04/10/2011 | Arnauld Achard | Finances | Lu 818 fois | aucun commentaire
Les agences de notation sous la menace d'une
régulation
(par Arnauld Achard, Associé Fasken Martineau Paris) - Les agences de notation sont de
nouveau mises en cause à l’occasion de l’abaissement de la note italienne. Cette fois-ci, on
ne leur reproche plus de ne pas avoir traduit dans leur notation la dégradation de la
situation de certains acteurs mais plutôt de rendre un jugement davantage motivé par des
considérations politiques et médiatiques.
Alors, les agences de notation, omnipotentes et incompétentes ? Bonnet
d’âne et DDD (Défaillantes, Destructrices et Désuettes, selon la formule de
Marc Touati) ? Le juriste a mieux à faire que participer à ces combats
d’arrière garde en stigmatisant tel ou tel bouc émissaire idéal. Si l’on veut
bien admettre que la prudence est une vertu cardinale du juriste, Droit et
Finance doivent s’engager dans une sorte de mariage de raison, à travers
une juste régulation financière.
Celle-ci s’exprime d’abord par une intervention accrue de l’Autorité des
Marchés Financiers (AMF). La régulation, pour reprendre la définition de Marie-Anne Frison-Roche cherche à
assurer l’équilibre d’un marché qui le requiert mais ne peut l’assurer par ses propres forces. Alliage subtil de
pouvoirs divers (décisions individuelles, sanctions, règlement des différends mais aussi la soft law que
constituent par exemple les rapports annuels de l’AMF sur les agences de notation), elle n’exclut pas le recours
à la réglementation, comme en témoignent les règlements européens du 16 septembre 2009 et du 11 mai 2011.
Une seconde façon de réguler qui est parfois évoquée et qui rejoindrait la régulation classique de type
concurrentielle serait l’introduction de davantage de compétition dans l’industrie de la notation. Le régulateur ne
s’opposerait pas au développement des notations par la Banque Centrale Européenne ou de nouveaux entrants
éventuellement sur la base d’une structure publique/privée. Il s’interroge néanmoins sur la rupture d’égalité et de
légitimité qui pourrait résulter de ce nouvel environnement.
Le droit se conjugue aussi sur le mode judiciaire. Si la notation n’équivaut pas à une certification des comptes,
ces agences ne sauraient bénéficier d’une quelconque immunité juridique. La loi du 22 octobre 2010 de régulation
bancaire et financière prévoit l’engagement de leur responsabilité tant à l’égard de leurs clients que des tiers, des
conséquences dommageables des fautes et manquements qu’elles commettent dans la mise en œuvre de leurs
obligations. Malgré les difficultés prévisibles d’application de ce texte, on reconnait le principe classique et
maintes fois éprouvé de la responsabilité pour faute fondée sur les articles 1382 et 1383 du Code civil. L’enjeu se
situe toutefois au niveau européen avec l’exigence qui s’annonce croissante d’un certain degré d’uniformisation
des régimes spécifiques aux agences qui respecteraient en parallèle les régimes nationaux de responsabilité
civile de droit commun. Le défi consistera donc à calibrer la notion de faute (intentionnelle, de négligence ou
d’imprudence) en veillant à ce qu’elle ne s’identifie pas simplement à une notation « incorrecte ».
Enfin, l’avenir de l’activité des agences doit passer par l’adoption d’un statut de la profession, de méthodes et
autres standards déontologiques, comme cela existe dans le domaine comptable et financier. Aujourd’hui, plus