que la concentration critique minimale obtenue en thérapeutique, La souche peut être atteinte par un traitement à dose habituelle par voie générale. - Résistante : La CMI est plus grande que la concentration c ritique maximale pouvant être atteinte in vivo sans dépasser le seuil toxique. La souche ne pourra probablement pas être éliminée, quelles que soient les modalités du traitement. - Intermédiaire : La CMI est comprise entre les 2 concentrations critiques. La souche pourrait être atteinte par un traitement local, de fortes doses par voie générale, ou encore si l'antibiotique se concentre particulièrement bien au foyer infectieux (urine, salive, tissu, prostatique...). Médecine du Maghreb 2001 n°91 AMHIS W., BENSLIMANE A, TIOUIT D., NAIM M 24 Mesure de la CMI par diffusion de disque en gélose (antibiogramme) C'est la méthode utilisée en pratique courante, car la plus aisée, bien que parfois d'interprétation difficile. Principe Cette technique utilise des disques de papier buvard imprégnés d'une concentration donnée d'antibiotique déposé à la surface d'une gélose spécifique (Muller Hinton) coulée en boîte de pétri uniformément ensemencée d'une suspension (100 bactéries/ml) de la bactérie étudiée. Interprétation Après une nuit à 37°C, il s'établit un gradient de concentration de l'antibiotique. L'interaction entre la bactérie et l'antibiotique s'exprime par une zone d'inhibition dont le diamètre est une expression indirecte de la CMI. Grâce à des études comparatives portant sur un grand nombre de souches appartenant à des espèces bactériennes différentes, des droites de régression liant pour un antibiotique donné les CMI aux diamètres d'inhibitions correspondants ont été tracées. Il existe ainsi 2 diamètres critiques D et d correspondants respectivement à la concentration critique minimale et maximale; le diamètre étant calculé suivant la fonction : D = f (de CMI). Exemples : - infection urinaire à Esch e ri chia coli, les antibiotiques testés sont les suivants : . Bêtalactamines : Ampicilline, Amoxicilline + acide clavulanique, etc, . Aminosides : Gentamicine, Amikacine, . Quinolones : Acide nalidixique,acide pipémidique, Triméthoprime sulfamétoxazole, Furanes. - infection cutanée à Staphylococcus aureus : les antibiotiques testés sont : . Bétalactamines : Pénicilline, oxacilline, cephalotine, . Aminosides : gentamicine, amikacine, . Macrolides : Erythromycine, Spiramycine, pristinamycine, clindamycine; Vancomycine (si Méti R). AUTRES TESTS DE SENSIBILITÉ E-test Un autre test de détermination de la CMI dit E-test connaît actuellement un essor considérable. Mis au point par un laboratoire suédois (AB BIODISK), il est caractérisé par sa facilité et sa rapidité de réalisation mais surtout par sa précision dans la détermination de la CMI. Son principal inconvénient est son coût élevé. Antibiogramme selon la Technique NCCLS Ils permettent de classer une souche bactérienne en fonction du diamètre d'inhibition dans la catégorie S, R ou I. En définitive, la lecture de l'antibiogramme de la bactérie isolée d'un foyer infectieux consiste en la mesure des différents diamètres des zones d'inhibition entourant les disques d'antibiotiques testés. Ils sont comparés aux deux diamètres critiques de l'antibiotique correspondant portés sur une table de lecture. La réponse est soit S, I ou R selon que ce diamètre est respectivement plus grand que D, entre les deux diamètres D et d, ou plus petit que d. Dans un souci de standardisation, l'OMS préconise la technique mise au point par le National Committee for Clinical Laboratory Standars (NCCLS). Cette technique, dont toutes les étapes sont rigoureusement standardisées, comporte une partie "contrôle de qualité" qui garantit sa fiabilité. [3] En Algérie, plusieurs laboratoires commencent à appliquer cette technique, appelée à se généraliser dans les prochaines années. CONCLUSION Les résultats sont reportés sur une fiche spéciale ou fiche d'antibiogramme. Elle servira au médecin traitant soit : - à choisir un antibiotique pour traiter une infection donnée, - à rectifier un traitement de première intention inadapté. La liste des antibiotiques testés au laboratoire est choisie en fonction du germe et du site infectieux Médecine du Maghreb 2001 n°91 Pour être efficace, le traitement antibiotique nécessite la collaboration étroite avec le laboratoire. Après avoir isolé et identifié le germe responsable de l'infection, ce dernier est seul capable de déterminer le meilleur traitement. Il permet d'identifier les résistances bactériennes et de limiter leur sélection et leur diffusion par une prescription adéquate. Il permet aussi de suivre le déroulement du traitement par des contrôles bactériologiques réguliers. TESTS DE SENSIBILITE… 25 REFERENCES 1 - BACTERIOLOGIE MEDICALE PRATIQUE Jean Pierre Flandrois -Monique Chomarat 1988, 2 - ESSENTIAL PROCEDURES FOR CLINICAL MICROBIOLOGY Henry D.Isenberg 1998. 3 - STANDARDISATION DE L'ANTIBIOGRAMME A L'ECHELLE NATIONALE SELON LES RECOMMANDATIONS DE L'OMS 1999. 4 - L'ANTIBIOGRAMME P.Courvalin et col. 1985 5 - ROLE DU LABORATOIRE DANS L'ANTIBIOTHERAPIE. D. Christol, A.Bure 8005 A 10 9-1976. Retrouvez « Médecine du Maghreb » sur Internet WWW.santetropicale.com ainsi que Médecine d’Afrique Noire, Le Pharmacien d’Afrique et Odonto-Stomatologie Tropicale Médecine du Maghreb 2001 n°91