Consortium en foresterie Gaspésie – Les-Îles
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Portrait forestier historique de la Gaspésie
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renversés représentaient une perturbation importante du paysage forestier
préindustriel. Il s’agissait d’arbres déracinés par le vent (les chablis), mais aussi
d’arbres fragilisés et cassés à mi-hauteur à la suite d’une épidémie d’insectes,
d’une maladie ou à cause du poids excessif de la neige (les volis). Très peu
d’information relative aux épidémies d’insectes du 19e siècle en Gaspésie est
ressortie de l’analyse des documents historiques et il ne fut pas possible d’en
connaître l’importance pour cette époque. Par contre, plusieurs épidémies
d’insectes ont eu lieu durant la première moitié du 20e siècle. Deux épidémies
de la tordeuse des bourgeons de l’épinette, une épidémie de l’arpenteuse de
la pruche, une épidémie du diprion (mouche à scie) et une épidémie du den-
droctone ont provoqué de forts taux de mortalité chez le sapin baumier et les
épinettes. Le taux de mortalité des épinettes variait entre 50 et 80 % dépen-
damment des secteurs. Les causes d’un dépérissement du bouleau blanc et
du bouleau jaune dans les années 1940 n’ont quant à elles jamais été déter-
minées avec certitude. Au courant du 20e siècle, des maladies exotiques ont
atteint des essences comme le pin blanc (rouille vésiculeuse du pin) et l’orme
d’Amérique (maladie hollandaise de l’orme). Les perturbations naturelles ont
grandement modelé la composition, la structure et le fonctionnement des
écosystèmes forestiers de la Gaspésie.
COMPOSITION FORESTIÈRE
Pour la sapinière à bouleau jaune, 14 taxons ont été notés dans les docu-
ments historiques : le sapin baumier, les épinettes, le bouleau blanc, le bou-
leau jaune, le thuya occidental, les érables, les pins, le peuplier baumier, le
peuplier faux-tremble, le frêne noir, l’orme d’Amérique, le mélèze laricin, le
hêtre à grandes feuilles et le chêne rouge. Les observations provenant des
carnets d’arpentage montrent qu’au 19e siècle, le couvert forestier de la sa-
pinière à bouleau jaune avait une forte proportion de peuplements mélan-
gés. Pour les deux régions écologiques de la sapinière à bouleau jaune, le
sapin baumier et le bouleau blanc dominaient le paysage. Les peuplements
d’épinettes, de thuya occidental et de bouleau jaune (uniquement pour la
région Côte de la baie des Chaleurs) représentaient tous respectivement un
dixième des peuplements de la sapinière à bouleau jaune. Toutefois, lorsque
les épinettes étaient présentes dans le paysage, elles étaient le plus souvent
codominantes alors que si le thuya était présent, il dominait le peuplement dans la
moitié des cas. Il semble que les espèces thermophiles, telles que le bouleau jaune,
les érables, les pins, les ormes et les frênes, avaient une place non négligeable
dans le paysage. Sachant que les observations des arpenteurs au courant du 19e
siècle ont été faites à une époque où l’utilisation des ressources forestières était
déjà active, les résultats obtenus pour les essences les plus prisées par les colons
correspondent à des seuils minimaux. Les pins, l’épinette blanche, le thuya occi-
dental, le bouleau jaune, l’orme d’Amérique et le frêne noir étaient possiblement
plus abondants.
Pour la sapinière à bouleau blanc, neuf taxons ont été notés dans les documents
historiques : le sapin baumier, les épinettes, le bouleau blanc, le bouleau jaune,
le thuya occidental, les érables, les pins, le peuplier baumier et le peuplier faux-
tremble. D’après les carnets d’arpentage, la forêt préindustrielle du centre de la
Gaspésie (de 1919 à 1940) avait un couvert majoritairement résineux. Que ce
soit en termes d’abondance ou de distribution, le sapin baumier et les épinettes
étaient les taxons qui dominaient le paysage de la sapinière à bouleau blanc. Dans
la région du Massif gaspésien (5h), le sapin baumier aurait dominé un peuplement
sur deux et les épinettes un peuplement sur trois. Dans la région du Haut massif
gaspésien (5i), le sapin baumier aurait été encore plus prépondérant en formant
les trois quarts des peuplements tandis que moins d’un peuplement sur cinq était
une pessière. Le bouleau blanc était une espèce importante de ces forêts, mais il
s’agissait le plus souvent d’une espèce accompagnatrice. Les espèces thermophi-
les (le bouleau jaune, les érables et les pins), ainsi que le thuya occidental, ne se
rencontraient que très rarement et le plus souvent dans des secteurs limitrophes
de la sapinière à bouleau jaune. Toutefois, l’exploitation le long des grandes riviè-
res était relativement avancée et elle visait particulièrement les épinettes et les pins
de gros diamètres. Les résultats avancés dans le présent portrait correspondent
donc à des seuils minimums pour les essences prisées de l’époque.
STADES DE DÉVELOPPEMENT
D’après les notes des carnets d’arpentage du 19e (1836-1875) et du 20e siècle
(1919-1940), ainsi que des photos aériennes de Lesseps (1926-1927), les forêts
gaspésiennes préindustrielles étaient de 50 à plus de 80 % matures. Ces résultats